Section 4
-
Branche accidents du travail
Art.
26 A (nouveau)
(art. 40 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999)
Prolongation du
délai de réouverture des droits
pour les victimes de l'amiante
Objet : L'Assemblée nationale a introduit en
première lecture cet article additionnel, à l'initiative de M.
Claude Evin, rapporteur pour avis, de Mme Jacqueline Fraysse et les
membres du groupe communiste. Celui-ci vise à prolonger jusqu'à
la fin de l'année 2001 le délai ouvert aux victimes de l'amiante
pour faire reconnaître leur maladie en tant que maladie
professionnelle.
D'une manière générale, depuis l'entrée en vigueur
de
l'article 40 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999
, la reconnaissance du caractère professionnel
d'une maladie doit obligatoirement être effectuée dans les
deux
ans
à compter du jour de la date à laquelle la victime a
été informée par un certificat médical du lien
possible entre sa maladie et une activité professionnelle (et non plus
de la date de la première constatation de la maladie, comme
c'était le cas avant 1999).
Toutefois, concernant les
maladies liées à l'inhalation de
poussière d'amiante
, compte tenu de la progression des connaissances
médicales et de l'instauration du nouveau dispositif de cessation
anticipée d'activité, il a été prévu
une
levée du délai de prescription
pour toutes les personnes
victimes d'une maladie de l'amiante constatée médicalement entre
le 1
er
janvier 1997 et le 28 décembre 1999, date
d'entrée en vigueur de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999
(III de l'article 40 de la loi du
23 décembre 1998).
Les victimes peuvent donc faire valoir leurs droits aux indemnités
prévues en cas de maladie professionnelle dans des conditions
améliorées par rapport au droit commun des délais de
forclusion.
Toutefois, cette réouverture des droits n'est pas
définitive : la procédure de reconnaissance de la maladie
professionnelle doit intervenir dans les deux ans de la publication de la loi
de financement de la sécurité sociale pour 1999,
c'est-à-dire jusqu'au 28 décembre 2000, ladite loi ayant
été publiée au Journal Officiel du 27 décembre 1998.
Le présent article propose de
porter de deux à trois ans
ce délai de réouverture des demandes, soit de la fin 2000
à la fin de l'année 2001.
Cette prolongation du délai, même si elle est prise de
manière anticipée avant la forclusion du délai
actuellement en vigueur, ne paraît pas injustifiée dans la mesure
où le dispositif de préretraite a été effectivement
mis en place en mars 1999 et où il faut sans doute un certain
délai pour informer les personnes frappées par une maladie
liée à l'amiante. En outre, l'article 26
infra
ouvre le
dispositif de préretraite à de nouvelles catégories de
travailleurs en contact avec l'amiante qui, informées de leurs nouveaux
droits, souhaiteront faire reconnaître le caractère professionnel
de leur maladie pour bénéficier éventuellement de la
retraite anticipée dès 50 ans.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art.
26
(art. 41 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1999)
Extension du bénéfice de l'allocation de
cessation d'activité
pour les victimes de l'amiante
Objet : L'Assemblée nationale à
l'exception
d'un amendement purement rédactionnel a adopté sans modification
cet article qui vise à compléter le dispositif adopté dans
la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999
prévoyant un dispositif de cessation anticipée d'activité
en faveur des salariés victimes de l'amiante ou ayant travaillé
au contact de ce matériau.
Le dispositif de préretraite spécifique pour les victimes de
l'amiante résulte de
l'article 41 de la loi n° 98-1194 du
23 décembre 1998
.
Tout en approuvant la création de ce dispositif, -qui n'est pas
contestable maintenant que sont mieux connus les dangers liés au contact
avec l'amiante-, votre commission avait néanmoins regretté, sur
le plan procédural, qu'un dispositif de cette importance eut
été annoncé par le Gouvernement au cours d'une
conférence de presse organisée le surlendemain de l'examen du
projet de loi en première lecture par le Sénat et introduit en
nouvelle lecture par l'Assemblée nationale après échec de
la commission mixte paritaire.
Sans entrer dans le détail du dispositif, il est nécessaire d'en
rappeler les grandes lignes.
L'allocation de cessation anticipée d'activité est ouverte
à
deux catégories de salariés
:
- ceux qui ont contracté une maladie professionnelle
provoquée par l'amiante telle que définie par arrêté
du 29 mars 1999 : asbestose, dégénérescence maligne
broncho-pulmonaire, mésothéliose, autres tumeurs pleurales
primitives et cancers broncho-pulmonaire primitifs ;
- ceux qui ont travaillé dans un établissement où
étaient
" fabriqués des matériaux contenant de
l'amiante "
: ces établissements ainsi que les
périodes de travail à risque sont fixés par
arrêté ministériel.
Pour la première catégorie, celle des salariés directement
victimes de l'amiante, l'allocation de cessation anticipée
d'activité est versée dès l'âge de 50 ans
jusqu'à l'âge de liquidation de la retraite.
S'agissant des salariés des établissements en relation avec
l'amiante, l'âge du début du droit à l'allocation est
calculé en déduisant de l'âge légal de départ
à la retraite, le tiers des années d'activités
passées dans l'établissement en cause. L'allocation ne peut
être versée avant 50 ans.
L'allocation versée équivaut à
l'allocation de
préretraite
accordée dans le cadre du Fonds national pour
l'emploi : elle est donc proportionnelle au niveau des dernières
rémunérations versées au salarié en activité
(65 % du dernier salaire jusqu'au plafond de la sécurité
sociale et 50 % au-delà). L'allocation est versée
jusqu'à la date de calcul de la pension de vieillesse à taux
plein ou, au maximum, jusqu'à 65 ans. Elle n'est pas compatible
avec le maintien d'un revenu d'activité.
Imposable à la CRDS, à la cotisation maladie et à la CSG,
l'allocation assure le droit aux prestations de sécurité sociale
(assurance maladie et maternité, assurance vieillesse et régime
complémentaire).
Les caisses régionales d'assurance-maladie (CRAM) sont chargées
de la gestion et du versement de l'allocation.
Enfin, la double nature de ce dispositif, qui tient à la fois d'un
mécanisme de préretraite et de la compensation d'un risque
professionnel, se traduit par
une
structure de financement
hybride
.
Un Fonds spécifique, dont la gestion est assurée par la Caisse
des dépôts et consignations (CDC), a été
créé par l'article 41 susvisé, intitulé
" Fonds de cessation anticipée d'activité des
travailleurs de l'amiante ".
Ce Fonds est alimenté en recettes, à la fois par une contribution
de l'Etat et par un versement de la branche accidents du travail et maladies
professionnelles (AT-MP).
En dépense, ce Fonds comprend (
article du décret
n° 99-247 du 29 mars 1999)
:
- le versement de l'allocation ;
- les cotisations d'assurance volontaire d'assurance maladie ;
- les cotisations et contributions au titre de la couverture retraite
complémentaire ;
- les frais exposés par les organismes chargés de la gestion
de l'allocation c'est-à-dire les CRAM, la CDC, l'ACOSS et les organismes
de retraite complémentaire ;
- les frais de fonctionnement du fonds.
Le Fonds est géré par un
Conseil de surveillance
chargé du suivi et du contrôle de ses activités et de son
fonctionnement. Il peut formuler des observations auprès du ministre.
La mise en place des
textes d'application
s'est déroulée
dans des
conditions satisfaisantes
. Le dispositif est entré en
vigueur le 2 avril 1999, après qu'eut été publié
le décret n° 99-247 du 29 mars 1999,
complété par deux arrêtés du même jour, fixant
respectivement la liste des maladies professionnelles liées à
l'amiante et la liste des établissements ayant fabriqué des
matériaux contenant de l'amiante
27(
*
)
. Une circulaire d'application a
été prise en juin 1999
28(
*
)
.
Par ailleurs, un arrêté du 8 juillet 1999 a nommé les
personnes siégeant au conseil de surveillance du Fonds. Celui-ci est
présidé par M. Alain Deniel.
En revanche, on observera que l'arrêté, prévu par la loi,
qui doit fixer annuellement le montant des contributions de l'Etat et de la
branche AT-MP n'est pas paru pour 1999.
Le fonds a connu une
mise en place progressive
: au 1
er
octobre 1999 sur
2.636 demandes déposées, 309 donnaient lieu
au paiement d'une allocation et 1.187 étaient en cours d'instruction.
Il est à noter que pour 842 salariés des droits
potentiels ont été reconnus après instruction de la
demande ; toutefois, ces derniers n'avaient pas encore pris la
décision de démissionner au 1
er
octobre 1999. Enfin,
298 demandes ont été rejetées pour des questions
liées à l'âge, à la non reconnaissance de la maladie
en tant que maladie professionnelle causée par l'amiante, ou pour
défaut d'inscription de l'établissement sur la liste.
On notera que le coût moyen constaté de la dépense par
allocataire est de 10.000 francs par mois environ, 7.500 francs correspondant
au montant net de l'allocation et le solde étant imputable aux diverses
cotisations de sécurité sociale et de retraite
complémentaire prise en charge par le fonds.
S'agissant du coût global du dispositif, celui-ci reste encore difficile
à évaluer dans la mesure où celui-ci se situe encore dans
une période de montée en charge.
On rappellera qu'en novembre 1998, le besoin de financement au titre du fonds
était estimé à 400 millions de francs par an.
Pour 1999, le coût du fonctionnement du fonds devrait s'élever
à 130 millions de francs financés par une dotation
budgétaire. Le fonds a reçu 100 millions de francs en cours
d'année et 30 millions de francs sont prévus dans le cadre du
collectif budgétaire pour 1999. Le financement est entièrement
assuré par l'Etat conformément à l'annonce faite par Mme
Martine Aubry en novembre 1998, d'où l'absence d'arrêté de
répartition.
Pour 2000, le coût du dispositif en année pleine, à
législation constante, est évalué à 415 millions de
francs. La participation de l'Etat est assurée par l'affectation des
droits sur les tabacs à hauteur de 200 millions de francs (
art.
29 du projet de loi de finances pour 2000
).
I - Le dispositif proposé
Cet article étend le dispositif de cessation anticipée
d'activité de la loi du 23 décembre 1998
précitée à de nouvelles catégories de travailleurs
en relation avec l'utilisation professionnelle de l'amiante et valide certaines
précisions techniques nécessaires pour le calcul de l'allocation.
Le paragraphe I
étend la liste des établissements
concernés par le travail de l'amiante
.
Ne sont visés actuellement que les établissements
29(
*
)
" de fabrication de
matériaux "
contenant de l'amiante. Néanmoins,
au-delà de la production des matériaux de base, se posait la
question des industries, notamment liées aux bâtiments et travaux
publics, qui faisaient un usage fréquent de l'amiante en raison de son
caractère d'isolant thermique et électrique.
Cet article vise donc les établissements de flocage et de calorifugeage
à l'amiante ainsi que les établissements de construction et de
réparation navale
(1° du I
).
On rappellera que le
flocage
est un procédé consistant
à appliquer ou à projeter un adhésif et des fibres sur un
support ou un panneau. Le
calorifugeage
est la technique consistant
à appliquer un matériau qui empêche la déperdition
de chaleur.
S'agissant des chantiers navals, un arrêté ministériel
précisera la liste des métiers pour lesquels existe une
présomption de contact avec l'amiante (
3° du I
). Diverses
corporations traditionnelles seront recensées telles que celles des
ajusteurs, chaudronniers, menuisiers, etc.
Par coordination, il est indiqué que la liste des établissements
concernera, non seulement
" la fabrication "
de l'amiante,
mais également le
" traitement "
de celle-ci
(
2° du I
).
Le paragraphe II
étend le dispositif spécifique de
préretraite
aux dockers professionnels dans les ports où
était manipulée de l'amiante
.
Contrairement au dispositif précédent, il n'est pas
proposé de viser un établissement spécifique ou un
métier particulier. Un arrêté ministériel doit
déterminer la liste des ports dans lesquels les
" sacs d'amiante
étaient manipulés ".
Cette rédaction peut sembler relativement générale :
on rappellera toutefois que, s'agissant des établissements de
fabrication de l'amiante, l'ensemble des salariés sont couverts par le
dispositif, même s'ils n'ont pas été impliqués
directement dans le processus de traitement du produit.
Par ailleurs, le dispositif vise explicitement les cas de manipulation de sacs
d'amiante, parfois éventrés à fond de cale, alors
qu'aujourd'hui ce produit est déchargé en containers
hermétiques.
La prise en compte de la période de durée du travail dans le
port, permettant d'évaluer l'âge de l'anticipation de la retraite,
mentionnée dans l'article, devrait être effectuée selon les
mêmes modalités que celles prévues actuellement pour les
bénéficiaires de la préretraite.
Selon les informations fournies par le ministère de l'emploi et de la
solidarité, les ports de Dunkerque (70 % du trafic), du Havre et de
Saint-Nazaire ont été, pendant des années, les ports de
déchargement de la plus grande partie des fibres d'amiante
importée en France, sans précaution particulière au
demeurant pour leur maniement.
Le paragraphe III complète les règles de non-cumul
.
D'ores et déjà, l'article 41 précité
prévoit que le bénéficiaire doit cesser toute
activité professionnelle et qu'il ne peut cumuler son allocation de
cessation anticipée d'activité, ni avec une allocation
mentionnée à l'article L. 131-2 du code de la
sécurité sociale, qui comprend notamment les allocations de
chômage, ni avec un avantage de vieillesse ou d'invalidité.
Cet article ajoute les allocations de préretraite ou de cessation
anticipée d'activité. Il vise ainsi les préretraites du
Fonds national de l'emploi (FNE) et l'allocation de remplacement pour l'emploi
(ARPE) financée par l'UNEDIC.
Cette mesure d'interdiction du cumul est logique dans la mesure où les
dispositifs ont bien le même objet ; au demeurant, le niveau de la
prestation prévue en faveur des travailleurs de l'amiante a
été fixé par référence à celui des
préretraites du FNE. Cette conséquence du dispositif avait
déjà été intégrée à la
circulaire du 9 juin 1999.
Le paragraphe IV
améliore les conditions dans lesquelles
doit être apprécié
le niveau de
rémunération d'activité des
bénéficiaires
pour le calcul de leur allocation.
L'article 41 précité se référait à
" la moyenne actualisée des salaires mensuels bruts de la
dernière année d'activité salariée du
bénéficiaire "
.
En fait, il est apparu que les salariés concernés avaient pu
connaître une diminution de leur rémunération au cours de
leur dernière année de travail pour des raisons qui ne leur
étaient pas imputables.
Tel était le cas en particulier des salariés dans des entreprises
confrontées à des difficultés économiques ayant mis
en place des plans sociaux prévoyant le recours à des
préretraites, des congés de conversion ou un passage à
temps partiel.
Par ailleurs, il convient de neutraliser les périodes durant lesquelles
le salarié a bénéficié d'allocations de
chômage, d'une période d'activité à mi-temps
thérapeutique, de périodes de congés payés ou de
périodes de travail à temps partiel dans le cadre d'un CDD
(circulaire n° 332 du 9 juin 1999 précitée).
Afin de mettre à jour la législation en fonction des situations
rencontrées sur le terrain, le paragraphe IV propose donc de se
référer aux salaires correspondant aux
" douze derniers
mois d'activité salariée "
du bénéficiaire
tout en ne prenant pas en compte certaines périodes d'activité
ayant donné lieu à rémunération réduite,
formule qui recouvre
a priori
les périodes de travail à
temps partiel imposées au salarié. Un décret doit
préciser les cas en question.
II - La position de votre commission
Votre rapporteur tient tout d'abord à souligner que la modification du
champ du dispositif de la préretraite proposé par cet article
n'est pas un aménagement à la marge par rapport au texte
adopté en 1999, mais qu'elle entraînera bien
une augmentation
significative des bénéficiaires potentiels du dispositif
. A
titre indicatif, sous toutes réserves car on ne dispose pas
d'éléments précis sur la répartition par classe
d'âge des salariés concernés, on peut estimer qu'un peu
plus de 9.000 travailleurs supplémentaires pourraient être
concernés, principalement les salariés dans les chantiers navals
et des établissements de calorifugeage et de flocage. Les dockers
pourraient représenter, à titre purement indicatif, 800 à
900 salariés bénéficiaires potentiels.
Selon les estimations transmises à votre rapporteur, le coût de
l'extension pourrait varier, en première analyse, de 400 à 600
millions de francs, ce qui n'est certes pas négligeable.
Bien entendu,
votre commission ne conteste pas l'utilité sociale de
cet effort pour les travailleurs de l'amiante
, qui, du fait de leur
activité professionnelle, ont été placés dans une
situation de risque pathogène.
Pour autant, il convient de ne pas minorer la charge que représente un
tel dispositif qui aura sans doute encore vocation à s'élargir
à mesure que l'on connaîtra mieux les secteurs ayant
travaillé sur l'amiante.
Votre commission a adopté
trois amendements
à cet article.
Le
premier amendement
précise que les dockers concernés
par le mécanisme sont ceux qui ont travaillé dans les ports dans
lesquels étaient manipulés des sacs d'amiante "
en
quantité importante
".
Dans la mesure où l'administration n'est pas en mesure d'identifier les
dockers ayant travaillé précisément au déchargement
de ce produit, il apparaît utile de préciser aux autorités
ministérielles qui prendront le décret fixant la liste des ports
en question que le texte législatif entend viser les ports par lesquels
transitaient une part significative des importations ou des exportations
d'amiante en France.
Tel semble être l'esprit dans lequel il a été compris par
l'Assemblée nationale.
Le
deuxième amendement
vise à une amélioration du
sort des salariés victimes de l'amiante qui, en raison des maladies
qu'elle provoque, ont dû prendre un travail à temps partiel sur
une longue période.
Certains travailleurs, prématurément touchés par une
maladie liée à l'amiante, ont bénéficié
d'une pension d'invalidité modeste et ont continué à
travailler à temps partiel, ceci depuis plusieurs années, pour
assurer des revenus décents à leur famille.
Ils ne peuvent pas opter pour l'allocation de cessation anticipée
d'activité car celle-ci est calculée proportionnellement à
leurs revenus d'activité dont le niveau est évidemment faible,
alors que le versement de l'allocation est incompatible avec le maintien du
versement de la pension d'invalidité.
Cet amendement prévoit que le décret relatif à la
période de rémunération pourra
"
compenser
" les périodes d'activité à
rémunération réduite : il s'agit d'autoriser les
autorités administratives à ajouter le montant de la pension
d'invalidité au revenu d'activité à temps partiel pour
déterminer les revenus de base pour le calcul de la pension de
préretraite du salarié victime de l'amiante et travaillant
à temps réduit.
Le
troisième amendement
propose de préciser que le
financement du Fonds doit être assuré
" à
parité "
entre l'Etat et la branche " accidents du
travail ".
Le Fonds est, en l'espèce, un mécanisme nouveau puisqu'il revient
à indemniser par avance les victimes d'un risque potentiel : ce
fonds a une double nature : il est à la fois une réparation
particulière pour les victimes d'une maladie professionnelle et un
mécanisme de préretraite pour des salariés qui n'ont pas
tous le même risque de développer une maladie. Il semble donc
logique de garantir pour l'avenir le principe d'une clé de
répartition équilibrée entre les deux acteurs que sont
l'Etat et la branche " accidents du travail ".
Au demeurant, Mme Martine Aubry elle-même, lorsqu'elle avait
présenté le dispositif à l'Assemblée nationale en
novembre 1998, s'était placée dans l'hypothèse du
financement paritaire.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Art.
26 bis (nouveau)
(art. L. 434-2 du code de la sécurité
sociale)
Amélioration des modalités
d'indemnisation
des accidents du travail successifs
Objet : Cet article, introduit par l'Assemblée
nationale, par adoption à l'unanimité d'un amendement
présenté par le Gouvernement en seconde
délibération, a pour objet de prendre en compte, en cas
d'accidents du travail successifs, l'incapacité permanente due aux
accidents de travail antérieurs au moment de l'indemnisation du nouvel
accident.
I - Le dispositif proposé
L'indemnisation de l'incapacité permanente au titre d'un accident du
travail ou d'une maladie professionnelle
30(
*
)
est régie par les
articles
L. 434-1 et suivants du code de la sécurité sociale
.
L'article L. 434-1
concerne les incapacités permanentes
inférieures à 10 % : une telle incapacité donne
lieu au versement d'une indemnité en capital à la victime. Un
barème forfaitaire est fixé par décret en fonction du taux
d'incapacité.
L'article L. 434-2
porte sur les incapacités permanentes
supérieures à 10 %. Dans ce cas, la victime a droit à
une rente égale au salaire annuel multiplié par le taux
d'incapacité "
qui peut être réduit ou
augmenté en fonction de la gravité de celle-ci
".
Le quatrième alinéa de l'article L. 434-2 prévoit
certaines modalités de calcul de la rente en cas d'accidents successifs.
Il prévoit que, si le taux d'incapacité est égal ou
supérieur à 10 %, le total de la nouvelle rente et des
rentes allouées en réparation des accidents antérieurs, ne
peut être inférieur à la rente qui aurait été
calculée sur la base du taux de la réduction totale et du salaire
minimum.
Il est à noter que la rédaction dudit quatrième
alinéa est relativement restrictive :
- le texte ne vise que le cas de deux accidents ayant
entraîné une incapacité donnant lieu au versement d'une
rente, c'est-à-dire supérieure à 10 % ; il
n'envisage pas le cumul d'une rente avec une indemnité en capital ;
- il ne pose pas le principe du cumul des taux d'incapacité pour le
calcul de la rente, par référence au salaire de la victime
lorsqu'elle était en activité, mais il se borne à imposer
la référence à un salaire minimum.
La mise en oeuvre de ces dispositions en cas d'accidents successifs a
soulevé de nombreux contentieux de la part des accidentés du
travail.
La Cour de cassation, en assemblée plénière, a pris deux
décisions qui, s'appuyant sur le texte même du code de la
sécurité sociale, rejette le principe du cumul des taux
d'incapacité due à des accidents successifs :
- "
il résulte de l'article L. 434-1 du code de la
sécurité sociale que le taux d'incapacité permanente de la
victime est fixé
pour chaque accident
, sans que l'article L.
434-2, qui se borne à déterminer les modalités de calcul
de la dernière rente en cas d'accidents successifs, constitue une
dérogation à ce principe
" (
pourvoi n° 90-19910,
8 février 1993
) ;
- une indemnité en capital est attribuée à la victime
de tout accident du travail, qu'il soit unique ou survenu après d'autres
accidents professionnels "
dès lors que l'incapacité
permanente en résultant est inférieure à
10 %
" (
pourvoi n° 92-10451, assemblée
plénière, 8 février 1993
).
Il est vrai que le dispositif a des conséquences concrètes
précises difficiles à comprendre pour les victimes.
Concernant les " petits accidents ", lorsque se produisent deux
accidents correspondant à 7 % d'incapacité, il n'est pas
procédé au versement d'une rente calculée à partir
de 14 % d'incapacité ; en fait, chacun des deux accidents
donne lieu à l'attribution d'une indemnité en capital indemnisant
une incapacité à 7 %.
De même, si la personne a été victime d'un accident
provoquant une incapacité de 50 %, un nouvel accident
entraînant une incapacité de 9 % ne donnera pas lieu au
versement d'une rente calculée à partir de 59 %
d'incapacité permanente, mais au maintien de la rente à
50 %, assortie du versement d'une indemnité en capital indemnisant
9 % d'incapacité.
Enfin, concernant les accidents graves, la situation est compliquée par
le jeu des coefficients réducteurs ou multiplicateurs.
Conformément à
l'article R. 434-2 du code de la
sécurité sociale
, la rente à laquelle a droit la
victime tient compte du taux d'incapacité "
préalablement
réduit de moitié pour la partie de ce taux qui ne dépasse
pas 50 % et augmenté de la moitié pour la partie qui
excède 50 %
"
31(
*
)
.
Le fait de prendre en compte séparément deux accidents du travail
provoquant chacun une invalidité à 30 % (soit le salaire x
15 %) n'a donc pas les mêmes conséquences que de calculer une
indemnisation pour un accident du travail ayant provoqué 60 %
d'invalidité (salaire x 55 %).
Le I de l'article additionnel présenté par le Gouvernement
prévoit deux mesures nouvelles.
Tout d'abord, il s'agit de réparer l'injustice du système actuel
qui conduit à des inégalités de traitement entre les
victimes d'accidents successifs et les victimes d'un seul accident pour un taux
d'invalidité donnée. Ainsi, le mode de calcul est-il
modifié afin que soient pris en compte le ou les taux
d'incapacité antérieurement reconnus à la victime pour le
calcul de la nouvelle rente (
première phrase du texte
proposé
pour le
4
ème
alinéa de l'article
L. 434-2
).
Par ailleurs, il est précisé que, dans le cas d'accidents
successifs, la victime pourra opter, soit pour une rente, soit pour une
indemnité en capital. Lorsqu'elle opte pour une rente, celle-ci tiendra
compte des indemnités ou capital précédemment
versés (
seconde
phrase du texte proposé
).
Les deux dispositions précitées remplacent le dispositif
actuellement prévu au quatrième alinéa de l'article L.
434-2 précité : Celui-ci n'a plus lieu d'être dans la
mesure où le principe du cumul des taux d'incapacité successifs
est désormais clairement posé.
En tout état de cause, la référence au salaire minimum
devient superflue dans la mesure où
l'article L. 434-16 du code de la
sécurité sociale
prévoit déjà que la
rente doit être calculée sur un salaire minimum.
Le
paragraphe II
précise que ces dispositions entreront en
vigueur à compter du 1
er
janvier 2000 pour les accidents du
travail ou les maladies professionnelles
"
déclarées
" à compter de cette date. La
déclaration de l'accident du travail à la caisse primaire
d'assurance maladie est une formalité qui incombe à l'employeur.
La mesure pourra donc s'appliquer à des accidents survenus avant le
1
er
janvier 2000. L'article L. 461-1 susvisé justifie que
soient mentionnés, non seulement les accidents du travail, mais
également les maladies professionnelles.
II - La position de votre commission
Votre rapporteur souhaite tout d'abord
présenter quelques
observations sur la procédure
suivie pour l'adoption de cet article
additionnel. Sur ce dossier bien connu, le Gouvernement a fait le choix de
présenter un amendement en seconde délibération qui
insère une disposition totalement nouvelle dans le projet de loi.
Or, l'article 101 du Règlement de l'Assemblée nationale dispose
sans ambiguïté que la seconde délibération intervient
"
sur tout ou partie du texte
". S'agissant, à
l'évidence, du texte en discussion, il est possible de revenir sur une
disposition adoptée à tort ou d'amender un texte imparfait, mais
il paraît pour le moins audacieux, du point de vue du strict respect du
parlementarisme, de demander une seconde délibération sur une
disposition législative qui n'a jamais été examinée
en première délibération en séance publique.
La précipitation du Gouvernement et de l'Assemblée nationale est
expliquée par le fait que la commission au fond avait adopté un
amendement, insérant un article additionnel après l'article 26,
sur la question des accidents du travail successifs qui n'a jamais
été discuté en séance publique, puisqu'il avait
été déclaré irrecevable par la commission des
finances.
Le débat ayant été relancé lors de l'examen du
rapport annexé, M. Claude Evin, rapporteur, informé de
l'existence d'un amendement du Gouvernement, déclare qu'il n'a
"
aucun scrupule d'auteur
" et propose à Mme la
ministre de l'emploi et de la solidarité de déposer l'amendement
au Sénat. Mme Martine Aubry déclare alors qu'elle s'engage
effectivement à présenter l'amendement au Sénat et
ajoute : "
mais de là à ce qu'il soit adopté,
je ne peux le promettre
".
Tout en étant sensible au souci de Mme la ministre de respecter la
volonté du Sénat, votre rapporteur ne peut néanmoins
s'empêcher de penser que, portant sur un amendement qui allait peu
après être adopté à l'unanimité à
l'Assemblée nationale, son appréciation comportait
néanmoins, en partie, un procès d'intention.
C'est cette inquiétude qui allait justifier le recours à la
procédure de la seconde délibération.
En tout état de cause, votre rapporteur tient à souligner que
votre commission a approuvé dans son principe le dispositif de cet
article qui répond à des cas concrets douloureux
devant
lesquels les considérations techniques liés au coût de la
mise en place de rentes d'un faible montant ou aux difficultés des
calculs de répartition du coût des indemnisations semblent de peu
de poids.
Cela étant, votre commission a adopté un amendement afin de
proposer sur le plan formel une nouvelle rédaction de cet article pour
trois raisons :
Tout d'abord, il semble que, par rapport à l'exposé des motifs
exposé en séance publique, le texte même de l'amendement
soit légèrement restrictif : en effet, le souhait du
Gouvernement est semble-t-il de permettre la prise en compte de tous les
accidents successifs, que le seuil d'incapacité en résultant soit
inférieur ou supérieur à 10 %.
Or, en insérant ce principe à l'article L. 434-2 du code de
la sécurité sociale, qui porte sur les accidents du travail
entraînant plus de 10 % d'incapacité, le risque est grand de
limiter la portée de la mesure. C'est en effet sur la base de la
rédaction de l'article L. 434-1 relatif aux " petits
accidents " que la Cour de Cassation s'est fondée pour refuser de
prendre en compte le cumul des taux en cas d'incapacité de moins de
10 %. Ce point peut avoir une grande importance pour les personnes
déjà atteintes d'une maladie ou victimes d'un accident
entraînant entre 40 % et 50 % d'invalidité qui pourrait
dépasser le seuil de 50 % du fait du nouvel accident qui les frappe.
Toujours sur le plan rédactionnel, il semble logique d'insérer au
deuxième alinéa de l'article L. 434-2 relatif aux
modalités de calcul de la rente pour les accidents de plus de 10 %,
la disposition permettant de cumuler les taux en cas d'accidents successifs.
Enfin, le droit d'option sur demande de la victime soulève une
interrogation au regard des règles applicables en matière de
détermination des cotisations de la branche AT-MP.
Il convient de rappeler que la branche accidents du travail est financée
uniquement par des cotisations dues par les employeurs.
Les établissements de moins de dix salariés ou appartenant
à certaines branches d'activité, sont soumis à une
tarification collective qui résulte de barèmes nationaux par
branche d'activité.
Les établissements comptant entre 10 et 200 salariés suivent une
tarification mixte qui fait intervenir pour partie le taux collectif de la
branche et pour partie le taux propre de l'établissement.
Enfin, les entreprises de plus de 200 salariés sont astreintes à
une tarification individuelle qui tient compte du coût réel du
risque dans l'établissement considéré.
Les indemnités versées sont donc imputées directement ou
indirectement aux entreprises. Le montant des indemnités en capital est
prélevé pour leur montant affecté d'un coefficient de
1,1 : les rentes sont évaluées forfaitairement à 32
fois leur montant annuel.
De ce point de vue, la notion de droit d'option de la victime introduite au
niveau de la loi est juridiquement complexe. Il convient de bien distinguer la
réparation
à laquelle a droit la victime, dont elle peut
choisir les modalités, de la nature de la
contribution
demandée à l'entreprise. Il paraît préférable
que la nature de cette contribution soit fixée par la loi.
En l'occurrence, au-delà de 10 % d'incapacité, les textes
prévoient le versement d'une rente. Il appartient à la branche de
garantir, le cas échéant, la possibilité d'une conversion
de la rente en une indemnité en capital en assurant les frais de gestion
d'une telle opération.
C'est pourquoi, il apparaît nécessaire de ne pas reprendre
l'expression "
sur demande de la victime
" en laissant ouverte
l'alternative entre rente et capital dont la caisse fixera les modalités.
Votre commission vous propose donc d'adopter
un amendement
:
- reprenant explicitement la possibilité d'un cumul pour les
incapacités permanentes inférieures à 10 % ;
- précisant clairement la possibilité du cumul des taux pour
les incapacités permanentes de plus de 10 % ;
- laissant ouverte l'alternative entre le versement d'une rente ou d'une
indemnité en capital en cas d'accidents successifs entraînant plus
de 10 % d'incapacité, la branche " accidents du travail "
étant ainsi habilitée à fixer les conditions de la
transformation de la rente en capital.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.