II. LA NÉCESSITÉ DE PROCÉDER À UN NOUVEL AJUSTEMENT DE LA RÉPARTITION DES SIÈGES POUR GARANTIR LE PRINCIPE CONSTITUTIONNEL DE L'ÉGALITÉ DU SUFFRAGE
A. LES CRITÈRES RETENUS PAR LA JURISPRUDENCE POUR GARANTIR LE PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DU SUFFRAGE
Le
Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 87-227 DC du
7 juillet 1987 relative aux modifications apportées au tableau des
secteurs pour l'élection des conseillers municipaux de Marseille, a
précisé que "
l'organe délibérant d'une
commune de la République doit être élu sur des bases
essentiellement démographiques résultant d'un recensement
récent ; que, s'il ne s'ensuit pas que la répartition des
sièges doive être nécessairement proportionnelle à
la population de chaque secteur ni qu'il ne puisse être tenu compte
d'autres impératifs d'intérêt général, ces
considérations ne peuvent intervenir que dans une mesure
limitée
".
Ces critères d'appréciation du respect du principe
d'égalité du suffrage avaient déjà
été affirmés dans sa décision n° 85-196 DC du
8 août 1985 relative à la loi sur l'évolution de la
Nouvelle-Calédonie : le Conseil constitutionnel avait alors reconnu
"
la possibilité pour le législateur, en
conformité avec l'article 74 de la Constitution, d'instituer et de
délimiter des régions dans le cadre de l'organisation
particulière d'un territoire d'outre-mer en tenant compte de tous les
éléments d'appréciation, notamment de la
répartition géographique des populations
" et
estimé que "
le congrès, dont le rôle comme organe
délibérant d'un territoire d'outre-mer ne se limite pas à
la simple administration de ce territoire doit, pour être
représentatif du territoire et de ses habitants dans le respect de
l'article 3 de la Constitution, être élu sur des bases
essentiellement démographiques ; que s'il ne s'ensuit pas que cette
représentation doive être nécessairement proportionnelle
à la population de chaque région ni qu'il ne puisse être
tenu compte d'autres impératifs d'intérêt
général, ces considérations ne peuvent cependant
intervenir que dans une mesure limitée
".
Il résulte de cette jurisprudence que le respect du principe
constitutionnel d'égalité du suffrage implique :
- la prise en considération des évolutions démographiques
récentes ;
- la prépondérance du critère démographique pour la
répartition des sièges ;
- la possibilité de pondérer cette répartition en prenant
en compte, dans une mesure limitée, d'autres impératifs
d'intérêt général.
A l'aune de ces critères, le juge constitutionnel vérifie que
"
les écarts de représentation entre les secteurs selon
l'importance respective de leur population telle qu'elle ressort du dernier
recensement, ne sont ni manifestement injustifiables ni disproportionnés
de manière excessive
" ; il exerce donc en la
matière un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation
(décision n° 87-227 DC précitée). Le Conseil
d'État a eu plusieurs fois l'occasion de faire application desdits
critères concernant la modification de la délimitation des
circonscriptions cantonales (arrêts d'assemblée du 13 novembre
1998, Commune d'Armoy, M. Le Déaut, M. Amalric et Commune de
Saint-Louis ; arrêt du 6 janvier 1999, M. Lavaurs), estimant que de
"
telles opérations ne peuvent légalement augmenter les
disparités d'ordre démographique existantes
".