Projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile
LEGRAND (Jean-François)
RAPPORT 424 (1999-2000) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES
Tableau comparatif au format Acrobat ( 6 Ko )Rapport au format Acrobat ( 54 Ko )
Table des matières
N°
424
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 21 juin 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN DEUXIÈME LECTURE, relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile,
Par M.
Jean-François LE GRAND,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Léon Fatous, Louis Moinard, Jean-Pierre Raffarin, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Jean-Louis Carrère, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Christian Demuynck, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Paul Natali, Jean Pépin, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Vial, Henri Weber.
Voir
les numéros :
Assemblée nationale (11
ème
législ.) :
Première lecture
:
2067
,
2159
et T.A.
467
Deuxième lecture :
2271
,
2391
et T.A.
521
Sénat
: Première lecture :
254, 264
et
T.A.
105
(1999-2000)
Deuxième lecture :
369
(1999-2000)
Transports. |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le projet de loi soumis en deuxième lecture à votre examen tend
à élargir le Conseil d'administration de la société
Air-France et à modifier les relations de cette société
avec l'Etat.
Ce texte comporte trois articles modifiant les dispositions du code de
l'aviation civile relatives à Air France, dont un seul, l'article 3,
reste en discussion.
Les deux premiers articles, adoptés dans les mêmes termes, par le
Sénat et l'Assemblée nationale, tendent à simplifier
certaines procédures entre l'Etat et l'entreprise.
Votre Commission avait estimé que ces dispositions -de portée
limitée- s'inscrivaient dans une logique d'ouverture du capital et
d'allégement de la tutelle de l'Etat qui conforte l'autonomie de gestion
d'Air France.
L'article 1
er
prévoit ainsi de supprimer:
- les dispositions de l'article L.341-1 du code de l'aviation civile
relatives aux conditions générale d'exploitation du transport
aérien par Air France ainsi qu'à l'allocation de subventions pour
les lignes exploitées en concurrence avec d'autres
sociétés françaises de transport aérien, dans la
mesure où celles-ci relèvent désormais de
règlements communautaires applicables à tous les transporteurs
aériens communautaires ;
- l'autorisation préalable des deux ministres de tutelle en
matière de prises de participations d'Air France dans des entreprises
présentant un caractère annexe par rapport à son
activité principale.
L'article 2 prévoit d'abroger les dispositions relatives à la
contrainte d'équilibre financier figurant à
l'article L.342-2, superfétatoire au regard de l'objet même
de l'entreprise. Il prévoit également de prendre en compte, parmi
les obligations devant faire l'objet de contrats préalables qui lui sont
imposées dans l'intérêt général, le cas
spécifique des obligations de service public définies par le
règlement communautaire du 23 juillet 1992 concernant l'accès des
transporteurs aux liaisons aériennes intracommunautaires.
L'article 3, qui reste en discussion, modifie, quant à lui, l'article
L.342-3 du même code. Il substitue aux dispositions offrant à la
compagnie la possibilité d'émettre des emprunts avec la garantie
de l'Etat, de nouvelles dispositions relatives à l'élargissement
du conseil d'administration de la société Air France. Le texte
proposé par cet article élargit le Conseil d'administration afin
de tenir compte de l'entrée de nouveaux actionnaires privés et du
renforcement de l'actionnariat des salariés.
En première lecture, Le Sénat avait adopté, à
cet article, deux amendements
tendant, d'une part, à porter de vingt
et un à vingt-trois le nombre d'administrateurs d'Air France et, d'autre
part, à préciser que la composition du conseil d'administration
doit respecter la répartition du capital.
L'objectif poursuivi par ces deux amendements, présentés par
M. Ladislas Poniatowski avec l'avis favorable de la Commission des
Affaires économiques, est d'assurer une représentation plus
équilibrée des investisseurs privés autres que les
salariés.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale n'a pas
souhaité retenir les apports du Sénat.
Le rapporteur de la
commission de la production et des échanges a notamment estimé
que l'augmentation du nombre d'administrateurs de 21 à 23 serait
préjudiciable à l'appréciation portée par la
communauté financière sur la compagnie et nuirait à
l'efficacité des travaux du conseil d'administration. L'Assemblée
Nationale a, en conséquence, rétabli le texte qu'elle avait
adopté en première lecture.
Votre commission n'a pas été convaincue par cette
argumentation
. Elle juge, comme il est indiqué dans l'examen des
articles, que le dispositif proposé par le Sénat permet une
participation de l'Etat, des salariés et des investisseurs privés
au sein du conseil d'administration d'Air France plus représentative de
leur engagement respectif dans le capital de cette compagnie.
Votre commission vous propose en conséquence de rétablir le
texte que la Sénat a adopté en première lecture.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 3
-
(article L.342-3 du code de l'aviation
civile)
-
Elargissement du Conseil d'administration de la
société Air France
•
Le projet de loi adopté par l'Assemblée Nationale en
première lecture
L'article 3 du projet de loi supprime les dispositions actuelles de
l'article L.342-3 du code de l'aviation civile et les remplace par de
nouvelles dispositions. Dans sa rédaction actuelle,
l'article L.342-3 dispose qu'en vue de financer ses immobilisations et
d'augmenter son fonds de roulement, la société Air France est
habilitée à émettre dans le public des emprunts qui
peuvent bénéficier de la garantie de l'Etat. Cette disposition
apparaît aujourd'hui clairement en contradiction avec les règles
européennes proscrivant les aides d'Etat, et notamment avec
l'article 92 du Traité instituant la Communauté
européenne. En outre, l'Etat n'a pas apporté sa garantie à
un emprunt émis par Air France depuis près de 25 ans. La
suppression de ces dispositions permet en conséquence une mise en
conformité du droit national avec le droit communautaire.
Le texte du projet de loi, adopté sans modification par
l'Assemblée nationale en première lecture, propose de remplacer
ces dispositions par des mesures précisant la composition du Conseil
d'administration d'Air France.
La rédaction initiale du projet de loi prévoit une
augmentation du nombre des membres du conseil d'administration, qui passe de 18
à 21.
L'augmentation du nombre d'administrateur est destinée, selon
l'exposé des motifs du projet de loi, à permettre
l'arrivée au sein du Conseil d'administration de représentants
d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés et d'accroître la
représentation des salariés actionnaires afin de tenir compte de
la nouvelle structure de son actionnariat résultant de l'ouverture du
capital d'Air France.
Alors que, début 1998, l'Etat détenait 94,5 % du capital
d'Air France, il en détient, au 1
er
janvier, 2000
environ 57 %, les salariés en possédant 11 % et les
autres investisseurs privés 32 %. Cette évolution imposait
donc une modification de l'équilibre du Conseil d'administration.
Outre l'augmentation du nombre d'administrateurs, le projet de loi tend
également à inscrire dans la loi les différentes
catégories d'administrateurs
auparavant prévues par
décret. Ainsi, le texte proposé prévoit :
" indépendamment des représentants de l'Etat, des
salariés, des salariés actionnaires ainsi que des actionnaires
autres que l'Etat et les salariés, le conseil peut comprendre des
personnalités choisies soit en raison de leur compétence
technique, scientifique ou économique, soit en raison de leur
connaissance du transport aérien "
.
Par rapport au droit en vigueur, cette rédaction introduit au sein du
conseil d'administration des représentants des actionnaires autres que
l'Etat et les salariés. La répartition des sièges entre
les différentes catégories d'administrateurs n'est cependant pas
précisée dans la rédaction proposée qui, de ce
fait, laisse au décret le soin de définir la composition exacte
du conseil d'administration.
COMPOSITION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE |
|
Composition actuelle |
Composition envisagée |
Cinq représentants de l'Etat
,
nommés par
décret, dont :
|
Six représentants de l'Etat
, nommés
par
décret, dont :
|
Six personnalités qualifiées , nommées par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile. |
Cinq personnalités qualifiées , nommées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé de l'économie ; |
|
Deux représentants d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés, nommés par l'assemblée générale ; |
Un représentant des salariés actionnaires ; |
Deux représentants des salariés actionnaires ; |
Six représentants des salariés
élus
dont
:
|
Six représentants des salariés
élus
dont
:
|
Le
Gouvernement a cependant tenu à préciser à votre
rapporteur ce que devrait être la structure du nouveau conseil
d'administration si le texte était adopté. Le tableau ci-avant
résume la composition du conseil d'administration envisagée.
Par rapport à la situation actuelle, la composition du conseil
d'administration ne serait modifiée qu'à la marge. Le texte
proposé par l'Assemblée nationale permet d'introduire deux
administrateurs représentant les investisseurs privés,
d'augmenter de 1 à 2 le nombre d'administrateurs représentant les
salariés actionnaires, ainsi que de 5 à 6 le nombre des
représentants de l'Etat. Il réduit, en revanche, de 6 à 5
le nombre des personnes qualifiées nommés par l'Etat.
L'Assemblée nationale avait adopté, en première
lecture, cet article sans modification.
•
La rédaction adoptée par le Sénat en
première lecture
Lors de la première lecture, le Sénat avait approuvé les
principales orientations de cette réforme du conseil d'administration
d'Air France. Il avait néanmoins adopté
deux amendements
tendant, d'une part, à porter de 21 à 23 le nombre
d'administrateurs d'Air France et, d'autre part, à préciser que
la composition du conseil d'administration doit respecter la répartition
du capital.
Ces deux amendements, présentés par M. Ladislas Poniatowski,
avaient reçu l'avis favorable de la Commission des Affaires
économiques. Leur objectif commun est d'assurer une
représentation plus équilibrée des investisseurs
privés autres que les salariés actionnaires.
Dans le projet de loi initial, les investisseurs privés, qui
détiennent plus de 30 % du capital, avaient, avec deux
administrateurs, moins de 10 % des sièges au Conseil
d'administration. Les amendements adoptés par le Sénat donnaient
la possibilité au Gouvernement de nommer un troisième
représentant des investisseurs privés
de sorte qu'ils
représentent plus de 14 % des administrateurs. Cette modification,
sans bouleverser la logique du projet de loi, permettait d'assurer aux petits
porteurs et aux investisseurs institutionnels une participation plus
représentative de leur engagement dans le capital d'Air France.
•
La position de l'Assemblée nationale en deuxième
lecture
L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur de la
commission de la production et des échanges, rétabli le texte
qu'elle avait adopté en première lecture.
Le rapporteur du texte a notamment jugé que "
les
sénateurs ont profondément modifié la philosophie de la
réforme du conseil d'administration d'Air France
", au motif
que le dispositif proposé "
créerait une exception
puisqu'un conseil d'administration de vingt et un membres se situe
déjà à la limite supérieure de la fourchette
habituelle du nombre d'administrateurs des grandes entreprises
françaises
".
L'augmentation du nombre d'administrateurs de 21 à 23 accroît,
en effet, l'effectif des administrateurs de deux personnes, soit plus de
9 % de l'effectif. On voit cependant mal comment cette modification serait
de nature à bouleverser l'esprit du projet de loi et le fonctionnement
du conseil d'administration.
•
La position de votre commission
Votre commission relève qu'un conseil d'administration de
23 membres est conforme au droit privé puisque la loi du
24 juillet 1966 sur les sociétés prévoit que les
conseils d'administration sont composés de 18 à
24 membres.
Elle estime, à la lecture des débats de
l'Assemblée nationale, que les arguments invoqués pour
rétablir le projet de loi dans son texte initial sont avant tout
inspirés par des préoccupations idéologiques.
Aussi vous propose t-elle de rétablir le texte que le Sénat avait
adopté en première lecture, qui prévoit un dispositif
assurant à l'Etat, aux salariés et aux investisseurs
privés une représentation équilibrée au sein du
conseil d'administration.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.