Rapport sur la proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane
LAGAUCHE (Serge)
RAPPORT 169 (1999-2000) - commission des affaires culturelles
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Table des matières
-
INTRODUCTION
- I. LA NÉCESSITÉ DE REMÉDIER AUX LACUNES DU DISPOSITIF DE PROTECTION DU PATRIMOINE NATIONAL
- II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
- EXAMEN EN COMMISSION
- TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION
N°
169
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 janvier 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur la proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane,
Par M.
Serge LAGAUCHE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel Charzat, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir le
numéro :
Sénat
:
444
(1998-1999).
Patrimoine. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le 28 fructidor an II de la République, l'abbé Grégoire
proclamait devant la Convention dans son rapport resté
célèbre " sur les destructions opérées par le
vandalisme et sur les moyens de les réprimer " qu'"
une
horde de brigands ont émigré ; mais les arts
n'émigrent pas. Comme nous, les arts sont enfants de la
liberté ; comme nous, ils ont une patrie, et nous transmettrons ce
double héritage à la prospérité
".
Ce discours a largement contribué à la prise de conscience qui a
inspiré la législation protégeant le patrimoine national
ébauchée dès le milieu du XIXe siècle sous
l'impulsion de Mérimée, qui a d'abord concerné les
immeubles pour s'appliquer ensuite également aux biens mobiliers, et
plus tardivement aux objets en mains privées.
En effet, ce n'est que devant la menace représentée par les
ventes massives d'oeuvres d'art à des acheteurs étrangers
après la première guerre mondiale que la loi du 31
décembre 1921 a ouvert la possibilité de classer comme monuments
historiques des biens mobiliers appartenant à des personnes
privées, mesure qui a notamment pour effet d'interdire leur exportation.
Ce dispositif a été complété par la loi du 23 juin
1941 qui a instauré un contrôle de l'exportation des
" objets présentant un intérêt national d'histoire
ou d'art "
et a attribué à l'Etat le droit de retenir au
prix déclaré par l'exportateur les objets proposés
à l'exportation.
Ces dispositions sont aujourd'hui peu ou prou caduques, ce qui prive l'Etat des
instruments nécessaires pour assurer le maintien du patrimoine mobilier
sur le territoire national.
Le classement d'un objet mobilier sans le consentement de son
propriétaire apparaît désormais, comme une solution
extrêmement coûteuse pour les finances publiques et donc dans les
faits impraticable, compte tenu de l'évolution de la jurisprudence
judiciaire relative à l'indemnisation qui doit être en
contrepartie versée au propriétaire du bien. En outre, la loi du
31 décembre 1992
1(
*
)
a
considérablement assoupli le mécanisme de contrôle des
exportations de biens culturels en abrogeant la loi de 1941 et en lui
substituant un dispositif très libéral qui ne permet guère
à l'Etat que de retarder la sortie des oeuvres majeures de notre
patrimoine sauf à les acquérir. Or cette dernière solution
présente également des limites dans la mesure où
même s'il dispose des fonds nécessaires, l'Etat se trouve,
notamment faute d'une procédure permettant d'évaluer l'oeuvre,
à la merci du refus du propriétaire de se dessaisir du
trésor national qu'il détient.
En comblant cette lacune, la proposition de loi soumise à votre
commission permet de remédier partiellement aux inconvénients de
la loi de 1992. En effet, s'inspirant des mécanismes en vigueur en
Grande-Bretagne, elle détermine les modalités selon lesquelles
l'Etat peut se porter acquéreur d'une oeuvre à laquelle a
été refusé le certificat et prévoit les
conséquences du refus du propriétaire de se dessaisir de son bien.
S'il n'est pas de nature à résoudre les difficultés
résultant, d'une part, de l'évolution de la jurisprudence
judiciaire concernant les conséquences financières du classement
et, d'autre part, du caractère limité des ressources dont dispose
le ministère de la culture pour financer ses acquisitions, ce dispositif
améliore incontestablement l'efficacité de la loi de 1992 en
permettant de régler les conflits pouvant survenir entre l'Etat et les
propriétaires sans pour autant porter atteinte au libre fonctionnement
du marché de l'art.
Force est de constater que ces conflits alimentés par les
réticences des collectionneurs privés face à une
administration encore trop souvent perçue comme jalouse de ses
prérogatives et d'une avidité hors de proportion avec les
richesses des collections nationales sont encore trop fréquents. A cet
égard, comme le fait apparaître une étude attentive de
l'exemple britannique, la préservation du patrimoine national aurait
tout à gagner d'une amélioration des relations entre les
collectionneurs et les responsables des collections publiques. Pour cette
raison, votre commission a souhaité compléter le texte qui lui
était soumis afin d'assurer un meilleur respect des droits des
propriétaires au cours de la procédure d'acquisition mais aussi
d'accroître la transparence de la procédure de délivrance
des certificats de libre circulation et d'en simplifier le
déroulement.
I. LA NÉCESSITÉ DE REMÉDIER AUX LACUNES DU DISPOSITIF DE PROTECTION DU PATRIMOINE NATIONAL
A. LES LIMITES DE LA LOI DU 31 DÉCEMBRE 1992
1. Les règles de contrôle des exportations d'oeuvres d'art posées par la loi du 31 décembre 1992
La loi
n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis
à certaines restrictions de circulation et à la
complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et
de douane a tiré les conséquences de la constitution d'un
marché unique européen sur le dispositif de contrôle des
exportations d'oeuvres d'art prévu par la loi du 23 juin 1941.
Ce dispositif reposait, en effet, sur un contrôle systématique des
exportations d'oeuvres d'art que la suppression des frontières
intérieures privait pour une grande partie de son efficacité. On
rappellera que la loi de 1941 prévoyait :
- l'octroi d'une autorisation pour toute exportation d'objets présentant
un intérêt national d'histoire ou d'art ;
- et le droit pour l'Etat de retenir, c'est-à-dire d'acheter, au prix
fixé par l'exportateur les objets proposés à l'exportation.
Cependant, il convient de souligner que,
si la création du
marché unique imposait d'adapter la loi de 1941, elle n'a pas remis pour
autant en cause la possibilité dont disposent les Etats membres de poser
des limites au principe de libre circulation des biens culturels
. Cette
compétence résulte de l'article 30 du traité
2(
*
)
instituant la communauté européenne qui,
par dérogation à ses articles 28 et 29, reconnaît aux Etats
le droit
" d'interdire ou de restreindre
l'importation,
l'exportation ou le transit pour des raisons (...) de protection des
trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou
archéologique ".
Les Etats membres peuvent donc mettre en oeuvre des législations
protectrices du patrimoine national reposant sur des restrictions aux
exportations d'oeuvres d'art sous réserve que ces restrictions ne
constituent pas "
un moyen de discrimination arbitraire, ni une
restriction déguisée dans le commerce entre les
Etats-membres
" selon les termes du deuxième alinéa de
l'article 30.
Dans le souci d'assurer un contrôle minimal et uniforme des biens
culturels aux frontières extérieures de la communauté, a
été toutefois mis en place un dispositif communautaire comprenant
deux volets :
- le règlement n° 3911/92 du Conseil du 9 décembre 1992
concernant l'exportation de biens culturels qui instaure un contrôle aux
frontières extérieures de la communauté fondé sur
la délivrance d'une licence d'exportation qui peut être
refusée lorsque le bien est couvert par une législation
protégeant des trésors nationaux ayant une valeur artistique,
historique ou archéologique ;
- la directive n° 937 du Conseil du 15 mars 1993 qui tend à
faciliter le retour des biens culturels sur le territoire d'un Etat membre dont
ils sont sortis illicitement.
Ces textes ne constituent en aucun cas une harmonisation des dispositifs de
protection du patrimoine qui aurait conduit à un transfert de
compétences des Etats membres vers la Communauté, que n'imposait
pas la mise en place du marché unique et qu'au demeurant ne souhaitaient
pas les Etats européens.
Cependant, le titre II de la loi du 31 décembre 1992, dont votre
rapporteur vous rappellera l'économie générale, s'inspire
largement des dispositions du règlement communautaire du 9
décembre 1992 tant dans le choix de la procédure que dans son
champ d'application.
L'exportation d'un bien culturel est subordonnée à l'obtention
d'un certificat attestant que le bien ne présente pas un
intérêt suffisant pour justifier sa conservation sur le territoire
national et qu'il peut dès lors circuler librement à
l'intérieur de la communauté ou être exporté
à destination d'un pays tiers. Cette procédure ne s'applique
qu'aux biens qui entrent dans l'une des catégories définies, par
référence à des seuils d'ancienneté ou de valeur,
par le décret n° 93-124 du 29 janvier 1993 relatif aux biens
culturels soumis à certaines restrictions de circulation,
catégories reprises du règlement communautaire.
Le certificat ne peut être refusé qu'aux trésors nationaux,
notion qui, outre les biens appartenant aux collections publiques et les biens
classés, recouvre les biens présentant "
un
intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de
l'histoire, de l'art ou de l'archéologie
" (article 4 de la loi
de 1992). Pour ces derniers, en cas de refus de certificat, aucune nouvelle
demande ne doit être adressée à l'administration pendant un
délai de trois ans, au terme duquel le certificat ne peut alors
être à nouveau refusé sauf si le bien a été
classé, mesure dont l'effet est l'interdiction d'exporter.
La logique de la loi adoptée en 1992 conduisait à ce qu'en cas de
refus du certificat, l'administration dans le délai de trois ans tire
les conséquences de l'interdiction d'exportation, en entamant une
procédure de classement s'il s'agissait d'un bien mobilier ou
d'archives, en le revendiquant s'il s'agissait d'un bien culturel maritime ou
d'un objet découvert à l'occasion de fouilles
archéologiques, ou encore en l'achetant pour le faire entrer dans les
collections publiques.
2. Un dispositif imparfait
Ce
dispositif de protection du patrimoine national d'inspiration très
libérale dans la mesure où l'octroi du certificat est la
règle et le refus, l'exception, s'est révélé dans
les faits peu efficace.
Dans l'esprit du législateur de 1992, le classement dont un des effets
est d'interdire l'exportation devait permettre d'assurer le maintien sur le
territoire national des éléments majeurs du patrimoine national
qui se seraient vus refuser le certificat. Or, l'évolution de la
jurisprudence judiciaire, en tirant les conséquences des dispositions de
la loi de 1913, a conduit à neutraliser cette alternative.
L'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques
prévoit que dans le cas où le classement d'un objet mobilier est
effectué sans le consentement du propriétaire il peut
" donner lieu au paiement d'une indemnité représentative
du préjudice résultant (pour ce dernier) de l'application de la
servitude de classement d'office ".
S'appuyant sur cette disposition, la Cour de cassation dans un arrêt du
20 février 1996
3(
*
)
a rejeté le
pourvoi de l'administration contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du
6 juillet 1994 condamnant l'Etat à verser à M. Jacques
Walter, ancien propriétaire d'un tableau de Van Gogh,
Jardin à
Auvers
, une indemnité de 145 millions de francs
représentative de l'interdiction définitive d'exportation
résultant du classement. On rappellera que la Cour d'appel avait
évalué le préjudice en comparant le prix de vente du
tableau en France avec ceux constatés pour des oeuvres comparables
vendues à l'époque du classement sur le marché
international de l'art.
Si l'on peut remettre en cause l'appréciation portée par les
juges sur l'étendue du préjudice et son évaluation, le
fondement de l'indemnité apparaît incontestable. Un revirement de
jurisprudence est donc improbable, seule une plus grande prudence dans
l'évaluation du préjudice pouvant être à bon droit
attendue. Une modification de la loi de 1913 dans le sens de la suppression du
droit à indemnisation ne semble guère envisageable compte tenu de
l'interprétation dégagée par la décision
n° 85-198 DC du 13 décembre 1985 du Conseil constitutionnel du
principe d'égalité devant les charges publiques.
Le classement comporte donc désormais pour l'Etat un risque financier
substantiel dans la mesure où il peut être condamné
à verser des indemnités d'un montant très
élevé sans pour autant acquérir le bien. Cette
procédure est en pratique écartée en tant qu'instrument de
la politique de protection du patrimoine national : depuis l'arrêt
de la Cour de cassation de 1996, seul un tableau de James Tissot,
le cercle
de la rue royale
, a été classé à la suite d'un
refus de certificat.
Dorénavant, l'Etat ne dispose donc plus guère pour retenir une
oeuvre sur le territoire national, que du refus de certificat, solution par
nature provisoire, ou de l'acquisition, pour laquelle il ne
bénéficie que de moyens budgétaires limités et qui
exige par ailleurs qu'il parvienne à convaincre les propriétaires
de céder leur bien, ce qui, faute de la menace du classement,
s'avère souvent difficile. C'est à cette lacune de la loi de 1992
que la proposition de loi remédie.
B. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES
La proposition de loi qui nous est soumise vise à faciliter l'acquisition par l'Etat des oeuvres auxquelles a été refusé le certificat mais également à limiter les incertitudes que fait peser sur les propriétaires le dispositif de contrôle des exportations.
1. Faciliter l'acquisition par l'Etat de trésors nationaux
La loi de 1992 ne permet pas à l'Etat de surmonter l'obstacle que représente le refus du propriétaire de se dessaisir de son bien. Le classement étant devenu trop onéreux, l'Etat, dans cette hypothèse, est contraint à l'échéance des trois ans de délivrer le certificat. En effet, la loi de 1992, à la différence de la loi douanière de 1941, n'organise pas l'achat de l'oeuvre par l'Etat à une valeur déterminée.
a) Une procédure d'acquisition ...
Le
dispositif prévu par l'article premier de la proposition de loi repose
sur une procédure d'expertise qui permet, en l'absence d'accord amiable
entre l'Etat et le propriétaire, de fixer un prix aussi proche que
possible de celui du marché international, qui ne puisse donc être
contesté par le propriétaire du bien et auquel l'Etat pourra se
porter acquéreur.
La détermination de la valeur du bien est confiée à deux
experts désignés respectivement par l'Etat et le
propriétaire de l'oeuvre. En cas de désaccord, la valeur de
l'oeuvre est déterminée par un tiers expert désigné
conjointement par l'Etat et le propriétaire. On relèvera que le
propriétaire - ou l'Etat - ne peut s'opposer à la
procédure d'expertise dans la mesure où, en cas de carence, c'est
l'autorité judiciaire qui procède à la désignation
des experts.
Une fois la valeur du bien déterminée, l'Etat peut, soit renoncer
à acquérir le bien, soit se porter acquéreur au prix
fixé par les experts. Dans cette hypothèse, si le
propriétaire du bien refuse de céder le bien, le refus de
délivrance du certificat peut être renouvelé.
Ce dispositif, incontestablement plus avantageux pour le propriétaire
que celui de la loi de 1941, dans la mesure où le prix d'achat sera un
prix de marché, s'inspire peu ou prou de la procédure en vigueur
en Grande-Bretagne. Le dispositif britannique de contrôle des
exportations de biens culturels lie, en effet, le refus de la délivrance
de la licence d'exportation à l'acquisition de l'oeuvre pour les
collections publiques : en cas de refus de la licence, un comité
d'experts (" reviewing committee ") évalue l'oeuvre et fixe un
délai, qui n'excède pas en général six mois, au
terme duquel l'oeuvre devra être acquise. Si le propriétaire
refuse une offre de l'Etat égale ou supérieure au prix
fixé par le comité, le certificat est en général
refusé sans que la validité de ce refus soit limitée dans
le temps. C'est ainsi que les trois Grâces de Canova que le musée
Getty souhaitait absolument acquérir ont été retenues
plusieurs années pour permettre leur acquisition par une institution
britannique, aidée en cela par de généreux donateurs.
b) ... entourée de garanties afin de préserver les intérêts de l'Etat et des tiers
La
proposition de loi entoure cette procédure d'acquisition de garanties
afin de protéger les prérogatives de l'Etat mais également
d'assurer une meilleure information des tiers sur les effets du refus de
délivrance du certificat.
• Afin d'éviter que l'acquisition ne puisse être
réalisée en raison de l'expiration du délai de
validité du refus de certificat, le propriétaire est tenu de
maintenir le bien sur le territoire national jusqu'au terme de la
procédure d'acquisition.
Dans le même souci de préserver les intérêts de
l'Etat, l'article 2 en insérant un nouvel article dans la loi de 1992
prévoit la nullité de toute vente consentie par le
propriétaire ou ses ayants cause après que l'offre d'achat de
l'Etat a été acceptée.
En outre, s'inspirant des dispositions de la loi du 31 décembre 1913,
l'article 2 complète la loi de 1992 pour préciser que
l'administration est informée de tout transfert de
propriété d'un bien ayant fait l'objet d'un refus de certificat.
Enfin, l'article 6 précise que les dispositions de la proposition de loi
s'appliquent également aux certificats ou aux refus de certificat en
cours - ce qui, en l'absence de dispositions expresses, aurait
été le cas. Il s'agit cependant d'une sage précaution dans
la mesure où, dans l'hypothèse d'une application aux seules
demandes de certificat introduites postérieurement à la date
d'entrée en vigueur de la loi, on aurait pu redouter d'ici la
promulgation de la loi une affluence de demandes de certificat de la part des
propriétaires afin de leur permettre d'échapper aux
conséquences d'un refus de vente à l'Etat.
• L'information des tiers, et en particulier des acquéreurs, est
également renforcée. L'article 2 dispose qu'en cas de vente d'un
bien ayant fait l'objet d'un refus de certificat, le propriétaire du
bien doit informer l'acquéreur de cette décision et des
éventuelles propositions d'acquisition faites par l'administration. En
outre, est proposé l'établissement d'une liste des biens reconnus
trésors nationaux non classés.
2. Limiter les incidences du contrôle des exportations d'oeuvres d'art sur le fonctionnement du marché de l'art
Parmi
les raisons les plus fréquemment avancées pour expliquer le
déclin puis la relative atonie du marché de l'art en France,
figurent le poids de la fiscalité des oeuvres d'art, et plus largement
du patrimoine, mais également les incertitudes que fait peser sur les
propriétaires, à défaut du classement paradoxalement
devenu attractif, la réglementation régissant l'exportation des
biens culturels. Il est en effet souvent souligné que les
collectionneurs hésitent à acheter et à domicilier leurs
biens en France de crainte de ne pouvoir en disposer librement et de les voir
se déprécier faute de jouir du droit de les faire sortir du
territoire national.
A cet égard, la proposition de loi comporte deux dispositions de nature
à rassurer les propriétaires sur le " statut " de leurs
biens au regard des dispositions législatives protégeant les
trésors nationaux : l'allongement de la durée de
validité du certificat et l'impossibilité de classer les biens
importés depuis moins de cinquante ans.
Par ailleurs, afin d'éviter des formalités administratives trop
lourdes aux collectionneurs étrangers vendant ou achetant des oeuvres en
France, la proposition de loi précise que les exportations de biens
culturels importés à titre temporaire- en vue d'une vente ou
d'une exposition- ne sont pas assujetties à la procédure de
délivrance du certificat prévue par la loi de 1992.
En outre, afin de rapprocher le monde du marché de l'art et celui des
collections publiques, elle modifie la composition de la commission
chargée de formuler un avis sur les refus de délivrance des
certificats.
a) Des dispositions de nature à rassurer les collectionneurs
•
L'allongement de la durée de validité du certificat
Le dispositif retenu par la loi de 1992 qui fait dépendre la
qualification de trésor national du refus de délivrance du
certificat de libre circulation laisse peser une incertitude sur les
possibilités d'exporter telle ou telle oeuvre, les propriétaires
ne pouvant être fixés qu'une fois la décision de
l'administration prise. A cet égard, il se différencie de
mécanismes de contrôle des exportations reposant comme en Italie
ou en Allemagne sur une liste d'oeuvres non susceptibles d'être
exportées. Par ailleurs, la loi de 1992 en limitant à cinq ans la
durée de validité du certificat n'interdit pas que son
propriétaire à l'issue de ce délai se voie refuser le
certificat, l'administration ayant été amenée à
réviser son appréciation.
Pour remédier à ces inconvénients, l'article 3 de la
proposition de loi modifie la loi de 1992 pour préciser que, pour les
biens d'une ancienneté supérieure ou égale à cent
ans, le certificat atteste à titre permanent que le bien n'est pas un
trésor national. Pour les biens d'une ancienneté
inférieure à cent ans, pour lesquels l'autorité
administrative ne dispose pas du recul suffisant au regard de l'histoire de
l'art, les auteurs de la proposition retiennent une solution plus prudente,
quoique favorable aux propriétaires, en fixant à vingt ans la
durée de validité du certificat.
• La suppression de la possibilité de classer comme monuments
historiques les biens mobiliers importés depuis moins de cinquante ans
La proposition de loi modifie l'article 7 de la loi du
31 décembre 1992 afin de préciser que les biens
importés depuis moins de cinquante ans sur le territoire national ne
peuvent faire l'objet d'un refus de certificat, ce qui a pour
conséquence implicite d'exclure que ces biens puissent être
classés au titre de la loi du 31 décembre 1913.
Cette disposition, dont la portée est plus significative que l'exception
prévue pour les importations temporaires, constitue une garantie
substantielle susceptible de faire disparaître les réticences que
pouvaient avoir les propriétaires à établir leurs
collections sur le territoire national. Une telle exception, directement
inspirée du système britannique, est légitime dans la
mesure où il est difficile de prétendre qu'une oeuvre qui se
trouve en France depuis moins de cinquante ans fait partie à proprement
parler du patrimoine national. Par ailleurs, cette modification
législative prend acte de la pratique : en effet, les biens
entrés sur le territoire national depuis moins de cinquante ans ne sont
quasiment jamais classés.
b) Alléger les procédures administratives
Le
paragraphe I de l'article 3 de la proposition de loi complète la loi de
1992 afin de préciser que l'exportation des biens culturels
importés à titre temporaire sur le territoire national n'est pas
soumise à la procédure de délivrance d'un certificat.
Cette précision apparaît quelque peu redondante dans la mesure
où les dispositions actuelles du deuxième alinéa de
l'article 7 de la loi de 1992 prévoient que le certificat ne peut
être refusé aux biens culturels licitement importés sur le
territoire douanier depuis moins de cinquante ans.
Toutefois, en évitant les lourdeurs administratives inhérentes
à la procédure de délivrance du certificat, une telle
disposition ne peut que contribuer à rassurer d'éventuels
vendeurs ou acheteurs étrangers souhaitant recourir aux
sociétés de ventes, galeristes et antiquaires français.
Elle traduit la volonté de prendre en compte le handicap que
représente la faiblesse de nos importations d'oeuvres d'art. En effet,
comme le démontrent les exemples étrangers, un marché
dynamique est un marché qui importe autant qu'il exporte. Par ailleurs,
on constate qu'une oeuvre vendue sur le territoire français a plus de
chances d'y demeurer, et donc de fait, d'enrichir le patrimoine national,
qu'une oeuvre vendue à l'étranger. Il reste à savoir si le
remède est à la hauteur du mal.
c) La modification de la composition de la commission chargée de formuler un avis sur les refus de délivrance de certificats
Le
paragraphe II de l'article 4 de la proposition de loi modifie la composition de
la commission qui, aux termes de l'article 7 de la loi de 1992, rend un avis
motivé avant tout refus de délivrance du certificat par le
ministre de la culture.
Jusqu'à présent, la loi se bornait à indiquer que cette
commission était composée de représentants de l'Etat et de
personnalités qualifiées sans préciser la proportion
respective de ces deux catégories de membres. En l'absence de
précisions législatives sur ce point, le décret
n° 93-124 du 29 janvier 1993 a attribué à l'Etat la
majorité des sièges : la commission comprend, outre son
président, membre du Conseil d'Etat, onze membres
nommés pour quatre ans soit six membres de droit
4(
*
)
et cinq personnalités qualifiées. Dans
la pratique, la prépondérance de la représentation de
l'administration est accentuée par la désignation en
qualité de personnalités qualifiées de responsables
administratifs (anciens conservateurs de musées par exemple) :
parmi les cinq personnalités qualifiées qui siègent
aujourd'hui à la commission, seules deux sont effectivement des
représentants du marché de l'art.
La rédaction actuelle de l'article 7 de la loi de 1992 est
précisée par la proposition de loi afin d'établir une
parité entre les représentants de l'Etat et les
personnalités qualifiées. Par cette modification de portée
limitée, les auteurs de la proposition de loi souhaitent atténuer
la méfiance des propriétaires à l'égard de
l'administration dont les décisions de refus, bien que peu nombreuses si
on les rapporte au nombre de demandes déposées chaque
année, sont souvent qualifiées d'abusives et d'arbitraires.
L'objectif est certes louable mais on peut se demander si la modification
législative proposée est à elle seule suffisante.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. UNE APPRÉCIATION GLOBALEMENT POSITIVE...
Votre commission a porté une appréciation globalement positive sur la proposition de loi n°444 qui améliore le dispositif adopté en 1992 avec le souci de parvenir à un équilibre satisfaisant entre les prérogatives de l'Etat et les droits des propriétaires.
1. Un souci louable de remédier aux lacunes de la loi de 1992
La
proposition de loi qui nous est soumise vise à améliorer
l'efficacité de la loi de 1992 et ne constitue en aucun cas un
assouplissement du dispositif français de protection du patrimoine.
C'est en effet la loi de 1992 elle-même, qui a opté pour un
système libéral en abandonnant la réglementation
douanière, certes difficile à mettre en oeuvre du fait de la
suppression des contrôles aux frontières internes de la
communauté européenne et critiquée par les professionnels
du marché de l'art mais en partie compatible avec les dispositions de
l'article 30 du traité instituant la communauté européenne.
L'application qui a été faite de ses dispositions a traduit dans
les faits cette volonté de limiter les interventions de l'Etat sur le
marché de l'art, objectif auquel a également concouru
l'évolution de la jurisprudence judiciaire en neutralisant l'alternative
du classement. Depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1992, sur les
4 500 oeuvres environ chaque année pour lesquelles est
sollicité un certificat, seules 68 ont été
déclarées " trésors nationaux ".
Si l'on considère non plus les oeuvres déclarées
" trésors nationaux " mais les oeuvres qui ont finalement pu
être retenues sur le territoire national, seules 30 ont été
acquises pour les collections publiques et une seule, classée.
Ce bilan incite donc à accueillir avec prudence les arguments
avancés par ceux qui considèrent la réglementation
française de contrôle des exportations des oeuvres d'art comme une
explication du déplacement du marché international de l'art vers
d'autres places que Paris. Les prérogatives dont dispose l'Etat pour
enrichir les collections publiques qu'il s'agisse du contrôle des
exportations ou encore du droit de préemption en ventes publiques ont
cela en commun, si l'on considère les chiffres, qu'elles exercent sur le
fonctionnement du marché de l'art une incidence bien moindre que celle
qui leur est généralement imputée.
Les professionnels du marché de l'art consultés par votre
rapporteur dans le cadre de ses travaux reconnaissent, au demeurant, que le
contrôle de l'administration est exercé avec circonspection et
modération et considèrent que les prérogatives reconnues
à l'Etat en ce domaine sont légitimes.
Les dispositions qui organisent l'acquisition par l'Etat d'oeuvres
considérées comme des trésors nationaux n'auront pas non
plus pour effet de renforcer les prérogatives de l'administration, et
cela pour deux raisons.
La première découle des dispositions mêmes de la
proposition de loi : l'oeuvre, si elle est acquise, le sera au prix du
marché. Les modalités d'acquisition proposées
n'affecteront donc pas le libre fonctionnement du marché de l'art. Les
experts auront, en effet, pour mission de déterminer la valeur de
l'oeuvre par référence aux prix pratiqués pour des oeuvres
comparables sur le marché international de l'art :
financièrement, le propriétaire ne sera pas
lésé ; son seul motif de mécontentement consistera
dans le fait de ne pouvoir choisir son acquéreur.
La seconde raison tient à des considérations budgétaires.
En effet, l'existence d'une procédure de fixation du prix d'une oeuvre
dont l'Etat refuse l'exportation n'aura pas à elle seule pour
conséquence une multiplication des cas d'acquisitions pour les
collections publiques. Sans revenir en détail sur l'analyse des
difficultés budgétaires auxquelles se heurte le ministère
de la culture pour conduire une politique ambitieuse d'acquisitions, il importe
de rappeler que la valeur des oeuvres entrées dans les collections
publiques à la suite d'un refus de certificat s'élève
à 271,81 millions de francs, montant à comparer avec la valeur
totale représentée par l'ensemble des oeuvres
considérées depuis 1992 comme des trésors nationaux, soit
1 435,75 millions de francs. L'origine des financements nécessaires
à ces acquisitions est retracée dans le tableau
ci-dessous.
VALEUR TOTALE DES TRÉSORS NATIONAUX ACQUIS DEPUIS 1993 |
271 812 695 F |
|
DONT : |
CRÉDITS D'ACQUISITION DE L'ETAT répartis comme suit :
FRAM
(fonds régionaux d'acquisition des musées)
|
157 284 795 F
1 274
100 F
|
|
CRÉDITS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES |
8 140 900 F |
|
AUTRES FINANCEMENTS |
106 387 000 F |
(Source : ministère de la culture et de la
communication)
On relèvera que les crédits provenant du budget de l'Etat ne
représentent que 57,8 % du montant des financements, les ressources
du mécénat jouant un rôle indispensable dans ces
acquisitions.
2. Un dispositif qui suscite néanmoins quelques réticences sur son efficacité
Le
dispositif figurant à l'article premier de la proposition de loi devrait
permettre à l'Etat de surmonter le refus de vente opposé par un
propriétaire. Sera-t-il de nature à assurer une protection plus
efficace du patrimoine national ? Rien n'est moins sûr.
• En effet, les ressources dont dispose l'Etat pour financer des
acquisitions sont limitées si on les ramène aux prix atteints sur
le marché de l'art par des oeuvres par nature exceptionnelles. Les deux
oeuvres dont les refus de certificat arrivaient à échéance
en 1999-et qui n'ont pu jusqu'ici être acquises- avaient
été déclarées par leurs propriétaires lors
de la demande de certificat, pour la première, un tableau de Degas, la
duchesse
de Montejasi et ses filles
Elena et Camilla
,
à une valeur de 200 millions de francs, et pour la seconde, une oeuvre
de Cézanne,
le jardinier Vallier
, à une valeur de
250 millions de francs. On rappellera que la loi de finances pour 2000 a
fixé les crédits du fonds du patrimoine, destiné à
ces acquisitions exceptionnelles, à 105,25 millions de francs. Cela
se passe de commentaires.
Sans vouloir s'interroger dans le cadre de ce rapport sur la pertinence de
dégager au sein du budget de l'Etat des crédits d'acquisition
susceptibles de répondre aux exigences du marché de l'art, votre
rapporteur souligne la nécessité pour l'Etat de faire preuve, en
matière de contrôle des exportations d'oeuvres d'art de
réalisme et de ne retenir que les oeuvres les plus exceptionnelles. Par
ailleurs, l'enrichissement des collections publiques ne dépend pas du
seul contrôle des exportations comme pouvaient le laisser croire les
habitudes engendrées par les dispositions de la loi de 1941. Des
acquisitions à l'étranger -beaucoup de trésors nationaux
sont d'ores et déjà à l'étranger- ou encore sur le
territoire national, en ventes publiques ou auprès de marchands ont
également vocation à servir la politique d'enrichissement des
collections nationales qui, on le rappellera, doit procéder d'un souci
de diversification plus que d'accumulation.
En outre, si la procédure d'acquisition prévue par la proposition
de loi est calquée sur le mécanisme en vigueur en
Grande-Bretagne, il est loisible de se demander si des dispositifs
législatifs comparables peuvent produire les mêmes effets dans les
deux pays.
En effet, le système britannique tire son efficacité plus de la
pratique et des caractéristiques de son marché de l'art que de
son socle juridique. Outre le fait que les britanniques disposent des
ressources provenant de la loterie pour financer des oeuvres d'art ou de fonds
tels que le " national heritage memorial fund " ou le " national
art collection fund ", la pertinence d'un système qui lie la
possibilité pour l'Etat de bloquer l'exportation d'une oeuvre et
l'obligation de l'acquérir dans un délai raisonnable tient
également à sa capacité de susciter un accord sur le prix
de vente des oeuvres à l'Etat, capacité qui n'est pas le
résultat direct d'un mécanisme juridique mais plutôt d'un
effet de système.
En Grande-Bretagne, l'Etat -et plus largement les collections publiques-
bénéficient des effets de dispositifs fiscaux tels que les
exonérations d'impôts sur le capital consenties si le
propriétaire s'engage à conserver l'oeuvre sur le territoire
britannique ou du régime des ventes préférentielles aux
collections publiques
5(
*
)
mais aussi d'un
ensemble de facteurs. Parmi ces derniers, figurent le rôle des
intermédiaires et des maisons de vente, dont les estimations et la
crédibilité s'appuient sur un marché de l'art très
actif, mais aussi et surtout la tradition de respect par l'Etat des
intérêts des propriétaires et les relations étroites
entre les collectionneurs et les musées, encouragées par la
multiplicité et l'indépendance des acteurs publics -et notamment
des organes dirigeants des musées (" board of trustees "). En
effet, lorsqu'une oeuvre est acquise, elle est acquise plus par un musée
que par l'Etat.
A cet égard, la modification de la loi de 1992 qui nous est
proposée, si elle va dans le bon sens, n'est pas à elle seule de
nature à faciliter les acquisitions publiques. Il faudra sans doute de
nombreuses années avant que ne cède la méfiance
réciproque qui prévaut entre l'Etat et les propriétaires
et que ne s'instaure un dialogue fructueux.
La procédure d'expertise est certes utile mais elle ne devra être
utilisée qu'en dernier recours pour surmonter les refus de vente
définitifs. Il n'est pas souhaitable qu'elle devienne la
règle : si elle est transparente, équitable et respectueuse
des intérêts des propriétaires, elle apparaît
également relativement longue et coûteuse. A cet égard,
votre rapporteur note que la proposition de loi ne précise pas par qui
seront supportés les frais d'expertise. Par ailleurs, il y a fort
à craindre que le prix fixé par les experts par
référence aux prix du marché international soit dans bien
des cas supérieur à celui qui pourrait résulter d'un
accord amiable entre le propriétaire et l'administration.
Compte tenu de ces observations, votre commission a souhaité apporter
à la proposition de loi des aménagements susceptibles d'en
accroître l'efficacité.
B. DES AMÉNAGEMENTS DESTINÉS À RENFORCER L'EFFICACITÉ DU DISPOSITIF
Outre des modifications de nature rédactionnelle, le texte adopté par la commission vise à améliorer la procédure d'acquisition mais également à aménager les modalités de délivrance des certificats de libre circulation afin d'assurer un meilleur dialogue entre les propriétaires et l'autorité administrative.
1. Les améliorations apportées à la procédure d'acquisition
Votre commission n'a apporté que des modifications de portée modeste au dispositif prévu par la proposition dont elle a relevé le caractère pour partie réglementaire.
a) Préserver la marge de manoeuvre de l'Etat
Votre
commission a souhaité laisser à l'Etat dans le cadre des
procédures prévues par la proposition de loi une certaine marge
de manoeuvre pour mettre en oeuvre les instruments dont il dispose pour assurer
la protection du patrimoine national.
La rédaction retenue par l'article premier de la proposition de loi
impliquait qu'en l'absence de classement ou de revendication du bien,
l'administration était tenue de faire une offre d'achat dans tous les
cas de refus de certificat. Il a semblé plus opportun sur ce point de ne
pas se calquer totalement sur le système britannique et
prévoir en cas de refus du certificat, la possibilité - et non
l'obligation - pour l'Etat de se porter acquéreur.
Il est apparu
souhaitable de laisser à l'Etat la possibilité de refuser le
certificat à titre conservatoire afin de vérifier
l'opportunité de la décision d'acquisition, de s'assurer des
financements nécessaires ou encore de consulter les différentes
collectivités publiques susceptibles d'être
intéressées.
b) Ne pas pénaliser les propriétaires
Le souci
de votre commission a été également d'éviter que la
procédure d'acquisition ne pénalise les propriétaires.
•
Pour cette raison, votre commission a modifié le texte
qui lui était soumis afin de
contenir la procédure
d'acquisition dans des délais aussi brefs que possible
. Les
propriétaires qui souhaitent se défaire d'une oeuvre veulent en
effet dans la majorité des cas la vendre rapidement pour régler
des droits de succession ou disposer de leur patrimoine.
Ainsi votre commission a fixé à trois mois le délai dont
disposeront les experts pour se prononcer sur la valeur du bien. Par ailleurs,
elle a réduit à six mois de délai laissé à
l'administration pour régler le prix de l'oeuvre, le délai d'un
an prévu par le texte initial étant à l'évidence
trop long.
Si l'on tient compte des délais prévus, dans le cas où le
propriétaire accepte de se dessaisir de son bien, il s'écoulera
au maximum seize mois entre la première offre faite par l'Etat au
propriétaire et le paiement du bien, ou dix-neuf mois si un tiers expert
a été désigné ; pour constater l'échec
de la procédure d'acquisition, il faudra attendre dix mois, ou treize
mois dans le cas de désaccord entre les premiers experts. Ces calculs
n'intègrent pas les délais dans lesquels seront
désignés les experts.
S'il semble difficile de réduire les délais fixés pour
chaque étape de la procédure, votre rapporteur ne peut
qu'insister sur la nécessité pour l'administration de faire
preuve de diligence et de prendre des décisions dans des délais
inférieurs à ceux prévus par la loi. Les rapports
qu'entretiennent l'administration et les propriétaires ne pourront que
s'en trouver améliorés.
• Par ailleurs, en cas de renouvellement du refus de délivrance
du certificat motivé par le refus du propriétaire de vendre
à l'Etat le bien au prix fixé par les experts, votre commission
a souhaité
réserver au propriétaire du bien la
possibilité de demander qu'il soit procédé à
nouveau à une expertise du bien
. Dans ce cas, si l'Etat refuse
d'acheter l'oeuvre au prix ainsi fixé, le refus du certificat ne pourra
plus être renouvelé.
Cette modification s'imposait à plusieurs titres. Pour des motifs
économiques d'abord : le marché de l'art est un
marché très fluctuant, il est donc nécessaire de ne pas
" figer " définitivement la valeur à laquelle l'Etat
peut se porter acquéreur du bien. Il en va de l'intérêt de
l'Etat comme des propriétaires. Pour des motifs d'équité
ensuite : il n'est pas envisageable de refuser indéfiniment le
certificat à un propriétaire ou à ses héritiers. En
effet, les conditions du marché comme la position du vendeur sur la
possibilité de vendre son oeuvre à l'Etat peuvent avoir
évolué.
Compte tenu des garanties apportées aux propriétaires par la
procédure d'expertise sur le prix du bien comme de la possibilité
pour ceux-ci de demander une nouvelle expertise en cas de renouvellement du
refus de délivrance du certificat, il a été
précisé que cette décision ne pouvait ouvrir droit
à une indemnisation.
2. Les aménagements apportés aux modalités de délivrance du certificat
Dans le souci d'améliorer la procédure de délivrance du certificat, votre commission a complété le dispositif de la proposition de loi afin de simplifier les formalités imposées aux propriétaires et de renforcer la transparence des décisions prises par l'administration.
a) Simplifier les formalités imposées aux propriétaires
Comme
votre rapporteur l'a déjà souligné, le dispositif de
contrôle des exportations de biens culturels résultant de la loi
de 1992 fait de la délivrance du certificat de libre circulation la
règle et de son refus, l'exception. La pratique a confirmé cette
interprétation : entre 1993 et 1999 en moyenne, chaque
année, seules dix oeuvres sur les 4 500 faisant l'objet d'une
demande du certificat sont considérées comme des trésors
nationaux.
A cet égard, le formalisme dont les dispositions du dernier
alinéa de l'article 7 de la loi de 1992 entoure les décisions de
délivrance du certificat apparaît désormais excessif. Votre
commission lui a substitué
un régime de délivrance
tacite du certificat
qui apparaît plus adapté aux conditions
dans lesquelles est appliquée la loi de 1992. Ce régime permettra
d'alléger les formalités à la charge de l'administration
tout en étant de nature à permettre un traitement plus rapide des
demandes. Actuellement, le décret n°93-124 du 29 janvier 1993 de la
loi précitée accorde quatre mois au ministre de la culture pour
refuser ou délivrer le certificat. Compte tenu des délais -en
constante voie d'amélioration- dans lesquels les services du
ministère de la culture traitent les dossiers, il serait envisageable
que soit fixé par décret un délai de deux mois,
durée qui correspond au demeurant à celui prévu par
l'article 20 du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs
relations avec les administrations, en instance d'examen par le Parlement, pour
les décisions implicites d'acceptation. On relèvera que la loi
n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives dans sa
rédaction antérieure à la loi de 1992 prévoyait
déjà une procédure d'autorisation tacite
d'exportation pour les archives classées comme pour les archives
privées qui présentent un intérêt public pour des
raisons historiques.
• Par ailleurs, afin de marquer le caractère transitoire de la
décision de refus du certificat,
sa durée de validité a
été ramenée de trois ans à trente mois
. Cette
modification de la loi de 1992 réduit les contraintes engendrées
pour les propriétaires par un refus de certificat sans pour autant
porter atteinte aux prérogatives de l'Etat. En l'absence de
décision d'acquisition, ce délai apparaît suffisant pour
mener à bien une procédure de classement. Elle ne fait pas non
plus obstacle à une procédure d'acquisition dans la mesure
où la proposition de loi prévoit explicitement que l'expiration
du délai de validité du refus de certificat ne met pas un terme
à une procédure d'acquisition déjà engagée.
• Votre commission, si elle a approuvé les dispositions
destinées à renforcer l'information des tiers -et en particulier
des acquéreurs- sur les oeuvres auxquelles a été
refusé le certificat, n'a pas vu l'intérêt d'établir
une liste de ces oeuvres. Le refus de certificat, à la différence
du classement, constitue une mesure transitoire ; de ce fait
l'établissement d'une liste - qui devra être
régulièrement tenue à jour- ne présente
guère d'intérêt.
De plus, si le souci des auteurs de la proposition de loi de ne pas publier
cette liste apparaît fondé, compte tenu de la
confidentialité qu'il importe de préserver sur l'identité
des propriétaires, la détermination des personnes
autorisées à la consulter apparaît délicate ;
si le but poursuivi est de réserver sa communication aux seuls
éventuels acquéreurs, on voit mal quel critère permettra
de garantir la confidentialité des informations qui devraient y figurer.
A cet égard, il est apparu plus opportun à votre commission de
renforcer la transparence de la procédure de délivrance.
b) Renforcer la transparence de la procédure de délivrance
Comme le
souligne une analyse attentive de l'exemple britannique, l'efficacité
des procédures tient moins au dispositif législatif qu'aux
relations étroites qu'entretiennent les propriétaires et les
responsables des collections publiques. A cet égard, garantir la
transparence de la procédure de délivrance apparaît comme
un moyen de surmonter la méfiance qui prévaut aujourd'hui encore
entre les collectionneurs et l'Etat.
Afin de favoriser une telle évolution, votre commission a
souhaité renforcer le rôle de la commission prévue à
l'article 7 de la loi de 1992 chargée de donner un avis au ministre de
la culture en cas de refus de certificat. Ainsi le dispositif de la proposition
de loi a été complété afin, d'une part, de
prévoir que le certificat ne pourra être refusé que sur
avis conforme de la commission et, d'autre part, que ces avis seront
publiés dans des conditions fixées par décret en Conseil
d'Etat .
• La
compétence liée du ministre
conjuguée
à la modification de la composition de la commission proposée par
les auteurs de la proposition de loi apparaît de nature à
restaurer un climat de confiance entre les propriétaires et
l'administration et à désamorcer les critiques formulées
contre le caractère arbitraire des décisions prises par
l'administration de la culture. Cependant, votre rapporteur souligne que cet
aménagement de la procédure de délivrance du certificat ne
prendra tout son sens que si le ministre de la culture choisit
réellement les personnalités qualifiées parmi des
représentants du marché de l'art (marchands, experts,
commissaires-priseurs ou représentants des futures
sociétés de vente).
•
La publication des avis de la commission
, mieux que
l'établissement d'une liste des biens déclarés
" trésors nationaux ", sera de nature à garantir
l'information des tiers, tout en éclairant les propriétaires sur
la doctrine de l'administration en matière de refus de certificat. Cette
publication devra bien entendu ne comporter aucune indication nominative.
En fonction de ces orientations, le texte adopté par la commission
qui respecte l'ordre des articles de la loi du 31 décembre 1992 comporte
sept articles :
•
L'article premier
introduit deux assouplissements aux
dispositions de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1992 qui pose
l'obligation du certificat.
La durée de validité du certificat est allongée. Pour les
biens dont l'ancienneté excède cent ans, la durée de
validité du certificat est illimitée et pour les autres biens, de
vingt ans renouvelable.
Par ailleurs, il est précisé que l'exportation de biens culturels
importés à titre temporaire n'est pas soumise à la
délivrance d'un certificat.
•
L'article 2
modifie sur deux points les dispositions de
l'article 7 de la loi du 31 décembre 1992 qui précise les
conditions de délivrance du certificat.
En premier lieu, il est prévu que les biens importés depuis
moins de cinquante ans ne peuvent se voir refuser le certificat, ce qui
implique donc qu'ils ne pourront pas être classés.
En second lieu, il est précisé d'une part que la commission
chargée d'émettre un avis sur les refus de certificat est
composée à parité de représentants de l'Etat et de
personnalités qualifiées et, d'autre part, que le ministre ne
peut refuser le certificat que sur avis conforme de cette commission, avis qui
désormais sera publié.
•
L'article 3
prévoit à l'article 8 de la loi de
1992 un régime de délivrance tacite du certificat et supprime par
coordination les dispositions du dernier alinéa de l'article 7 de la loi
qui imposaient la motivation des décisions de délivrance et leur
communication à la commission chargée de se prononcer sur les
refus de certificat.
•
L'article 4
modifie l'article 7 de la loi du 31 décembre
1992 afin de porter de trois à trente mois la durée de
validité du refus du certificat. Par ailleurs, il précise la
rédaction de l'article 7 afin de dissiper l'ambiguïté qui
pouvait éventuellement résulter des termes de la loi de 1992
quant à la possibilité de classer des biens en application de la
loi du 31 décembre 1913 une fois le délai de validité du
refus de certificat expiré. Contrairement à ce que pourraient
laisser à penser des interprétations jurisprudentielles
6(
*
)
il va de soi que le bien, si du moins il se trouve sur
le territoire national, peut toujours être classé après
cette date. L'application de l'article 9 de la loi de 1992 n'écarte pas
l'application de la loi de 1913.
•
L'article 5
insère dans la loi de 1992 quatre nouveaux
articles :
L'article 9-1
précise les modalités de la
procédure d'acquisition et les conséquences pour le
propriétaire d'un trésor national d'un refus de vente à
l'Etat au prix d'expertise.
L'article 9-2
prévoit que l'autorité administrative est
informée de tout transfert de propriété d'un bien culturel
présentant le caractère de trésor national.
L'article 9-3
impose à tout propriétaire qui
aliène un bien culturel ayant fait l'objet d'un refus de certificat de
faire connaître à l'acquéreur l'existence de cette
décision et, le cas échéant, les offres d'achat
adressées par l'administration.
L'article 9-4
dispose que toute aliénation d'un trésor
national après que son propriétaire a accepté une offre
d'achat faite par l'Etat est nulle.
•
L'article 6
reprend les dispositions de l'article 5 de la
proposition de loi afin de tirer les conséquences sur la
rédaction de l'article 215 ter du code des douanes (contrôle aux
frontières au sein de la Communauté européenne) du
non-assujettissement des biens culturels importés à titre
temporaire à la procédure de délivrance du certificat.
•
L'article 7
prévoit que les dispositions de la
proposition de loi sont applicables aux biens auxquels a été
délivré un certificat, dont la durée de validité se
trouve donc prolongée, et aux biens qui, à la date
d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de certificat en
cours de validité, ce qui ouvre donc à l'Etat la
possibilité d'entamer une procédure d'acquisition.
Au bénéfice des observations qui précédent,
votre commission vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte
résultant de ses conclusions, et qui figure ci-après.
*
* *
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une réunion tenue le mercredi 19 janvier 2000 sous la
présidence de
M. James Bordas, vice-président
, la
commission a examiné, sur le rapport de M. Serge Lagauche, la
proposition de loi n° 444 (1998-1999) relative à la protection des
trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477
du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à
certaines restrictions de circulation et à la
complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et
de douane.
Après avoir rendu hommage au travail accompli par le rapporteur,
M. Pierre Laffitte
a estimé que le dispositif
proposé procédait à une amélioration pragmatique du
système mis en place par la loi
du 31 décembre 1992, dont les conséquences,
notamment sur le dynamisme du marché de l'art, seraient
appréciables. Il a interrogé le rapporteur sur l'effet de ce
dispositif sur les importations illicites d'oeuvres d'art.
M. Serge Lagauche, rapporteur,
a considéré que, si le
dispositif proposé permettait d'assouplir les procédures pour les
propriétaires et les professionnels de bonne foi, il n'était pas
à lui seul de nature à réduire significativement les
trafics illicites qui concernent un grand nombre d'oeuvres et favorisent une
évasion du patrimoine national.
La commission a ensuite procédé à l'examen du dispositif
proposé par le rapporteur.
A l'issue de cet examen
,
elle a adopté à
l'unanimité des commissaires présents les conclusions
proposées par son rapporteur
.
*
* *
TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION
Article premier
L'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre
1992
relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et
à la complémentarité entre les services de police, de
gendarmerie et de douane est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
" Ce certificat atteste à titre permanent que le bien n'a pas le
caractère de trésor national. Toutefois, pour les biens dont
l'ancienneté n'excède pas cent ans, le certificat est
délivré pour une durée de vingt ans renouvelable. "
2° Après le deuxième alinéa, il est
inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
" L'exportation des biens culturels qui ont été
importés à titre temporaire dans le territoire douanier n'est pas
subordonnée à l'obtention du certificat prévu au premier
alinéa. "
Art. 2
L'article 7 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre
1992
précitée est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
" Il est accordé aux biens culturels licitement importés
dans le territoire douanier depuis moins de cinquante ans. "
2° Dans la première phrase du quatrième alinéa,
après le mot : " avis " est inséré le
mot : " conforme " et après les mots : " par
décret en Conseil d'Etat, " sont insérés les
mots : " à parité ".
Art. 3
I - Le
premier alinéa de l'article 8 de la loi n° 92-1477 du
31 décembre 1992 précitée est complété
par deux phrases ainsi rédigées :
" Ce décret fixe le délai à l'expiration duquel le
certificat est réputé délivré. Il fixe
également les conditions de publication des avis de la commission
mentionnée au quatrième alinéa de l'article 7. "
II - Le dernier alinéa de l'article 7 est supprimé.
Art. 4
L'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre
1992
précitée est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : " trois
ans" sont remplacés par les mots : " trente mois "
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
" Après ce délai, si le bien n'est pas classé en
application des lois du 31 décembre 1913 ou n° 79-18 du
3 janvier 1979 précitées ou revendiqué en application
des lois du 27 septembre 1941 portant réglementation des fouilles
archéologiques et n° 89-874 du
1
er
décembre 1989 relative aux biens culturels
maritimes, le refus de délivrance du certificat ne peut être
renouvelé que dans les conditions prévues au sixième
alinéa de l'article 9-1. "
Art. 5
Après l'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31
décembre 1992 précitée, il est inséré quatre
articles nouveaux ainsi rédigés :
" Art. 9-1 .-
Dans le délai prévu au premier
alinéa de l'article 9, l'autorité administrative peut dans
l'intérêt des collections publiques, présenter au
propriétaire du bien une offre d'achat. Cette offre tient compte des
prix pratiqués pour des oeuvres comparables sur le marché
international.
" Si le propriétaire du bien n'accepte pas l'offre d'achat dans un
délai de trois mois, l'autorité administrative peut faire
procéder à une expertise pour fixer le prix du bien dans les
conditions fixées aux troisième et quatrième
alinéas.
" L'autorité administrative et le propriétaire du bien
désignent respectivement un expert. En cas de carence, le tribunal
compétent de l'ordre judiciaire procède à la
désignation. Ces experts rendent un rapport conjoint dans un
délai de trois mois à compter de leur désignation.
" En cas de divergences entre ces experts, le prix du bien est fixé
par un expert désigné conjointement par l'autorité
administrative et le propriétaire du bien ou, à défaut
d'accord, par le tribunal compétent de l'ordre judiciaire. Cet expert
rend son rapport dans les conditions prévues au quatrième
alinéa.
" L'autorité administrative peut adresser au propriétaire du
bien une offre d'achat au prix d'expertise dans un délai de deux mois
à compter de la notification du rapport d'expertise fixant le prix du
bien.
" Si, dans un délai de deux mois à compter de l'offre
d'achat, le propriétaire refuse cette offre ou n'a pas fait savoir qu'il
l'acceptait, le refus de délivrance du certificat peut être
renouvelé. Aucune indemnité n'est due à ce titre.
" Si le propriétaire du bien accepte l'offre d'achat, le paiement
du bien doit intervenir dans un délai de six mois à compter de
l'accord du propriétaire à peine de résolution de la vente.
" Si un bien a fait l'objet d'une offre d'achat, son propriétaire
ne peut présenter de demande de certificat avant l'expiration du
délai prévu au sixième alinéa ou, s'il accepte
l'offre d'achat, avant l'expiration du délai prévu à
l'alinéa précédent.
" En cas de renouvellement du refus de certificat, le propriétaire
du bien peut faire procéder à une expertise dans les conditions
prévues aux troisième et quatrième alinéas. Si
l'autorité administrative refuse d'acquérir le bien au prix
d'expertise, le refus de délivrance ne peut être renouvelé.
" L'autorité administrative peut également procéder
à l'acquisition des biens visés au second alinéa de
l'article 9 pour le compte de toute personne publique.
" Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du
présent article.
" Art. 9-2.-
L'autorité administrative est informée
de tout transfert de propriété d'un bien culturel
présentant le caractère de trésor national qui n'est pas
classé en application des lois du 31 décembre 1913 ou
n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitées ou
revendiqué en application des lois du 27 septembre 1941 ou
n° 89-874 du 1
er
décembre 1989
précitées par la personne à qui est
transféré le bien dans un délai de trois mois à
compter du transfert.
" Art. 9-3
.- Tout propriétaire qui aliène un bien
culturel visé à l'article 9-2 est tenu de faire connaître
à l'acquéreur l'existence du refus de délivrance du
certificat mentionné à l'article 7 et, le cas
échéant, les offres d'achat adressées dans les conditions
prévues à l'article 9-1.
" Art. 9-4
. - Est nulle toute aliénation du bien consentie
par le propriétaire ou ses ayants cause après avoir
accepté une offre d'achat adressée par l'autorité
administrative dans les conditions prévues à l'article 9-1.
" L'action en nullité se prescrit par six mois à compter du
jour où l'autorité administrative a eu connaissance de la vente.
Elle ne peut être exercée que par le ministre chargé de la
culture. "
Art. 6
A l'article 215 ter du code des douanes, après les mots : " soit des documents attestant que ces marchandises peuvent quitter le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'exportation ", sont insérés les mots : " soit tout document prouvant que ces biens ont été importés temporairement d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ".
Art. 7
Les dispositions de la présente loi sont applicables aux biens culturels auxquels a été délivré le certificat prévu par l'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée ou qui, à la date d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de certificat.
I. TABLEAU COMPARATIF
___
Textes
en vigueur
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Texte
de la proposition de loi
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Propositions du rapporteur
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Loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane |
Proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane |
Proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane |
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(L'ordre des articles reprend celui du texte en vigueur de la loi de 1992) |
Art. 5
L'exportation temporaire ou définitive hors du
territoire
douanier des biens culturels, autres que les trésors nationaux, qui
présentent un intérêt historique, artistique ou
archéologique et entrent dans l'une des catégories
définies par décret en Conseil d'Etat est subordonnée
à l'obtention d'un certificat délivré par
l'autorité administrative.
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Article premier
Le
second alinéa de l'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31
décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines
restrictions de circulation et à la complémentarité entre
les services de police, de gendarmerie et de douane est remplacé par les
alinéas suivants :
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Article
premier
L'article 5 de la loi
n° 92-1477 du 31 décembre
1992
relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et
à la complémentarité entre les services de police, de
gendarmerie et de douane
est ainsi modifié :
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A titre dérogatoire et sous condition de retour obligatoire des biens culturels sur le territoire douanier, le certificat peut ne pas être demandé lorsque l'exportation temporaire des biens culturels a pour objet une restauration, une expertise ou la participation à une exposition. |
" A défaut d'accord amiable dans un délai de trois mois à compter de cette notification, deux experts sont désignés, l'un par l'autorité administrative, l'autre par le propriétaire du bien. En cas de carence dans la désignation des experts, celle-ci est prononcée par l'autorité judiciaire à la demande, soit de l'Etat, soit du propriétaire. Ces deux experts, qui se font présenter le bien, en déterminent la valeur dans un rapport conjoint. |
2°
Après le deuxième alinéa, il est inséré un
nouvel alinéa ainsi rédigé :
|
Dans ce
cas, l'exportation temporaire est subordonnée à la
délivrance par l'autorité administrative d'une autorisation de
sortie temporaire délivrée dans les conditions prévues
à l'article 10.
|
" Si les conclusions des experts sont divergentes, et
à
défaut de désignation amiable, la partie la plus diligente
sollicite du président du tribunal de grande instance, statuant en la
forme des référés, la désignation d'un
troisième expert qui accomplit sa mission dans les conditions
définies au précédent alinéa et dont l'avis est
déterminant.
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|
" En cas de proposition d'acquisition du bien à la valeur d'expertise par l'Etat, le propriétaire fait connaître son accord ou son refus de vendre le bien dans un délai de deux mois à compter de la notification de la proposition d'acquérir. Le silence du propriétaire, à l'issue de ce délai, équivaut à un refus de vendre. |
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|
" En cas de refus de vendre ou de désaccord sur les conditions de la vente indiquées dans la notification prévue au précédent alinéa, le refus de délivrance du certificat peut être réitéré à l'échéance des trois ans autant de fois qu'il est nécessaire. |
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|
" En cas d'acquiescement, le propriétaire est tenu de maintenir l'oeuvre en France jusqu'au transfert de propriété du bien, consécutif au paiement, lequel doit intervenir, à peine de résolution de la vente, dans un délai d'un an à compter de la réception de l'acquiescement du propriétaire. |
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|
" Dans tous les cas, le propriétaire est tenu de maintenir le bien en France à compter de la notification de la proposition d'acquisition prévue au deuxième alinéa et jusqu'au terme de la procédure d'acquisition. |
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|
" L'Etat pourra procéder à l'acquisition du bien à la demande et pour le compte de toute collectivité publique, dans les conditions précisées aux précédents alinéas. " |
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Art. 7 |
Art. 2 |
Art. 2
|
Le
certificat ne peut être refusé qu'au biens culturels
présentant le caractère de trésor national.
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I. -
Après l'article 9 de la même loi, il est inséré
quatre articles 9-1 à 9-4 ainsi rédigés :
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L'article 7 de la loi
n° 92-1477 du 31 décembre
1992
précitée
est ainsi modifié :
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Le refus de délivrance du certificat ne peut intervenir qu'après avis motivé d'une commission composée, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées. Cette commission est présidée par un membre du Conseil d'Etat nommé par décret. |
" Art. 9-2. - Tout propriétaire qui aliène un bien culturel reconnu trésor national et non classé en application de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques ou de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives est tenu de faire connaître à l'acquéreur l'existence de la procédure et des décisions prévues à l'article 9. |
2° Dans la première phrase du quatrième alinéa, après le mot : " avis " est inséré le mot : " conforme " et après les mots : " par décret en Conseil d'Etat ," : sont insér és le s mot s : " à parité ". |
La décision de délivrance du certificat est motivée. Elle comporte, par écrit, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est communiquée à la commission visée au précédent alinéa. |
" Art. 9-3. - L'autorité administrative établit la liste des biens culturels reconnus trésors nationaux et non classés en application de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques ou de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. La communication des données de cette liste s'effectue dans les conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. |
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" Art. 9-4. - Est nulle toute aliénation du bien consentie par le propriétaire ou ses ayants-cause après l'acceptation de l'offre d'achat prévue aux alinéas 2 et 5 de l'article 9. |
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" L'action en nullité se prescrit par six mois à compter du jour où l'Etat a eu connaissance de la vente. Elle ne peut être exercée que par le ministre chargé de la culture. |
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Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. |
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Art.8 |
Art. 3 |
Art. 3 |
Les
conditions d'instruction de la demande et de délivrance du certificat
sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
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L'article 5 de la même loi est ainsi
modifié :
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I -
Le premier alinéa de l'article 8 de la loi n° 92-1477 du
31 décembre 1992 précitée est complété
par deux phrases ainsi rédigées :
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II. - Après le deuxième alinéa, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé : |
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" La sortie des biens culturels importés ou introduits temporairement en France n'est pas soumise à la procédure mentionnée au premier alinéa du présent article. " |
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Art. 9 En cas de refus du certificat, les demandes présentées pour le même bien sont irrecevables pendant une durée de trois ans. |
Art. 4
L'article 7 de la même loi est ainsi
modifié :
|
Art. 4
L'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre
1992
précitée
est ainsi modifié
:
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Après ce délai, le certificat ne peut être refusé une seconde fois pour le même bien si l'administration compétente n'a pas, selon la nature du bien, procédé à son classement en application des lois du 31 décembre 1913 et n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitées ou ne l'a pas revendiqué en application des lois du 27 septembre 1941 portant réglementation des fouilles archéologiques et n° 89-874 du 1 er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes. |
II. - Dans la première phrase du quatrième alinéa, après les mots : "par décret en Conseil d'Etat ", insérer le mot : " paritairement ". |
2°
Le second alinéa est
ainsi
rédigé
:
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Art. 5
Après l'article 9 de la loi
n° 92-1477 du 31
décembre 1992 précitée
, il est inséré
quatre articles
nouveaux
ainsi rédigés :
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Code
des douanes
Par dérogation à l'article 215 bis , ceux qui détiennent ou transportent les biens culturels ou les trésors nationaux visés au 4 de l'article 38 doivent, à première réquisition des agents des douanes, produire soit des documents attestant que ces marchandises peuvent quitter le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'exportation, soit toute justification d'origine émanant de personnes ou de sociétés régulièrement établies à l'intérieur du territoire douanier communautaire. |
Art.5 A l'article 215 ter du code des douanes, après les mots : " soit des documents attestant que ces marchandises peuvent quitter le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'exportation ", insérer les mots : " soit tout document prouvant que ces biens ont été importés temporairement d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, ". |
Art. 6
A l'article 215 ter du code des douanes, après les mots : " soit des documents attestant que ces marchandises peuvent quitter le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'exportation ", sont insér és les mots : " soit tout document prouvant que ces biens ont été importés temporairement d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ". |
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Art. 6 |
Art.7 |
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(cf art. 6 de la proposition de loi) |
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Les dispositions de la présente loi sont applicables aux biens culturels qui font l'objet du certificat mentionné à l'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 modifiée relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane ou d'un refus de certificat décidé à la date d'entrée en vigueur de la présente loi. |
Les dispositions de la présente loi sont applicables aux biens culturels auxquels a été délivré le certificat prévu à l'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée ou qui , à la date d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de délivrance du certificat. |
1
: Loi n° 92-1477 du 31
décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines
restrictions de circulation et à la complémentarité entre
les services de police, de gendarmerie et de douane.
2
Il s'agit de l'article 36 du traité de Rome du 25 mars
1957 devenu l'article 30 du traité instituant la communauté
européenne.
3
Cass. 1
ère
civ., 20 février 1996 ;
Agent judiciaire du Trésor c/Walter.
4
Il s'agit pour le ministère de la culture, du directeur
général des archives de France, du directeur du livre et de la
lecture, du directeur du patrimoine, du directeur des musées de France,
du délégué aux arts plastiques et pour le ministère
chargé de l'éducation nationale, du directeur de la recherche et
des études doctorales.
5
Lorsqu'une oeuvre a fait l'objet d'exonérations
conditionnelles de droits de succession, sa vente éventuelle contraint
le vendeur à s'acquitter de l'impôt dont le versement avait
été différé, sauf s'il la vend à une
collection publique. Dans ce cas, le trésor public renonce à
percevoir l'impôt et le prix de vente du bien est fixé à un
niveau intermédiaire entre le prix qu'aurait touché le
propriétaire après versement de l'impôt et le prix du
marché.
6
Cf : TA. Paris, 30 juin 1999, Rodolphe Hottinguer c/ministre
de la culture.