C. LES CONSÉQUENCES JURIDIQUES
Dans le domaine juridique, les réflexions sur
l'incidence de la technologie dans le traitement ou la diffusion de
l'information et, plus particulièrement des images, portent en
règle générale sur la propriété
intellectuelle. L'une des premières préoccupations des juristes
qui s'intéressent aux NTIC est de protéger les auteurs. Cette
attention se traduit sur le plan technique. Il est ainsi tout à fait
significatif que beaucoup de recherches techniques dans le domaine du
traitement des images, qu'il s'agisse de marquage, tatouage..., visent à
repérer, dans une image informatique, si des images
protégées ont été utilisées.
Cette approche est cependant très réductrice. Si la
propriété intellectuelle est bien au cœur du débat,
elle ne peut être l'axe exclusif de la réflexion autour de la
réalité virtuelle et des images de synthèse en
général. Trois thèmes doivent être
évoqués : le droit d'auteur et, d'une façon
générale, la propriété intellectuelle, la
responsabilité, le droit à l'image et le respect des personnes.
1. La propriété intellectuelle
a) Présentation des rapports entre droit et image
Une distinction est souvent opérée entre le
"
droit à l'image
", qui concerne le respect de l'image et de la
vie privée d'une personne, et le "
droit de l'image
", qui
renvoie
à la question des droits d'auteur et, d'une façon
générale, à la propriété intellectuelle.
Une œuvre est couverte par le droit de la propriété
intellectuelle, quelle que soit sa technique de fabrication, de
création, dès lors qu'elle est originale, qu'elle traduit la
conception de l'auteur et que ce dernier avait une idée suffisante du
résultat à atteindre. Ainsi, peu importe que l'auteur ait choisi
de se faire aider par un ordinateur pour créer l'œuvre et
d'automatiser une partie du processus.
" Le principe qui fait
(des images de synthèse)
des
œuvres susceptibles de protection, ne semble guère contestable.
Ordinateurs et programmes n'étant considérés que comme des
outils, l'intégration de ces derniers dans le champ d'application du
droit d'auteur fait de l'objet virtuel une œuvre créée
à partir d'une autre œuvre préexistante : le
logiciel "
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)
.
La difficulté née de la multiplicité des intervenants,
même si elle revêt aujourd'hui une grande acuité, n'est pas
nouvelle et a d'ailleurs été parfaitement abordée par le
droit à travers les notions d'"œuvre collective" et
d'"œuvre
de collaboration", qui permettent d'écarter la tâche fastidieuse
d'identification précise des auteurs. L'œuvre collective fait
intervenir plusieurs auteurs dans le même registre, la part de
création de chacun étant néanmoins facilement
individualisable (type dictionnaire, encyclopédie). L'œuvre de
collaboration s'applique surtout aux œuvres audiovisuelles dans
lesquelles les auteurs interviennent dans des registres différents
(texte, son, image...) et que la part de création de chacun est
indissociable de celle des autres. Cette notion paraît plus
adaptée à l'image de synthèse sans pour autant
correspondre exactement. Il y a, en vérité, un "double
mélange", la part du logiciel -qui est l'outil- et la part du
créateur -qui, à travers l'œuvre, exprime une intention et
une personnalité- ; mais aussi, souvent, la juxtaposition d'images
réelles, empruntées, et d'images de synthèse,
calculées et construites à partir de modèles.
" Tour à tour média et outil de création,
l'informatique fait finalement éclater les concepts classiques de la
propriété intellectuelle pour donner naissance et distribuer des
œuvres hybrides dont le statut juridique subit l'attraction
conjuguée de régimes distincts.
(...)
L'entrelacs de
programmes informatiques et d'images d'origine diverse que la
numérisation rend accessibles sur un même support, interdit
d'envisager ces œuvres nouvelles sous un éclairage
unique. "
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)
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