b) L'éducation à l'image
L'objectif est très simple :
apprendre qu'une image
n'est qu'une image
, mais il est incroyablement ambitieux. Notre culture est
fondée sur l'affirmation :
" Je ne crois que ce que je
vois. ",
et même, avec l'emprise de la télévision,
sur ce précepte ainsi transformé :
" Je ne crois que ce
que je vois ... à la télévision "
, tant il
apparaît qu'
" on se méfie de la réalité non
médiatisée
137(
*
)
"
.
Curieuse aliénation en effet, qui survient avec la maturité,
alors que
" les enfants, d'instinct, maintiennent une distinction
entre
le vrai et le faux que les esprits forts, eux, n'aperçoivent
plus
138(
*
)
"
et qui
appelle la médiation de l'écran pour croire en la
réalité des choses, alors que l'image devient de plus en plus
aisément transformable, manipulable à l'envi, et, par là
même, suspecte !
Le but d'une formation à l'image doit être double :
maîtriser l'image et apprendre à s'en distancier. Maîtriser
l'image, c'est comprendre qu'elle est toujours une mise en scène
guidée par une intention. Les exemples sont nombreux et connus (cadrage,
lumière...). Cette mise en scène est à la fois volontaire,
au moment de sa fabrication, et involontaire chez le spectateur dont la
perception est conditionnée par son passé, par son histoire
personnelle, et qui l'amène à sélectionner certaines
images plutôt que d'autres.
Apprendre à se distancier de l'image, c'est apprendre à ne pas y
voir plus que ce qu'elle est : une image et, de moins en moins sûrement,
une représentation du réel. Les techniques de traitement d'images
permettent, et permettront demain, mieux et plus vite qu'aujourd'hui, des
manipulations de toute sorte, mélanges, fusions, compositions,
créations. Le numérique permet, "de faire" l'image que l'on
souhaite voir.
L'enjeu est alors de parvenir à modifier ses réflexes : au
lieu de croire en ce qu'on voit, et de chercher ce qui est faux dans ce qu'on
regarde, il faudra désormais accepter la possibilité que ce que
l'on voit soit fiction et chercher ce qui est vrai dans ce que l'on
regarde
. Les professionnels de l'image ont fait cette "révolution"
mentale. Reste à élargir progressivement le cercle des
initiés.
La nécessité d'une formation aux images est aujourd'hui
défendue par des personnalités incontestées.
" Il
reste à l'homme de l'an 2000 à apprendre à se servir de
ses immenses pouvoirs. Cela implique un consensus des diffuseurs pour
l'autorégulation.
Mais les responsables politiques doivent être
conscients qu'il leur incombe aussi de favoriser un apprentissage du public,
adapté à la société virtuelle. Former le regard.
Enseigner à vivre dans le monde des images. C'est dès la
maternelle qu'il faudra apprendre à maîtriser les médias et
à différencier le réel des icônes
139(
*
)
. "