2. L'image de synthèse et les métiers du cinéma
a) Présentation
C'est assurément dans ce secteur que les
bouleversements sont les plus importants : mise en scène, production,
scénario, montage, son, photo et travail du comédien. Tous les
métiers du Septième Art sont susceptibles d'être atteints
par la vague numérique. Après une période d'observation au
cours de laquelle les techniciens de l'industrie cinématographique
éprouvèrent une certaine méfiance à l'égard
des techniques de l'image de synthèse, le monde de l'image de
synthèse se réclamant de sa spécificité, les deux
univers se sont rapprochés, les cloisonnements ont disparu, les
techniques et les métiers se sont adaptés. Les techniciens, les
comédiens, abordent désormais avec aisance cette nouvelle
façon de travailler
L'image de synthèse fait désormais partie du paysage audiovisuel
et est intégrée aux différentes étapes de la
réalisation cinématographique. Au stade de la conception, tout
d'abord, l'image de synthèse est un formidable moyen de contourner tous
les obstacles physiques, de s'affranchir de contraintes, de montrer
l'impossible. Tous ceux qui font des images n'ont pas attendu l'image de
synthèse pour faire rêver le spectateur, mais aujourd'hui, ce
qu'un auteur imagine, l'image de synthèse le réalise. Au stade de
la "fabrication" ensuite, l'image de synthèse change un certain nombre
de métiers : menuisiers, peintres, plâtriers et, d'une
façon générale, tous ceux chargés de
réaliser un décor, peuvent être remplacés par un
infographiste, seul devant son écran. Les décors changent, se
bâtissent sans ouvriers. Le stuc, le bois et le carton pâte ne sont
plus indispensables. Un logiciel de graphisme, de
mate painting
ou de
texturage peut tout aussi bien -et parfois mieux- faire l'affaire. Le
décor, ainsi réalisé, peut de surcroît être
indéfiniment conservé et indéfiniment modifié. Avec
le perfectionnement du graphisme et la diminution des coûts, il est
probable que la pratique des décors virtuels se développera.
Ces possibilités inquiètent les professionnels concernés
au point de les amener à se demander si le numérique ne risquait
pas de supprimer un certain nombre d'emplois d'intermittents du spectacle. Ces
craintes paraissent cependant excessives. Il y a bien une nouvelle technique de
création de décor qui fait appel à d'autres
compétences et d'autres métiers, et qui, probablement,
connaîtra un développement durable, mais cette évolution
n'a rien de comparable avec la véritable révolution technologique
qu'a connue l'imprimerie au moment du passage du plomb à la
photocomposition. Il y avait eu alors un basculement radical,
irréversible, ce qui n'est pas le cas actuellement. La percée du
numérique dans ces métiers, certes incontestable, et parfois
spectaculaire, reste marginale dans l'ensemble de la production audiovisuelle,
notamment T.V. Le numérique offre une technique complémentaire
aux créateurs de décors, mais ne se substitue pas aux
métiers antérieurs.
Une inquiétude identique, et pareillement infondée, a pu
naître chez les comédiens, inquiets de la "concurrence" des
acteurs virtuels.