N°
340
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 mai 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN DEUXIÈME LECTURE, modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ,
Par M.
Jean-Paul HUGOT,
Sénateur.
TOME I
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Adrien Gouteyron,
président
; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Paul Hugot, Pierre
Laffitte, Ivan Renar,
vice-présidents
; Alain Dufaut, Ambroise
Dupont, André Maman, Mme Danièle
Pourtaud,
secrétaires
; MM. François
Abadie, Jean Arthuis, André Bohl, Louis de Broissia, Mme Claire-Lise
Campion, MM. Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Xavier Darcos,
Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt,
Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard
Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre
Jeambrun, Roger Karoutchi, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre,
Serge Lepeltier, Mme Hélène Luc, MM. Pierre
Martin
,
Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Daniel Percheron,
Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux,
Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre
Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
Première lecture :
1187
,
1541
,
1578
,
1586
et T.A.
325
.
Deuxième lecture :
2119
,
2238
et T.A.
473
.
Sénat
: Première lecture :
392
(1998-1999),
154
,
161
et T.A.
63
(1999-2000).
Deuxième lecture :
286
(1999-2000).
Audiovisuel et communication.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Lors de l'examen en seconde lecture par l'Assemblée nationale du projet
de loi modifiant la loi relative à la liberté de la
communication, Madame Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la
communication, a eu l'occasion de se référer à la sagesse
du Sénat
1(
*
)
.
Ouverture fugace et sans conséquence.
L'Assemblée nationale est en effet globalement revenue au texte qu'elle
avait adopté en première lecture, en gommant seulement
quelques-unes de ses aspérités et en oubliant quelques-unes de
ses curiosités.
Sur le numérique de terre, qui constitue l'apport majeur du Sénat
à un texte dont il n'est pas utile de rappeler la difficulté
d'être, l'Assemblée nationale a adopté en bloc les
propositions du Gouvernement sans soumettre leur pertinence à un
véritable examen.
Il n'est dès lors pas surprenant que le texte qui vous est
présenté en seconde lecture continue de répondre
très insuffisamment aux besoins actuels du secteur audiovisuel.
Le présent rapport retiendra à cet égard trois critiques
majeures :
- alors que, dans le contexte actuel, l'une des principales missions du service
public de l'audiovisuel est de favoriser la création de contenus
français en mobilisant des moyens nouveaux, le projet de loi borne la
capacité d'autofinancement des chaînes publiques et prépare
un développement dans le numérique de terre qui ponctionnera
à terme les ressources publiques dont elles disposent pour
améliorer leurs programmes ;
- alors que la communication audiovisuelle fonctionne définitivement en
milieu ouvert et concurrentiel, le projet de loi continue d'accumuler les
procédures administratives encadrant l'activité des
opérateurs privés nationaux ;
- alors que le numérique de terre doit donner un nouveau souffle
à la communication audiovisuelle, le projet de loi met en place un
régime d'attribution de la ressource de diffusion qui dont sortira un
paysage audiovisuel plus éclaté que divers, plus brouillon que
dynamique, voué aux limbes de l'interventionnisme administratif et aux
incertitudes de l'innovation mal engagée.
I. LE PROJET DE LOI, LE SECTEUR PUBLIC ET LA PRODUCTION FRANÇAISE
L'Assemblée nationale n'a rien retenu des efforts du
Sénat pour introduire dans le fonctionnement de l'audiovisuel public, et
spécialement du groupe France Télévision
opportunément mis en place par le projet de loi, le surcroît de
cohérence et de responsabilité nécessaires à son
insertion dans la communication audiovisuelle de demain. Ont été
repoussées en particulier les propositions relatives à la
définition des missions et au mode de nomination et de révocation
des responsables, dont l'examen des articles démontrera ci-dessous une
nouvelle fois la nécessité.
Au delà de ces aspects juridiques maintes fois évoqués par
votre commission, il convient de s'inquiéter de l'absence de
réponse satisfaisante, dans le projet de loi et dans les propos qui
accompagnent son élaboration, à la question cruciale du
rôle du service public à l'égard de la production
française.
La production française se trouve dans une situation de pénurie
financière qui explique largement son faible dynamisme par rapport aux
industries concurrentes : 600 heures ont été produites en
1999, soit 21 % de moins qu'en 1998, contre 2 000 heures en Allemagne
et 1 300 heures au Royaume-Uni.
Avec un budget de 18 milliards de francs contre 25 milliards au Royaume-Uni et
40 milliards en Allemagne, l'audiovisuel public ne peut guère contribuer
à redresser la barre.
Le gouvernement se flatte à bon droit d'avoir augmenté de
11,7 % les ressources publiques affectées à l'audiovisuel
public en 2000, ce qui représente une progression de 1,3 milliard
de francs pour France 2 et France 3.
Mais la progression nette n'est que de 0,7 milliard après prise en
compte de la réduction mécanique des recettes publicitaires au
cours de cet exercice, et le report massif vers les chaînes
privées des budgets publicitaires écartés des
écrans publics accentue l'inégalité des moyens du secteur
public et du secteur privé.
Toutefois, la compensation intégrale des exonérations de
redevance, prévue par le projet de loi, devrait apporter au secteur
public un supplément de 1,6 milliard de crédits
budgétaires en 2001, ce qui portera les crédits
budgétaires du secteur public à 2,5 milliards de francs.
Après déduction de 1,2 milliard de francs correspondant au
manque à gagner en ressources publicitaires, les chaînes publiques
ne conserveront cependant que 600 millions francs à 1 milliard de
francs pour financer à la fois leur contribution au développement
de la production audiovisuelle et leur investissement dans le numérique
de terre.
La ministre de la culture a certes reconnu lors de la seconde lecture du projet
de loi à l'Assemblée nationale qu'une montée en charge des
besoins liés au numérique était prévisible pour
2002 et devrait être prise en compte dès la loi de finances pour
2001. Elle a aussi annoncé l'attribution
, " le moment
venu "
, d'une
" dotation significative dont le montant
dépendra des projets finalement retenus "
, pour
" permettre le démarrage du groupe dans les meilleures
conditions, son développement en numérique et un investissement
complémentaire dans les programmes "
. Madame Catherine Tasca a
confirmé ces orientations devant votre commission, et cité le
chiffre d'un milliard de francs.
Mais ces annonces optimistes sont à relativiser eu égard à
quelques tendances lourdes : les perspectives d'augmentation du rendement
de la redevance sont faibles à législation constante,
l'augmentation de ses taux n'est évoquée par personne et son
assiette est fragilisée par l'évolution technologique ; la
diminution législative de la durée des écrans
publicitaires risque d'avoir un effet cumulatif défavorable aux
performances déjà faibles des chaînes publiques sur le
marché publicitaire ; au delà de 2001, le gouvernement
pourrait éprouver quelques difficultés à porter les
crédits budgétaires de l'audiovisuel public au delà des
remboursements d'exonérations évalués à 2,5
milliards de francs. Dans ces conditions, et quand bien même une dotation
en capital permettrait de lancer de nouvelles chaînes, il est
vraisemblable que l'investissement du secteur public dans le numérique
ne pourra être financé sur la durée que par ponction sur
les recettes de redevance destinées initialement à
l'amélioration des programmes de France 2 et de France 3.
Il faut dès lors constater qu'aucune vraie réponse n'est
apportée à la question du rôle spécifique de la
télévision publique en faveur de la production française,
alors que s'accentue l'avantage financier dont disposent les chaînes
privées et que la discussion du projet de loi consacre beaucoup de temps
au jeu de mécano un peu stérile qui voit la Sept-ARTE entrer dans
la holding puis en sortir, RFO renvoyée à la convention
après avoir frôlé l'adhésion, des filiales
numériques apparaître en seconde lecture dans le paysage
audiovisuel public avant peut-être d'en disparaître.
II. LE PROJET DE LOI ET LA RÉGLEMENTATION DES DIFFUSEURS
En
dépit de quelques améliorations adoptées par le
Sénat et acceptées par l'Assemblée nationale en seconde
lecture, le projet de loi continue de soumettre globalement les
opérateurs privés à un système renforcé de
contrôle administratif qui exprime à leur égard, de
façon très injuste et inopportune, une profonde méfiance
du législateur, qui bridera sensiblement leur dynamisme, qui accentuera
les distorsions de concurrence dont le câble souffre par rapport au
satellite.
A titre d'exemple :
- le projet de loi sacrifie à l'opportunité purement politique de
manifester la méfiance des membres de la majorité gouvernementale
à l'égard des opérateurs des télévisions
nationales privées. Les projets maximalistes de naguère ont
été abandonnés au profit d'une obligation d'informer le
CSA des opérations commerciales des actionnaires des chaînes
privées, quand ces opérations consistent en des candidatures
à des marchés publics ou à des délégations
de service public. Cette mesure, qui explicite un pouvoir d'informateur que le
CSA possédait déjà, aura pour effet essentiel de noyer le
régulateur sous une documentation qu'il aura quelque peine à
exploiter ;
- le projet de loi a imposé aux câblo-opérateurs un
contrôle étroit du CSA sur la composition de leur offre au
prétexte d'un monopole de la distribution filaire des images
animées qui n'a plus de portée économique, mais qui
interdit en revanche aux câblo-opérateurs d'envisager, comme leurs
concurrents du satellite, la délocalisation.
Il est vrai qu'en contrepartie, la procédure de modification des offres
avait été allégée, l'accord préalable des
collectivités locales n'étant plus exigé ;
- la procédure du renouvellement automatique des autorisations des
chaînes hertziennes a été modifiée afin de rendre
son déroulement aléatoire, ce qui ne pourra que fragiliser les
intéressés.
III. LE PROJET DE LOI ET LE NUMÉRIQUE DE TERRE
Le régime juridique du numérique de terre mis en place par le Sénat en première lecture a été entièrement refondu par l'Assemblée nationale sur la proposition du Gouvernement. L'Assemblée nationale a ainsi substitué au système d'attribution de la ressource de diffusion multiplexe par multiplexe un système d'autorisation service par service dont la portée doit être appréciée au regard du contexte économique et juridique global du lancement du numérique de terre.
1. Un intérêt public clairement identifié, de graves incertitudes
Le
développement de la télévision numérique de terre
devrait permettre :
- d'ouvrir un nouvel espace de développement à l'audiovisuel
public. Confronté à la perspective d'un tassement progressif de
son audience globale au fur et à mesure du développement des
services thématiques diffusés sur les divers supports
numériques, le secteur public court le risque d'une perte
d'efficacité dans l'exercice de sa mission généraliste. Si
par ailleurs la participation de France Télévision à TPS
lui a permis d'acquérir une expérience des métiers de la
communication numérique, cette expérience ne saurait à
elle seule apparaître comme un véritable axe de
développement pour le secteur public ;
- d'utiliser plus efficacement la ressource rare que constituent les
fréquences hertziennes terrestres, en rendant à terme disponible
pour d'autres usages une partie au moins des fréquences
mobilisées actuellement pour la diffusion analogique ;
- d'offrir au public non désireux de s'équiper pour la
réception des services du satellite ou ne disposant pas du câble,
ainsi qu'au public qui restera à l'écart de l'internet rapide, un
grand choix de programmes et de services innovants sur son support
habituel ;
- d'offrir de nouvelles marges de développement à l'industrie de
l'électronique grand public, qui fournira aux ménages les
équipements de réception numériques nécessaires
pour recevoir l'offre nouvelle ;
- de favoriser le développement de la communication locale et de
proximité ;
- de permettre aux opérateurs d'accroître à terme,
grâce à la réduction de leurs coûts de diffusion,
leur rentabilité et par suite leur capacité investissement dans
les programmes;
- de retarder les conséquences sur le dispositif français d'aide
à l'industrie des programmes des progrès de la diffusion par
satellite et de la mondialisation, en maintenant l'audience d'un mode de
diffusion essentiellement national.
La réalisation de ces objectifs ambitieux se heurte à de
sérieuses incertitudes.
Incertitude, tout d'abord, sur les coûts et les perspectives
financières de la diffusion numérique de terre. Aucune
étude économique n'a encore été
réalisée par le Gouvernement afin de dissiper le brouillard qui
entoure quelques questions majeures :
- sur quelle évolution du marché publicitaire et sur quelle
répartition de la recette entre les supports anciens et nouveaux est-il
possible de tabler ;
- quelles perspectives les recettes d'abonnement présentent-elle ;
- à quel montant estimer le coût de diffusion sur un canal
numérique ;
- à quel montant estimer le coût global des droits qui devront
être acquis pour disposer de nouveaux programmes et diffuser en
numérique les programmes disponibles ;
- à quel rythme et dans quelles conditions économiques se fera le
renouvellement du parc de téléviseurs et l'équipement des
ménages en décodeurs.
Incertitude, aussi, sur la place disponible pour le numérique de terre
entre le câble, qui progresse lentement et auquel le marché des
télécommunications et celui de l'internet ouvrent de nouvelles
perspectives ; le satellite, qui a conquis en quelques années plus
de 2,5 millions d'abonnés ; l'internet rapide, qui offrira
bientôt au public un nouveau mode d'accès aux programmes de
télévision.
2. Les conditions du succès
Face
à ces incertitudes, la réussite du lancement du numérique
de terre se présente comme un pari industriel dont la réussite
est assujettie à deux conditions essentielles.
Il convient d'une part de favoriser l'élaboration d'une offre de
services attractive et financièrement équilibrée, il
convient d'autre part de favoriser l'équipement rapide du public en
terminaux numériques.
La mise en place d'un régime juridique facilitant la réalisation
de ces conditions est la première responsabilité de l'Etat
à l'égard du numérique de terre. Faute d'un régime
adapté à la réalité économique, le
marché émergera de façon trop aléatoire pour
permettre à ce support de trouver sa place entre le câble, le
satellite et l'internet rapide, et de façon trop lente pour permettre
aux opérateurs de trouver dans des délais raisonnables un retour
sur l'investissement consenti. La migration de l'analogique vers le
numérique, qui constitue l'ultime raison d'être du
numérique de terre, sera alors compromise. L'échec se profilera.
L'Etat sera invité à en prévenir la perspective ou
à en atténuer les conséquences, en prenant en charge
certains coûts d'une opération qu'il aura mal engagée, on
pense au financement des infrastructures de diffusion ou au coût du
renouvellement des équipements de réception du public. Le
processus pervers de l'économie structurellement déficitaire et
nécessairement subventionnée sera alors lancé.
Le numérique de terre ne prendra donc très vraisemblablement
forme et consistance que dans la mesure où les opérateurs
privés les plus aptes à relever le pari industriel choisiront de
s'y impliquer.
Comment assurer cette implication ? L'acteur clé du succès,
l'opérateur capable à la fois de réunir une offre
économiquement cohérente et d'encourager le public à
s'équiper en décodeurs ou en récepteurs numériques
ne peut être que l'ensemblier responsable de la constitution du
multiplexe, de sa gestion, de sa distribution et de sa commercialisation. Ce
rôle est crucial dans la mesure où, pour des raisons techniques
qu'il est facile de comprendre en se référant à
l'expérience des bouquets satellitaires, le multiplexe apparaît
comme l'unité efficace de gestion de l'offre en diffusion
numérique hertzienne de terre. C'est dans le cadre du multiplexe que
devra être assurée par un dosage délicat de services
généralistes et de services thématiques, de services de
télévision et de services connexes, de services gratuits et de
services payants, la constitution d'une offre économiquement viable. La
réussite du basculement de l'analogique vers le numérique
dépendra de l'efficacité de ces dosages à l'égard
desquels l'Etat ne peut exercer qu'une responsabilité d'encadrement,
c'est à dire énoncer des principes, organiser la garantie de leur
respect, identifier les conditions globales de l'émergence d'une
économie viable et s'en remettre aux opérateurs privées
pour l'organisation concrète de l'offre, sauf à se poser en
maître d'oeuvre, architecte et décorateur du paysage
numérique de terre dans le cadre d'une logique d'administration
économique qui ne correspond pas aux exigences de l'économie
moderne.
Les opérateurs qui disposent de l'expérience et des ressources
nécessaires pour exercer utilement la fonction d'ensemblier ne sont pas
nombreux. Seuls les groupes qui pilotent les chaînes hertziennes
traditionnelles sont vraisemblablement en mesure de la prendre en charge avec
de véritables chances de succès. Encore faut-il qu'ils le
désirent, que le régime juridique défini par l'Etat non
seulement le leur permette, mais les y incite.
Le choix du mode d'attribution de la ressource de diffusion sera
déterminant à cet égard.
3. La crainte de l'échec
Bien
loin des considérations qui précèdent, le système
d'attribution d'autorisations service par service élaboré par le
Gouvernement conduit à la mise en place d'une économie
administrée par le CSA, véritable ordonnateur - mais pas
comptable - de l'offre numérique.
Ce système fera nécessairement émerger à l'occasion
des appels à candidatures une offre éclatée qu'il
appartiendra au CSA d'organiser de son propre chef, en s'inspirant
éventuellement des souhaits exprimés par les éditeurs,
afin de composer fréquence par fréquence des multiplexe
supposés cohérents, attractifs et susceptibles de provoquer
à terme la constitution d'une économie viable de la diffusion
hertzienne numérique de terre.
En d'autres termes, le dispositif adopté par l'Assemblée
nationale confie au CSA et à lui seul le rôle d'ensemblier global
de la diffusion numérique de terre, rôle crucial, on l'a dit, pour
le lancement de ce marché comme il a été
déterminant pour la réussite de la diffusion satellitaire
(l'absence d'ensemblier a été en revanche largement responsable
des pannes de l'économie du câble).
Sans entrer dans la description détaillée du mécanisme mis
en place par le projet de loi - cette description figure ci-dessous dans
l'examen des articles du projet de loi - il convient de noter quelques-unes de
ses implications :
- le distributeur de multiplexe, ensemblier naturel, et véritable garant
du lancement du numérique de terre, est réduit à un
rôle second ;
- une priorité est accordée aux chaînes gratuites alors que
rien n'indique que le marché publicitaire pourra financer la
création de plusieurs dizaines de chaînes nouvelles, nationales ou
locales, et en dépit de l'essor que la constitution d'une offre payante
significative donnerait à l'équipement des ménages en
moyens de réception numériques (la présence d'une offre
payante inciterait les distributeurs de multiplexe à subventionner
largement l'équipement des ménages, comme ce fut le cas pour
assurer le succès d'abord du Minitel puis du satellite) ;
- l'attribution pour 10 ans des autorisations service par service va sans
délai figer le paysage numérique de terre alors d'une part que
l'adaptabilité de l'offre est essentielle à son caractère
attractif, alors d'autre part que l'évolution technologique va modifier
en permanence les conditions d'une gestion optimale de la ressource disponible
sur chaque fréquence, incitant à adapter de façon continue
la composition optimale de l'offre de chaque multiplexe.
Le système retenu par le Sénat mise en revanche sur l'implication
des diffuseurs traditionnels dans la réussite du numérique de
terre, la diversité et l'ouverture du futur paysage numérique
étant assurées par des règles imposant la présence
de services indépendants dans chaque multiplexe.
C'est ainsi que le Sénat :
- a prévu l'allocation de la ressource de diffusion multiplexe par
multiplexe en fonction de critères faisant intervenir la
viabilité économique, le pluralisme et la diversité de
l'offre de services, la promotion de la communication locale de
proximité, les engagements pris en ce qui concerne les modalités
de commercialisation des terminaux numériques ;
- a reconnu au distributeur-ensemblier la responsabilité de fixer la
répartition de son offre entre services payants et services
gratuits ;
- a prévu l'octroi aux opérateurs hertziens existants d'une
priorité pour l'attribution des multiplexe ;
- a exigé la présence dans chaque multiplexe d'un quota de
services indépendants du distributeur afin de permettre l'arrivée
de nouveaux entrants dans la diffusion hertzienne de terre.
- a fixé un système anti-concentration.
C'est ce système que votre commission propose au Sénat de
réintroduire dans le projet de loi avec quelques modifications de
détail destinées à accentuer son efficacité.