EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 27 octobre 1999 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen des crédits du budget de l'agriculture et de la pêche pour 2000 et de l'article 64 rattaché, sur le rapport de M. Joël Bourdin, rapporteur spécial .

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a indiqué que le budget de l'agriculture et de la pêche n'était pas, pour le Gouvernement, une priorité. Il a souligné qu'en apparence le projet de budget proposé pour 2000 diminuait de 13,5 % mais qu'en réalité cette réduction, hors subvention au budget des prestations sociales agricoles (BAPSA) et à périmètre constant, n'était que de 0,5 % par rapport aux crédits votés pour 1999. Parmi les modifications de structure de ce budget, il a indiqué que la subvention budgétaire d'équilibre au BAPSA était désormais inscrite au budget des charges communes et que le compte spécial du Trésor " fonds forestier national " (FFN) était supprimé, et ses dépenses intégrées dans le budget de l'agriculture et de la pêche.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a indiqué que les dépenses ordinaires augmentaient fortement sous l'impact de diverses mesures de politique générale de la fonction publique, mais aussi de décisions propres au ministère de l'agriculture. S'agissant des dépenses d'intervention il a mentionné leur diminution, essentiellement due à des modifications de périmètre ainsi qu'à la diminution automatique des charges de bonification. Il a souligné l'augmentation rapide des dépenses en capital en raison de la budgétisation du FFN et d'un effort accru en faveur de l'enseignement et de la recherche agricoles.

Il a ensuite commenté les quatre priorités du ministre de l'agriculture et de la pêche pour 2000. Sur le financement des contrats territoriaux d'exploitation (CTE), il s'est dit en désaccord avec les modalités de financement retenues et notamment le redéploiement de crédits, au détriment d'actions en faveur de l'installation en agriculture, et la modulation des aides agricoles communautaires. Sur le financement des actions en faveur de la forêt et les crédits d'amélioration de la qualité sanitaire, il s'est dit largement en accord avec les orientations proposées. Enfin, s'agissant de la formation et de l'emploi des jeunes, il a reconnu que l'effort était indéniable en matière d'enseignement agricole mais il a estimé que le signal donné en matière d'installation était très mauvais, dans la mesure où le fonds d'installation en agriculture créé il y a moins de deux ans était asséché en 2000 et les crédits de la dotation aux jeunes agriculteurs amputés d'un quart.

A l'issue de cette présentation générale, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a rappelé à ses collègues qu'un article de la loi de finances pour 1997 faisait obligation au Gouvernement de déposer un rapport sur l'incidence pour le budget de l'Etat du programme de maîtrise des pollutions agricoles (PMPOA). Soulignant que le Parlement n'en avait jamais été destinataire et rappelant que le PMPOA allait avoir un impact budgétaire considérable, il a estimé qu'il serait juste que la représentation nationale ait accès aux conclusions d'un rapport récemment remis sur le même sujet et actuellement tenu confidentiel.

S'agissant de la fiscalité agricole, il a répété son souhait de voir le Gouvernement déboucher sur des propositions concrètes à la suite du dépôt prévu en mars 2000 du rapport d'un parlementaire en mission. Il a rappelé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 prévoyait la création d'un nouveau compartiment de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) concernant les produits phytosanitaires. Il s'est étonné que le produit de cette taxe prélevée sur les agriculteurs ne retourne pas à des actions de résorption des pollutions agricoles, mais aille financer la réduction du temps de travail.

Enfin, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a critiqué les modalités pratiques de modulation des aides communautaires destinée à financer les CTE l'an prochain. Remarquant que le revenu tiré des exploitations n'entrait pas dans les critères retenus, il a estimé que le système proposé était inéquitable et potentiellement dangereux pour la survie de certaines exploitations.

En conséquence de ces observations, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, a proposé le rejet des crédits de l'agriculture et de la pêche.

M. Alain Gérard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur les crédits de la pêche, a indiqué que les crédits de ce secteur était en hausse modérée et que sur ce point le projet de budget était tout à fait convenable.

M. Bernard Dussaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur les crédits des industries agro-alimentaires, a noté quant à lui que le projet de budget contenait des efforts en matière de qualité sanitaire des aliments. Il a toutefois regretté la diminution des aides accordées à la Société pour l'expansion des ventes agro-alimentaires françaises (Sopexa).

M. François Trucy a souhaité avoir de plus amples informations sur les crédits de la recherche agricole et sur la qualité générale de celle-ci.

Au sujet de la pêche, M. Michel Sergent a alerté le rapporteur spécial sur des cas où la taxe sur la valeur ajoutée était payée deux fois sur les produits. Il a également souhaité connaître le sentiment du rapporteur spécial sur la possibilité d'instaurer comme en agriculture, une Charte de l'installation pour les jeunes pêcheurs.

M. Joseph Ostermann s'est inquiété d'un possible transfert des charges vers les collectivités locales suite au désengagement apparent de l'Etat sur la question des installations en agriculture. Il a également évoqué le coût très important du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole.

S'agissant de la disparition du compte spécial du Trésor " fonds forestier national ", M. Roland du Luart a souhaité connaître l'avis du rapporteur spécial. Il a également demandé s'il lui semblait garanti que les mêmes actions continuent d'être financées dans les années à venir.

M. Jacques Oudin a critiqué l'instauration de la TGAP qui opérera selon lui une confiscation de ressources issues du monde agricole au détriment d'actions de résorption des pollutions agricoles. Qualifiant cet impôt de nouvelle " gabelle ", il a estimé qu'il constituait une aberration à bien des points de vue, fiscal, économique, environnemental et agricole. S'agissant du secteur de la pêche et évoquant en particulier la question des filets maillants dérivants, il a estimé que les situations entre pays européens étaient contrastées et souvent inéquitables. Il a évoqué les négociations en cours dans le cadre du cinquième plan d'orientation de la pêche (POP V) ainsi que les difficultés du mareyage en France.

M. Philippe Adnot a souhaité connaître le sentiment du rapporteur spécial sur la question de l'embargo décidé par la France sur le boeuf britannique et des menaces de boycott qui y répondent outre-Manche. Il a également évoqué la possibilité d'intégrer un nouveau critère dans les calculs de modulation des aides agricoles européennes, celui de la marge brute standard.

M. René Ballayer a tenu à savoir ce que recouvrait l'article 10 " Anciens harkis " du chapitre 35-92 " Forêts : travaux d'entretien ", doté de 60 millions de francs.

M. Michel Moreigne s'est dit étonné des apparentes contradictions de la note de présentation de M. Joël Bourdin quant à l'évolution générale des crédits étudiés. Il a tenu en outre à connaître les aides à l'acquisition de forêts dont pouvaient bénéficier les communes forestières.

M. Jacques Pelletier a demandé au rapporteur spécial quelques précisions sur l'insuffisance des effectifs dans l'enseignement agricole public.

M. Alain Lambert, président , s'est dit inquiet de la disparition des crédits destinés à l'installation des jeunes en agriculture dans le fonds de financement des CTE.

En réponse à MM. Alain Gérard, Michel Sergent et Jacques Oudin au sujet des crédits de la pêche, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , s'est engagé à réserver un développement à ce secteur dans son rapport écrit. Il a trouvé intéressante l'idée de M. Michel Sergent de conclure une Charte d'installation spécifique à la pêche, mais a mis en garde ce dernier contre les désillusions, estimant que, quatre ans après la conclusion de la Charte d'installation en agriculture la diminution du nombre des installations annuelles se poursuivait.

En réponse à M. Bernard Dussaut, il a indiqué qu'il partageait son appréciation sur les crédits alloués au secteur des industries agro-alimentaires et en particulier à la Sopexa. Il a évoqué la possibilité de mener en 2000 une mission de contrôle budgétaire sur les crédits dont bénéficie cette société.

En réponse à M. François Trucy, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a indiqué que la recherche agricole faisait l'objet dans ce projet de budget pour 2000 d'une attention particulière. Il a indiqué qu'il portait un jugement tout à fait positif sur sa qualité générale.

En réponse au président et à M. Joseph Ostermann, il s'est dit préoccupé comme eux de l'évolution des crédits destinés à l'installation des jeunes en agriculture. Il a rappelé que le fonds de financement des CTE devrait financer, entre autres, des installations, mais il a estimé que le signal adressé aux jeunes qui avaient le projet de s'installer était très mauvais.

En réponse à M. Roland du Luart, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a indiqué que la disparition du fonds forestier national permettait de ne pas faire peser le développement de la politique forestière de la France sur les acteurs de la filière. Il a souligné que désormais l'Etat assumait budgétairement les actions de l'ancien FFN mais qu'en contrepartie cela signifiait que ces crédits n'étaient pas à l'abri de la régulation budgétaire et qu'il conviendrait de demander des garanties de pérennité de ces actions au ministre de l'agriculture et de la pêche.

Au sujet de la TGAP et en particulier de l'intervention de M. Jacques Oudin, il s'est dit parfaitement en accord avec ce dernier, estimant notamment que l'instauration d'une taxation des produits phytosanitaires pour financer la politique des 35 heures relevaient selon lui de la confiscation de ressources.

En réponse à M. Philippe Adnot, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , s'est déclaré très prudent sur les jugements que l'on pouvait porter sur la crise actuelle entre la France et la Grande-Bretagne. Il a toutefois estimé que les agriculteurs apparaissaient comme pris en otages par les embargos et boycotts réciproques. Au sujet du critère de la marge brute standard, il a indiqué qu'il permettrait de prendre en compte le niveau de revenu dans la modulation des aides mais que le jugeant trop complexe, le Gouvernement ne l'avait pas retenu pour 2000.

En réponse à M. René Ballayer, il a indiqué qu'il demanderait des explications complémentaires aux services du ministère, mais qu'il pouvait d'ores et déjà indiquer qu'il s'agissait de crédits nécessaires aux travaux d'entretien de la forêt, en particulier méditerranéenne, qui sont notamment assurés par d'anciens harkis.

En réponse à M. Michel Moreigne, M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a rappelé que les crédits du fascicule diminuaient de 13,5 % et que, hors subvention au budget annexe des prestations agricoles et à périmètre constant, ils diminuaient de 0,5 %. Il a toutefois ajouté qu'il ne s'arrêtait pas à la seule évolution des crédits pour juger le budget, mais qu'il tenait compte de la qualité de la gestion, de l'exécution budgétaire et des résultats obtenus. A cet égard, a-t-il rappelé, alors que les coûts de fonctionnement du ministère augmentent sensiblement, les retombées de son action pour le monde agricole diminuent.

En réponse à M. Jacques Pelletier, il a rappelé que l'enseignement agricole faisait l'objet d'un effort budgétaire important avec, pour accompagner l'ouverture de 72 classes nouvelles, la création de 230 emplois supplémentaires.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de l'agriculture et de la pêche pour 2000.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial , a ensuite présenté l'article 64 rattaché au budget de l'agriculture et de la pêche qui vise à proroger d'un an les majorations des taux des contributions additionnelles dues par les agriculteurs au profit du fonds national de garantie contre les calamités agricoles. Etant donnée la bonne santé financière du fonds et la faible participation de l'Etat à son financement alors qu'elle devrait être à parité avec le financement professionnel, il a estimé plus équitable de ne reconduire les majorations qu'à des taux réduits de moitié et a présenté à la Commission un amendement en ce sens.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter cet article ainsi amendé.

Réunie le mercredi 27 octobre 1999 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, sur les crédits de l'agriculture et de la pêche pour 2000, et sur l'article 64 rattaché.



Elle a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de l'agriculture et de la pêche pour 2000 et d' amender l'article 64 rattaché.

Lors de sa réunion du jeudi 25 novembre 1999, elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification les articles 64A, 64B, 64C, 64D et 64 bis nouveaux , insérés par l'Assemblée nationale, et confirmé sa position sur ces crédits , après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page