II. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN 2000
A. LES CRÉDITS DU SECRÉTARIAT D'ETAT A L'OUTRE-MER
La
commission des finances doit se prononcer sur les crédits inscrits dans
le fascicule budgétaire consacré à l'outre-mer. Toutefois,
il convient de garder présent à l'esprit que ces crédits,
dont le montant s'établit à
6,3 milliards de francs
dans le projet de loi de finances pour 2000, ne constituent qu'une partie de
l'effort total de l'Etat en faveur de l'outre-mer, dont l'ordre de grandeur est
d'environ 50 milliards de francs.
Le montant des crédits inscrits dans le PLF 2000 au budget du
secrétariat d'Etat à l'outre-mer est supérieur de 760
millions de francs à celui de 1999, soit une augmentation de 13,5 %.
Toutefois,
ce taux de progression est artificiel
. En effet, 660 de ces
760 millions de francs correspondent à des dépenses
antérieurement prises en charges par d'autres ministères, et qui
sont transférées cette année au budget de l'outre-mer.
A structure constante, l'augmentation des crédits en 2000
s'établit à 1,8 %
(+ 3 % pour les dépenses de
fonctionnement, - 1,2 % pour les dépenses d'investissement).
Les crédits du secrétariat d'Etat à l'outre-mer en 2000
Les crédits du budget de l'outre-mer servent à financer cinq types d'actions (" agrégats ") d'inégales importances :
1. L'administration générale
L'agrégat 01 " Administration
générale " retrace essentiellement les dépenses de
fonctionnement du secrétariat d'Etat : les dépenses de
personnel et les moyens en matériel des services.
La stabilité du montant des crédits de l'administration
générale, qui s'élève à 1 milliard de francs
(+ 0,3 %), masque en réalité un double mouvement :
-
l'augmentation des dépenses de personnel
de 1,5 %, pour un
montant total de 869 millions de francs.
Cette augmentation, qui s'élève à 12,9 millions de francs
entre 1999 et 2000, est due principalement à la mise en oeuvre de
l'accord salarial dans la fonction publique du 10 février 1998 :
les crédits du chapitre 31-90 "
Rémunération des
personnels
" augmentent en effet de 23,6 millions de francs dans le
PLF 2000, soit une progression de 3,4 %.
-
la
réduction des dépenses consacrées au fonctionnement des
services
, dont le montant baisse de 6,2 % et s'établit à
181,1 millions de francs (soit 11,9 millions de francs de moins que dans la LFI
pour 1999).
Cette diminution résulte de la réforme du
service militaire
adapté
(SMA). En effet, les crédits du chapitre 34-42
" SMA-alimentation " baissent de 6,8 millions de francs (-14,16%)
tandis que les crédits consacrés au SMA au sein du chapitre 34-96
" Fonctionnement des services " diminuent pour leur part de 6
millions de francs. Le secrétariat d'Etat explique la réduction
de ces crédits par celle des effectifs.
Au sein des dépenses de fonctionnement, il convient de signaler que,
comme les années précédentes,
le chapitre 37-91
" Frais de justice. Réparations civiles
" reste
considérablement sous doté
. L'enveloppe habituelle de 3
millions de francs est reconduite alors que, en 1998, le montant total des
dépenses de ce chapitre s'est élevé à 161,6
millions de francs et que, pour 1999, elles s'élevaient
déjà à 35,6 millions de francs au 30 juin.
2. L'action en faveur des collectivités locales
Le
montant des actions en faveur des collectivités locales d'outre-mer
avait baissé de 47 % entre 1998 et 1999, principalement en raison de la
fin de la prise en compte par le budget du secrétariat d'Etat de la
subvention au fonds intercommunal de péréquation de la
Polynésie française.
Cette subvention devait théoriquement être supportée par le
budget du ministère de la défense à compter de 1999, au
titre des compensations accordées en contrepartie de l'arrêt des
essais nucléaires.
Les documents budgétaires affichent une forte augmentation de l'effort
financier du secrétariat d'Etat en faveur des collectivités
locales d'outre-mer : 525 millions de francs, soit 3,8 fois plus qu'en
1999.
En réalité, cette augmentation est due au transfert de
crédits figurant auparavant au budget d'autres ministères. A
structure constante, le montant des crédits de cet agrégat
diminue.
Une baisse à structure constante
A structure constante, le montant des actions en faveur des
collectivités locales diminue à nouveau en 2000, de 20,6 %, et
s'établit à 119,3 millions de francs contre 135 en 1999.
Cette réduction ne traduit pas une réduction de l'effort
financier de l'Etat mais :
- la fin des versements effectués au profit du fonds intercommunal de
péréquation de Nouvelle-Calédonie en application d'une
décision de justice de 1996 (5,9 millions de francs en 1999) ;
- l'écart traditionnel entre le montant des crédits du chapitre
67-51 "
Travaux divers d'intérêt local
" en loi
de finances initiale et le montant inscrit dans le PLF de l'année
suivante. Ce chapitre sera, à n'en pas douter, abondé au cours de
la discussion budgétaire.
En outre, il convient de rappeler que plusieurs des chapitres composant cet
agrégat (36-01 "
Equipement administratif
",
41-91 "
Subventions facultatives
" sont abondés
en cours de gestion par des crédits en provenance du chapitre 68-93
"
Actions diverses pour le développement de la
Nouvelle-Calédonie
".
La traduction financière des dispositions de la loi organique du
19 mars 1999 sur la Nouvelle-Calédonie
La loi organique du 19 mars 1999 a organisé le transfert de certaines
compétences à la Nouvelle-Calédonie en matière de
commerce extérieur, de droit du travail, d'enseignement scolaire, de
jeunesse et sport et de mines et d'énergie.
Il est prévu que l'Etat compense à la Nouvelle-Calédonie
les charges résultant de ces compétences nouvelles en versant une
dotation globale de compensation (DGC). L'Etat versera dorénavant
également aux communes de Nouvelle-Calédonie une dotation globale
de fonctionnement (DGF) destinée à leur donner les moyen
d'exercer leurs compétences dans le domaine sanitaire et social et le
domaine de l'enseignement.
La DGC et la DGF sont regroupées au sein d'un nouveau chapitre 41-56
"
Dotations globales pour la Nouvelle-Calédonie
",
doté de 405,7 millions de francs (11,7 millions de francs pour la
DGC et 393,5 millions de francs pour la DGF).
Ces crédits ne doivent pas être considérés comme
un effort supplémentaire de l'Etat en faveur de l'outre-mer.
En effet, les crédits du chapitre 41-56 proviennent soit de transferts
en provenance du budget des ministères qui exerçaient auparavant
les compétences aujourd'hui transférées à la
Nouvelle-Calédonie, soit de transferts internes au budget du
secrétariat d'Etat à l'outre-mer.
L'origine des crédits de la dotation globale de
compensation
L'origine des crédits de la dotation globale de fonctionnement
En revanche, l'entrée en vigueur de la loi organique a conduit à une augmentation importante de l'effort de l'Etat en faveur de l'équipement administratif des TOM et de la Nouvelle-Calédonie (chapitre 57-91), qui passe de 3,3 millions de francs à 7,2 millions de francs.
3. L'action en faveur de l'emploi et de l'insertion sociale
Les
dépenses en faveur de l'emploi et de l'insertion sociale
représentent la moitié du budget du secrétariat d'Etat
à l'outre-mer. Leur montant s'établit dans le projet de loi de
finances pour 2000 à 3,1 milliards de francs , en hausse de 13,5%.
En réalité, à structure constante, l'augmentation n'est
que de 1,5 %.
Les crédits de cet agrégat sont répartis en trois grandes
masses :
Le fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer (FEDOM)
A lui seul, le FEDOM concentre plus du tiers des crédits du
secrétariat d'Etat, soit 2,1 milliards de francs, en hausse de 16 %.
Cette hausse est artificielle
. Elle est due au transfert au
secrétariat d'Etat du financement de 7000 contrats emplois
consolidés (CEC), soit 291,7 millions de francs, auparavant
assuré par le budget du ministère de l'emploi et de la
solidarité.
Ce rapatriement correspond à un souci de rationalisation. En effet, les
crédits des contrats emplois solidarité (CES), aujourd'hui mis en
extinction au profit des CEC, se trouvent déjà au budget de
l'outre-mer. Ils constituent d'ailleurs la plus grosse fraction des
crédits du FEDOM, avec 661,5 millions de francs en 2000, en très
légère baisse.
L'évolution des crédits du FEDOM est également
marquée par la montée en charge du dispositif des emplois-jeunes.
Outre-mer, c'est en effet le secrétariat d'Etat, et non le
ministère de l'emploi et de la solidarité, qui assure la prise en
charge de 80 % des rémunérations des emplois-jeunes outre-mer.
Les crédits correspondants s'établissaient à 300 millions
de francs en 1998 et à 445 millions de francs en 1999. En 2000, cette
enveloppe sera portée à 615,5 millions de francs.
Le coût des 11.000 emplois-jeunes outre-mer, dont 3000 nouveaux, ne sera
pas couvert par les crédits ouverts au sein du FEDOM. Leur financement
sera cependant permis par un report de 180 millions de francs non
consommés en 1999. Ce report fait suite à un report de 122
millions de francs de l'exercice 1998 sur l'exercice 1999.
En 1998 et en 1999, plus du tiers des crédits consacrés aux
emplois-jeunes par la loi de finances n'ont pas été
consommés
. Il semble donc que le gouvernement éprouve des
difficultés à trouver les candidats afin de pourvoir à
l'ensemble des créations d'emplois-jeunes prévues.
Les crédits consacrés aux contrats d'accès à
l'emploi (CAE) accusent pour leur part une baisse importante, de 28 %, dans le
projet de loi de finances pour 2000 et s'établissent à 354
millions de francs. Cette baisse serait due à la réduction du
coût unitaire des CAE. Le nombre de CAE augmenterait quant à lui
légèrement, de 7000 à 7500.
Pour mémoire, il convient de rappeler que le FEDOM
bénéficie également en cours d'exercice de crédits
en provenance de la " créance de proratisation " du RMI. Cet
abondement s'est élevé à 192 millions de francs en 1998.
La " créance de proratisation "
Le chapitre 46-01 "
Action d'insertion en faveur des
bénéficiaires du revenu minimum d'insertion
" est un
chapitre " réservoir ", dont le montant correspond à la
" créance de proratisation " du RMI.
Autrement dit, le montant des crédits inscrits sur ce chapitre
correspond à la différence entre le coût théorique
du RMI outre-mer et son coût réel, qui est inférieur
puisque le RMI versé en métropole est supérieur de 20 %
à celui versé outre-mer.
Les crédits de la créance sont répartis en cours
d'année entre les différents chapitres du budget et son
destinés à financer des actions d'insertion en faveur des
bénéficiaires du RMI. La créance alimente principalement
les aides au logement, inscrites au chapitre 65-01.
Le montant en 2000 de la créance de proratisation s'élève
à 861,5 millions de francs, en hausse de 5,7 %. Compte tenu du fait
que le RMI n'a été revalorisé que de 3 %, il faut en
conclure que le nombre de bénéficiaires du RMI dans les
départements d'outre-mer augmente.
L'action sociale et culturelle
L'action sociale et culturelle (chapitre 46-94) est l'un des seuls domaines
(avec la montée en charge des emplois-jeunes et les aides au logement)
dans lequel le secrétariat d'Etat à l'outre-mer disposera de
moyen réellement nouveaux en 2000.
Les crédits consacrés aux activités sportives, culturelles
et de jeunesse dans les DOM et dans les TOM passeront de 4 à 9,75
millions de francs. Ils serviront notamment à alimenter un nouveau
" fonds d'aide aux échanges artistiques et culturels ", dont
la création répond à la volonté du ministère
de la culture et du secrétariat d'Etat à l'outre-mer de mettre en
commun des moyens.
Il conviendra de se prononcer l'année prochaine sur l'opportunité
de l'augmentation des crédits de l'action culturelle et sociale,
étant donné l'augmentation de 20 millions de francs des reports
de crédits sur le chapitre entre 1998 et 1999.
Le périmètre du chapitre 46-94 sera modifié en 2000 par
l'inscription de 44,7 millions de francs, destinés au financement des
contrats emploi consolidés à Mayotte. Ces crédits
figuraient auparavant au budget de l'emploi et de la solidarité. Ils
n'ont pas pu être intégrés au FEDOM, Mayotte n'étant
pas un DOM.
Le montant des crédits de l'action culturelle et sociale est
traditionnellement majoré en cours d'exercice par des crédits du
fonds social européen (FSE). Ce fonds de concours, dont le montant s'est
établi à 60 millions de francs en 1998 et 53 millions de
francs en 1999, sert à financer des dépenses de formation
professionnelle dans le cadre du service militaire adapté.
4. L'action en faveur du logement
Depuis
1996, l'Etat a regroupé en un chapitre budgétaire unique
l'ensemble de ses aides à la pierre pour le logement social outre-mer au
sein d'un chapitre budgétaire unique, le 65-01 (la " LBU ",
ligne budgétaire unique).
Les crédits de ce chapitre avaient fortement augmenté dans la loi
de finances pour 1999 puisqu'ils avaient été majorés de
57,8 % , pour s'établir à 897 millions de francs. Au 30 juin
1999, près de 80 % des crédits du chapitre avaient
été ordonnancés.
En 2000, le gouvernement poursuit son effort et porte le montant des
crédits de la LBU à 918 millions de francs.
Il est déjà prévu que 650 millions de francs en provenance
de la " créance de proratisation " seront
transférés à la LBU en cours d'exercice.
5. L'action en faveur de l'investissement et du développement économique et social
Outre la
LBU, les subventions d'investissement accordées par le
secrétariat d'Etat à l'outre-mer se composent essentiellement des
crédits consacrés à l'équipement administratif, des
crédits du fonds d'investissement des départements d'outre-mer
(FIDOM) et du fonds d'investissement pour le développement
économique et social (FIDES).
Les crédits consacrés à l'équipement administratif
(chapitre 57-91) augmentent de 19,4 % dans le projet de loi de finances
pour 2000 et passent de 18 millions de francs à 21,5 millions de francs.
Cette augmentation s'explique principalement par l'augmentation de 3,9 millions
de francs des subventions d'équipement aux territoires d'outre-mer et
à la Nouvelle-Calédonie (article 20). Elle résulte
des dispositions de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la
Nouvelle-Calédonie. Pourtant, entre 1998 et 1999, les reports de
crédits sur cet article avaient augmenté de 11 millions de
francs. L'augmentation des reports sur le chapitre s'établissait quand
à elle à 9,7 millions de francs, soit une progression de
40 %.
Le FIDOM finance surtout la participation de l'Etat aux opérations
inscrites aux contrat de plan Etat-régions et à la convention de
développement de Mayotte. Les crédits du FIDOM augmentent en 2000
(+ 9,5 %, à 217,5 millions de francs), après avoir connu une
baisse continue depuis 1995.
Comme en 1999, la section locale du FIDES n'est pas dotée dans le projet
de loi de finances pour 2000, alors que les reports de crédits existants
ont tous été consommés en 1999, et ce dès le 30
juin. Pourtant, le taux de consommation des crédits de la section locale
est nettement supérieur à celui de la section
générale.
Les ressources du FIDES augmentent également de 13,01 % et passent de
127 à 143 millions de francs.
L'explication de la baisse de 1,2% des dépenses en capital du
secrétariat d'Etat à l'outre-mer provient de la réduction
de près de 70 millions de francs des crédits du chapitre
68-93 "
Actions diverses pour le développement de la
Nouvelle-Calédonie
".
Ce chapitre est un " réservoir ", dont les crédits sont
en partie transférés en cours d'exercice vers des chapitres des
titres III et IV. L'autre partie alimente le fonds d'équipement pour la
Nouvelle-Calédonie (FEPNC). La baisse de 18 % de son montant en 2000,
pour un total de 320 millions de francs, s'explique en partie par
l'incorporation d'une partie de ces crédits à la DGF de
Nouvelle-Calédonie.
B. LES FONDS STRUCTURELS EUROPÉENS
Les
quatre régions d'outre-mer seront les seules régions
françaises à être éligibles à l'objectif 1
des fonds structurels européens pour la période 2000-2006.
L'enveloppe qui leur sera attribuée s'élève à
21,3 milliards de francs sur sept ans, donc environ 3 milliards de francs
par an.
Compte tenu du montant élevé de cette enveloppe, et de la
nécessité pour les Etats-membres de compléter les
financements européens par des " contreparties nationales ",
les régions d'outre-mer bénéficieront d'une enveloppe
spéciale au sein des contrats de plan Etat-région 2000-2006, dont
le montant s'établit à 4 milliards de francs.
Au total, le montant des sommes consacrés par l'Etat dans les
départements d'outre-mer dans le cadre des contrats de plan
s'élève à 5,6 milliards de francs sur sept ans.