Proposition de loi relative à la validation législative d'actes pris après avis du comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères
GOULET (Daniel)
RAPPORT 128 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES
Table des matières
- I. RAPPEL DES FAITS AYANT CONDUIT À L'ANNULATION DE L'ARRÊTÉ DU 14 OCTOBRE 1994 PAR LE CONSEIL D'ETAT
- II. DIFFICULTÉS LIÉES À L'ANNULATION DE L'ARRÊTÉ DU 14 OCTOBRE 1994
- III. QUELQUES INTERROGATIONS POUR L'AVENIR
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
-
PROPOSITION DE LOI
relative à la validation législative d'actes
pris après avis du comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères
N°
128
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 décembre 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relative à la validation législative d' actes pris après avis du comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères,
Par M.
Daniel GOULET,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Xavier de Villepin,
président
; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait,
Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle
Bidard-Reydet,
vice-présidents
; MM. Michel Caldaguès,
Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès,
secrétaires
; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy
Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert
Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean
Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel,
Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle,
René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc
Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano,
Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard
Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas,
André Rouvière.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1205, 1218
et T.A.
213.
Sénat
:
109
(1998-1999).
Ministères et secrétariats d'Etat.
Mesdames, Messieurs,
La présente proposition de loi, adoptée par l'Assemblée
nationale le 8 décembre 1998, tend à valider l'ensemble des
actes pris après avis du Comité technique paritaire du
Ministère des Affaires étrangères tel qu'il avait
été composé sur la base d'un arrêté du
14 octobre 1994 déterminant les organisations syndicales aptes
à désigner les représentants du personnel à ce
Comité, et fixant la répartition des sièges entre les
différentes organisations.
Le Conseil d'Etat ayant annulé cet arrêté le
29 juillet 1998, tous les actes pris après consultation du
Comité technique paritaire dont la composition est ainsi
contestée paraissent entachés d'illégalité. Cette
constatation s'étend aux textes adoptés après avis du
Comité technique paritaire suivant, institué sur la base d'un
arrêté du ler octobre 1997 qui fondait la composition de ce
comité sur les mêmes critères de
représentativité syndicale que l'arrêté de 1994
annulé par le Conseil d'Etat.
La présente proposition de loi vise donc à
consolider
l'ensemble de la vie juridique du Ministère des affaires
étrangères
, l'arrêt du Conseil d'Etat étant
à l'origine d'une situation d'
insécurité juridique
qui s'étend sur l'ensemble de la période 1994-1998, et concerne
de surcroît la réorganisation du Ministère fondée
sur la fusion entre le Quai d'Orsay et le Ministère de la
coopération.
La présente proposition, il faut le souligner, ne constitue pas un
blanc-seing donné par le législateur au gouvernement pour
maintenir à l'avenir une situation irrégulière.
Cette proposition de loi, en effet, ne vise pas à donner force de loi
à un arrêté jugé contraire au droit par le Conseil
d'Etat, ce qui constituerait une violation du principe de séparation des
pouvoirs et de l'autorité de la chose jugée, mais concerne la
validation de textes adoptés après avis d'un comité
technique paritaire dont la composition, pourtant conforme aux habitudes
administratives du Ministère des affaires étrangères, est
contestée par le Conseil d'Etat. Dans cette logique, la présente
proposition a pour objet de valider
des actes pris depuis 1994 par le
ministère des affaires étrangères, ces textes étant
fondés sur une base qui s'est révélée par la suite
irrégulière.
Après un rappel des faits qui ont conduit à l'annulation, par le
Conseil d'Etat, de l'arrêté précité du
14 octobre 1994, et après avoir commenté la situation
juridique créée par cette annulation, qui permettent de conclure
à l'opportunité de l'adoption de la présente proposition
de loi, votre rapporteur présentera les interrogations suscitées
par les mesures d'ores et déjà prévues au Ministère
des affaires étrangères pour tirer les conséquences des
observations formulées par le juge.
*
* *
I. RAPPEL DES FAITS AYANT CONDUIT À L'ANNULATION DE L'ARRÊTÉ DU 14 OCTOBRE 1994 PAR LE CONSEIL D'ETAT
1. Les comités techniques paritaires de la fonction publique
Institués dans la fonction publique de l'Etat par la
loi du
19 octobre 1946, et maintenus par l'ordonnance du 4 février
1959 relative au statut général des fonctionnaires, les
comités techniques paritaires sont régis par le décret
n° 82-452 du 28 mai 1982 modifié.
.
Le décret de 1982 prévoit
deux types de CTP
:
- Les CTP dont la création est
obligatoire
: il s'agit du
CTP
ministériel
, institué auprès de chaque ministre
(article 2), ainsi que du
CTP Central
devant être mis en place
"auprès de chaque directeur du personnel de l'administration centrale"
et auprès des directeurs d'administration, comportant des services
centraux et des services extérieurs (article 3). Des comités
techniques paritaires régionaux ou départementaux doivent
également être créés auprès des chefs de
service déconcentré lorsque les effectifs du service sont
supérieurs à 50 agents (article 4).
.
Les CTP dont la création est
facultative
: il s'agit
des
CTP spéciaux
, susceptibles d'être mis en place "dans
les services (...) dont la nature ou l'importance le justifie" (article
4 bis).
.
La
composition des comités techniques paritaires
est
assise sur les organisations syndicales "regardées comme
représentatives du personnel" en fonction des effectifs qu'elles
représentent. Les organisations syndicales aptes à
désigner des représentants au CTP sont déterminées
par arrêté ministériel. Un autre arrêté fixe
le nombre des sièges attribués à chaque organisation
à partir du nombre de voix obtenues lors des élections des
représentants du personnel aux commissions administratives paritaires
(article 8).
.
Le décret de 1982 permet la participation aux comités
techniques paritaires d'
agents non titulaires
(article 3) : cette
disposition tire les conséquences du fait que les attributions des CTP
concernent tous les agents travaillant dans le ressort d'un CTP, que ces agents
soient ou non titulaires.
.
L'article 11 du décret de 1982 invite le ministre
intéressé à procéder à une
consultation
du personnel
afin de déterminer le nombre de sièges
susceptibles d'être attribués à chaque organisation, "en
cas d'impossibilité d'apprécier la représentativité
des organisations syndicales".
.
Les
attributions
définies par le décret de 1982
(article 12) concernent, pour l'essentiel :
- les problèmes généraux d'organisation des
administrations, établissements ou services,
- les conditions générales de fonctionnement des administrations
et services,
- les programmes de modernisation des méthodes et techniques de travail
et leur incidence sur la situation des personnels,
- les règles statutaires,
- l'examen des grandes orientations à définir pour
l'accomplissement des tâches de l'administration concernée,
- les problèmes d'hygiène et de sécurité.
2. L'organisation retenue au Ministère des affaires étrangères
Le
décret n° 94-726 du 19 août 1994, relatif aux
comités techniques paritaires du ministère des affaires
étrangères et dérogeant à certaines dispositions du
décret n° 82-452 du 28 mai 1982, pose le principe d'une
organisation particulière pour le ministère des affaires
étrangères. D'autres départements ministériels
disposent de CTP dérogeant aux principes posés par le
décret de 1982 : il s'agit des ministères de la défense,
de l'intérieur et de l'éducation nationale.
Au ministère des affaires étrangères, le décret de
1994 précité institue :
- un premier
comité technique paritaire ministériel
,
"compétent pour connaître des questions intéressant les
fonctionnaires du ministère des affaires étrangères et les
agents contractuels en fonctions à l'administration centrale du
ministère des affaires étrangères ou dans les missions
diplomatiques et les postes consulaires" ;
- un
second comité technique paritaire
, compétent pour les
questions concernant les personnels contractuels et les fonctionnaires
détachés auprès du ministre des affaires
étrangères et exerçant une mission dans un
établissement ou organisme de diffusion culturelle à
l'étranger.
La répartition des compétences entre ces deux CTP est donc
essentiellement sectorielle.
Le premier comité technique paritaire ministériel connaît,
en effet, des questions relatives à l'organisation et au fonctionnement
des services centraux, des missions diplomatiques et des postes consulaires du
ministère des affaires étrangères, et des questions
concernant les règles statutaires et les rémunérations,
les problèmes d'hygiène et de sécurité, ainsi que
les programmes de modernisation des méthodes et techniques de travail et
leur incidence sur la situation des personnels. Le second comité
technique paritaire (le CTP "culturel"), quant à lui, a pour
attributions la situation des personnels exerçant leur mission dans un
établissement ou organisme de diffusion culturelle à
l'étranger. Notons, à cet égard, que l'article 4
(concernant le second CTP) du décret du 19 août 1994 vise les
fonctionnaires, les contractuels recrutés en France et, s'agissant des
contractuels recrutés localement, les personnels contractuels de
nationalité française :
cet article exclut donc les
recrutés locaux de nationalité étrangère du champ
de compétence du second CTP
.
3. Les arrêtés fixant la composition des comités techniques paritaires du Ministère des affaires étrangères
.
L'arrêté du 14 octobre 1994 du ministre des affaires
étrangères annulé par le Conseil d'Etat déterminait
les organisations syndicales aptes à désigner les
représentants du personnel aux CTP, en se fondant sur les
résultats des élections aux commissions mixtes paritaires. Dans
la logique définie par cet arrêté, un second
arrêté du 10 novembre 1994 fixait la composition du CTP
ministériel du Ministère des affaires étrangères.
.
Le mandat des CTP étant de trois ans,
deux nouveaux CTP ont
été institués en 1997
. Dans la même logique que
précédemment, l'arrêté du ler octobre 1997
établissait la liste des organisations syndicales aptes à
désigner les représentants du personnel au premier CTP
ministériel, en se fondant sur les mêmes critères que
l'arrêté du 14 octobre 1994. Il était donc fait
référence, conformément d'ailleurs à la formule qui
a toujours été retenue à cet égard par le
Ministère des affaires étrangères, aux résultats
des élections aux commissions mixtes paritaires. Enfin,
l'arrêté du 5 novembre 1997 déterminait, comme
l'arrêté du 10 novembre 1994, la composition du CTP
ministériel du ministère des affaires
étrangères.
4. Les arguments du Conseil d'Etat
Le
Conseil d'Etat a estimé que, pour
apprécier la
représentativité des organisations syndicales
susceptibles de
représenter le personnel aux CTP du ministère des affaires
étrangères, le ministère des affaires
étrangères n'aurait pas dû se référer aux
résultats des élections aux commissions mixtes paritaires. En
effet, ces élections
ne concernent pas les contractuels et, parmi
ceux-ci, les recrutés locaux de nationalité
étrangère.
Or ces derniers,
a constaté le
Conseil d'Etat, représentent quasiment la moitié des agents
relevant du Ministère des affaires étrangères, soit, en
1994, 5 072 personnes sur un effectif de 13 681 (dont 591
recrutés locaux de nationalité française). En 1998, le
nombre de recrutés locaux est passé à 5 530 agents (au
terme du schéma quinquennal d'adaptation des réseaux, qui a
prévu le recrutement de deux recrutés locaux pour un emploi de
titulaire supprimé), dont 1 191 Français.
Le Conseil d'Etat a souhaité tirer "mécaniquement" les
conséquences de l'
importance des effectifs de recrutés
locaux
-et, notamment, des recrutés locaux de nationalité
étrangère -dans les effectifs du ministère des affaires
étrangères. Il a donc estimé que le ministre des affaires
étrangères aurait dû, conformément à
l'article 11 du décret de 1982, procéder à une
consultation des agents titulaires et non titulaires
afin de
déterminer le nombre de sièges susceptible d'être
attribués à chaque organisation syndicale. Le Conseil d'Etat a
donc fait valoir que ces organisations doivent être
représentatives des personnels contractuels, sans exclure les
recrutés locaux, y compris ceux de nationalité
étrangère, alors que la liste qui résulte de
l'arrêté du 14 octobre 1994 ne permet pas la
représentation spécifique des personnels contractuels.
L'argumentation du Conseil d'Etat s'appuie sur la constatation que les
personnels contractuels recrutés localement constituent une
proportion très importante des effectifs du Quai d'Orsay
. On peut se
demander si l'interprétation faite par le juge de la composition du CTP
ministériel du ministère des affaires étrangères
pourrait être étendue aux CTP des autres ministères
recourant aussi à des recrutés locaux, dans leurs services
à l'étranger. Tel est le cas, en effet, des ministères de
la défense et de l'économie. Selon les informations transmises
à votre rapporteur, les recrutés locaux employés par ces
départements ministériels représenteraient une proportion
suffisamment modeste de leurs effectifs pour que leur représentation aux
comités techniques paritaires ne soit pas considérée comme
indispensable.
II. DIFFICULTÉS LIÉES À L'ANNULATION DE L'ARRÊTÉ DU 14 OCTOBRE 1994
1. Conséquences juridiques
L'annulation de l'arrêté du 14 octobre 1994 a pour
effet d'
entacher d'illégalité l'ensemble des actes et des
textes pris après avis du comité technique paritaire
constitué en 1994.
La conséquence juridique est la même
pour les actes et textes pris en application de l'arrêté du ler
octobre 1997 établi sur la même logique que le
précédent arrêté de 1994, même si ce second
texte n'a pas fait, à ce jour, l'objet d'un recours devant le juge
administratif.
De ce fait, c'est
toute la vie du Ministère des affaires
étrangères pendant quatre années (entre 1994 et 1998) qui
se trouve suspendue par la décision du juge.
La liste des actes soumis à l'approbation du CTP ministériel du
ministère des affaires étrangères est, à cet
égard, éclairante des conséquences de l'arrêt
précité du Conseil d'Etat.
.
En effet, le CTP ministériel désigné sur la base
de l'arrêté du 14 octobre 1994 annulé s'est
prononcé, pour l'essentiel, sur les textes suivants :
- projets de décrets relatifs au
statut particulier des agents
diplomatiques et consulaires
(chiffreurs, secrétaires de
chancellerie, secrétaires-adjoints...),
- projet de décret relatif au
calcul des émoluments
des
personnels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à
l'étranger,
- projet d'arrêté relatif à l'
expérimentation de
l'annualisation
du service à temps partiel au ministère des
affaires étrangères,
- projets de décrets concernant la
nouvelle bonification
indiciaire
dans les services du Ministère des affaires
étrangères,
- projets d'arrêtés d'application de dispositions du décret
n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'
hygiène
et à la sécurité du travail
ainsi qu'à la
prévention médicale dans la fonction publique,
- projet d'arrêté créant une
mission pour l'adoption
internationale
au ministère des affaires étrangères.
.
Le CTP ministériel constitué sur la base de
l'arrêté du ler octobre 1997 -qui n'a fait à ce jour
l'objet d'aucun recours, mais qui s 'appuie sur les mêmes critères
que le précédent arrêté de 1994- s'est, lui aussi,
prononcé sur des
textes décisifs pour l'organisation du
ministère des affaires étrangères
:
- projet de décret portant intégration des chanceliers dans le
corps des secrétaires de chancellerie,
- projet de décret instituant un
congé spécial
pour
les ministres plénipotentiaires,
- projet d'arrêté modifiant l'arrêté du
4 novembre 1993 relatif à l'
organisation de l'administration
centrale
du ministère des affaires étrangères,
- projet de décret portant organisation de l'administration centrale du
ministère des affaires étrangères.
C'est ce dernier décret (décret n° 98-1124 du 10
décembre 1998), il convient de le souligner, qui traduit les
conséquences administratives de la réforme de la
coopération
annoncée par le gouvernement le
4 février 1998, et qui prévoit la fusion des services du
ministère des affaires étrangères et des services du
ministère délégué à la coopération et
à la francophonie.
L'annulation de l'arrêté du 14 octobre 1994 rend donc
particulièrement vulnérables des textes (décrets ou
arrêtés) déterminants non seulement pour la carrière
des personnels concernés
(recrutement, statuts des corps
spécifiques, rémunérations)
mais aussi pour
l'organisation du ministère des affaires
étrangères.
2. Une validation législative justifiée
.
La présente proposition de loi vise donc à
sécuriser l'environnement juridique du ministère des affaires
étrangères entre 1994 et 1998
. Certes, le
procédé tendant à recourir à la validation
lui-même a pu, par le passé, susciter quelques réticences
de la part du législateur
1(
*
)
. Celui-ci
reconnaît cependant généralement que
"nécessité fait loi" et que seule, la validation permet de
résoudre les difficultés causées par la décision du
juge.
. La présente proposition de loi est non seulement opportune, elle est
également
fondée juridiquement.
En effet, cette proposition respecte les
critères de
constitutionnalité
définis par le Conseil constitutionnel
dans sa décision du 22 juillet 1980. Notons la ressemblance entre le cas
porté à l'appréciation du Conseil constitutionnel en 1980,
et la situation que vise à résoudre la présente
proposition.
La loi déférée au Conseil constitutionnel le 30 juin
1980 résultait d'une
proposition de loi de validation portant sur les
décrets pris après consultation du comité technique
paritaire du Ministère des Universités en 1977, 1978 et 1979,
après
l'annulation, par le Conseil d'Etat, de l'un des
décrets adoptés après l'avis de ce comité technique
paritaire
. Notons que, en 1980 comme dans le cas couvert par la
présente proposition de loi,
la validation concernait l'ensemble des
textes pris après avis de ce CTP pendant plusieurs années, alors
même que ces textes n'avaient fait l'objet d'aucun recours
contentieux
.
Les conditions de conformité à la constitution des lois de
validation appréciées par le Conseil constitutionnel sont les
suivantes :
-
la validation ne doit pas intervenir a posteriori
, c'est-à-dire
violer l'autorité de la chose jugée en remettant en vigueur un
acte annulé par le juge administratif : or la présente
proposition de loi ne tend pas à donner force de loi à
l'arrêté annulé par le Conseil d'Etat, mais à
valider les actes pris après consultation du CTP dont la composition est
contestée par le juge administratif ;
- en ce qui concerne les
validations préventives
, portant sur un
acte qui, non encore annulé par le juge, risquerait de l'être s'il
faisait l'objet d'un recours (ce qui est le cas de l'arrêté du 1er
octobre 1997), les conditions définies par le Conseil constitutionnel
portent sur :
.
le fait que l'acte validé soit
en vigueur au moment de la
validation
(tel est le cas du décret tirant les conséquences
de la réforme de la coopération sur l'organisation du
Ministère, publié au Journal officiel du 13 décembre 1998),
.
le fait que l'acte soit intervenu en
matière non
répressive
, c'est-à-dire qu'il ne doit prévoir ni
sanctions administratives, ni sanctions pénales (car la loi ne peut
être rétroactive en matière pénale),
.
le fait que la validation ait pour objet de
"préserver le
fonctionnement continu des services publics"
ainsi que le
"déroulement normal de la carrière des personnels", ce qui est
le cas de la présente proposition de loi
, s'agissant du
fonctionnement du Ministère des affaires étrangères et du
déroulement de la carrière de ses agents,
.
l'acte à valider doit être réglementaire.
A ces diverses conditions a plus récemment été
ajoutée la notion de "proportionnalité de la mesure de validation
par rapport à sa justification qui est elle-même fonction des
nécessités d'intérêt général
".
En l'occurrence, l'enjeu que constituent la vie administrative d'un
ministère ainsi que la sécurisation des carrières de
quelque 13 000 agents justifie le recours à une loi de
validation.
III. QUELQUES INTERROGATIONS POUR L'AVENIR
Le
Ministère des affaires étrangères a d'ores et
déjà tiré les conséquences de l'annulation, par le
Conseil d'Etat, de l'arrêté du 14 octobre 1994 en mettant en place
une
consultation référendaire de l'ensemble de ses agents
,
en vue de l'
appréciation
de la représentativité
des syndicats auprès des personnels non titulaires
, et de la
désignation de son prochain comité technique paritaire
ministériel
. Cette consultation sera réalisée en mars
1999 sur la base de l'article 11 du décret n° 82-452. Elle
concernera donc l'ensemble des personnels du ministère des affaires
étrangères et de la coopération, y compris les
recrutés locaux
et, parmi ceux-ci, les
recrutés locaux
de nationalité étrangère
.
Le Conseil d'Etat a motivé cette exigence par le fait que les
recrutés locaux de nationalité étrangère sont
particulièrement nombreux (voir supra) dans les services du Quai d'Orsay
à l'étranger. Cette situation résulte notamment, comme
votre rapporteur l'a relevé précédemment, aux
conséquences du
schéma quinquennal d'adaptation des
réseaux
, mis en oeuvre pour la période 1994-1998, et qui
prévoyait, en contrepartie de la suppression de 610 emplois de
titulaires, le recrutement de personnels de droit local dans la proportion d'un
recruté local pour deux emplois de titulaire supprimés.
Or la participation de ces personnels, dans leur pays, à une
consultation syndicale organisée par un pays étranger n'est pas
sans poser de substantielles difficultés :
.
Sur le
plan pratique
, tout d'abord :
- le scrutin prévu pour le mois de mars 1999 pose des problèmes
de
communication
, pour les recrutés locaux ne connaissant pas
notre langue, ce qui nécessite la traduction préalable des
bulletins et des informations relatives aux modalités du scrutin et aux
attributions du CTP ministériel ;
- des
délais
relativement importants sont imposés par les
textes en vigueur et par les modalités pratiques d'un vote
intéressant quelque 10 500 agents en poste à
l'étranger.
.
D'autres difficultés sont d'
ordre juridique
, voire
diplomatique
. En effet, les droits -y compris les droits syndicaux- des
recrutés locaux relevant d'un
contrat de travail de droit local
,
il n'est pas exclu que leur participation à une consultation syndicale
française soit en contradiction avec la loi locale si, par exemple,
celle-ci exclut l'exercice du droit syndical, ou limite celui-ci à
l'affiliation à un syndicat unique.
Mentionnons enfin, par ailleurs, que la loi française ne s'oppose pas
à ce qu'un ressortissant étranger, adhérent à un
syndicat, accède aux fonctions d'administration ou de direction de ce
syndicat, à condition qu'il ait dix-huit ans révolus, et qu'il
n'ait encouru aucune des condamnations prévues aux articles L. 5 et L. 6
du code électoral (article L. 411-4 du code du travail).
Les difficultés soulevées pour l'avenir ne sauraient toutefois
affecter la pertinence de la présente proposition de validation, qui
porte exclusivement sur la sécurisation de la vie juridique du
Ministère des affaires étrangères entre 1994 et
1998.
CONCLUSION
Il
ressort des analyses ci-dessus que la présente proposition de validation
paraît offrir les garanties requises de conformité à la
Constitution. Elle consiste à prendre les dispositions
nécessaires afin de régler, comme le législateur seul, en
l'espèce, peut le faire, les situations nées de l'annulation de
l'arrêté du ministre des affaires étrangères du
14 octobre 1994, et de valider les actes pris après consultation du
premier comité technique paritaire ministériel des affaires
étrangères entre 1994 et 1998.
Votre rapporteur conclut donc favorablement à l'adoption de la
présente proposition de loi, telle qu'elle nous est transmise par
l'Assemblée Nationale.
EXAMEN EN COMMISSION
Votre
commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées a examiné la présente proposition de loi au
cours de sa réunion du 16 décembre 1998.
A la suite de l'exposé de M. Daniel Goulet, M. Xavier de Villepin,
président, est revenu, avec le rapporteur, sur le recours à une
proposition de loi plutôt qu'à un projet de loi pour apporter une
solution au problème posé.
La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, adopté sans
modification la présente proposition de loi, adoptée par
l'Assemblée nationale.
TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION
PROPOSITION DE LOI
relative à la validation
législative d'actes
pris après avis du comité technique
paritaire du ministère des affaires
étrangères
Article unique
Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les actes pris après avis du comité technique paritaire ministériel institué par l'article 2 du décret n° 94-726 du 19 août 1994 relatif aux comités techniques paritaires du ministère des affaires étrangères et dérogeant à certaines dispositions du décret n° 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux comités techniques paritaires, réuni dans sa composition fixée respectivement au vu des arrêtés du 14 octobre 1994 et du 1er octobre 1997 déterminant les organisations syndicales aptes à désigner les représentants du personnel au comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères et fixant la répartition des sièges entre ces organisations, en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré du défaut de consultation de l'ensemble des agents titulaires et non titulaires relevant de la compétence dudit comité en application du deuxième alinéa de l'article 11 du décret n° 82-452 du 28 mai 1982 précité.
1 Voir notamment les rapports de M. Paul Girod (rapport sur le projet de loi portant validation des résultats du concours 1976 d'élèves-éducateurs des services extérieurs de l'éducation surveillée, Sénat, n° 342, 1981-1982) et M. Paul Séramy (rapport sur le projet de loi de validation de la liste principale et de la liste complémentaire d'admission à l'internat en médecine, Sénat, n° 413, 1981-1982).