Projet de loi de finances pour 1999
MARINI (Philippe), Rapporteur général ; COLLIN (Yvon), Rapporteur spécial
RAPPORT GENERAL 66 (98-99), Tome III, Annexe 25 - COMMISSION DES FINANCES
Table des matières
- PREMIERE PARTIE
- LE BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE
-
CHAPITRE PREMIER
L'ÉQUILIBRE DU BUDGET ANNEXE
DE L'AVIATION CIVILE -
CHAPITRE II
UN BUDGET CONFRONTÉ À DES DIFFICULTÉS
JURIDIQUES ET FINANCIÈRES -
CHAPITRE III
UN BUDGET DONT LES DÉPENSES
NE SONT PAS MAÎTRISÉES - DEUXIÈME PARTIE :
-
LES CRÉDITS DE TRANSPORT AÉRIEN ET
DE
MÉTÉOROLOGIE DU BUDGET DU MINISTÈRE DE L'ÉQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT
ET DU TOURISME -
ARTICLE 85
Instauration de la taxe d'aéroport - EXAMEN EN COMMISSION
-
ANNEXE 1
LA SÉCURITÉ DU TRANSPORT AÉRIEN -
ANNEXE 2
LA PONCTUALITÉ DES TRANSPORTS AÉRIENS
N° 66
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès verbal de la séance du 19 novembre 1998.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 25
ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT :
III
.
- TRANSPORTS : TRANSPORT AÉRIEN ET MÉTÉOROLOGIE
et AVIATION CIVILE
Rapporteur spécial
: M. Yvon COLLIN
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Alain Lambert,
président
; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude
Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet,
vice-présidents
; Jacques-Richard Delong, Marc Massion,
Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Philippe
Marini,
rapporteur général
; Philippe Adnot, Denis
Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin,
Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean
Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard,
Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude
Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne,
Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri
Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1078
,
1111
à
1116
et T.A.
193
.
Sénat
:
65
(1998-1999).
Lois de finances. |
PREMIERE PARTIE
LE BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE
CHAPITRE PREMIER
L'ÉQUILIBRE DU BUDGET ANNEXE
DE L'AVIATION CIVILE
Le
budget annexe de l'aviation civile (BAAC)
, dont les dépenses
s'étaient accrues de 5,9 % l'an dernier, enregistre
une
progression apparente de 2,9 % de 1998 à 1999.
Cette évolution n'intervient pas à périmètre
constant puisqu'une part des dépenses de sécurité et
sûreté retracée dans le BAAC serait "sortie" du budget
annexe pour figurer au nouveau Fonds d'intervention pour les aéroports
et le transport aérien (FIATA). Les crédits concernés
s'élèvent à 97 millions de francs. A structure
constante, l'augmentation des crédits est, en réalité, de
4 %.
Evolution des dépenses du BAAC entre 1998 et 1999
(en millions de francs)
|
|
|
Variations |
|
|
1998 |
1999 |
En niveau |
En % |
Dépenses de fonctionnement (1) |
6.231,8 |
6.584,4 |
+ 352,6 |
+ 5,7 |
Dépenses en capital |
2.237,7 |
2.129,8 |
- 107,9 |
- 4,8 |
Total |
8.469,5 |
8.714,2 |
+ 244,7 |
+ 2,9 |
(1)
Le terme "dépenses de fonctionnement" est plus approprié que
celui de "dépenses d'exploitation" directement issu de l'ordonnance
organique du 2 janvier 1959.
Le total des dépenses s'élève à
8.714,2 millions de francs.
La variation des dépenses en
capital, qui représentent 24,4 % de l'ensemble des dépenses
contre 26,4 % en 1998, est, cette année, orientée à
la baisse ce qui permet de compenser au total la forte hausse des
dépenses de fonctionnement.
I. LES RESSOURCES
La présentation simplifiée suivante des ressources peut être donnée :
Recettes d'exploitation 1( * ) |
6.389,7 millions de francs |
Subvention reçue du budget général |
215 millions de francs |
Taxe de sécurité et de sûreté |
1.279,5 millions de francs |
Emprunts |
830,0 millions de francs |
Total |
8.714,2 millions de francs |
L'évolution des différentes catégories de ressources par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 1998 est retracée dans le tableau ci-dessous.
Evolution des grandes catégories de ressources 1999/1998
(en milliards de francs)
|
|
|
Variations |
|
|
1998 |
1999 |
En niveau |
En % |
Recettes d'exploitation |
6.029,2 |
6.389,7 |
+ 360,5 |
+ 6 |
Subvention reçue du budget général |
215 |
215 |
0 |
0 |
Taxe de sécurité et de sûreté |
1.182,8 |
1.279,5 |
+ 96,7 |
+ 8,2 |
Emprunts |
1.042,5 |
830 |
- 212,5 |
- 20,4 |
Total |
8.469,5 |
8.714,2 |
+ 244,7 |
+ 2,9 |
Sur longue période, l'évolution des différentes ressources du BAAC a été fort contrastée. Cela a conduit à une déformation de la structure de financement du budget annexe que l'année prochaine viendrait quelque peu tempérer pour des raisons exceptionnelles.
Structure
de financement du BAAC
Part dans le total des ressources
(en %)
|
1998 |
1999 |
Ecart en points |
Recettes d'exploitation |
71,2 |
73,3 |
+ 2,1 |
Subvention reçue du budget général |
2,5 |
2,5 |
0 |
Taxe de sécurité et de sûreté |
14 (1) |
14,7 |
+ 0,7 |
Emprunts |
12,3 |
9,5 |
- 2,8 |
Total |
100 |
100 |
0 |
(1) 16,2 % des ressources propres du budget annexe de l'aviation civile.
A. LES RESSOURCES D'EXPLOITATION
1. Les aménagements concernant les redevances aéronautiques :
L'essentiel des ressources du BAAC provient des redevances
aéronautiques dont le produit s'élèverait à
6.133 millions de francs, soit 70,1 % du total des ressources du
budget annexe et 78,8 % du total des seuls recettes d'exploitation.
Les produits des redevances aéronautiques s'accroîtraient de
4 % globalement.
Mais, une distinction doit être opérée entre la redevance
de route et la redevance pour services terminaux de la circulation
aérienne (RSTCA).
Pour la redevance de route
qui
représente 81,5 % des recettes tirées des redevances
aéronautiques, la progression de la recette serait de 4,7 % par
rapport aux prévisions du projet de loi de finances initiale. Par
rapport aux estimations de recettes révisées pour 1998 qui ont
été majorées pour tenir compte d'un essor du trafic plus
important que prévu, la croissance des recettes serait de 2,9 %.
Cette évolution tient compte d'une diminution du taux moyen de la
redevance de route de 1,4 % et d'une prévision de hausse du trafic
en 1999 qu'on peut juger assez optimiste.
Pour la RSTCA
, la croissance des recettes serait beaucoup plus
modérée, comprise entre 0,6 et 1 % en fonction de la base
retenue pour 1998. En effet, le taux de la RSTCA serait sensiblement
réduit, diminuant de 4,9 % par rapport au taux en vigueur au
début 1998. Cette réduction provient d'une évolution, sur
laquelle on revient plus bas, au terme de laquelle l'assiette servant au calcul
des taux de la RSTCA a dû être rétrécie afin d'en
exclure les coûts du service de sécurité incendie sauvetage
(SSIS) et de la gendarmerie des transports aériens (GTA).
2. L'alourdissement de la fiscalité spécifique affectée
Le
produit de la taxation affectée au budget annexe de l'aviation civile
s'est quant à lui beaucoup accru au cours de ces dernières
années.
La taxe de sécurité et de sûreté dont le produit
s'élevait à 652,5 millions de francs en 1995 et
représentait 10,6 % des recettes d'exploitation "rapporterait"
1.279,5 millions de francs en 1999, soit 16,5 % des recettes
d'exploitation du BAAC.
Pour appréhender l'augmentation du produit de la taxe, il faut en outre
prendre en compte la fraction de son produit qui serait affectée au
Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien
(FIATA) -voir infra-. La quotité affectée à ce fonds
s'élèverait en 1999 à 97 millions de francs, si bien
que la charge de la taxe progresserait en fait de 16,4 % par rapport
à l'an dernier. Son produit atteindrait 1.376,5 millions de
francs
2(
*
)
hors part de la
péréquation des lignes aériennes, soit plus de deux fois
le montant qui était le sien en 1995.
Ces évolutions doivent être mises en rapport avec la variation des
charges du BAAC qui, entre 1995 et 1999, ont progressé de 20,8 %.
La montée en charge de la fiscalité affectée au BAAC est
aussi celle de la fiscalité pesant sur les compagnies aériennes
puisque la taxe de sécurité et sûreté constitue,
comme la taxe de péréquation du transport aérien, un
impôt spécifique.
Elle s'accompagne d'une décrue du soutien budgétaire
accordé au transport aérien.
Le montant de la subvention versée au BAAC à partir du budget
général s'est réduit au cours des années
récentes. Avec 215 millions de francs prévus en 1999, son
niveau nominal resterait inchangé comme depuis 1997.
Il faut d'ailleurs préciser que cette contribution est
régulièrement amputée en gestion au gré des
arrêtés d'annulations de crédits. Ainsi, même si en
1998 elle devrait être épargnée, elle fut réduite en
1997 et ramenée de 215 à 183 millions de francs.
Le désengagement de l'Etat -voir infra- prend d'ailleurs d'autres
visages très préoccupants. La navigation aérienne doit
ainsi supporter la charge des exonérations accordées aux vols
militaires, ce qui déséquilibre le BAAC. Les services de l'Etat
en charge des missions essentielles de sûreté se retirent des
aéroports, laissant aux exploitants la charge mais aussi la
responsabilité de les suppléer.
B. LES RESSOURCES D'INVESTISSEMENT
La
section d'exploitation du budget annexe de l'aviation civile dégage une
capacité d'autofinancement
portée en recettes de la
section d'investissement.
Cette recette s'élèverait à 1.172,8 millions de
francs en 1999, en diminution de 20,4 millions de francs par rapport
à 1998.
Elle représenterait 15,1 % des recettes d'exploitation et 55 % des
recettes de la section d'investissement, soit un niveau d'autofinancement des
investissements en légère hausse par rapport à 1998, mais
toutefois très faible.
Malgré cela, le recours aux
emprunts
diminuerait sensiblement en
1999. Le montant des emprunts prévus serait ramené à
830 millions de francs contre 1.042,5 millions de francs
l'année précédente. Cette diminution de 20 %
permettrait de limiter la progression de l'endettement net du BAAC à
384 millions de francs.
L'une des raisons -pour la seconde, voir infra- qui expliquent cette
évolution vient de l'inscription dans le budget annexe d'une
recette
exceptionnelle
de 125 millions de francs liée à la
réalisation d'une cession immobilière. Sans cette recette, le
niveau d'emprunt nécessaire pour équilibrer les opérations
du BAAC se serait élevé en 1999 à 955 millions de
francs, soit une économie d'endettement de seulement 87,6 millions
de francs.
II. LES DÉPENSES
A. LES GRANDES ACTIONS
Le BAAC
a succédé au budget annexe de la navigation aérienne. Il
retrace désormais l'intégralité des actions de la
direction générale de l'aviation civile, exception faite de la
gestion des crédits de construction aéronautique civile qui
figurent au budget du ministère des transports, et non plus seulement
l'activité de navigation aérienne.
La répartition des crédits entre les différents
agrégats serait la suivante en 1999 :
BAAC 1999 - Répartition des actions *
(En millions de francs)
|
Dépenses ordinaires (exploitation) |
Crédits de paiement (dépenses en capital) |
|
|
|
Direction générale
|
1.942,2
|
512,2
|
2.454,4
|
28,2
|
12,1
|
TOTAL |
6.584,3 |
2.128,8 |
8.713,1 |
100,0 |
2,9 |
* aux
arrondis près.
Une part majoritaire des crédits budgétaires est
consacrée à la mission de navigation aérienne,
l'agrégat "bases aériennes" étant, si l'on néglige
pour l'instant celui dénommé "direction générale",
le seul autre agrégat disposant de crédits significatifs. La
modicité des crédits de contrôle technique, et la
décroissance continue des crédits de formation
aéronautique se confirment.
Les crédits consacrés à l'action "bases aériennes"
qui avaient fortement augmenté ces dernières années sont
stabilisés au prix d'une forte baisse des investissements qui
résulte pour beaucoup de facteurs transitoires et techniques.
Quant aux crédits de navigation aérienne, si leur croissance
apparente est un peu moins rapide que celle de l'ensemble des moyens du BAAC,
ce constat doit être nuancé compte tenu des observations
exposées plus haut sur la discordance entre les crédits
budgétaires récapitulés par agrégats et les moyens
réellement alloués aux différentes missions de la DGAC. On
y reviendra, mais
on peut
dès ce stade
relever le fort
accroissement des crédits budgétaires de navigation
aérienne depuis 1994.
Dépenses de navigation aérienne
(en millions de francs)
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Différence 1999/1994 |
Dépenses d'exploitation |
3.292,2 |
3.552,8 |
3.850,6 |
3.881,0 |
4.077,2 |
4.264 |
+ 971,8 |
Dépenses en capital |
1.140,0 |
1.139,0 |
1.185,0 |
1.335,0 |
1.370 |
1.195,5 |
+ 55,5 |
Total |
4.432,2 |
4.691,8 |
5.035,6 |
5.216,0 |
5.447,2 |
5.459,5 |
+ 1.027,3 |
C'est ainsi qu'en cinq ans, le niveau des crédits annuels de
navigation aérienne aura été accru de 1 milliard de
francs soit une augmentation de près de 23,2 %. Celle-ci se
décompose elle-même en une croissance de près de 29 %
des crédits de fonctionnement et de 4,9 % des crédits
consacrés aux opérations en capital qui cette année
connaissent une chute non pérenne.
La seule présentation des crédits budgétaires
consacrés à la navigation aérienne fait ainsi
apparaître
une déformation de la structure des moyens
consacrés à cette mission. Déjà très
fortement consommatrice de moyens de fonctionnement en 1994
-74,3 %
des crédits sont alors consacrés à l'exploitation du
système-
la mission de navigation aérienne requiert en 1999
une part encore plus élevée de tels crédits
(78,1 %).
La croissance annuelle moyenne des crédits d'exploitation
s'élève sur la période à plus de
5,3 %.
B. LES DÉPENSES PAR NATURE
Les crédits du budget annexe correspondent pour les uns à des dépenses d'exploitation, pour les autres à des dépenses d'investissement.
1. Les crédits de la section d'exploitation
La
structure des crédits d'exploitation
Comparaison 1995-1999
(en %)
|
1995 |
1999 |
Variation |
Achats et services |
12,8 |
9,9 |
- 2,9 |
Services extérieurs |
1,3 |
0,8 |
- 0,5 |
impôts |
0,5 |
0,3 |
- 0,2 |
Charges de personnel |
51,9 |
54,1 |
+ 2,2 |
Autres charges de gestion courante |
16,6 |
15,7 |
- 0,9 |
Charges financières |
3,5 |
3,0 |
- 0,5 |
Charges exceptionnelles |
0,2 |
0,6 |
+ 0,4 |
Dotations aux amortissements et aux provisions |
13,2 |
15,6 |
+ 2,4 |
Total |
100 |
100 |
0 |
Entre
1995 et 1999, les crédits d'exploitation auront progressé de
21,8 %, soit une moyenne de 5 % par an. Mais, dans cet ensemble,
l'évolution des différentes composantes est fort
contrastée.
La déformation de la structure des crédits d'exploitation fait
apparaître le poids de deux contraintes : celle d'abord de la
progression des charges de personnel qui, entre 1995 et 1999, ont cru de
26,8 % (+ 887,2 millions de francs) ; celle ensuite issue
de la nécessité de dégager une capacité de
financement toujours plus importante. Entre 1995 et 1999, les dotations aux
amortissements augmentent ainsi de 42,3 % (+ 355 millions de
francs).
La dynamique de ces deux catégories de dépenses explique celle du
BAAC mais aussi les recherches d'économies effectuées sur les
autres crédits d'exploitation. Certaines catégories d'entre eux
ont connu une variation nominale négative entre 1995 et 1999. Il s'agit
en particulier des crédits pour achats et services, des crédits
de services extérieurs et des crédits pour impôts et taxes.
Les autres catégories ont connu une progression de leurs crédits
inférieure à la moyenne. Ce dernier phénomène est
venu soit d'une politique volontariste, soit de l'évolution favorable
mais quelque peu aléatoire de l'environnement économique et
financier. Ainsi, malgré une forte progression de l'endettement, les
charges financières correspondant au coût de la dette n'ont
augmenté que de 6,4 % grâce à la diminution des taux
d'intérêt.
2. Les crédits de la section d'investissement
Entre
1995 et 1999, les crédits de la section d'investissement se sont accrus
de 26,7 % (6,1 % l'an), sur un rythme plus rapide que celui des
crédits d'exploitation. Encore doit-on observer que l'exercice à
venir est marqué par une réduction des crédits
d'investissements ramenée de 2,2 à 2,1 milliards de francs.
S'agissant des crédits pour investissements qui représentent
32,3 % des crédits d'exploitation, une comparaison entre 1999 et
1995 permet de faire ressortir une évolution disparate entre les deux
grandes catégories que sont les amortissements financiers et les
" investissements physiques ".
Les premiers progressent très vivement. Ils sont en 1999 2,5 fois
pus lourds qu'en 1995. Cette évolution n'est que le reflet des besoins
d'amortissement d'une dette grandissante.
Quant aux " investissements physiques " leur niveau n'est
supérieur en 1999 à celui atteint en 1995 que de 12 %. Mais,
l'année 1999 marque de ce point de vue un revirement notable puisque les
investissements seraient réduits par rapport à l'année
antérieure de plus de 220 millions de francs. Ainsi, d'une
comparaison entre 1995 et 1998 l'on tire une évolution probablement plus
significative démontrant la poursuite d'une progression soutenue des
dépenses d'investissement sur un rythme annuel de l'ordre de
8 %.
CHAPITRE II
UN BUDGET CONFRONTÉ À DES
DIFFICULTÉS
JURIDIQUES ET FINANCIÈRES
Le
budget annexe de l'aviation civile est confronté à des
difficultés juridiques profondes, diverses dans leurs natures. Si des
progrès ont été accomplis pour donner plus d'assise
juridique aux redevances aéronautiques, il reste quelques
difficultés substantielles de ce point de vue.
Mais, l'essentiel est ailleurs. Même des redevances entièrement
satisfaisantes sur le plan du droit ne sauraient assurer une gestion
équilibrée du BAAC. Il faut alors choisir entre deux
écueils également redoutables : le
déséquilibre financier ou la dénaturation du budget annexe.
Une autre voie doit donc être recherchée. Elle passe par une
réforme en profondeur.
I. MALGRÉ DES AMÉLIORATIONS CERTAINES, LE SYSTÈME DES REDEVANCES RESTE FRAGILE
Les
redevances aéronautiques représentent près de 79 %
des ressources propres du BAAC. Elles ont fait l'objet de contestations
récurrentes au terme desquelles plusieurs décisions de justice
sont intervenues pour rappeler que ce type de financement devait être
réservé à la couverture de prestations de services rendus
aux usagers.
Le Parlement à l'initiative de la commission des finances du
Sénat s'est également saisi de la question. Des progrès
ont pu être accomplis. Mais, il reste des éléments de
fragilité.
A. DES PROGRÈS ONT ÉTÉ ACCOMPLIS
1. L'intervention du Conseil d'Etat
L'intervention de la juridiction administrative, limitée pour des motifs juridiques quelque peu contestables à la RSTCA, a permis d'exercer un contrôle sur les taux de cette redevance et d'exclure le recours à cette formule pour le financement de missions d'intérêt général.
L'arrêt du 10 février 1995 sur la RSCTA
Rendu par la Section du Contentieux du Conseil d'Etat à la demande de la Chambre Syndicale du Transport Aérien, un arrêt du 10 février 1995 a annulé l'arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre des transports daté du 21 décembre 1992 fixant les conditions d'établissement et de perception de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne.
Les motifs retenus par le Conseil ont été les suivants :
Le
premier, technique, a consisté à reprocher aux auteurs de
l'arrêté de n'avoir pas établi la liste des
aérodromes où les services de circulation aérienne rendus
donnaient lieu à rémunération en considération du
seuil d'activité des bases aéroportuaires. En somme,
l'administration se serait affranchie d'exercer son pouvoir
d'appréciation qui est aussi, en droit public français, un devoir.
Le second a consisté à estimer qu'en imputant de
façon forfaitaire une partie de l'ensemble des coûts
supportés par la DGAC comme des coûts générés
par le contrôle d'approche, l'administration n'étant pas en mesure
de justifier que la fraction des coûts ainsi imputée correspondait
bien à des charges auxquelles l'expose ledit contrôle.
Par cet arrêt dont votre commission avait rendu compte, le Conseil
d'Etat rappelait que les redevances devaient trouver une
contrepartie
directe et proportionnelle dans un service rendu
à ceux priés
de les acquitter.
Le même jour, un autre arrêt du Conseil d'Etat sur la redevance de
contrôle technique apportait la confirmation d'une jurisprudence
constante.
L'arrêt du 10 février 1995 sur la redevance de contrôle technique
Par
un
arrêt du 10 février 1995
, le Conseil d'Etat a
considéré que les dépenses de contrôle technique
étaient des dépenses liées à une mission de service
public d'intérêt général. Il en a conclu qu'elles ne
pouvaient être financées par des redevances pour service rendu.
Votre commission en avait également rendu compte en ces termes :
" Le sens de l'arrêt du Conseil d'Etat est dépourvu
d'ambiguïté :
les missions exercées par la DGAC au
service de l'intérêt public ne sauraient être
financées par redevances.
Sans préjuger des solutions juridictionnelles qui n'ont pas
été sollicitées à ce jour, il est loisible de
penser que cette règle trouve à s'appliquer dans d'autres
domaines d'activité de la DGAC et, en particulier, dans l'un, dont le
développement pourrait s'accélérer à l'avenir, la
sûreté -v. infra-
3(
*
)
. "
Il apparaissait alors à votre commission comme un fait très
probable que d'autres difficultés surgiraient à partir des
mêmes causes.
C'est ce qui s'est produit puisque par un arrêt du 20 mai 1998, le
Conseil d'Etat a annulé divers arrêtés fixant le taux de la
RSTCA au motif que les coûts de certaines missions d'intérêt
général encore inclus dans l'assiette de la RSTCA (Services de
sécurité d'incendie et de sauvetage -SSIS- et de gendarmerie du
transport aérien) devaient être financés autrement que par
redevances.
Le projet de budget pour 1999 en tient compte -v. supra- en réduisant le
taux unitaire de la RSTCA rapprochant ainsi les redevances perçues au
profit du BAAC de ce qu'elles sont autorisées à
être.
2. L'initiative du Parlement
a) L'article 99 de la loi de finances pour 1996
Mais, le
Parlement a également beaucoup contribué à
améliorer la situation.
Il était apparu à votre commission qu'une source importante de
contentieux venait de ce que les comptes à partir desquels
étaient fixés les tarifs des redevances de transport
aérien manquaient de transparence. Cette situation nourrissait à
l'évidence le soupçon que les coûts des missions
d'intérêt général exercées par la direction
générale de l'aviation civile (DGAC) étaient, au moins
partiellement, financés par les redevances. C'est la raison pour
laquelle votre rapporteur avait pris l'initiative de proposer un amendement,
devenu l'article 99 de la loi de finances pour 1996
, qui prescrivait que
soit remis chaque année au Parlement un état récapitulatif
présentant la répartition des coûts et des dépenses
budgétaires en distinguant ceux afférents aux prestations de
services rendus aux usagers et ceux résultant des missions
d'intérêt général public assumés par la DGAC.
Cette initiative avait évidemment d'abord pour objet de favoriser le
contrôle parlementaire du budget annexe de l'aviation civile.
Mais, il s'agissait aussi, d'une part, de traduire l'exigence d'une meilleure
transparence des opérations conduites par la DGAC et, d'autre part, un
effort de pédagogie et d'ouverture ayant été
réalisé à destination des redevables, de faciliter le
dialogue entre ceux-ci et l'administration.
Dans l'ensemble, ces objectifs ont été atteints et d'ailleurs les
conclusions du commissaire du gouvernement du Conseil d'Etat produites à
l'occasion de l'examen du contentieux qui devait donner lieu à
l'arrêt du 20 mai 1998 pouvaient indiquer :
"
L'administration a, par ailleurs, accompli d'importants efforts de
clarification et d'information, comme le lui impose d'ailleurs l'article 99 de
la loi de finances pour 1996. Ainsi le rapport établi à ce titre
à l'automne 1996 fournit d'utiles explications sur le mode de calcul
actuel de la RSTCA. Et de manière générale, c'est à
notre avis à juste titre que le rapport du sénateur Collin sur le
budget annexe de l'aviation civile dans le projet de loi de finances pour 1997
salue (p. 28) les efforts réalisés dans le sens de la
transparence.
"
b) Le rapport annuel
Grâce à la production de ce rapport les
problèmes posés par les modes de fixation des tarifs des
redevances sont exposés.
Ces problèmes sont doubles
.
Le premier
consiste dans l'identification des coûts de la
navigation aérienne.
Cette 'identification
n'est pas simple. Elle suppose en premier lieu
de disposer d'une comptabilité analytique fiable
permettant d'isoler
les coûts effectifs attachés à cette mission. Les
difficultés les plus sensibles rencontrées dans cet exercice
concernent l'identification des dépenses d'administration
générale résultant de l'exercice de la mission de
contrôle aérien dont 57,1 % des charges sont
considérés comme relevant de cette mission.
Mais d'autres conditions s'imposent pour que l'identification des
coûts de la navigation aérienne puisse être jugée
convenable. Il faut, en particulier, que le calcul des charges à
incorporer dans ces coûts soit pertinent.
Deux questions sont à évoquer :
- celle des investissements ;
- celle du calcul des intérêts.
S'agissant des investissements
, on ne peut en effet retenir l'ensemble
des charges budgétaires exposées dans l'intérêt du
contrôle aérien pour établir le montant des coûts du
contrôle. En effet, les recommandations de l'Organisation de
l'administration civile internationale -OACI- qui paraissent, sur ce point,
conformes à notre droit public précisent que la valeur d'origine
des immobilisations doit être amortie sur l'estimation de leur
durée de vie utile et que
les coûts d'amortissement ne doivent
commencer à courir qu'une fois l'installation mise en service
.
S'agissant du calcul des intérêts
, on rappelle que l'OACI
considère que les intérêts doivent être
calculés sur la base de la
valeur nette des immobilisations en
service au cours de l'exercice.
Enfin, surgit l'écueil du calcul des coûts dénommés
dans le
rapport "
éléments supplétifs
d'assiette
" et dont l'essentiel consiste dans les coûts des
prestations d'organismes extérieurs à la DGAC aux premiers rangs
desquels, le ministère de l'équipement et celui de la
défense. Leur prise en compte intégrale, alors même que la
DGAC ne supporte pas de dépenses à due proportion au profit de
ces deux ministères, est conforme au principe qui veut que l'ensemble
des coûts d'un service soit pris en compte pour en asseoir le tarif.
Le deuxième problème
est celui de l'imputation des
coûts de navigation aérienne.
A ce propos, plusieurs difficultés doivent être relevées.
La première concerne le "
mécanisme correcteur"
.
Les
taux des redevances de navigation aérienne sont établis sur la
base de prévision de la façon suivante. Une fois
déterminées les assiettes des redevances, leur tarif
découle de prévisions portant sur le niveau des unités de
service taxables. Si une erreur survient sur l'un ou l'autre nombre de ce
rapport, il se peut que les produits appelés soient inférieurs ou
supérieurs aux coûts effectivement engagés pour satisfaire
la mission de contrôle aérien. Le déficit ou
l'excédent de produit est alors ajouté ou déduit de
l'assiette des redevances, avec un décalage de 2 ans. Par exemple,
en 1996, un surcroît de produits de 131 millions de francs
constaté en 1994 a dû être déduit des coûts de
la mission de navigation aérienne.
Une deuxième difficulté déjà relevée l'an
dernier concerne le sort des
créances impayées
.
Avec les difficultés posées par les
exemptions et
exonérations
,
on aborde une troisième
difficulté
, de taille puisque les montants concernés ont
atteint 675 millions de francs en 1996, qui voit la DGAC renoncer à
percevoir les redevances auprès de certains usagers pour des prestations
de contrôle aérien rendues par elle à ces usagers.
Les exemptions concernent la RSTCA qui n'est perçue que lorsque le
trafic d'un aéroport dépasse le seuil de 5.000 unités de
service par an en moyenne sur les trois dernières années.
Les exonérations s'appliquent à certains types de vol et, en
particulier, aux vols militaires.
Les exonérations de fait concernent l'outremer où les redevances
effectivement perçus ne couvrent que moins de 20 % des coûts
effectifs de la navigation aérienne.
S'il apparaît justifié de réduire les coûts
associés à ces prestations pour calculer les coûts
facturables par voie de redevances, il ne faut pas en déduire que ces
coûts n'existent plus "ipso facto". En réalité, ils
subsistent et doivent être couverts par d'autres
ressources.
B. DES FRAGILITÉS SUBSISTENT
La
complexité du droit de redevances, ses exigences sont une source
permanente de vulnérabilité.
A ce propos, l'on doit de façon liminaire vivement déplorer que
le rapport transmis au Parlement puisse contenir des données de fait
contestables. Il faut citer à ce propos les conclusions du commissaire
du gouvernement du Conseil d'Etat relatives à l'évaluation des
coûts de l'école nationale de l'aviation civile pris en compte
pour calculer le taux de la RSTCA.
"
On peut cependant éprouver davantage de doute sur une question
qui se situe en réalité en amont de l'existence ou non d'une
erreur manifeste, celle de la manière dont est justifiée la prise
en compte des dépenses de formation et notamment du coût de
fonctionnement de l'école nationale de l'aviation civile (ENAC).
Sans doute le ministre explique-t-il de manière convaincante que cette
école sert en particulier à former les techniciens du
contrôle aérien.
Mais on peut s'étonner, avec le syndicat requérant, que la
quote-part financée par les compagnies à travers la RSTCA soit de
57,2 % alors que cette école forme aussi des pilotes et des
ingénieurs aéronautiques.
Les doutes que l'on éprouve à ce sujet s'accroissent en outre
lorsque l'on relève le caractère évolutif, et en
réalité contradictoire des explications fournies sur le calcul de
ce taux.
Dans le document de la DGAC présentant sa comptabilité
analytique, on peut lire, p. 40, que la répartition des coûts
d'administration générale de l'ENAC " est effectuée
au prorata de coûts opérationnels de la DGAC ". Or une telle
clé est étrangère à la nature des personnels
formés par l'ENAC, le seul critère pertinent conduisant à
distinguer, parmi les agents qui bénéficient de ces formations,
selon qu'ils sont liés ou non au contrôle aérien et, plus
précisément, qu'ils concourent ou non aux missions que la
redevance litigieuse a pour objet de financer.
Conscient sans doute de cette faiblesse, le ministre avance une autre
explication dans son dernier mémoire, en indiquant que le taux de
57,2 % résulte d'un calcul qui tient compte, d'une part de la
proportion des élèves qui suivent les formations
intéressant le contrôle aérien, d'autre part du coût
relatif des différentes formations.
Mais outre qu'il est pour le moins fâcheux que les indications
données au Parlement dans le document que nous avons mentionné
à l'instant soient radicalement différentes
, l'administration
-pourtant invitée à le faire par une mesure d'instruction
prescrite par votre 8° sous-section- ne nous paraît pas avoir
justifié que cette nouvelle explication permettait de rendre compte d'un
taux aussi élevé ".
Il faut souhaiter que de telles difficultés ne se renouvellent pas.
Elles illustrent la fragilité des exercices de comptabilité
analytique.
Quant aux autres facteurs de vulnérabilité des redevances qui
persistent, il y a lieu d'évoquer sommairement les questions
suivantes.
Il n'est d'abord pas certain que les règles posées pour
encadrer la prise en compte des
investissements
pour le calcul des taux
de redevances soient entièrement respectées.
Si elles paraissent l'être s'agissant des investissements directement
financés par le BAAC, c'est plus douteux s'agissant des investissements
effectués par Eurocontrol dans la mesure où la DGAC a pris le
parti d'incorporer aux coûts de la navigation aérienne la
totalité de sa contribution annuelle à Eurocontrol. Il faudrait
alors s'assurer que les appels à contribution de cette organisation
tiennent elles-mêmes compte des recommandations de l'OACI.
S'agissant du calcul des intérêts
, la règle
de l'OACI est contestable en ce que l'application du taux
d'intérêt ne tient pas compte du niveau d'autofinancement des
immobilisations, étant uniforme quelque soit le mode de financement -sur
emprunt ou sur ressources propres- de l'investissement.
Or, en cas d'autofinancement sur ressources tirées des redevances, le
choix d'appliquer cette règle revient à faire supporter deux fois
le coût financier d'opportunité des investissements aux redevables
des redevances.
S'agissant du fonctionnement du " mécanisme
correcteur ", il conviendrait sans doute d'améliorer le
système en affectant aux sommes qu'il concerne un taux
d'intérêt représentatif du coût d'opportunité
que l'immobilisation de ces montants suppose.
S'agissant des
créances impayées,
par leur
intégration dans la base de calcul des coûts de la navigation
aérienne, l'administration choisit de prélever auprès des
"
bons
payeurs
" des sommes représentatives, par
définition, de coûts qui ne leur sont pas imputables. Autrement
dit, une partie, certes minime, du tarif des redevances apparaît, non pas
comme la contrepartie d'un service rendu aux redevables, mais bien comme la
conséquence d'un mécanisme de solidarité collective entre
les usagers. Cette option, qui n'apparaît pas conforme aux principes de
calcul des redevances rappelées par le juge administratif, pourrait
constituer, pour l'administration, un élément désincitatif
à un recouvrement diligent de créances auprès des mauvais
payeurs.
Elle devrait être abandonnée.
*
* *
Trois
conséquences nocives résultent de la complexité du
système des redevances :
elle pose d'abord un problème de compréhension aux redevables
qui nuit à l'acceptation des redevances ;
elle suppose des arbitrages parfois contestables qui entretiennent le doute et
la suspicion ;
elle s'accompagne de transferts peu transparents entre administrations.
Mais, surtout, elle pose un redoutable problème de financement au
budget annexe.
II. L'ECUEIL DU FINANCEMENT DE LA NAVIGATION AÉRIENNE
Les redevances ne permettent pas d'assurer un financement équilibré du BAAC. Il s'ensuit un dilemme regrettable et dont il faut sortir.
A. UNE IMPASSE DE FINANCEMENT
Le tableau ci-après, tiré du rapport déposé au mois d'octobre 1998 en application de l'article 99 de la loi de finances pour 1996 est, à soi seul, éloquent.
Tableau des coûts inclus dans l'assiette des redevances pour 1999
(En millions de francs)
Catégories |
Coûts |
Charges incorporables |
5.144 |
Coûts calculés |
1.447 |
Coûts supplétifs |
291 |
Assiette totale |
6.882 |
Recettes accessoires |
- 11 |
Mécanisme correcteur |
- 15 |
Exemptions et exonérations |
- 708 |
Assiette réduite (facturée) |
6.148 |
On peut
relever que l'estimation figurant dans le tableau ci-dessus tient compte de la
décision du Conseil d'Etat du 20 mai 1998, qui place les services
de sécurité incendie et sauvetage (SSIS) et de gardiennage parmi
les missions d'intérêt général ne pouvant être
mises à la charge des usagers au moyen des redevances.
Selon ce tableau, le total des coûts de navigation aérienne
à financer s'élève à 6.882 millions de francs.
Ce chiffre peut être mis en rapport avec celui des recettes tirées
des redevances aéronautiques qui s'élèveraient, elles,
à 6.133 millions de francs en 1999.
L'écart entre ces deux données, 769 millions de francs,
manifeste que
le système des redevances ne permet pas de couvrir les
coûts économiques de la navigation aérienne
. Cette
situation s'explique principalement (pour 708 millions de francs), par les
exemptions et exonérations dont bénéficient certains vols.
Il provient en outre de trois autres éléments :
- le jeu du "mécanisme correcteur" pour 15 millions de francs ;
- la prise en compte des recettes accessoires pour 11 millions de
francs ;
- enfin, pour 35 millions de francs, d'un décalage dans le temps
entre facturation et enregistrement des recettes au tournant de deux exercices
budgétaires.
Il faut souligner que si tous les bénéficiaires devaient
contribuer également aux coûts des prestations de la navigation
aérienne, le BAAC enregistrerait en 1999 un supplément de
recettes de 708 millions de francs, ce qui permettrait soit une
modification, à la hausse, du taux d'autofinancement des
investissements, soit d'alléger les autres prélèvements
affectés au budget annexe.
Mais, il y a plus grave : les produits des redevances sont
inférieurs aux crédits budgétaires ouverts en loi de
finances au titre de la navigation aérienne.
Sur la base d'une clef de répartition réaliste ne mesurant pas
artificiellement les crédits d'investissement nécessaires pour
couvrir les charges de la navigation aérienne en ce domaine, on aboutit
à une estimation des crédits budgétaires de navigation
aérienne de 6.511,8 millions de francs correspondant à la
sommation de 4.859 millions de francs de crédits d'exploitation et
de 1.652,8 millions de francs de crédits pour opérations en
capital.
Les produits budgétés au titre des redevances
aéronautiques s'élevant à 6.113 millions de francs,
une impasse de financement de près de 400 millions de francs doit
être couverte par d'autres ressources.
L'année dernière, l'écart entre les recettes
d'exploitation de la navigation aérienne qui s'élevaient à
5.880 millions de francs et les crédits budgétaires
consacrés à la navigation aérienne, de
6.773,1 millions de francs, était plus important. La
réduction de cet écart pour 1999 donne du crédit à
l'observation formulée l'an dernier selon laquelle il est une fonction
directe du niveau des investissements de navigation aérienne une
année donnée. Plus celui-ci est élevé, plus
l'écart se creuse entre les ressources disponibles et les crédits
à financer. C'est la baisse du niveau des investissements qui, pour
l'essentiel, explique la diminution de l'impasse de financement observée
cette année. Mais à l'avenir, cette impasse s'élargira
à nouveau compte tenu en particulier de la charge croissante des
amortissements d'emprunts.
B. LES DEUX ÉCUEILS
1. Déséquilibre financier ou alourdissement de la fiscalité ?
Comme
les recettes propres sont insuffisantes pour financer les investissements, le
recours à d'autres sources de financement s'impose.
On suppose que
les recettes tirées de la taxe de sécurité et de
sûreté sont affectées à d'autres missions que celle
de navigation aérienne, ce qui est conforme à la vocation de
cette taxe et au principe de financement de la navigation aérienne
résultant de la logique même du budget annexe. Il en
résulte que les besoins d'emprunts nécessaires à la
couverture des investissements de navigation aérienne sont
considérables et qu'ils absorbent une part importante de la
capacité d'emprunt du budget annexe telle qu'elle ressort des choix
opérés pour calibrer le recours à l'endettement
extérieur.
Ce phénomène d'insuffisance d'autofinancement des
crédits de la navigation aérienne contraint à retenir un
niveau d'autofinancement des opérations en capital résultant des
missions régaliennes
sensiblement élevé.
Compte tenu de l'évolution qui affecte la subvention versée par
le budget général et les autres recettes,
il est alors
nécessaire d'accroître considérablement le taux de la taxe
de sécurité et de sûreté qui devient la ressource
d'ajustement d'un budget annexe qui, sans elle, verrait son équilibre
financier sérieusement menacé.
2. Un alourdissement de la fiscalité affectée en question
La formule du budget annexe constitue une exception à la règle de non-affectation des recettes posée à l'article 18 de l'ordonnance n° 59-2 portant loi organique relative aux lois de finances. Ce même article dispose en effet que certaines recettes pouvant être directement affectées à certaines dépenses, ces affectations spéciales "prennent la forme de budgets annexes, de comptes spéciaux du Trésor ou de procédures comptables particulières au sein du budget général ou d'un budget annexe." Mais, l'accroissement de la fiscalité affectée au BAAC ainsi que celui des dépenses d'intérêt général qu'il retrace sont à l'origine de doutes quant à la pérennité même du BAAC.
a) Qu'est-ce qu'un budget annexe ?
L'article 20 dispose que "
les opérations financières de
services de l'Etat que la loi n'a pas dotés de la personnalité
morale et dont l'activité tend essentiellement à produire des
biens ou rendre des services
donnant lieu au paiement de prix, peuvent
faire l'objet de budgets annexes
."
La formule du budget annexe, exception aux principes d'universalité et
d'unité budgétaire et à son corollaire le principe de
non-affectation, permet donc
deux formes d'affectation distinctes
:
l'affectation directe de certaines recettes à certaines
dépenses ;
l'affectation par procédure particulière.
Cette deuxième catégorie d'affectation est
décidée par voie réglementaire dans les conditions
prévues à l'article 19 de l'ordonnance.
Ce dernier article
précise que
les procédures particulières d'affectation
sont la procédure de fonds de concours et la procédure de
rétablissement de crédits.
Des définitions précises de ces procédures sont
données à l'article 19. Elles encadrent et limitent les
procédures particulières d'affectation et, par conséquent,
l'entorse qu'elles apportent au principe général de
non-affectation des recettes. Il va de soi que l'actuelle taxe de
sécurité et de sûreté, comme d'ailleurs toute autre
taxe venant s'y substituer, n'entre pas dans ce cadre réservé, on
le sait, aux ressources non fiscales.
Un problème majeur avait été mis en
évidence par votre commission, celui de l'interprétation à
donner aux termes de l'article 21 de l'ordonnance organique.
Celui-ci précise que "
les budgets annexes comprennent, d'une part,
les recettes et les dépenses d'exploitation, d'autre part, les
dépenses d'investissement et les ressources spéciales
affectées à ces dépenses".
En fixant le contenu et la structure des opérations
budgétaires retracées par un budget annexe, il semblait que
l'article 21 jetait les principes à partir desquels on pouvait
définir le champ de l'affectation directe de recettes à certaines
dépenses ouvert par la formule du budget annexe.
Suivant cet article, deux types de ressources semblaient, seules,
pouvoir être affectées au BAAC : des ressources d'exploitation et
des ressources spéciales. Mais aucune définition explicite de ces
ressources n'étant donnée par le texte, il fallait tenter une
exploration de la logique particulière du budget annexe pour comprendre
ce que peuvent être ces ressources. Au terme de cette exploration, les
conclusions suivantes s'imposaient.
L'article 20 mentionné plus haut invite à considérer que
les recettes d'exploitation visées par l'article 21 sont les
recettes perçues en contrepartie de la tarification d'un prix
censé rémunérer l'exploitation du service rendu aux
bénéficiaires des prestations de la DGAC soit, pour l'essentiel,
les recettes tirées des redevances.
Cette interprétation est confortée par l'accolement des termes
"d'exploitation" au mot "recettes" alors que, pour le budget
général, le mot "recettes" n'est accompagné d'aucun
élément de précision. De plus, le texte concernant les
budgets annexes vise les "dépenses d'exploitation" là où,
pour le budget général, sont visées les dépenses
ordinaires.
On peut constater que le lexique des budgets annexes diffère donc de
celui du budget général et trouver cette situation logique dans
la mesure où les budgets annexes retracent les opérations
financières de services qui, par leur nature, offrent des prestations
"donnant lieu au paiement d'un prix", ce que ne fait pas le budget
général.
On peut conclure que les recettes d'exploitation du BAAC sont
principalement les redevances de navigation aérienne, d'autres
ressources tirées de l'exploitation entreprise par la DGAC pouvant y
être ajoutées comme des recettes issues des autres prestations de
service.
Dans cette acception, le concept de recettes d'exploitation diffère
profondément de celui de recettes de fonctionnement. Il s'agit en effet
d'un concept économique et non d'un concept purement comptable.
Cette lecture du texte de l'article 21 de l'ordonnance n'est pas la seule
mais elle paraît plus heureuse que celle qui considérerait comme
d'étroits synonymes les termes "recettes d'exploitation" et "recettes de
fonctionnement".
En effet, si cette dernière interprétation purement juridique
devait être privilégiée, les recettes d'exploitation ne
pourraient couvrir aucune des charges d'investissement du budget annexe.
Celles-ci devraient toutes être financées à partir des
"ressources spéciales" visées par l'article 21 de
l'ordonnance. Dans cette hypothèse, les deux sections du budget annexe,
la section d'exploitation et celle des opérations en capital, devraient
être, chacune, équilibrées par des recettes propres sans
possibilité de transfert d'une section à l'autre.
Mais, il s'ensuit que ni des recettes purement fiscales ni des ressources
d'emprunt ne sauraient être assimilées à des recettes
d'exploitation.
Par conséquent ces recettes ne pouvant être
considérées comme des recettes d'exploitation ne sauraient, au
terme de l'article 21 de l'ordonnance organique, couvrir les
dépenses d'exploitation du BAAC, c'est-à-dire les dépenses
liées à la mission de navigation aérienne alors que, dans
la réalité, elles y contribuent.
Le même écueil se retrouve du côté des
dépenses : que sont les dépenses d'exploitation du budget
annexe ?
L'article 21 de l'ordonnance distingue clairement les dépenses
d'exploitation des dépenses d'investissement pour indiquer quelles
dépenses peuvent figurer à un budget annexe
4(
*
)
.
Ce faisant, l'ordonnance apporte plus de confusion que de clarté
puisque la distinction qu'elle opère entre les dépenses
d'exploitation et les dépenses d'investissement donne à penser
que les charges d'investissement seraient à exclure du champ des
dépenses d'exploitation des prestations de navigation aérienne.
Dans cette hypothèse, les dépenses d'investissement devraient
n'être financées que par les ressources spéciales
qu'évoque l'ordonnance.
On sait bien qu'il n'en est rien -v. supra- et que, si les crédits
budgétaires d'investissement doivent être distingués des
dépenses d'exploitation, celles-ci sont néanmoins tributaires
pour partie des dépenses d'investissement.
En bref, la notion de dépenses d'exploitation devrait être
distinguée de celle de dépenses de fonctionnement : pour la
cerner, il faut ajouter aux dépenses de fonctionnement liées au
service offert aux usagers les charges des opérations en capital qui
concourent à rendre possible l'exploitation du service rendu aux
usagers.
Une autre interprétation qui retiendrait l'idée
d'équivalence entre dépenses d'exploitation et dépenses de
fonctionnement serait ruineuse pour le budget annexe. On sait que,
dans la
pratique, la part des recettes dites d'exploitation qui excède les
besoins de fonctionnement courant du BAAC, est virée en recette de la
section d'investissement. Si une conception des recettes d'exploitation tendant
à les assimiler aux recettes de fonctionnement courant devait
prévaloir les principes d'affectation posés par l'article 21 de
l'ordonnance devraient interdire cette pratique
qui reviendrait à
affecter à des dépenses d'investissement d'autres ressources que
les ressources spéciales mentionnées par l'ordonnance.
Face à une lecture purement juridique des budgets annexes,
l'interprétation juridique et économique qu'on propose de retenir
conduit à ceci que, les dépenses d'exploitation seraient
constituées de l'ensemble des coûts d'exploitation du service de
la navigation aérienne et les recettes d'exploitation, des redevances et
autres recettes directement tirées de l'exploitation du service.
Ce n'est pourtant pas cette voie qu'à suivie le Conseil Constitutionnel
dans sa décision sur la loi de finances pour 1998.
Par cette décision, le Conseil a affirmé le principe
d'universalité des budgets annexes. Il en a conclu que les ressources
fiscales affectées au budget annexe n'avaient pas à être
affectées à une dépense plutôt qu'à une autre
et qu'elles pouvaient ainsi sans contrarier la Constitution ni l'ordonnance
organique concourir aux conditions de l'équilibre général
du budget annexe.
On observera que cette décision a pour effet d'atténuer
considérablement la portée de l'article 21 de l'ordonnance
organique qui semblait, par dérogation aux principes rappelés par
le Conseil et à la règle de non affectation posée par
l'article 18 de la même ordonnance, articuler des règles
d'affection de recettes à certaines dépenses.
Il est bien possible que le Conseil en négligeant une disposition
spéciale au profit d'une référence à des
règles d'ordre général ait souhaité neutraliser un
article qui, à l'évidence, relève d'une conception un peu
vague et est entaché d'une rédaction plutôt floue et
ambiguë.
Il n'empêche que la décision du Conseil, simplificatrice, a pour
effet de réduire la spécificité des budgets annexes et, au
fond, d'atténuer également la portée de l'article 20 de
l'ordonnance.
Il sera sans doute utile à l'avenir d'apporter quelques
précisions au texte de l'article 21 de l'ordonnance
organique.
b) De quelques compromis peu satisfaisants
C'est peut-être parce qu'il a été conscient de ce
problème que le Conseil s'est attaché à commencer à
régler
une difficulté considérable sur le plan des
principes.
On sait que le budget annexe de l'aviation civile abrite des opérations
qui n'ont pas vocation à y être retracées et reçoit,
du coup, des financements qui ne devraient pas lui être affectés.
Ce problème lassant avait été perçu lorsque le
BANA
5(
*
)
avait été
transformé en BAAC.
Dans l'avis du Conseil d'Etat du 17 juillet 1990, la Haute
Assemblée avait considéré que :
"
Si, en revanche, les missions de la Direction Générale, en
ce qui concerne la sûreté des passagers dans les aéroports,
ne peuvent être regardés comme tendant à rendre des
services donnant lieu au paiement d'un prix, dès lors qu'en ce domaine
le législateur a créé la taxe définie à
l'article 302 Bis K du Code Général des Impôts, ces
activités ne représentent, du point de vue tant des moyens en
personnel que des charges financières,
qu'une part très faible
de l'ensemble de l'activité
de la direction générale
de l'aviation civile qui serait reprise dans le budget annexe ;
il s'ensuit
que, même en tenant compte de cette part des missions de la direction
générale les conditions définies à
l'article 20 resteraient remplies
; par suite, il est loisible au
législateur de créer un budget annexe pour les opérations
financières de la direction générale de l'aviation civile
correspondant à l'ensemble des missions ci-dessus rappelées et de
décider que les recettes correspondant au produit de la taxe de
sûreté sur les aéroports seront affectées à
ce budget".
Dès l'origine, l'avis du Conseil d'Etat pouvait ne pas emporter
complètement la conviction.
La Haute Assemblée se référait en effet à
l'article 20 de l'ordonnance et négligeait l'article 21.
Or, si son interprétation de l'article 20 peut satisfaire,
même si le choix de conférer à l'adverbe "essentiellement"
le sens de l'adverbe "principalement" plutôt que celui, plus
philosophique de "naturellement" peut être contesté,
le
défaut de référence à l'article 21,
décidément peu prisé par nos juristes, posait
problème
.
Comme aucune des dépenses régaliennes assumées par le
budget annexe ne peut être assimilée soit à une
dépense d'exploitation, soit à une dépense
d'investissement nécessaire à l'exploitation d'un service, ces
dépenses ne peuvent donc être retracées par le budget
annexe que moyennant "l'oubli" des dispositions de l'article 21 de
l'ordonnance.
Il y a sans doute une contradiction entre cet article 21 et
l'article 20 que le Conseil a alors choisi de résoudre en
privilégiant celui-ci plutôt que celui-là, comme le Conseil
Constitutionnel l'a, semble-t-il, plus récemment, fait. Ce compromis peu
satisfaisant n'a pas réglé toutes les difficultés.
Depuis, le problème est resté pendant et s'est trouvé
aggravé par l'ampleur prise par la part des dépenses
régaliennes dans le budget annexe et par celle du financement
trouvé dans les taxes affectées à ce budget.
Sur ce sujet, il faut souligner que, dans son avis, le Conseil d'Etat avait
considéré que ses observations ne pouvaient valoir que pour
autant que les activités autres que de prestations de service conservent
une place très faible dans l'ensemble de l'activité de la DGAC et
que, parallèlement, la taxe de sûreté procure une part
très faible des recettes du budget.
Votre rapporteur avait fait valoir que tel n'était plus le cas et
que, par conséquent, l'entorse au principe de non-affectation des
recettes pourrait bien dégénérer en une fracture du BAAC.
Il avait ajouté qu'on ne pourrait "sauver" l'affectation à
ce budget annexe des taxes qu'en considérant celles-ci comme appartenant
à la catégorie de ces ressources spéciales que vise
l'article 21 de l'ordonnance organique.
Mais, il avait précisé alors que son produit devrait être
affecté aux seules dépenses d'investissement -ce qui est loin
d'être le cas-, ce qui supposerait, au demeurant, que le budget annexe
puisse abriter des dépenses d'investissement conséquentes
destinées à autre chose qu'à l'exploitation d'un service
faisant l'objet de prestations donnant lieu au "paiement de prix".
La décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 1998
allait globalement confirmer le bien-fondé des observations de votre
rapporteur en indiquant que, de la combinaison des articles 20 et 21 de
l'ordonnance organique, il résultait "
que, pour l'essentiel, les
recettes des budgets annexes doivent être constitués de
rémunérations pour services rendus et que la part des ressources
fiscales qui leur sont affectées doit demeurer réduite
". Le
Conseil devait conclure que tel était encore le cas.
Mais, le rappel
des principes a été compris par chacun comme une sorte de mise en
garde devant le renforcement d'un risque constitutionnel
substantiel.
CHAPITRE III
UN BUDGET DONT LES
DÉPENSES
NE SONT PAS MAÎTRISÉES
La progression apparente des crédits du BAAC semble modérée. Mais, cette modération tient largement à un changement de périmètre budgétaire -v. supra. Surtout, elle n'apparaît pas durable.
I. LA POURSUITE DE L'ACCROISSEMENT DES CHARGES DE PERSONNEL
Le BAAC est, pour moitié, un budget de rémunérations. Les charges de personnel s'accroîtraient de près de 5,2 % par rapport à 1998 après une augmentation de 6 % l'an dernier.
Evolution des charges de personnel depuis 1995
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Evolution 1999/1995 |
Evolution
|
3.311,6 |
3.632,5 |
3.766 |
3.990,6 |
4.198,8 |
+ 26,8 % |
+ 5,2 % |
En 1998, dernière année de traduction budgétaire du précédent protocole triennal du 3 novembre 1994, les charges de personnel étaient supérieures d'1/5ème au niveau atteint en 1995, première année d'application du protocole triennal.
A. LE PROTOCOLE DU 3 NOVEMBRE 1997
Un
nouveau protocole a été conclu le 3 novembre 1997 qui
produira lui-même un accroissement important des charges.
Le protocole récemment conclu comporte en effet de nombreuses mesures
susceptibles d'accroître les charges de personnel, qu'il s'agisse de
créations d'emplois à la DGAC -voir tableau ci-dessous- ou de
mesures indemnitaires pour les personnels en activité ou les personnels
en retraite.
Recrutements DGAC associés au protocole du 3 novembre 1997
Corps |
1998 |
1999 |
2000 |
Total |
ICNA |
80 |
80 |
110 |
270 |
TEEAC |
70 |
70 |
70 |
210 |
IESSA |
30 |
30 |
30 |
90 |
IAC |
4 |
4 |
4 |
12 |
IEEAC |
12 |
12 |
12 |
36 |
ADM.C |
1 |
1 |
1 |
3 |
ATT. |
5 |
5 |
6 |
16 |
ASSIS. |
8 |
9 |
9 |
26 |
ADJ. |
15 |
15 |
15 |
45 |
OUVRIERS |
18 |
21 |
27 |
66 |
INFIRMIERS |
- |
1 |
- |
1 |
ASSIS. SOC. |
- |
1 |
- |
1 |
Total |
243 |
249 |
284 |
776 |
Questionnée sur l'impact financier du protocole, la DGAC a fourni le tableau suivant.
Charges nouvelles annuelles résultant du nouveau protocole DGAC
(en millions de francs)
Années |
1998 |
1999 |
2000 |
Créations d'emplois |
13 |
35 |
100 |
mesures catégorielles |
107 |
114 |
118 |
TOTAL |
120 |
149 |
218 |
Le
niveau des charges de personnel devrait donc être augmenté de
120 millions de francs en 1998 puis de 269 et 487 millions de francs
en 1999 et 2000 respectivement par rapport à une situation sans
protocole catégoriel.
La dynamique de dépenses induite par le seul protocole représente
environ 12,3 % de charges de personnel supplémentaire par rapport
aux données de 1998.
B. LES AUTRES FACTEURS D'EVOLUTION
Mais,
pour apprécier l'accroissement des charges de personnel, il faut prendre
en compte les autres facteurs d'augmentation que sont les mesures
générales applicables à la fonction publique.
Les tableaux suivants décrivent les facteurs d'augmentation des charges
de personnel en 1999 :
|
L.F.I. 1998 |
3 990 573 567 |
29 382 222 |
Interministériel
Type dépense |
Détail dépenses |
Dépenses de personnel |
Impôts et taxes |
Total |
1. Hausse des rémunérations |
11 Revalorisations point FP (1) |
18.126.172 |
439.757 |
18.565.929 |
|
12. Revalo. salaires ouvriers |
8.214.026 |
141.304 |
8.355.330 |
|
13. Accord salarial FP |
7.079.045 |
111.314 |
7.190.359 |
|
14. Indemnité compensatrice CSG |
42.297.146 |
0 |
42.297.146 |
Somme 1. Hausse des rémunérations |
74.731.469 |
692.375 |
75.423.844 |
|
2. Pensions & FSOE (2) |
21. Pensions civiles |
9.300.000 |
0 |
9.300.000 |
Somme 2. Pensions & FSOE |
17.294.859 |
0 |
17.294.859 |
|
3. Protocole Durafour |
31. Abondement Durafour TEEAC (3) |
5.000.000 |
0 |
5.000.000 |
Somme 3. Protocole Durafour |
5.000.000 |
0 |
5.000.000 |
|
TOTAL |
|
97.026.328 |
692.375 |
97.718.703 |
(1)
FP : Fonction Publique
(2) FSOE : Fonds spécial des ouvriers de l'Etat
(3) TEEAC : Techniciens des études et de l'exploitation de l'aviation
civile
Mesures d'ajustement
Type dépense |
Détail dépenses |
Dépenses de personnel |
Impôts et taxes |
Total |
1. Revalorisations |
11. Primes pers. techniques |
16.412.267 |
0 |
16.412.267 |
Somme 1. Revalorisations |
16.412.267 |
0 |
16.412.267 |
|
2. Evolut fonct & qualific |
21. Corps navigation aérienne |
34.120.838 |
278.328 |
34.399.166 |
Somme 2. Evolut fonct & qualific |
|
34.120.838 |
278.328 |
34.399.166 |
3. Effet volume |
31. Avantage fin de carrière 99 |
457.796 |
35.135 |
492.931 |
Somme 3. Effet volume |
457.796 |
35.135 |
492.931 |
|
4. Délocalisations |
41. Non reconduction |
- 15.260.000 |
0 |
- 15.260.000 |
|
42. Dernière tranche STNA (1) |
2.500.000 |
0 |
2.500.000 |
Somme 4. Délocalisations |
- 12.760.000 |
0 |
- 12.760.000 |
|
TOTAL |
|
38.230.901 |
313.463 |
38.544.364 |
|
0,96 % |
|
(1)
STNA : Services techniques de la navigation aérienne
Protocole du 3/11/1997
Type dépense |
Détail dépenses |
Dépenses de personnel |
Impôts et taxes |
Total |
1. Mesures 1998 |
11. Créations d'emplois |
12.821.615 |
176.777 |
12.998.392 |
|
12. Transformations d'emplois |
2.620.988 |
40.279 |
2.661.267 |
|
13. Responsables services |
525.270 |
11.900 |
537.170 |
|
14. Fonctionnels attachés (1) |
595.640 |
12.156 |
607.796 |
|
15. Indice fin. 1015 ICNA-IESSA (1) |
18.249.026 |
372.429 |
18.621.455 |
|
16. Revalorisat indemnitaires |
57.773.592 |
0 |
57.773.592 |
|
17. Avantage fin de carrière |
26.354.856 |
289.762 |
26.644.618 |
|
18. Non reconduction provision |
- 75.000.000 |
0 |
- 75.000.000 |
Somme 1. Mesures 1998 |
43.940.987 |
903.303 |
44.844.290 |
|
2. Mesures 1999 |
21. Créations d'emplois |
21.118.808 |
293.343 |
21.412.151 |
|
22. Transformations d'emplois |
3.580.574 |
52.784 |
3.633.358 |
|
23. Revalorisat indemnitaires |
1.206.945 |
0 |
1.206.945 |
Somme 2. Mesures 1999 |
25.906.327 |
346.127 |
26.252.454 |
|
TOTAL |
69.847.314 |
1.249.430 |
71.096.744 |
|
|
1,75 % |
|
|
(1)
ICNA : Ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne
IESSA : Ingénieurs électroniciens des systèmes de
sécurité aérienne
Moyens nouveaux
Type dépense |
Détail dépenses |
Dépenses de personnel |
Impôts et taxes |
Total |
1. Revalorisations |
11. Primes IAC (1) |
59.749 |
|
59.749 |
Somme 1. Revalorisations |
|
59.749 |
0 |
59.749 |
2. Evolut fonct & qualific |
21. Budgétis surnombres |
2.163 |
- 2.163 |
0 |
|
22. Avancement infirmières |
34.474 |
496 |
34.970 |
Somme 2. Evolut fonct & qualific |
|
36.37 |
- 1.667 |
34.970 |
3. Effet volume |
|
997. 525 |
2.475 |
1.000.000 |
TOTAL |
|
1.093.911 |
808 |
1.094.719 |
|
|
0,03 % |
|
|
(1) IAC : Ingénieurs de l'aviation civile
à déduire révision des services votés impôts et taxes |
|
- 2.256.076 |
|
TOTAL MESURES DE PERSONNEL |
206.198.454 |
0 |
|
|
5,17 % |
0,00 % |
|
PLF 1999 |
4.196.772.021 |
29.382.222 |
|
Il
apparaît ainsi que les crédits ouverts en 1999 au titre du
protocole ne sont budgétés qu'à hauteur de 47,7 % des
charges du protocole en année pleine en 1999.
Malgré cela, les dépenses de personnel s'accroissent de
206,2 millions de francs car aux mesures catégorielles s'ajoutent
les charges des mesures générales qui s'élèvent
à près de 100 millions de francs.
Ces évolutions sont évidemment préoccupantes puisqu'elles
laissent présager le maintien d'un rythme de progression des charges de
personnel très rapide et sans commune mesure avec les contraintes qui
pèsent sur les salaires des entreprises de transport aérien
confrontées à la nécessité d'affronter la
concurrence.
Il faut ajouter que cette perspective jure avec les conditions
générales de progression des rémunérations de la
fonction publique.
On peut au surplus redouter, compte tenu de la structure des
rémunérations des personnels de la DGAC marquée par
l'importance des indemnités, les effets retardés de ces
évolutions sur les charges de pension.
Enfin, pour s'en tenir aux seuls chapitres de rémunération hors
cotisations et prestations sociales, les évolutions significatives
suivantes doivent être rappelées :
|
1995 |
1997 |
1998 |
1999 |
Ecart
1
|
Ecart
1
|
Rémunérations des titulaires et contractuels |
1.463,9 |
1.644,4 |
1.752,5 |
1.820,6 |
24,4 |
3,9 |
Rémunérations des personnels ouvriers |
170,7 |
186,3 |
191,9 |
199,5 |
16,9 |
4 |
Vacataires et divers |
12,7 |
19,2 |
18,9 |
15,9 |
25,2 |
- 15,9 |
Primes et indemnités |
886,3 |
1.074,8 |
1.164,6 |
1.264,2 |
42,6 |
8,6 |
Total |
2.533,6 |
2.924,7 |
3.127,9 |
3.300,2 |
30,2 |
5,5 |
(1)
En pourcentage
Rapportée au nombre d'agents, la masse salariale hors cotisations
sociales donnait un coût par agent de 255.000 francs en 1995, de
284.920 francs en 1997, de 301.000 francs en 1998 et de
311.398 francs en 1999 soit un niveau de rémunération
individuelle supérieur de 22 % au montant atteint en 1995.
L'essentiel de la progression de la masse salariale de la DGAC vient donc de
la revalorisation des rémunérations individuelles, le reste
provenant de l'accroissement des effectifs.
Ce n'est donc pas la
nécessité de mettre en place des capacités nouvelles de
traitement du trafic qui explique à titre principal le glissement de la
masse salariale. Cette nécessité reste d'ailleurs à
démontrer compte tenu d'une évaluation réaliste des
conditions de travail des agents du contrôle aérien.
Ces évolutions sont évidemment peu raisonnables au regard des
contraintes financières du moment qui s'imposent tant à la
fonction publique qu'aux salariés des entreprises du transport
aérien
.
II. LES DÉPENSES EN CAPITAL NE SONT MAÎTRISÉES QU'EN APPARENCE
Le niveau des dépenses en capital s'élève à 2.129,8 millions de francs et marque une baisse de 4,8 % par rapport à 1998. Cette évolution semble manifester une maîtrise portant sur des dépenses dont le rythme de croissance a été très vif dans le passé. Pourtant, une analyse détaillée conduit à remettre en cause la réalité de cette évolution.
A. LES DÉPENSES D'AMORTISSEMENT FINANCIER
Ces
dépenses correspondent au remboursement en capital des dettes du BAAC.
Leur progression est considérable : de 17,6 % l'an dernier, elle
passe à 33,8 % cette année et cette charge
s'élève à 446,2 millions de francs. Cette tendance au
terme de laquelle les dépenses d'amortissement constituent la
catégorie de dépenses la plus dynamique du budget annexe
reflète l'endettement passé.
Le tableau qui suit retrace la progression du capital restant dû au
31 décembre de chacune des dernières années connues.
(En millions de francs)
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1.852,9 |
1.668,9 |
1.861,3 |
2.439,4 |
3.098,1 |
3.798,8 |
4.507,8 |
De
1992 à 1998, l'endettement net aura été multiplié
par plus de 2,4. En dépit d'une forte progression des remboursements,
l'endettement nouveau qui se situait autour du milliard de francs par an se
traduirait par une situation de dette alarmante. Si 1999 traduit une inflexion
avec un niveau d'emprunt de 830 millions de francs, son caractère
durable est douteux puisqu'elle est complètement due à des
produits exceptionnels -la vente d'un ensemble immobilier- pour
125 millions de francs et qu'elle s'inscrit dans un contexte de
réduction des investissements qui ne sera pas durable -voir
ci-dessous.
La situation d'endettement du BAAC est inquiétante.
Toute tension sur les taux d'intérêt exercerait un effet à
la hausse des charges d'intérêt compte tenu de la part du stock de
dettes contractée à taux variable. Elle se traduirait en outre
par un renchérissement des nouveaux emprunts qui, avec un
décalage, exercerait le même effet.
En outre, à terme, les charges d'amortissement financier annuelles
tendent vers le niveau d'endettement supplémentaire contracté
chaque année, soit 1 milliard de francs.
L'évolution enregistrée de ce point de vue depuis 1992 rend
partiellement compte de ce phénomène.
Evolution des charges d'amortissement
(en millions de francs)
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
174,9 |
183,9 |
187,7 |
261,9 |
252,3 |
283,5 |
333,5 |
446,2 |
De 1992 à 1999, ces charges sont multipliées par 2,5. Sans que l'échéance puisse être précisément établie puisqu'elle dépendra des mesures d'étalement des amortissements, la dérive vers un niveau de charges de 1 milliard de francs est en cours. Elle se traduira par une progression soutenue du taux des redevances et exercera un fort effet d'éviction sur les investissements physiques de la DGAC qu'on commence à percevoir cette année.
B. LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT
Elles s'élèveraient à 1.683,6 millions de francs, soit une chute de 11,6 % par rapport à 1998.
(1) Les investissements de navigation aérienne
Les
investissements de navigation aérienne représentent 71 % du
total des investissements. Les crédits de paiement avec
1.195,5 millions de francs seraient en recul sensible, de 12,7 %,
tandis que le niveau des autorisations de programme ouvertes en 1999 baisserait
de 11,1 %.
Compte tenu du niveau des autorisations de programme en
compte la diminution des crédits de paiement ne pourra être
maintenue.
Une part importante des investissements de navigation aérienne consiste
à achever le programme "Operator Input and Display System" -ODS-
nouvelle dénomination du programme PHIDIAS. Initié au
début de la décennie, ce programme représente un
coût de 1,025 milliard de francs dont plus de la moitié
-530 millions de francs- pour des achats de matériels.
Les investissements réalisés dans le domaine de la navigation
aérienne sont à l'origine d'interrogations persistantes
:
Le projet CAUTRA-5
est un projet à très long terme, 2015,
et est l'homologue français du programme EATCHIP d'Eurocontrol.
La définition du stade ultime du schéma est encore, comme pour
l'EATMS d'Eurocontrol, un sujet de recherche.
On comprend mal ce qui justifie la redondance des efforts consentis pour
construire le schéma de navigation aérienne du futur.
Il est impératif de rechercher une meilleure cohérence des
dépenses d'investissement entre les programmes nationaux et les
programmes européens.
Le programme ODS pose le même type de problèmes.
L'argumentaire développé par la DGAC pour justifier ces
investissements dont la variable essentielle, les gains de productivité
qu'ils permettraient, suppose l'acceptation du personnel et une
démonstration qui n'est pas encore faite et dont l'impact
économique dépend des conditions de leur affectation, pourrait
apparaître désuet en cas de renforcement des missions
d'Eurocontrol.
(2) Les investissements du service des bases aériennes
Estimés à 483 millions de francs en 1998, les investissements du service des bases aériennes passeraient à 420,1 millions de francs en 1999, soit une diminution sensible de 13 % et de 62,9 millions de francs en niveau.
Evolution des investissements des bases aériennes
|
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Ecarts en % |
|
|
|
|
|
|
1999/1996 |
1999/1998 |
Infrastructures
Total |
123
|
140,6
|
163
|
173,3
|
40,9
|
15,9
|
La
diminution des investissements provient essentiellement de la baisse des
dépenses résultant de la construction du nouveau siège de
la DGAC. On peut noter en revanche un accroissement des dépenses
d'infrastructures de 10,3 millions de francs, et une stabilisation des
dépenses de sûreté.
Alors que le coût des équipements de sûreté
jugés nécessaires est considérable du fait des besoins du
contrôle des bagages de soute, la
stabilité des
moyens consacrés aux investissements de sûreté n'est pas
satisfaisante.
DEUXIÈME PARTIE :
LES CRÉDITS DE TRANSPORT AÉRIEN ET
DE
MÉTÉOROLOGIE DU BUDGET DU MINISTÈRE DE
L'ÉQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT
ET DU
TOURISME
I. LES CREDITS DE TRANSPORT AERIEN
A. LES CRÉDITS
1. Présentation générale
Crédits de paiement du transport aérien
(en millions de francs)
|
1998 |
1999 |
Ecart en % |
Subvention au BAAC
Total |
215
|
215
|
0
|
Les
crédits du transport aérien du ministère de
l'équipement, des transports, du logement et du tourisme
s'élèveraient à 1.642 millions de francs, soit une
diminution de leur niveau par rapport à 1998 de 1,35 %.
Le montant de la
subvention versée au BAAC
serait
inchangé, à 215 millions de francs.
Cette prévision confirme le regrettable désengagement de l'Etat
du transport aérien observé depuis quelques années qui
manque de cohérence avec l'ampleur des besoins opérationnels ou
résultant des difficultés financières du BAAC.
Subvention d'équilibre du BAAC
(En millions de francs)
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
253 |
305 |
265 |
260,6 |
260 |
215 |
215 |
215 |
Le
montant des
soutiens à la recherche-amont
après avoir
été amputé de 230 millions de francs l'an dernier
regagnerait un peu de terrain en s'accroissant de 23,1 millions de francs.
Les crédits prévus pour payer en 1999 les
échéances des
avances remboursables
s'infléchiraient, passant de 972,5 à 934 millions de
francs, soit une diminution de 4 % faisant suite l'an dernier à une
augmentation de 247,5 millions de francs (+ 34,4 %).
Le montant des
subventions à des organismes tiers
serait
réduit de 7 millions de francs, soit de 26,3 %.
Par rapport à la présentation qui en était donnée
traditionnellement, le projet de loi de finances pour 1997 avait innové
en agrégeant les crédits par grands types de production. Il
n'était donc plus immédiatement possible d'identifier le
financement de chacun des projets soutenus par l'Etat. Le projet de budget pour
1998 n'avait pas entièrement tenu compte des observations
formulées l'année précédente sur ce point, mais
avait cependant un peu amélioré la présentation des
crédits. Le projet de budget pour 1999 se caractérise par le
statu quo.
Après reconstruction, on peut donner de l'évolution des
crédits l'image qui suit :
Evolution des crédits de transport
aérien
Crédits de paiement
(en millions de francs)
|
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Ecart 1999/1998 |
Moyenne 1999-1996 |
Etudes et recherche amont |
11,2 |
1,0 |
451,0 |
473,1 |
+ 231 |
* NS |
Hélicoptères |
|
68,0 |
94,0 |
86 |
- 8 |
82,7 |
Moteurs |
374,0 |
149,0 |
40,0 |
10 |
- 30 |
143,25 |
Equipements de bord |
200,0 |
190,0 |
190,0 |
170 |
- 20 |
187,5 |
Aviation légère |
7,0 |
6,0 |
6,0 |
4 |
- 2 |
5,75 |
Aviations de transport |
434,0 |
318,0 |
642,5 |
664 |
+ 21,5 |
514,6 |
Subventions |
48,9 |
37,0 |
27,0 |
199 |
- 7,1 |
33,2 |
Total |
1.075,1 |
763,0 |
1.450,5 |
1.606,1 |
- 23,5 |
1.178,9 |
Les
crédits d'études et de recherche
qui avaient presque disparus
du budget, conséquence de leur transfert au budget du ministère
de la défense, ont été réaffectés au budget
des transports dans la loi de finances pour 1998 du fait d'un transfert en sens
inverse, résultat des débats tenus lors de l'examen de la loi de
programmation militaire. Ils s'élèvent à
473,1 millions de francs en crédits de paiement et à
720 millions de francs en autorisations de programme.
Les avances remboursables représentent l'essentiel des crédits
avec 934 millions de francs.
2. L'exécution des crédits
L'exécution des crédits de transport
aérien
souffre régulièrement des régulations budgétaires
intervenant en cours d'année.
En 1997, une série d'annulations l'avait marquée.
L'annulation de crédits résultant de l'arrêté du
9 juillet 1997 a touché le chapitre 53-22 à hauteur de
194,5 millions en autorisations de programme et 257,25 en
crédits de paiement. Cette annulation a été
répartie de la manière suivante :
(en millions de francs)
|
AP |
CP |
Recherche amont de
l'aéronautique civile
|
33,5
|
116,25
|
Total |
194,5 |
257,25 |
5,5 millions de francs ont également
été
annulés sur le chapitre de subventions.
Les crédits d'avances remboursables
ont donc été
réduits de 141 millions de francs, soit 18,5 % des dotations
initialement prévues.
Quant aux crédits de recherche-amont
, il faut ajouter
l'annulation de 52,6 millions de francs réalisée par
l'arrêté du 19 novembre au montant des crédits
annulés en juillet, si bien que le total des réductions de moyens
s'élève à 168,8 millions de francs, soit près
de 25 % des crédits initialement prévus.
En 1998, une première annulation de crédits de 92 millions
de francs est intervenue dès le 16 janvier. Elle ne devrait pas
être suivie d'autres opérations de cette sorte.
Même si la pratique observée en 1998 paraît plus raisonnable
que celle de l'année précédente,
ces différentes
annulations posent le problème de la capacité de l'administration
à programmer convenablement l'action de soutien à l'industrie
aéronautique.
Sans doute faut-il nuancer.
Pour les avances remboursables
, il semble
que les annulations de crédits ne soient que le reflet des
difficultés des industriels à conduire les programmes
conventionnés sur la base des prévisions contractuelles. Cette
observation vaut tout particulièrement pour les programmes relatifs aux
moteurs. En 1997, ces derniers devaient théoriquement donner lieu
à 149 millions de francs d'avances remboursables. Cette
prévision s'est révélée excessive compte tenu des
développements réels si bien que les crédits ont pu
être réduits de 92 millions de francs (61 % des
dotations initiales). Cette annulation de conséquence est, en
particulier, venue de l'échec rencontré par la SNECMA dans le
développement du moteur CFM XX.
Le moteur CFM XX
Le
projet de moteur CFM XX, d'une poussée voisine de 42.000 livres
avait été étudié conjointement par General Electric
et Snecma dans le but de motoriser le projet de version allongée de
l'A340 alors en cours de définition par Airbus Industrie.
L'évolution des spécifications de l'Airbus allongé et le
retard observé dans le calendrier de l'avion ont conduit au gel de ce
projet de moteur. Airbus industrie a marqué sa préférence
pour un dérivé sensiblement plus lourd. L'étude
préliminaire de ce moteur avait été confiée par
Airbus Industrie à General Electric jusqu'à fin
octobre 1996, cette clause d'exclusivité ayant été
prorogée. Les conditions de participation de Snecma à ce
programme de moteur devaient être précisées une fois ces
études terminées. Aucun des crédits réservés
pour le soutien du CFM XX (140 millions de francs en CP) n'a
été utilisé en 1996, compte tenu des orientations
nouvelles prises par Airbus Industrie et de ses incidences sur le projet de
moteur.
Dans le projet de budget pour 1997, une provision de 80 millions de
francs était inscrite. Elle n'a pas non plus été
utilisée. La décision de confier la motorisation du nouvel Airbus
à Rolls Royce a, de ce fait, sonné le glas pour ce projet.
Si les annulations de crédits d'avances remboursables peuvent
globalement être considérées comme la conséquence
normale des problèmes rencontrés dans le développement de
produits nouveaux, il faut veiller à ce qu'elles ne soient pas la
conséquence d'un ralentissement du soutien aux programmes accordé
par l'Etat.
En revanche,
pour ce qui concerne
les crédits de
recherche-amont
, les annulations de crédits ne peuvent être
considérées autrement que comme une réduction des soutiens
publics à un secteur de recherche essentiel pour l'avenir industriel,
dont la programmation devrait être soigneusement élaborée
et scrupuleusement respectée.
3. Le détail des crédits pour 1999
Le
niveau des avances remboursables dépend des conventions passées
avec les industriels et des projets nouveaux ayant reçu l'aval des
pouvoirs publics.
Leur affectation était la suivante en 1997 :
Les avances remboursables en 1997
(en millions de francs)
|
|
AP |
CP |
Article 21 |
Hélicoptère EC 165 |
90 |
68 |
Article 36 |
Moteurs GE 90 |
91 |
69 |
|
Moteur du nouveau A340 ex CFM XX |
100 |
80 |
Total article 36 |
191 |
149 |
|
Article 60 |
Equipements de bord |
220 |
190 |
Article 81 |
Avions de transport A 330 - A 340 |
141 |
142 |
|
Avions de 100 places |
40 |
30 |
|
A 330-320 |
90 |
140 |
Total article 81 |
271 |
312 |
|
Article 84 |
Autres aéronefs |
|
|
|
Aviation légère |
6 |
6 |
TOTAL |
778 |
725 |
En 1998, ils étaient calibrés comme indiqué ci-dessous hors un poste "autres aéronefs" doté de 6 millions de francs de crédits de paiement :
Détail des avances remboursables prévues pour 1998
(en millions de francs)
Programmes |
AP |
CP |
Hélicoptère EC 165 |
103 |
94 |
Moteur GE 90 |
49 |
10 |
Nouveaux moteurs SNECMA (provision) |
40 |
30 |
Equipements (divers programmes) |
220 |
190 |
Avion de 100 places |
42 |
38 |
Airbus A330-200 |
80 |
100 |
Airbus A340-500 et 600 |
603 |
504,5 |
TOTAL |
1.137 |
966,5 |
En 1999, ils devraient être consacrés aux opérations suivantes :
Les avances remboursables en 1999
(en millions de francs)
|
|
AP |
CP |
Article 21 |
Hélicoptère EC 165 |
81 |
86 |
Article 36 |
Moteurs (nouveaux) |
20 |
10 |
Total article 36 |
20 |
10 |
|
Article 60 |
Equipements de bord |
250 |
170 |
Article 81 |
Avions de transport A 340 - 500 et 600 |
735 |
644 |
|
Avions de 70 à 110 places (nouveau) |
20 |
10 |
|
A 330-320 |
0 |
10 |
Total article 81 |
755 |
664 |
|
Article 84 |
Autres aéronefs |
4 |
4 |
|
Aviation légère |
|
|
TOTAL |
1.110 |
934 |
Les
programmes soutenus seraient les suivants :
L'EC 165
L'hélicoptère EC 165 est le successeur du Dauphin dans la
catégorie des hélicoptères moyens de 4 à 6 tonnes.
Capable d'accueillir 12 passagers, sa charge utile est de 2,5 tonnes.
Cet hélicoptère livrable à partir de l'an 2000 affichera
une vitesse de 330 Km/h et une distance franchissable de 890 km. Le niveau
acoustique de l'appareil se situe à - 8 db par rapport aux normes
de l'OACI. Le marché potentiel est estimé à plus de
600 unités.
En 1997, année de début du soutien, ce programme a fait l'objet
d'une dotation 90 MF en AP de 68 MF en CP, ramenée à
67 MF en AP et 51 MF en CP par suite d'une annulation de
crédits de 23 MF et 17 MF ; ces dotations ont
été complétées, en 1998, à hauteur de
103 MF en AP et 94 MF en CP. La demande pour 1999
s'élève à 81 MF en AP et 86 MF en CP.
Le programme devrait trouver son achèvement cette année puisque
la première livraison est prévue pour l'an 2000. Toutefois, cette
échéance pourrait être quelque peu retardée ce qui
n'empêcherait pas le déroulement du 1er vol du
démonstrateur dès cette année.
Il est à souligner que les annulations de crédits intervenues en
1997 avaient dû être compensées par un fort ressaut des
crédits en 1998. Cela doit conduire à conclure à
l'inopportunité et à l'ineffectivité des
régulations en cours d'année lorsqu'elles frappent des programmes
au développement normal et régulier.
Les moteurs
Le projet de moteur CFM XX, d'une poussée voisine de 42.000 livres
a dû être abandonné. Ce programme avait été
envisagé dans le but de motoriser les premiers projets de version
allongée de l'A 340. Après une analyse de marché et des
besoins des compagnies aériennes, Airbus Industrie a finalement
opté pour un projet d'avion de capacité et de rayon d'action
sensiblement plus grands, qui demande pour sa propulsion un réacteur
plus puissants (près de 56.000 livres).
La SNECMA travaille maintenant sur d'autres projets de motorisation, notamment
pour les gammes d'avion de plus faible capacité (bas de gamme Airbus,
bi-réacteur de transport régional).
Les dotations demandées sont destinées à soutenir le
projet qui aura été retenu.
On rappelle que les dotations des lois de finances des années
précédentes, s'étaient élevées à
186 MF en AP et 140 MF en CP pour 1996
, réduits à
101 MF et 87,5 MF au profit de la première annuité du
financement de l'A330-200,
100 MF en AP et 80 MF en CP pour
1997
avec une annulation de 150,6 MF sur les AP et 92 MF sur les
CP,
40 MF en AP et 30 MF en CP pour 1998
amputés
à hauteur de 32 MF en AP et 11 MF en CP par la mesure
d'annulation de janvier.
Les équipements de bord
Cette ligne budgétaire a pour objet d'aider les industriels
français à développer, seuls ou en coopération, les
équipements de bord destinés essentiellement aux Airbus, mais
également aux autres avions français ou étrangers sur
lesquels ils peuvent être retenus.
En 1997, 205 MF en AP et 180 MF en CP
ont été
consacrés à ce secteur, compte tenu d'une annulation de
15 MF en AP et 10 MF en CP.
Les montants prévus par la LFI pour 1998 ont été
ramenés à 212 MF en AP et 183 MF en CP par l'annulation
du 16 janvier.
Les avions de transports
L'A330-200
est une version à rayon d'action augmenté de
l'Airbus A330. Cet appareil pourra effectuer des étapes de 11.700
kms, soit 3.000 kms de plus que la version de base. Ce rayon d'action est
sensiblement supérieur à celui des Boeing B 767-300 ER.
L'économie d'exploitation de l'A 330-200 sera meilleure de
7,5 % par rapport à son concurrent. Le marché est
estimé aux environs de 300 unités. Au 1er juillet 1997,
le programme A 330-200 avait déjà enregistré
près de 50 commandes fermes. L'A 330-200 a été
lancé le 24 novembre 1995. Le calendrier actuel prévoit une
entrée en service en avril 1998. Le premier vol a été
réalisé le 13 août 1997. Le coût des travaux
à la charge d'Aérospatiale est de 1 Mdf courant
représentant environ 40 % du programme.
Le soutien de l'Etat
s'inscrit à hauteur de 33 % des dépenses, en
conformité avec les dispositions de l'accord bilatéral du
17 juillet 1992, soit un montant de 330 MF.
Les 10 MF de crédits de paiement demandés pour 1999
permettront de solder cette opération pour laquelle, respectivement
90 MF et 140 MF étaient prévus en AP et CP pour 1997,
et 80 MF et 100 MF en 1998.
Le programme d'avion de 100 places
, qu'il était prévu
de réaliser dans le cadre d'une coopération entre les industries
chinoise et européenne, est aujourd'hui abandonné, principalement
parce que les dernières études approfondies menées par les
industriels ont montré que les conditions de sa viabilité
économique ne paraissaient pas acquises. Airbus a annoncé
à l'occasion du Salon de Farnborough le
prélancement d'un
nouvel appareil, l'A318, qui serait conçu à partir de l'actuel
A319.
Les dotations demandées sont destinées à initialiser un
soutien à ce nouveau projet, une fois qu'il aura été
finalisé, ou à un projet de bi-réacteur de transport
régional.
Elles viendront compléter les dotations prévues par les
précédentes Lois de finances initiales, 40 MF en AP et
30 MF en CP pour 1996 et 1997, 42 MF en AP et 38 MF en CP pour
1998,
dotations particulièrement affectées par les mesures
d'annulation de ces trois dernières années
puisque les
crédits disponibles pour l'exécution 1998 s'élèvent
à 42,5 MF en AP et 32,5 MF en CP.
Airbus a entrepris la réalisation de
nouvelles versions de l'Airbus
A340-500 et 600
qui auront une capacité et un rayon d'action accrus.
L'A340-600 pourra emporter 370 passagers sur des distances voisines de
13.900 kms, alors que l'A340-500 emmènera jusqu'à
313 passagers sur 15.800 kms. Ces deux nouvelles versions, qui font
déjà l'objet de 34 commandes fermes et 40 options
seront disponibles dès 2002 et concurrenceront directement les Boeing
B777-300 et B747-400.
Les dotations demandées permettront la poursuite du soutien par avances
remboursables.
Les autres aéronefs (aviation légère)
Depuis le début des années 80, l'Etat, en apportant son aide
à de nombreux développements (TB 20, TBM 700, Robin 3000, moteurs
JPX et PRV, planeurs Marianne et Pégase...), a contribué au
maintien de la construction aéronautique légère
française. Plus récemment, cette politique d'aide a permis
à la Socata et Renault Sport de développer un moteur pour avions
légers, permettant de mettre fin au monopole détenu par
l'américain Lycoming. Il est prévu de poursuivre cette politique
à l'avenir et de soutenir les projets de développement ou de
recherche susceptible d'accroître le dynamisme de ce secteur.
Sur la dotation initiale de l'année 1997 de 6 MF en AP et CP, un
montant de 2 MF a annulé ; la dotation initiale pour 1998,
également de 6 MF, a été annulée à
hauteur de 1 MF.
B. UNE STABILISATION DE L'EFFORT DE SOUTIEN PUBLIC
La
réduction des crédits d'avances remboursables atténue les
effets favorables de la progression des crédits de recherche amont.
Les moteurs de la SNECMA sont en panne et faute de projets ne sont plus
financés ou presque. L'avion sino-européen de 100 places ne
décollera pas. Les avances remboursables prévues à ce
titre disparaissent naturellement au profit d'un nouveau projet, l'A 318.
En revanche, les versions allongées des A 340 et A 330
poursuivent leur carrière.
Le montant des avances remboursables qui est budgété traduit
l'absence d'accompagnement financier du futur gros porteur A 3XX dont, certes,
la décision de lancement n'a pas encore officialisée, mais dont
le principe semble acquis.
En outre, le montant des avances remboursables sera significativement
inférieur à celui des remboursements dus sur les avances
remboursables antérieurement concédées, si bien que le
bilan du mécanisme sera défavorable en 1999, avec, par exemple,
des transferts nets versés par Aérospatiale, à hauteur de
près de 800 millions de francs.
Cette charge, si elle est la rançon des avantages octroyés
à l'entreprise dans le passé et si elle traduit en outre les
succès commerciaux des programmes alors soutenus, n'en est pas moins
considérable au point que le redressement en cours des entreprises
concernées pourrait être compromis par ces versements. Il est
alors loisible de considérer comme indispensable que l'Etat prenne
l'initiative de mieux équilibrer ses relations financières avec
elle.
Ces données contrastent pour le moins avec l'image complaisamment
répandue selon laquelle notre système de soutien "distordrait" la
concurrence en octroyant un avantage indu à nos entreprises.
Si notre
système offre un avantage ponctuel aux entreprises, il n'est pas un
mécanisme systématique de financement public de la construction
aéronautique civile. Il convient donc de compléter les avances
remboursables et de rééquilibrer les interventions de l'Etat.
C'est l'occasion de rappeler les principales conclusions du rapport
adopté par la commission des finances sur ce thème le
24 juin 1997.
Un réexamen des règles internationales
qui encadrent la
politique de soutien public s'impose qu'il s'agisse de l'accord
euro-américain du 17 juillet 1992 ou de l'adaptation des
règles européennes relatives aux aides publiques.
Le soutien public à la construction aéronautique civile doit
être augmenté
et mis à niveau afin de contrer les
effets sur notre compétitivité des soutiens publics
accordés par nos concurrents et de permettre à nos constructeurs
de poursuivre un développement sans lequel les acquis seraient perdus.
En effet, l'avenir de nos entreprises aéronautiques est certes
conditionné par des efforts de maîtrise des coûts mais aussi
par leur capacité à développer leurs chiffre d'affaires,
ce qui suppose de diversifier une offre encore insuffisante.
Il apparaît prioritaire de développer l'A3XX et de mettre la
SNECMA en mesure de suivre l'offre mondiale.
La panoplie de notre soutien public doit être diversifiée.
Une mise à niveau des fonds propres des entreprises s'impose
, qui
doit s'accompagner, si les entreprises concernées devaient rester, pour
l'essentiel publiques, d'une clarification des rapports entre l'Etat et ces
entreprises et, en particulier, d'une réforme des modalités de
contrôle de l'Etat passant par l'affirmation d'un "chef de file" qui
devrait être le ministre chargé de la conception de la politique
dans le domaine de l'aéronautique civile.
La proportion des aides indirectes doit être accrue
puisque les
avances remboursables sont, en l'état, soumises à de stricts
plafonds. Mais, cela suppose une meilleure programmation des soutiens à
la recherche au niveau national et européen.
L'environnement des entreprises de construction aéronautique doit
être amélioré.
L'environnement européen doit être fortifié.
- Il est nécessaire de construire de vrais ensembles
européens sans que les difficultés rencontrées par ce
processus obèrent les développements industriels
nécessaires.
- Une diplomatie aéronautique doit émerger à
l'échelle européenne sur le modèle de la diplomatie
Boeing.
- Une plus grande harmonisation en Europe doit marquer différentes
procédures qui constituent l'environnement du transport
aérien : la certification, mais aussi les procédés de
navigation aérienne et la promotion à l'exportation des normes et
procédés européens.
Au plan national, certaines mesures s'imposent.
- Le principe de la fusion Aérospatiale-Dassault doit être
approuvé.
- Nous devons nous doter d'un pôle permanent d'expertise et d'animation
de notre politique de soutien à l'industrie aéronautique civile,
les processus de décision en ce domaine n'apparaissant pas pleinement
satisfaisants. L'administration principalement chargée de la conception
de notre politique en ce domaine, la Direction des programmes
aéronautiques civils du ministère des transports, doit se voir
reconnaître une responsabilités éminente et ses moyens
propres doivent être renforcés sans accroissement net des
fonctionnaires publics.
C. UNE STRUCTURATION DE L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE EUROPÉENNE QUI BUTE SUR DES PROBLÈMES À RÉSOUDRE
Si les résultats des principaux avionneurs récapitulés dans les tableaux ci-après démontrent que l'industrie européenne a réalisé des performances plus satisfaisantes que son concurrent, la multiplicité des tableaux concernant les industriels européens contraste avec l'unicité du tableau nécessaire pour rendre compte de l'activité de production d'avions commerciaux aux Etats-Unis.
Résultats des principaux avionneurs
Boeing
(1)
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Chiffre
d'affaires (millions de dollars)
|
21.924
|
19.515
|
22.681
|
45.800
|
Résultat net (millions de dollars) |
856 |
783 |
1.095 |
- 180 |
Effectifs |
119.400 |
109.400 |
147.000 |
238.000 |
(1) La nouvelle entité Boeing résultant de la fusion avec McDonnell Douglas devrait réaliser en 1997 un chiffre d'affaires de l'ordre de 34 milliards de dollars.
Aérospatiale
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Chiffre
d'affaires (millions de francs)
|
48.653
|
49.226
|
50.885
|
56.293
|
Résultat net total (millions de francs) |
- 535 |
- 1.442 |
613 |
1.423 |
Dont part du groupe |
- 483 |
- 981 |
812 |
1.418 |
Effectifs |
39.500 |
38.600 |
37.700 |
37.087 |
British aerospace
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Chiffre
d'affaires (millions de livres)
|
7.873
|
6.627
|
7.441
|
8.546
|
Résultat net (millions de livres) |
138 |
140 |
311 |
161 |
Effectifs |
47.900 |
45.400 |
47.000 |
43.400 |
(1) Avions commerciaux
DASA
|
1996 (1) |
1997 |
Chiffre
d'affaires (millions de DM)
|
12.699
|
15.286
|
Résultat net (millions de DM) |
1.202 |
7 |
Effectifs |
44.174 |
43.521 |
(1)
La baisse du chiffre d'affaires résulte du changement de
périmètre. Ainsi dans la branche aéronautique civile cette
évolution est due à l'arrêt des activités Fokker et
Dornier.
CASA
En 1997, CASA a réalisé un chiffre d'affaires de
4,8 milliards de francs, soit une augmentation de 6 % par rapport à
1996. Les activités aéronautiques civiles contribuent pour
56 % au chiffre d'affaires total. Le groupe espagnol, dont les effectifs
s'élèvent à 7.900 personnes, a enregistré un
bénéfice de 260 millions de francs, en hausse de 16,6 %
par rapport à 1996.
L'Europe est à son tour lancée dans un processus
d'intégration de son industrie aéronautique pour réagir
à la fusion entre Boeing et Mc Donnel Douglas.
Bref historique du processus :
On peut
pour simplifier rappeler que ce processus a été lancé par
une déclaration intergouvernementale du 9 décembre 1997 des
gouvernements français, allemand et anglais appelant les industriels du
secteur, Aérospatiale, DASA, British Aerospace et l'espagnol CASA,
"à présenter un plan clair et un calendrier
détaillé de la restructuration industrielle et de
l'intégration".
Comme suite à cette demande, un projet de constitution d'une
société unique nommée EADC -société
européenne de l'aéronautique, du spatial et de la
défense-, a été proposé par les industriels dans
leur rapport du 27 mars 1998.
Deux grandes difficultés sont apparues :
La question du périmètre
a fait l'objet d'un accord
global pour inclure les activités aéronautiques
civiles
et
militaires
, le
spatial
et les
missiles
tactiques
,
mais des désaccords ponctuels subsistent sur les
avions
régionaux
, les
satellites
et les
missiles balistiques
.
On doit à ce stade, souligner que Dassault qui a été
consulté refuse d'intégrer EADC, si bien que les avions
militaires français resteraient hors de cette entreprise.
La deuxième difficulté rencontrée a
été celle de savoir
comment procéder
pour
créer
l'EADC. Cette difficulté est, en
réalité, double avec un problème de fond portant sur
l'actionnariat de la future entreprise et un problème, lié au
premier, portant sur la séquence de constitution de l'entreprise unique.
S'agissant de ce dernier problème,
trois modèles de
rapprochement ont été envisagés :
- la fusion en une étape ;
- une démarche par étapes avec la constitution d'une holding
dont seraient actionnaires les industriels et qui mettrait en place
progressivement des filiales spécialisées ;
- une démarche analogue à celle citée
précédemment mais où Airbus, érigée en
société, jouerait au départ le rôle de holding.
Il semble que seule la fusion en une seule étape fasse l'objet d'un
accord de principe de tous. C'est donc vers cette formule, la fusion en une
étape, qu'on devrait se diriger.
Mais, l'obstacle essentiel sur lequel bute le processus est celui de
l'actionnariat de la future entité.
Un problème français doit, en outre, être
réglé, celui du sort de notre infrastructure industrielle
militaire.
L'hétérogénéité des actionnariats est un
obstacle réel au processus
Le panorama est le suivant, avec tout d'abord des entreprises privées
-BAe et DASA- et Aérospatiale, une entreprise publique.
BAe et DASA et, demain, CASA, sont trois entreprises privées qui n'ont
guère le désir de voir leurs actifs détenus de
façon significative par une entité publique. Par
conséquent, l'entreprise unique ne verra pas le jour tant que ce
problème ne sera pas réglé.
Le capital d'Aérospatiale est en cours de modification. Aujourd'hui
Aérospatiale est détenue à 99 % par les actionnaires
publics dont 18 % sont portés par le consortium de
réalisation (CDR). L'annonce par le premier ministre le 27 mai
d'une mise en bourse partielle d'Aérospatiale a permis d'annoncer
l'apport à Aérospatiale par Matra Hautes Technologies de ses
activités aérospatiales contre des actions de l'entreprise. Au
terme de ces opérations, l'Etat ne détiendrait plus que 48 %
du capital d'Aérospatiale, soit 52 % de moins qu'aujourd'hui. De 30
à 33 % du capital serait détenu par Matra Hautes
Technologies. Environ 20 % serait mis en bourse et les salariés
détiendraient de l'ordre de 3 % du capital.
Le poids de l'Etat dans Aérospatiale serait ainsi nettement
allégé et, du coup, le poids de l'Etat français dans le
futur ensemble européen le serait aussi.
De
quelques problèmes posés par les opérations en cours
concernant le capital d'Aérospatiale
L'apport des activités aérospatiales du groupe
Lagardère SCA portées par Matra Hautes Technologies contre une
participation de Lagardère au capital d'Aérospatiale
a
fait naître des
contestations de deux types
et suscite une
interrogation.
La première porte sur la
valorisation des apports de
Lagardère
estimée entre 30 et 33 % du capital
d'Aérospatiale.
Il faut pour juger de l'équité du processus comparer la valeur
des actifs apportés à Aérospatiale avec ce que
représente une participation de 30 à 33 % dans le capital de
cette entreprise.
Le chiffre d'affaires apporté par Lagardère SCA
s'élève à 12 milliards de francs, soit la part de
Matra dans les activités des filiales qui génèrent ce
chiffre (Matra-Nortel Communications, Matra-Marconi-Space et Matra-BAe-Dynamics
pour l'essentiel). En outre, la valorisation boursière de MHT est
estimée entre 5 et 9 milliards de francs sur la base des cours de
bourse de septembre et de juillet, respectivement.
Aérospatiale, c'est, en 1997, un chiffre d'affaires de
56 milliards
dont 3,4 milliards au titre des satellites
apportés à Thomson en échange d'actions de cette
entreprise et un résultat d'exploitation de 1 milliard. A partir de
ces données, on pourrait conclure qu'une valorisation
d'Aérospatiale de l'ordre de 20 milliards avec un PER de 20
justifierait que les apports de Matra soient eux-mêmes valorisés
comme ils le sont. Mais, une telle valorisation d'Aérospatiale
sous-estime certainement la valeur de l'entreprise. C'est du moins ce qu'on
peut conclure à partir des éléments suivants :
Aérospatiale dispose de 37,7 % des droits dans Airbus dont la
valeur a été estimée par la banque Lehman Brothers en 1997
à près de 110 milliards de francs, soit une part
Aérospatiale de 41,4 milliards.
En outre, la mise sur le marché d'environ 20 % du capital de
l'entreprise est censée, selon certaines sources, rapporter
20 milliards. Enfin, à travers l'apport par l'Etat de ses actions
dans Dassault aviation, Aérospatiale "récupère" les
dividendes -150 millions de francs- qui y sont attachés et un
actif estimé à 5 milliards de francs. On peut en
déduire une valeur d'Aérospatiale sensiblement supérieure
à la valeur implicite résultant de la valorisation des apports de
MHT.
Il serait donc logique que Lagardère SCA verse une soulte lors de cette
opération et il faudra
veiller à ce que celle-ci soit
financièrement saine.
Il existe une deuxième source de contestations qui porte sur la
faisabilité même de l'opération.
L'entrée de Lagardère dans Aérospatiale a
été annoncée, elle n'est pas encore réalisée.
Elle est vulnérable d'abord du fait que l'activité
apportée par Lagardère est réalisée à
travers des filiales, principalement franco-britanniques, ce qui suppose
évidemment l'accord des britanniques. Il va de soi qu'un tel accord sera
d'autant plus facile à atteindre que la participation des partenaires
sera mieux valorisée. C'est peut-être ce qui explique
l'équivalence retenue et qu'on a commentée plus haut.
Mais, une autre source de vulnérabilité provient des
difficultés de cohérence entre cette opération et l'apport
par Aérospatiale de son activité dans les satellites à
l'ensemble Thomson-Alcatel.
Une clause de non reconstitution d'une activité, éventuellement
concurrente dans ce secteur, avait alors été introduite qui lie
Aérospatiale.
L'apport de l'activité satellitaire de Matra-Marconi-Space pourrait
bien aboutir à violer cette clause ce qui supposerait d'apporter une
solution au problème ainsi créé.
Une interrogation
doit être énoncée :
l'entrée de Lagardère dans Aerospatiale conduit à
l'émergence d'un deuxième actionnaire de référence
après l'Etat. Ceci pourrait gêner la construction de la future
entreprise européenne si l'entrée de Lagardère devait
former un obstacle à l'entrée d'une autre partenaire -Dassault-
français ou si elle était perçue comme une menace pour les
autres partenaires européens.
Avec 48 % du capital d'Aérospatiale, si tout se passe comme
prévu, l'Etat français verrait certes sa participation au capital
de la future EADC réduite de moitié par rapport à ce
qu'elle aurait été sans cela.
Mais, cette participation
publique reste jugée excessive par les autres industriels.
En outre, au terme de ces réaménagements capitalistiques,
continue de se poser le problème de l'actionnariat
d'Aérospatiale.
Celui-ci serait en effet concentré autour de
deux actionnaires de référence : l'Etat et Lagardère,
qui détiendraient 81 % du total, ce qui ne lève pas l'un des
obstacles majeurs sur lesquels bute l'EADC. -v. infra. En effet, même si
l'actionnariat de Lagardère est dispersé avec un flottant de
83 %, la forme sociale de l'entreprise permet à l'actionnaire
minoritaire (Lagardère avec environ 4 % du capital) d'être
décisionnaire.
Il convient de réduire encore l'influence de l'Etat dans Aerospatiale
ce qui peut signifier une amplification des transferts au secteur privé
ou un réaménagement des droits de l'Etat actionnaire à
travers, par exemple, une dissociation des droits financiers et des droits
sociaux.
Il faut veiller de près à l'équilibre de
l'opération d'apport de Matra Hautes Technologies qui doit être
réalisée.
Le rapprochement entre Aérospatiale et Dassault semble démontrer
que cette exigence est satisfaite.
Cependant, cet apport ne doit pas être un obstacle à des
opérations ultérieures comme l'entrée dans Aerospatiale
d'un autre partenaire français.
Mais, en outre, les entreprises européennes ont des formes
d'actionnariat très contrastées et cela constitue un obstacle
majeur à l'aboutissement du processus.
Au terme de la fusion projetée, les actionnaires de chaque entreprise
seront actionnaires de la nouvelle entreprise. Il s'agit donc de marier
différents actionnariats. En l'état, les caractéristiques
de chacun d'entre eux s'opposent à un mariage harmonieux.
Bae regroupe un actionnariat dispersé, DASA est une filiale à
99 % de Daimler-Benz, devenue Daimler-Chrysler ; pour
Aérospatiale, on a vu ce qu'il en était.
Pour construire EADC, il est donc nécessaire d'harmoniser les
actionnariats afin d'égaliser les pouvoirs dans la future
société.
Il faut alors tenter d'évaluer ce qui peut advenir. Pour cela, on peut
partir du constat que l'actionnariat de BAe, qui est singulier, car
dispersé, n'a pas vocation à connaître de profondes
évolutions. Il est peu probable, en particulier, qu'entre dans le
capital de BAe un actionnaire de référence, ce processus
conduisant à une marginalisation des actionnaires actuels de BAe que
ceux-ci refuseront sans doute.
C'est donc du côté des autres entreprises que des
évolutions capitalistiques surviendront. A cet égard, la
malléabilité du capital de DASA paraît plus grande que
celle d'Aérospatiale pour plusieurs raisons ;
- le rapprochement entre DASA et BAe répond à une logique
forte ;
- DASA, comme BAe, est une entreprise privée, ce qui suppose plus
de marges de manoeuvre -l'évolution en cours du capital
d'Aérospatiale démontre en même temps une certaine
flexibilité et une certaine rigidité du capital des entreprises
publiques- et une propension à poursuivre des objectifs commun ;
- la récente fusion entre Daimler et Chrysler est propice à
un changement de management de la branche aéronautique de Daimler autour
d'une filialisation plus achevée de cette activité.
On peut, à partir de ces données, imaginer un scénario
où, dans le respect des intérêts financiers des
actionnaires de DASA, ceux-ci accepteraient un aménagement de leurs
droits d'actionnaires rendant possible une fusion entre les deux entreprises.
De cette fusion, naîtrait un groupe
d'intérêts communs
représenté par des mandataires solidaires avec un
périmètre d'activités étendu, ce qui
marginaliserait Aérospatiale.
Il faut donc réagir et inviter l'Etat français à
promouvoir une approche au terme de laquelle l'actionnariat
d'Aérospatiale ne serait plus un obstacle à la fusion. Cela
suppose soit l'approfondissement de la privatisation d'Aérospatiale,
processus qui n'est pas incompatible avec le maintien d'un contrôle
stratégique sur l'entreprise via "une action particulière"
(golden share), soit de consentir à des aménagements des droits
des actionnaires de référence d'Aérospatiale (dissociation
entre les droits financiers et les droits de vote).
Au terme du rapprochement entre Aérospatiale et Matra Hautes
Technologies, le nouvel ensemble réalisera un chiffre d'affaires de
l'ordre de 80 milliards de francs, comparable avec celui de BAe.
Par rapport à la situation qui prévaut actuellement, où
79,4 % des recettes d'Aérospatiale proviennent des activités
civiles et où les excédents d'Airbus viennent compenser les
pertes des autres activités, l'accord avec MHT devrait apporter un
certain rééquilibrage.
Votre rapporteur avait donc souhaité qu'un rapprochement intervienne
entre Dassault et la nouvelle entité.
Sans ce rapprochement, la configuration des actifs offerts à l'occasion
de la constitution d'EADC serait loin d'être optimale :
on sait que la valeur d'un groupe aéronautique dépend de la
dualité de ses métiers, les productions militaires étant
censées amortir les cycles des productions commerciales et permettre
d'optimiser les coûts de recherche ;
les apports français seraient dépourvue de toute composante
aéronautique militaire, si bien que les actifs dépendants des
avions de combat dissociés de leurs vecteurs naturels pourraient subir
une décote ;
le maintien à l'écart de la production française
d'avions de combat ne pouvant probablement être pérenne, il
fallait supposer, comme semblait le préfigurer les accords
d'étape entre Dassault-Aviation et BAe sur l'étude du futur avion
de combat européen, que des rapprochements ultérieurs se feraient
avec des partenaires étrangers plutôt que nationaux.
Les annonces récemment faites sur ce dossier devront donc être
analysées soigneusement, afin d'en évaluer le déroulement
et l'impact réel.
II. LES CRÉDITS DE MÉTÉOROLOGIE
Crédits de météorologie
(en millions de francs)
Recherche |
|
Fonctionnement |
93,35 |
Dépenses en capital |
220 |
TOTAL |
313,35 |
Hors recherche |
|
Fonctionnement |
837,6 |
TOTAL |
1.150,95 |
Le montant des crédits de météorologie diminuerait de 10,9 millions de francs. Ils atteignent cependant un niveau conséquent à peine inférieur à ceuli des moyens publics consacrés à l'aéronautique civile et très supérieur à ce dont Aérospatiale bénéficie.
ARTICLE 85
Instauration de la taxe
d'aéroport
Le
gouvernement a introduit par voie d'amendement lors de l'examen du projet de
loi de finances pour 1999 par l'Assemblée nationale un article nouveau
portant création de la taxe d'aéroport.
Cette initiative répond au souci de conforter juridiquement le
système de financement de certaines missions relatives au transport
aérien. Cette intention louable se traduit pourtant par un dispositif
défectueux sur le plan juridique, peu satisfaisant au regard de la
viabilité des petites plates-formes aéroportuaires et
inquiétant du point de vue de la conception de l'impôt qu'il
recèle.
Pour cet ensemble de raisons, votre commission des finances vous recommande de
rejeter l'article 85 nouveau. Elle souhaite accompagner cette
recommandation de suggestions constructives destinées à apporter
une solution raisonnable à des problèmes dont la
récurrence doit être évitée.
I. LA TAXE D'AÉROPORT, UNE CRÉATION VISANT À CONSOLIDER
LE FINANCEMENT DE CERTAINES MISSIONS LIÉES AU TRANSPORT AÉRIEN
Les méthodes de financement des missions d'intérêt
général nécessaires à l'exploitation des
aérodromes critiquées par votre commission des finances
étant dépourvues de justification juridique, il s'est
trouvé nécessaire de les réformer.
La voie choisie repose sur la création d'une taxe d'aéroport,
pilier d'une réforme qui comporte deux autres dispositifs : la taxe
de l'aviation civile, le Fonds d'intervention pour les aéroports et le
transport aérien.
A. DES MODES DE FINANCEMENT INACCEPTABLES
1. Bref rappel des évolutions récents du financement des
infrastructures d'aviation civile
Le financement des infrastructures de transport aérien repose pour
l'essentiel sur le paiement de redevances par leurs usagers. Une partie de plus
en plus importante du financement provient cependant de la taxation et de
l'emprunt. Enfin, les contributions des budgets de l'Etat et des
collectivités locales ont connu des évolutions opposées.
L'Etat s'est désengagé du financement du transport aérien
puisque la dotation provenant du budget général versée au
budget annexe de l'aviation civile (BAAC) a été fortement
amputée et n'est plus revalorisée depuis 1997 (215 millions
de francs) tandis que d'autres ministères, dont celui de
l'intérieur, décident de renoncer à certaines missions.
Quant aux collectivités locales, leur contribution à
l'équilibre financier des aérodromes, variable selon la
catégorie à laquelle ces aérodromes appartiennent, a
été appelée à combler les
déséquilibres financiers du système aéroportuaire
français.
Aperçu sur l'équilibre financier du
réseau
aéroportuaire
à partir des données pour 1995
(en milliards de francs)
Exploitation |
|
Charges |
10,8 |
Recettes |
11,1 |
Solde |
0,3 |
Investissements |
|
Charges |
4,4 |
dont augmentation du fonds de roulement |
0,4 |
Capacité d'autofinancement |
2 |
Solde à financer |
2,4 |
dont emprunts |
1,1 |
dont subventions d'équipement |
0,7 |
L'accroissement de la part de la fiscalité
spécifique
dans le financement des infrastructures d'aviation civile est venu, dans un
contexte de désengagement de l'Etat, de la nécessité de
trouver une solution au problème de financement du budget annexe de
l'aviation civile. La taxe de sécurité et de sûreté
a été considérablement alourdie afin de pallier les
lacunes des redevances. Celles-ci sont en effet sous contraintes et ne
permettent pas de financer les investissements nécessaires aux
prestations de navigation aérienne en contrepartie desquelles elles sont
prélevées.
Afin d'éviter un alourdissement ruineux de l'endettement du BAAC, le
produit de la taxe de sécurité et de sûreté a
dû être considérablement augmenté.
Il est passé de 652 millions de francs en 1995 à
1.182,8 millions de francs en 1998n soit une augmentation de 81 % en
trois ans. Cette variation a été beaucoup plus importante que
celle des dépenses que cette taxe est appelée à financer.
Cette augmentation de la fiscalité spécifique
6(
*
)
a pourtant été minorée en
affichage par le recours aux redevances pour financer des missions
d'intérêt général. Cette "facilité" a
été empruntée par les gestionnaires du BAAC et par les
exploitants d'aéroports pour une somme de l'ordre de 1,1 milliard
de francs.
2. Une méthode juridiquement critiquable
Votre commission des finances a toujours veillé à ce que les
redevances respectent les principes juridiques qui s'imposent à elles
afin que le financement ainsi trouvé ne soit pas contestable.
Il lui était apparu qu'une source importante de contentieux venait de ce
que les comptes à partir desquels étaient fixés les tarifs
des redevances de transport aérien manquaient de transparence. Cette
situation nourrissait à l'évidence le soupçon que les
coûts des missions d'intérêt général
exercées par la direction générale de l'aviation civile
(DGAC) étaient, au moins partiellement financés par les
redevances. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur prit l'initiative de
proposer un amendement,
devenu l'article 99 de la loi de finances pour
1996
, qui prescrivait que soit remis chaque année au Parlement un
état récapitulatif présentant la répartition des
coûts et des dépenses budgétaires
en distinguant ceux
afférents aux prestations de services rendus aux usagers et ceux
résultant des missions d'intérêt général
public assumés par la DGAC.
Cette initiative avait évidemment d'abord pour objet de favoriser le
contrôle parlementaire du budget annexe de l'aviation civile.
Mais, il s'agissait aussi, d'une part, de traduire l'exigence d'une meilleure
transparence des opérations conduites par la DGAC et, d'autre part, un
effort de pédagogie et d'ouverture ayant été
réalisé à destination des redevables, de faciliter le
dialogue entre ceux-ci et l'administration.
Votre commission avait également dénoncé une pratique
au terme de laquelle les exploitants d'aérodromes avaient recours
à leurs recettes courantes, et en particulier aux redevances
aéroportuaires, pour financer certaines missions d'intérêt
général.
Votre rapporteur avait ainsi, dans son rapport consacré aux
crédits de l'aviation civile du 20 novembre 1997, exprimé
sans ambiguïté le souhait que soient évitées
"certaines dérives actuelles constatées, au terme desquelles
les exploitants d'aéroports lèvent des redevances
destinées à financer des équipements de
sûreté qu'ils mettent en place dans un contexte de dispersion des
initiatives.
"Il s'agit bien là de dérives puisque l'usage de redevances pour
services rendus devrait être exclu lorsqu'il s'agit de financer des
dépenses qui sont effectuées essentiellement dans
l'intérêt général des usagers du transport
aérien, des populations survolées et, au fond, de la
collectivité nationale toute entière.
"Elles sont d'autant moins acceptables que l'amélioration de la
sûreté aéroportuaire suppose, à l'évidence,
une action coordonnée et des solutions financières
réalistes".
Successivement un arrêt du Conseil d'Etat du 20 mai 1998 et une
décision du tribunal administratif de Nice devaient donner raison
à ces alarmes.
Par son arrêt, le Conseil d'Etat devait annuler deux
arrêtés relatifs à la redevance pour services terminaux de
la circulation aérienne (RSTCA) au motif notamment que l'assiette de la
redevance incluait des dépenses relatives aux services de
sécurité-incendie-sauvetage, mission d'intérêt
général qui ne peut être mis à la charge des usagers
par l'intermédiaire de redevances.
Les conséquences de cet arrêt étaient importantes pour le
budget annexe de l'aviation civile qui perçoit la RSTCA. Cette
jurisprudence conduisant indirectement à remettre en cause le mode de
financement d'un certain nombre de missions exercées par les exploitants
d'aérodromes.
Le tribunal administratif de Nice a d'ailleurs tranché dans le
même sens que le Conseil d'Etat à propos du service de
sécurité-incendie-sauvetage à propos d'un contentieux
relatif aux redevances aéroportuaires.
B. LA RÉFORME ENVISAGÉE
Le gouvernement a introduit, à la hâte, trois dispositions
nouvelles dans le projet de loi de finances pour 1999, et ce par voie
d'amendements.
Cette façon expéditive de procéder est assez peu
compréhensible puisque le projet de budget annexe de l'aviation civile
avait tenu compte, lui, des difficultés posées par les
décisions des juridictions administratives sans même rappeler que
le gouvernement avait demandé, là aussi dans la
précipitation, la validation des arrêtés en cause à
l'occasion du récent texte portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier de juin dernier.
Dans le nouveau système, la taxe d'aéroport jouerait un
rôle central, la taxe de l'aviation civile et le FIATA apparaissant
largement comme des dispositifs de conséquence.
1. La taxe d'aéroport
Cette taxe serait levée au profit des exploitants d'aérodromes
selon un dispositif assez complexe ménageant la compétence du
Parlement et une large délégation laissée au pouvoir
exécutif pour en déterminer précisément le taux
aéroport par aéroport.
Le dispositif proposé
qui s'appliquerait à compter du
1er avril 1999
7(
*
)
, consiste à
classer les aéroports dont le trafic dépasse les
1.000 passagers embarqués ou débarqués en cinq
grandes catégories en fonction du nombre de passagers traités. Le
tarif de la taxe serait échelonné en fonction des cinq
catégories d'aéroports ainsi définies. En outre, il serait
fixé par référence à une fourchette.
Les classes d'aéroports et les limites de chacune des fourchettes
seraient fixées comme suit :
Classe |
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
Trafic de l'aérodrome ou du système aéroportuaire en total des passagers, embarqués ou débarqués |
à partir de 10.000.001 |
de 4.000.001 à 10.000.000 |
de 400.001 à 4.000.000 |
de 50.001 à 400.000 |
de 1.001 à 50.000 |
Tarifs par passager |
de 16 à 20 F |
de 8 à 17 F |
de 17 à 32 F |
de 32 à 65 F |
de 65 à 99 F |
Le
dispositif proposé s'articule autour d'une
répartition des
rôles entre le législateur et l'exécutif.
Le législateur est appelé à fixer les dispositions
concernant l'assiette, le débiteur de la taxe, à préciser
les règles de détermination de son taux et à
aménager les responsabilités en matière de recouvrement.
Mais, c'est l'exécutif qui est chargé de fixer, par
arrêté, la liste des aéroports en fonction des
catégories définies par le législateur et le tarif
précis applicable pour chaque aéroport.
S'agissant de l'assiette
, il est prévu que la taxe s'applique au
nombre de passagers embarqués par un transporteur aérien sur
l'aéroport à l'exception :
des "professionnels" embarqués ;
des enfants de moins de deux ans ;
des passagers en transit direct repartant sans changement d'avion avec le
même numéro de vol qu'à leur arrivée ;
des passagers victimes d'un atterrissage forcé en raison
"d'incidents techniques ou de conditions atmosphériques
défavorables".
En outre, l'application de la taxe n'est exigible que pour les vols
commerciaux. Ne sont pas considérés comme tels :
les évacuations sanitaires d'urgence,
les vols locaux au sens du 2 de l'article premier du
règlement CEE n° 2407/92 du 23 juillet 1992.
S'agissant des règles concernant le débiteur et le
recouvrement de la taxe,
il est prévu que la taxe soit due par les
entreprises de transport aérien public et qu'elle s'ajoute au prix
acquitté par le passager.
Le recouvrement serait à la charge des comptables du budget annexe de
l'aviation civile sauf pour les établissements publics nationaux
dotés d'un comptable public. Dans ce cas, c'est à ce comptable
qu'incomberait la charge du recouvrement. Chaque mois, les transporteurs
adresseraient une déclaration mentionnant le nombre des passagers
embarqués le mois précédent et accompagnée du
paiement de la taxe due.
Les contrôles et les sanctions sont précisés, par
référence pour les uns, au texte organisant la taxe d'aviation
civile, et pour les autres à l'article 1729.
Le gouvernement aura la responsabilité de fixer le tarif de la taxe
par aéroport
. Cette compétence est doublement
encadrée :
par les limites de la fourchette applicable à chaque
catégorie d'aéroports qui sont fixées par le
législateur ;
et par l'édiction de principes devant guider l'exécutif
dans son choix final.
Il est ainsi précisé que le tarif est fonction du coût sur
l'aérodrome des services de sécurité-incendie-sauvetage,
de lutte contre le péril aviaire et de sécurité, ainsi que
des mesures effectuées dans le cadre des contrôles
environnementaux. Une importante précision supplémentaire est
apportée, relative à la façon dont ce coût doit
être apprécié. Il est indiqué qu'il l'est à
partir des prestations assurées en application de la
réglementation en vigueur et de l'évolution prévisible des
coûts.
Le tarif de la taxe d'aéroport tel qu'il est proposé par le
gouvernement est loin d'être calqué sur les coûts
réels.
Il ne dépasserait pas 99 francs par passager
alors que le coût des missions que la taxe est appelée à
financer peut dépasser 600 francs par passager. Le tarif de la taxe
suppose donc une certaine péréquation, réalisée en
l'espèce à travers les interventions du FIATA (v. infra) qui
sera financé par une part du produit de la taxe de l'aviation civile..
Cependant le tarif est modulé en fonction de la fréquentation
des aéroports si bien qu'un passager ne paierait pas la même somme
quel que soit son point d'embarquement.
Concrètement, un passager
embarquant à Nice acquitterait une taxe de l'ordre de 8,5 francs
alors qu'un passager embarquant à Cherbourg paierait 99 francs.
En l'état du texte transmis par l'Assemblée nationale, le produit
attendu de la taxe d'aéroport s'élèverait globalement
à 795 millions de francs sur les neuf mois de 1999 où elle
trouverait à s'appliquer face à des besoins évalués
à 811 millions de francs.
2. la taxe de l'aviation civile et le FIATA
Pour combler la différence entre les besoins et les produits de la taxe
d'aéroport, on recourrait aux ressources du FIATA
générées par la nouvelle taxe de l'aviation civile.
a) La taxe de l'aviation civile
La taxe de l'aviation civile, comme toute imposition, aurait une assiette, des
redevables, un tarif et un mode d'administration. On examine ci-après
ces différents éléments.
L'assiette de la taxe :
La taxe serait assise sur le nombre de
passagers embarqués
en
France, quelles que soient les conditions tarifaires accordées par le
transporteur. Toutefois, seraient "sortis" de l'assiette de la taxe :
- les personnels dont la présence à bord est "directement
liée au vol considéré", le texte prenant le soin
d'indiquer qu'il s'agit
notamment
des membres d'équipage assurant
le vol mais aussi des agents de sûreté ou de police et des
accompagnateurs de fret ;
- les enfants de moins de deux ans ;
- les passagers en transit direct, effectuant un arrêt
momentané sur l'aéroport et repartant sur le même
aéronef avec un numéro de vol au départ identique au
numéro de vol de l'aéronef à bord duquel ils sont
arrivés ;
- les passagers reprenant leur vol après un atterrissage
forcé en raison d'incidents techniques ou de conditions
atmosphériques défavorables.
Il est en outre précisé que si la taxe concerne les passagers
des vols commerciaux ne doivent pas être considérés comme
de tels vols :
- les évacuations sanitaires d'urgence et
- les vols locaux au sens du 2 de l'article premier du règlement
CEE n° 2407.92 du 23 juillet 1992.
Le tarif de la taxe
Le tarif de la taxe, exprimé en francs par passage, est modulé
en fonction de la destination du passager embarqué.
De 23 francs lorsque le passager est embarqué à destination
de la France ou d'un autre Etat membre de la communauté
européenne, il passe à 39 francs lorsque le passager est
embarqué vers d'autres distinctions.
Le mode d'administration de la taxe
La taxe serait levée à partir du 1er janvier 1999 à
partir d'un système déclaratif. Les entreprises de transport
aérien désignées comme les redevables de la taxe devraient
adresser mensuellement aux comptables du budget annexe de l'aviation civile une
déclaration récapitulant le nombre de passagers embarqués
le mois précédent assortie du paiement de la taxe due.
Les contrôles d'assiette seraient à la charge des services de la
Direction générale de l'aviation civile (DGAC), qui pourraient
examiner sur place les documents utiles.
Il incomberait au directeur général de l'aviation civile
d'émettre les titres exécutoires nécessaires à la
perception des "droits supplémentaires maintenus et des
pénalités prévues à l'article 1729".
Un régime plus sévère prévaudrait en cas d'absence
de déclaration dans les délais. Alors, il serait
procédé à la taxation d'office sur la base du nombre total
de sièges offerts pour les aéronefs utilisés pour
l'ensemble des vols du mois.
L'entreprise de transport peut cependant régulariser sa situation dans
les trente jours suivant la notification du titre exécutoire en
déposant une déclaration. Cette régularisation vaut pour
"les droits", mais pas pour les pénalités les assortissant, qui
sont prévues par l'article 1728.
L'affectation du produit de la taxe
La taxe de l'aviation civile serait levée au profit du budget annexe de
l'aviation civile (BAAC), mais aussi du "Fonds d'intervention pour les
aéroports et le transport aérien" (FIATA) (v-infra).
L'article précise que les quotités du produit de la taxe
respectivement affectées à l'un et à l'autre de ces
supports budgétaires seraient déterminées par "la loi de
finances".
Enfin, il est prévu qu'à compter du 1er janvier 1999 ces
quotités s'établissent ainsi qu'il suit :
- 90 % du produit irait au budget annexe de l'aviation civile ;
- 10 % du produit seraient versés au FIATA.
Le produit global de la taxe de l'aviation civile s'élèverait
à environ 1.421 millions de francs, dont 142 seraient
affectés au FIATA et le reste (1.279,5 millions de francs) au
budget annexe de l'aviation civile.
b) Le FIATA
La création du FIATA constitue le troisième
élément de l'édifice.
Le gouvernement propose une extension du compte d'affectation spéciale
n° 902-25 intitulé "Fonds de péréquation des
transports aériens" (FPTA).
Ce fonds, créé par l'article 46 de la loi de finances pour
1995 afin de financer les déficits d'exploitation de certaines lignes
aériennes dites "d'aménagement du territoire" prendrait une autre
dénomination et s'intitulerait désormais "Fonds d'intervention
pour les aéroports et le transport aérien" (FIATA).
Le FIATA continuerait à assumer cette dernière charge mais il
serait en outre appelé à financer :
a) les dépenses directes de l'Etat en fonctionnement et en capital
concernant les services de sécurité-incendie-sauvetage et la
sûreté, à l'exception des dépenses de
personnel ;
b) les subventions aux gestionnaires d'aérodromes en matière de
sécurite-incendie-sauvetage, de sûreté, de lutte contre le
péril aviaire et de mesures effectuées dans le cadre des
contrôles environnementaux ;
c) les frais de gestion ;
d) les restitutions des sommes indûment perçues ;
e) les dépenses diverses ou accidentelles.
Le FIATA serait financé au moyen d'une part du produit de la taxe
d'aviation civile (TAC) comme il a été dit plus haut.
En 1999, le FIATA présenterait le profil suivant :
(En millions de francs)
|
Dépenses |
Recettes |
Péréquation lignes aériennes |
51 |
|
Financement aéroportuaire |
97 |
|
dont dépenses en capital directes de l'Etat |
50 |
|
dont péréquation petites plates-formes |
15 |
|
dont Bâle-Mulhouse |
10 |
|
dont TOM |
22 |
|
Total |
148 |
148 |
Observations :
Une analyse des charges du FIATA fait ressortir que :
- pour 34,5 % et 51 millions de francs, elles correspondraient aux
charges théoriques du FPTA estimées à l'an dernier
à 48,5 millions de francs et qui progresseraient donc de
5,15 % ;
- pour le reste, 65,5 % et 97 millions de francs au financement des
aérodromes.
Cette dernière catégorie de dépenses se
répartiraient en :
- 50 millions de francs au titre des dépenses en capital anciennement
logées dans le BAAC et financées à travers les
redevances ;
- 15 millions de francs au titre des subventions versées aux
exploitants d'aérodromes pour lesquels le produit de la taxe
d'aéroport ne suffirait pas à couvrir les coûts des
missions que cette taxe nouvelle serait censée financer ;
- 32 millions de francs pour intervenir sur les aéroports de
Bâle-Mulhouse et des territoires d'outre-mer qui, en l'état,
seraient hors du champ de la taxe d'aéroport.
En bref, le FIATA subrogé dans les missions du FPTA servirait
à :
- financer les dépenses des missions de sûreté dans les
aéroports sans taxe d'aéroport (32 millions de francs soit
1/3 des interventions dans les aéroports) ;
- financer les seules dépenses de sûreté du BAAC
auparavant financées via la RSTCA (50 millions de francs,
51,5 % des interventions aéroportuaires du FIATA mais seulement
15,7 % des dépenses de sûreté identifiables
assumées par l'Etat et 6,2 % de l'ensemble des dépenses de
sûreté aéroportuaire) ;
- et financer l'impasse de financement des aéroports en déficit
de produit de taxe d'aéroport pour 15 millions de francs, ce qui
représente sa contribution à la péréquation.
II. UNE RÉFORME INACCEPTABLE EN L'ETAT MAIS PERFECTIBLE
La réforme entreprise a fait l'objet d'un examen approfondi de la part
de la commission des finances du Sénat qui se félicite de la
franchise avec laquelle le ministre de l'équipement, des transports et
du logement et ses services ont abordé la discussion.
La commission des finances a proposé au Sénat qui l'a suivie de
rejeter la création de la taxe de l'aviation civile et du FIATA. Elle
lui proposera également le rejet de la taxe d'aéroport.
Les motifs de ces rejets sont nombreux. On évoquera brièvement
les imperfections du texte qu'il aurait été possible de
surmonter. Puis, l'on rappellera les principes très fermes qui, sur le
fond, ont animé la commission et le Sénat.
A. DES IMPERFECTIONS DE DÉTAIL
Un certain nombre d'imperfections auraient pu être surmontées
qu'il s'agisse du régime des taxes envisagées ou du FIATA.
1. Les taxes de l'aviation civile et d'aéroport.
S'agissant du détail de la rédaction, on peut regretter quelques
choix malheureux.
On peut d'abord s'interroger sur un défaut
d'homogénéité entre le critère d'appartenance des
aéroports aux différentes catégories définies par
le texte -le nombre des passagers embarqués et débarqués-
et l'assiette de la taxe -le nombre de passagers embarqués. Comme le
tarif de la taxe est "construit" pour couvrir les coûts des missions
qu'elle est appelée à financer, cette dichotomie n'a pas de
justification évidente.
Le choix d'asseoir la taxe sur les passagers
embarqués
sur
l'aéroport est, quant à lui, plus discutable et n'est
probablement pas entièrement neutre. Un choix alternatif aurait pu
être fait d'asseoir la taxe sur les passagers embarqués et
débarqués. Il apparaît en effet que les missions à
financer concernent, de la même, manière, l'une et l'autre
catégories de passagers.
S'agissant des passagers exemptés
, on doit d'abord observer que
si l'on suit la logique du dispositif proposé, l'exemption des passagers
en transit direct ne va pas de soi. Si le système avait une vocation
nationale, on pourrait certes la comprendre comme un moyen d'éviter une
cascade d'impositions. Mais, comme il a vocation à financer chaque
aéroport, cette considération trouve mal sa place, même si
elle a pour effet d'éviter de pénaliser le fonctionnement des
"hubs".
L'exemption accordée aux passagers victimes de circonstances
exceptionnelles est, quant à elle, parfaitement admissible. Mais, la
rédaction choisie est malheureuse car trop limitative. Quel serait le
sort des passagers reprenant leur vol après un détournement
terroriste ou simplement parce que l'aéroport théorique de
destination serait momentanément fermé pour une cause non
atmosphérique et indépendante de la technique ? Il ne
bénéficierait pas d'une exonération qu'il entre
sûrement dans l'intention du législateur de lui accorder. Il faut
donc simplifier la rédaction et se référer au cas "des
passagers reprenant leur vol après un atterrissage causé par la
survenance d'un cas de force majeurs".
S'agissant du texte du II qui précise que la taxe s'ajoute au prix
acquitté par le passager, la formule retenue n'est pas
satisfaisante
. En matière d'impôts indirects, comme pour les
autres impôts, ce qui compte dans la définition d'une taxe, c'est
de déterminer son assiette, son taux et son fait
générateur.
Le fait générateur de la taxe d'aéroport sera la
délivrance gratuite ou onéreuse du billet. A partir de là,
le transporteur qui devra la taxe doit être libre de la répercuter
ou non sur le client. Indiquer que la taxe s'ajoute au prix -qui peut
être nul- acquitté par le passager, c'est supprimer cette
liberté. Cela n'est pas souhaitable.
Ce qui est souhaitable, en revanche, c'est que le client soit informé
qu'une taxe s'ajoute au prix acquitté par lui. On doit donc trouver une
formule qui satisfasse à cette seule exigence.
Il faut alors écrire que "la taxe est due par toute entreprise de
transport aérien public et s'ajoute, le cas échéant, au
prix acquitté par le passager".
La référence implicite aux "comptables du budget annexe de
l'aviation civile"
n'est pas satisfaisante. Il faut préciser la
rédaction, de même que celle qui renvoie sans plus à
l'article 1729.
Le dispositif proposé suscite au surplus à l'évidence
des questions sur sa mise en oeuvre concrète.
Les problèmes pratiques posés par l'administration de la taxe
d'aéroport ne sont pas à négliger. Sa gestion supposera de
mettre en place un réseau de recouvrement sur le territoire puisqu'il
n'est pas envisagé de confier cette mission aux réseaux du
ministère des finances. On peut légitimement s'interroger sur les
raisons de ce choix.
En outre, il est loisible de s'inquiéter d'une éventuelle
multiplication des contentieux. Le système mis en place est assis sur
les déclarations des
transporteurs aériens dont
dépendront les allocations versées à chaque
aéroport
.
Il est à redouter que chacun de ces acteurs ne s'accordent pas toujours
sur les éléments constitutifs de l'assiette de la taxe et que des
contestations s'élèvent. On peut donc s'attendre à des
contentieux.
Ceux-ci alourdiraient encore le poids de la gestion de la taxe
d'aéroport qui nécessitera sans doute une forte activité
de contrôle.
En bref, l'administration de la taxe ne sera pas chose aisée.
La question du statut budgétaire de la taxe d'aéroport doit,
au demeurant, être posée. Elle est plus ardue.
La taxe d'aéroport serait, comme le rappelle très justement
l'exposé des motifs du gouvernement, à ranger dans
la
catégorie des impositions de toute nature
.
Par conséquent, son régime juridique devra obéir aux
règles qui, dans notre droit budgétaire, s'appliquent à de
telles impositions. Elle devrait être retracée dans les recettes
de l'Etat, sa perception devrait être autorisée chaque
année par la loi de finances et son affectation comptable devrait
respecter les dispositions prévues par le chapitre II de l'ordonnance
59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de
finances. En particulier, il faudrait respecter la règle posée
à l'article 18 de cette ordonnance selon laquelle "
Il est fait
recette du montant intégral des produits, sans contraction entre les
recettes et les dépenses. L'ensemble des recettes assurant
l'exécution de l'ensemble des dépenses, toutes les recettes et
toutes les dépenses sont imputées à un compte unique,
intitulé budget général.
"
Le dispositif proposé par le gouvernement contrevient manifestement
à cet ensemble de contraintes constitutionnelles. Il n'est en effet pas
prévu de rattacher le produit de la nouvelle taxe au budget
général non plus d'ailleurs que de mentionner dans le budget les
charges qu'elle est appelée à financer. Mais, plus grave, la
mention du texte selon laquelle "
la taxe... est perçue au profit des
exploitants des aérodromes
" si elle s'inspire des dispositions
traditionnellement retenues en matière de taxes parafiscales n'a pas
lieu d'être s'agissant d'une imposition et soutient une affectation
contraire aux règles du droit budgétaire.
Le point de vue selon lequel la jurisprudence du Conseil constitutionnel
autoriserait de telles méthodes ne convainc pas.
Il est politiquement inacceptable d'instaurer un système de financement
de cette importance, son montant est d'1 milliard de francs en
année pleine et il concerne des missions d'intérêt
général essentielles sans que le Parlement n'en soit saisi en
totalité à travers des documents budgétaires dont c'est la
raison d'être.
Au surplus, la référence à la jurisprudence du Conseil
constitutionnel paraît procéder d'une assimilation erronée
du cas d'espèce à d'autres cas d'espèces.
S'il est bien vrai que le Conseil constitutionnel a admis dans sa
décision du 29 juillet 1998 rendue à propos de l'affectation
d'une taxe appartenant à la catégorie des impositions de toute
nature à l'Agence nationale d'amélioration de l'habitat qu'un
établissement public pouvait bénéficier de l'affectation
du produit d'une imposition, il serait surprenant qu'il choisisse une solution
analogue à propos de la taxe d'aéroport.
On peut d'abord observer que l'existence juridique des aéroports n'est
pas établie dans la plupart des cas, ceux où les aéroports
sont gérés par des personnes morales pour lesquelles cette
gestion n'est qu'une activité parmi d'autres.
On peut également faire valoir que certains aéroports sont
gérés par des personnes morales de droit privé qui se
trouveraient ainsi affectataires d'une imposition.
On doit ajouter que la jurisprudence du Conseil d'Etat a clairement
établi que
"les services rendus par les services de
sécurité d'incendie et de sauvetage et par la gendarmerie
correspondent à des missions d'intérêt
général qui incombent, par nature à l'Etat
".
Dans ces conditions, l'on voit mal comment des dépenses correspondant
à des charges qui incombent naturellement à l'Etat pourraient ne
pas être intégrées dans le budget de l'Etat, censé
les retracer en totalité et constituer le support de leur autorisation
et de leur gestion.
2. Le FIATA
Une première question s'est posée, celle de savoir si
le FIATA devait intégrer les opérations du FPTA. Une
réponse négative a été apportée
à
cette question car l'on peut craindre d'une telle intégration qu'elle ne
comporte un certain mélange des genres au terme duquel des arbitrages
opaques défavoriseraient les interventions jusqu'alors mises à la
charge du FPTA. Cela a des conséquences sur la rédaction de
l'article 35 bis qui devrait laisser subsister le FPTA.
Une seconde question a été de savoir comment devrait
être formaté le FIATA, et, partant, de savoir quel sort
budgétaire réserver aux dépenses d'intérêt
général dans les aéroports et quel mode de financement
choisir pour couvrir ces dépenses.
La jurisprudence du Conseil d'Etat et les exigences du contrôle
démocratique invitant à conclure que les financements des
dépenses réalisées par les gestionnaires d'aéroport
devraient être retracées par le budget de l'Etat, il est apparu
inopportun d'imputer de telles dépenses à un budget annexe, cette
formule n'étant pas faite pour cela. Cette dernière observation a
conduit à suggérer que les dépenses de même nature
que celles envisagées ici qui, dans le schéma du gouvernement ,
resteraient assumées par le BAAC, soient transférées au
budget général ou à un compte spécial.
Au total, au terme d'une telle opération, le montant des
dépenses qui devraient faire l'objet du tel rattachement
s'élèverait en 1999 à 1.215 millions de francs,
soit :
- 322 millions de francs au titre des dépenses de
sûreté assumées par le BAAC ;
- 811 millions de francs de dépenses de SSIS et de
sûreté assumées par les aéroports mais
financées par l'impôt, dont 484 millions de francs de
dépenses de sûreté, 311 millions de francs de
dépenses de SSIS ;
- 32 millions de francs au titre des dépenses
d'intérêt général dans les aéroports des
territoires d'outre-mer et de Bâle-Mulhouse ;
- 50 millions de francs au titre des dépenses directes de SSIS
assumées par le BAAC.
Entre un rattachement au budget général et un rattachement
à un compte d'affectation spéciale(CAS), la seconde option serait
a priori
la meilleure puisqu'elle permettrait d'isoler les moyens
consacrés aux missions d'intérêt général dans
les aéroports. L'on pourrait alors "loger" ces dépenses dans un
FIATA consacré aux financements des aéroports.
Mais il faut considérer une difficulté pratique de
l'opération :
Le transfert de ces dépenses à un CAS poserait un
problème particulier du fait de la règle posée à
l'article 25 de l'ordonnance organique qui veut que les versements du
budget général à un CAS n'excèdent pas 20 %
des dépenses envisagées.
Or, la partie des dépenses de
sûreté correspondant aux sujétions normales qui incombent
à l'Etat du fait de ses responsabilités propres doit être
financée par l'impôt général.
Du fait de la contrainte passée par l'ordonnance organique, le
versement de l'Etat au CAS ne pourrait excéder 20 % des
dépenses mises à la charge de ce CAS, soit 243 millions de
francs.
Il resterait à financer 972 millions de francs en 1999 à
travers un autre outil.
La question, et on aborde alors le problème du dosage du financement par
l'impôt général et par l'impôt spécifique
-voir infra- qui se pose est de savoir si un versement de 243 millions de
francs en provenance du budget général suffirait à
satisfaire l'exigence de voir celui-ci financer les missions normales de
sûreté publique exercées dans le secteur du transport
aérien.
Il faut, pour y répondre, indiquer qu'une telle somme correspondrait
à un peu moins de 30 % des charges de sûreté publique
dans les aéroports qui seraient réalisées en 1999 par les
gestionnaires d'aéroports ou par le BAAC.
Il est difficile de faire le départ entre les sujétions dont le
financement doit rester à la charge de l'Etat du fait de l'exercice
normal de ses responsabilités et celles qui, du fait des exigences
particulières du transport aérien, pourraient être
financées par les entreprises de transport aérien. Mais cette
difficulté doit être résolue sur la base de propositions de
gouvernement.
B. LES OBJECTIONS DE FOND
Le Sénat a surtout considéré deux objections de fond.
Il a rappelé son attachement au principe d'un financement par
l'impôt général des sujétions normales
supportées par l'Etat du fait de ses missions essentielles.
Il s'est aussi inquiété des conséquences du dispositif
sur l'aménagement du territoire.
1. Il faut financer les sujétions normales auxquelles la mission,
régalienne par excellence, de préservation de la
sûreté publique expose l'Etat
La taxe d'aéroport suscite à l'évidence des
problèmes juridiques qui ne sont d'ailleurs que le reflet des questions
politiques qu'elle pose.
Le dispositif de la taxe en fait l'exact équivalent d'une redevance,
même si en tant que taxe le prélèvement nouvellement
institué obéira à un régime juridique
différent de celui des redevances : elle devra ainsi en particulier
faire l'objet d'un vote par le Parlement.
Mais,
sur le fond, la taxe d'aéroport, imposition spécifique
assise sur le passager aérien et prélevée sur les
compagnies pour financer des missions d'intérêt
général ne différerait pas des redevances
.
Formellement, la ressemblance avec les redevances serait assurée par un
calcul du tarif de la taxe épousant au plus près possible les
coûts aéroport par aéroport et, surtout, par une
absence
totale d'affectation budgétaire
de son produit et donc d'imputation
budgétaire des charges qu'il serait censé couvrir.
Avec la question du choix de la nature de l'imposition appelée
à financer les coûts des missions d'intérêt
général en cause, on aborde une difficulté de principe.
Votre commission des finances s'est systématiquement opposée en
la matière à des solutions où une redevance mise à
la charge d'une catégorie spéciale d'usagers ou une taxe
spécifique viendrait financer l'
exercice
normal
de
missions d'intérêt général.
Le dispositif proposé par le gouvernement n'est donc pas satisfaisant
puisque les principes républicains d'ailleurs enracinés dans
l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
veulent que les dépenses de sûreté soient financées
à partir d'une contribution commune, générale.
Le choix d'une taxation spécifique ne saurait être sans
distinction justifié par la spécificité des missions
à financer
: lesdites missions relèvent de
l'intérêt général. Mais,
sur ce point, une nuance
peut probablement être
faite entre les missions de
sécurité qui sont destinées essentiellement à
préserver l'intégrité physique des personnes
embarquées et les missions de sûreté qui sont
destinées à cela mais aussi à contribuer à la
défense de la Nation contre des actes de malveillance susceptibles de
l'atteindre
.
On ne peut non plus se contenter de se référer aux
spécificités du transport aérien.
Cette justification
à laquelle renvoient les propos du ministre devant l'Assemblée
nationale s'inspire, semble-t-il, de deux considérations : le fait
qu'une proportion réduite de la population se transporte par la voie des
airs ; le fait qu'à l'étranger la taxation spécifique est
de pratique répandue et qu'elle soit consacrée par l'OACI.
On sait ce qu'il faut penser du second de ces arguments du fait du
décalage entre la logique des "règles" de l'OACI et la
philosophie de notre droit public. On peut ajouter que la France a
jusqu'à un récent passé offert l'exemple d'une implication
normale des pouvoirs publics à travers en particulier l'intervention de
la DICCILEC.
Quant au premier argument, on voit bien que sa généralisation
pourrait déboucher sur une révolution fiscale susceptible
d'anéantir l'idée même de contribution commune.
Appliqué à l'ensemble des dépenses publiques, il pourrait
déboucher sur un financement par voie de contributions
spécifiques imposées aux seuls bénéficiaires des
biens produits à l'aide de la dépense publique.
Ainsi, seuls les habitants des quartiers en difficulté seraient
appelés à financer les mesures destinées à
régler les problèmes qu'ils doivent affronter, seuls les clients
de la SNCF devraient financer les forces de police mobilisées par le
souci d'assurer la tranquillité du transport ferroviaire, etc. Une telle
argumentation suppose des ajustements tels qu'elle ne peut sans débat
sur ses conséquences et prolongements être produite à
l'appui de la solution proposée par le gouvernement.
Néanmoins, là aussi, une nuance pourrait être
introduite entre l'exercice normal des missions de sûreté et ce
qui, dans l'exercice de ces missions, correspond à des exigences
particulières liées au transport aérien, en particulier
à l'impératif de célérité des
contrôles nécessaires à la fluidité du trafic.
Ajoutons que le recours à une taxation spécifique pose des
problèmes au regard du principe d'égalité.
Ainsi les
choix du gouvernement en matière d'assiette des taxes d'aéroport
et de l'aviation civile introduisent une rupture d'égalité devant
les charges publiques puisqu'elles conduisent à exonérer
entièrement les entreprises de fret.
2. Il faut envisager les problèmes posés par le dispositif au
regard de la préservation des intérêts de
l'aménagement du territoire
Les problèmes posés à notre réseau
aéroportuaire du fait des exigences de sécurité et de
sûreté constituent un sujet de très grande importance sur
lequel l'information des acteurs est lacunaire. Il faudrait que le gouvernement
présente une étude approfondie sur la question plus
générale des conditions de l'équilibre financier de notre
réseau d'aéroports.
Ce réseau est, en effet, confronté à des exigences
croissantes.
Le tableau ci-après rend compte, par aéroport, des coûts
annuels des missions de sûreté et des "services chargés de
la sécurité incendie sauvetage" (SSIS).
Coût par aéroport des missions de
sûreté et
de sécurité incendie et
sauvetage.
|
|
Coût annuel sûreté -estimation 1999 en MF |
Coût annuel ssis - estimation 1999 en MF |
Coût annuel de missions en F/passager |
ADP
|
32.012.468
|
410.36
|
160.17
|
17.82
|
On
observe que les coûts de ces missions sont variables selon les
plates-formes considérées -dans nombre d'aéroports, le
coût des missions de sûreté est nul, ces missions
continuant, en tout cas on l'espère, à être assumées
par les pouvoirs publics-. Elles ont en outre tendance à croître
avec la taille de l'aéroport. Mais
le coût annuel des missions
rapporté au nombre des passagers a, lui, tendance à croître
quand ce dernier diminue
. Cette donnée est totalement
indépendante, remarquons-le, du mode de financement choisi. Elle est
appelée à s'intensifier avec l'augmentation prévisible des
dépenses de sûreté. Il faut certes relativiser cette
perspective. Les problèmes posées par la sûreté dans
un petit aéroport ne sont pas les mêmes que ceux qui sont
posés dans un grand aéroport et ils peuvent recevoir des
solutions moins coûteuses. Mais, la remarque est dans l'ensemble
pertinente qui vise à faire observer que les coûts de la
sûreté augmenteront plus que le nombre des passagers dans la
plupart des aéroports. Comme ces coûts rapportés à
chaque passager sont d'autant plus élevés que la plate-forme est
moins fréquentée, l'avenir se traduira par une distorsion de plus
en plus grande entre les coûts des missions de sûreté et de
sécurité par passager dans les aéroports, en fonction de
leur fréquentation.
La dispersion des coûts par passager est d'ores et déjà
considérable, allant de plus de 600 francs à 8 francs.
Ainsi, tout système de financement construit sur l'idée
d'appliquer au passager un tarif représentatif des coûts
réels qu'il génère a nécessairement pour effet
d'épouser la dispersion de ce coût et la
perspective d'un
élargissement de cette dispersion est inévitable
. Elle doit
être clairement mise en évidence. Elle contribuera à
accroître les charges de financement de certains aéroports
à fréquentation réduite dans des conditions telles qu'une
imputation des coûts aux passagers embarquant dans ces aéroports
exposeraient ceux-ci à devoir supporter une " facture "
parfois très lourde. C'est ce qu'indique déjà assez la
dernière colonne du tableau ci-dessus.
Le tarif de la taxe d'aéroport tel qu'il est proposé par le
gouvernement est loin d'être calqué sur les coûts
réels.
Il ne dépasserait pas 99 francs alors que le
coût des missions que la taxe est appelée à financer peut
dépasser 600 francs par passager. Le tarif de la taxe suppose donc
une certaine péréquation, réalisée en
l'espèce à travers les interventions du FIATA (v. ci-dessus).
Cependant le tarif est modulé en fonction de la fréquentation
des aéroports si bien qu'un passager ne paierait pas la même somme
quel que soit son point d'embarquement.
Concrètement, un passager
embarquant à Nice acquitterait une taxe de 8,5 francs alors qu'un
passager embarquant à Cherbourg paierait 99 francs.
Que penser d'une telle situation ? L'on peut d'abord observer qu'
en
première analyse
elle ne se traduirait, dans l'immédiat,
par aucun changement notable si la taxe d'aéroport devait simplement
prendre le relais du financement par redevances aéroportuaires
jusqu'à présent en oeuvre. On peut même considérer
que le nouveau dispositif serait plus favorable que l'ancien pour les
" petits aéroports " puisque ceux-ci
bénéficieraient désormais d'une intervention du FIATA.
L'on doit également souligner que l'échelonnement d'un tarif
fiscal en fonction des coûts réels est conforme aux enseignements
de la théorie économique et, en particulier, au souci de
réunir les conditions d'une bonne allocation des ressources.
Enfin, rien ne permet d'affirmer que le tarif proposé serait de nature
à provoquer des détournements de trafic aux dépens des
aéroports où la taxe serait élevée. Si l'on fait
l'hypothèse que la taxe prendrait le relais des redevances, une telle
éventualité paraît même exclue. Il en irait autrement
si la taxe se substituait également à des subventions ou si le
tarif de la taxe devait, dans un souci de péréquation,
s'éloigner, pour certains aéroports, du tarif actuel des
redevances.
Cependant, à supposer cette équivalence vérifiée
pour l'heure, la perspective, mise en évidence plus haut, d'une
augmentation des dépenses de sûreté et de
sécurité pourrait à l'avenir susciter une distorsion du
tarif de la taxe plus importante qu'il n'est aujourd'hui proposé.
On
peut donc redouter que la logique du système ne revienne à
alourdir très sensiblement dans un futur proche le tarif pour les
" petits aéroports ". Cette évolution ne serait pas
à proprement parler antiéconomique mais elle pourrait condamner
certaines plates-formes. Il fallait le dire.
Une solution évoquée par le gouvernement consisterait à
réduire le nombre des classes d'aéroports et à
rétrécir le barème de la taxe d'aéroport.
Le schéma envisagé désormais par le gouvernement serait
le suivant :
|
1 |
2 |
3 |
Trafic Minimum |
10.000.001 |
4.000.001 |
1.001 |
Trafic Maximum |
|
10.000.000 |
4.000.000 |
Tarif Minimum |
16,00 F |
8,00 F |
17,00 F |
Tarif Maximum |
20,00 F |
17,00 F |
50,00 F |
Le
tarif s'échelonnerait de 8 à 50 francs contre une
échelle de 8 à 99 francs dans le dispositif actuel.
Dans cette hypothèse, les besoins à couvrir par la
péréquation s'élèveraient ; ils passeraient de
15 à 25 millions de francs pour 1999 et seraient donc en
année pleine, sur la base d'estimations de coûts probablement
optimistes, d'au moins 33 millions de francs.
Comparaison entre les deux schémas
(en millions de francs)
|
Disposition adoptée à l'Assemblée nationale |
Disposition envisagée |
Produit attendu de la taxe d'aéroport (sur 9 mois) |
795 |
780 |
Besoins de péréquation |
15,99 |
25,72 |
Classe 1 |
0,00 |
0,00 |
Classe 2 |
0,00 |
0,00 |
Classe 3 |
2,70 |
0,00 |
Classe 4 |
4,12 |
9,02 |
Classe 5 |
9,18 |
16,70 |
NB. :
ce calcul ne prend pas en compte les aéroports de moins de
1.000 passagers, les TOM et Bâle-Mulhouse qui représentent un
coût de 35 millions de francs.
La mesure envisagée par le gouvernement, si elle aurait pour effet de
réduire le montant de la taxe exigée des compagnies
aériennes dans les petits aéroports, accroîtrait leurs
besoins financiers résiduels.
Il faudrait alors les couvrir soit en augmentant le tarif de la taxe de
l'aviation civile, ce que le gouvernement ne propose pas et qui, de toutes
façons, se traduirait par un accroissement de la fiscalité
supportée par les compagnies aériennes, y compris dans les petits
aéroports, soit trouver un financement alternatif.
Le refus par l'Etat d'assumer les charges financières des
sujétions normales de sa mission de sûreté dans les
aéroports laisse présager que les collectivités locales
sur le territoire desquels sont situés les aéroports en
déficit de financement seront appelées à financer ce
déficit.
On ne peut donc sérieusement établir que le changement
envisagé se traduirait par une plus grande préservation des
intérêts de l'aménagement du territoire.
*
* *
Votre
commission des finances a tracé la voie à suivre. Elle ne s'est
pas contentée de rejeter le dispositif gouvernemental. Mais, elle n'a
pas les pouvoirs nécessaires pour transcrire dans notre droit la
solution durable et satisfaisante qu'elle a pourtant dessinée.
Seul dans notre système constitutionnel, le gouvernement le pourrait
s'il en avait le désir.
C'est à cela que votre commission des finances invite le gouvernement et
c'est pour cela qu'elle a déposé un amendement de suppression de
l'article 85.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le jeudi 29 octobre 1998, sous la présidence de
M. Alain Lambert, président, puis de Mme Marie-Claude Beaudeau,
vice-président, la commission a procédé, sur
le
rapport
de
M. Yvon Collin
,
rapporteur spécial
,
à l'examen du projet de
budget annexe de l'aviation civile pour
1999
et des crédits affectés au
transport aérien et
à la météorologie par le projet de loi de finances pour
1999
.
Après l'exposé du rapporteur spécial, un large
débat s'est ouvert.
M. Philippe Marini, rapporteur général
, a souligné
le caractère préoccupant de l'endettement du budget annexe de
l'aviation civile et considéré que celui-ci offrait une
étude de cas particulièrement illustratrice des
difficultés posées par un endettement public excessif.
M. François Trucy
s'est interrogé sur les raisons pour
lesquelles les personnels pouvaient connaître une progression si
conséquente de leurs rémunérations ainsi que sur les
missions précisément exercées par le service des bases
aériennes. Il a souligné la charge représentée par
la formation aéronautique.
Mme Maryse Bergé-Lavigne
a souhaité préciser que
l'absence d'avances remboursables consacrées au projet d'A3XX ne pouvait
être reprochée au Gouvernement puisque la décision de
lancement de ce projet n'avait pas encore été prise. Elle a
ajouté que cette décision n'était d'ailleurs pas acquise,
tant les divers problèmes posés par ce projet apparaissaient
importants.
En réponse,
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a
expliqué que l'augmentation des rémunérations des
personnels témoignait d'une position favorable de ces personnels dans le
rapport de force social qui dicte les décisions du Gouvernement en
matière de navigation aérienne. Il a rappelé que
l'augmentation des rémunérations individuelles observée
dans le passé avait permis un certain rattrapage à partir d'une
situation de traitement plutôt modeste. Mais il a souligné
qu'aujourd'hui un meilleur parallélisme entre la progression des
rémunérations des personnels de la direction
générale de l'aviation civile et celle des
rémunérations de la fonction publique en général ou
des personnels des entreprises de transport aérien devait être
recherché. Ayant précisé les diverses missions du service
des bases aériennes et insisté sur les difficultés de
conduire une politique de formation optimale dans un secteur soumis à de
profondes fluctuations d'activité,
M. Yvon Collin, rapporteur
spécial
, a jugé que le lancement d'un programme tel que
l'A3XX était une impérieuse nécessité. Il a alors
ajouté que compte tenu de l'exigence d'égaler les gains de
compétitivité tirés par Boeing de sa position de monopole
sur les secteurs des gros porteurs, il lui semblait que les industriels
européens étaient désormais acquis à l'A3XX. Il a
précisé qu'il n'entrait pas dans ses intentions de critiquer le
Gouvernement sur ses choix en matière d'avances remboursables mais que
devait être rappelée l'exigence d'accompagner le futur gros
porteur par un soutien public.
M. Maurice Blin
a alors précisé que 80 % des
bénéfices de Boeing étaient tirés de la production
des Boeing 747 et que de ses contacts avec les dirigeants d'Airbus, il
apparaissait que ceux-ci et les autres industriels européens avaient en
effet la volonté de bâtir un appareil en mesure de concurrencer le
747.
M. Jacques Oudin
a abondé dans le sens de l'ensemble de ces
propos en observant que dans le contexte de duopole caractéristique de
l'industrie aéronautique mondiale, il était hors de question que
l'un des compétiteurs ne dispose pas de l'ensemble de la gamme de
production. Il a souligné que ce qui était vrai des gros porteurs
commerciaux l'était également dans le cas des gros avions de
transport militaire, évoquant la situation de l'avion de transport futur
(ATF).
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a alors rappelé que,
dès son rapport sur les soutiens publics à l'industrie
aéronautique civile adopté par la commission en 1996, il avait
insisté, dans une ambiance un peu sceptique, sur la
nécessité de produire un avion gros porteur qui occuperait dans
les vingt ans à venir 25 % du marché.
La commission a alors décidé de reporter son vote sur les
crédits des transports aériens et de la
météorologie après l'audition du ministre de
l'équipement, des transports et du logement et son vote sur le budget
annexe de l'aviation civile après l'examen des articles de la
première partie du projet de loi de finances pour 1999.
Puis le rapporteur spécial a fait une
communication sur le processus
de structuration de l'industrie aéronautique civile en Europe.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, ayant rappelé que, le
9 décembre 1997, les gouvernements de la France, de
l'Allemagne et du Royaume-Uni avaient lancé un processus destiné
à déboucher sur l'intégration européenne du secteur
aéronautique et demandé aux industriels d'étudier sur
quelles bases une telle intégration pouvait être
réalisée, a indiqué qu'il avait alors informé la
commission de son intention de consacrer un rapport d'information à ce
sujet. Il a déclaré que sa communication du jour portait sur la
structuration de l'industrie aéronautique et non sur la restructuration
qui en résulterait et que les conclusions, qu'il souhaitait
présenter à la commission, visaient à permettre à
notre pays de participer pleinement à la construction en cours d'une
industrie européenne intégrée.
Il a ajouté que cette communication d'étape se justifiait par
l'urgence et par le souci de préserver des intérêts
nationaux majeurs. Il a précisé que notre pays risquait de faire
les frais d'un rapprochement entre British Aerospace et DASA, sauf à
prendre les décisions qui s'imposent. Il a alors précisé
les risques d'une telle évolution en indiquant que l'ensemble qui
résulterait d'une fusion entre British Aerospace et DASA
détiendrait 57,7 % des droits dans Airbus, une part importante de
l'activité de missilier, et occuperait l'essentiel du créneau des
avions de combat européens avec l'Eurofighter ainsi qu'un contrôle
très significatif du Grippen suédois. Il a ajouté qu'un
tel groupe exercerait une attractivité très forte sur tous les
industriels européens, y compris Dassault, et sur les concurrents de
Boeing aux Etats-Unis.
Le rapporteur a alors expliqué qu'une fusion entre British Aerospace et
DASA était plus qu'une éventualité du fait, d'une part, de
la cohérence industrielle de ce rapprochement, et, d'autre part, d'une
réelle capacité de ces entreprises à moduler leur
actionnariat pour s'unir. En effet, a-t-il indiqué, l'une des
difficultés majeures du processus devant conduire à la
constitution d'une entreprise aéronautique unique en Europe regroupant
les activités aéronautiques, civiles et militaires, le spatial et
les missiles tactiques, provient de
l'hétérogénéité de l'actionnariat des
entreprises concernées avec :
- la coexistence d'entreprises privées, British Aerospace et DASA, et
d'une entreprise publique Aérospatiale ;
- et la superposition de trois modèles d'actionnariat, celui,
dispersé, de British Aerospace, celui de DASA, concentré mais
privé puisque détenu par Daimler-Chrysler, et celui
d'Aérospatiale, concentré mais public, car encore détenu
à près de 99 % par l'Etat français.
Il a poursuivi son propos en indiquant que pour "se marier", ces trois
entreprises devraient rapprocher leurs modèles d'actionnariat et que
s'il était très improbable que British Aerospace abandonne le
sien, il n'était pas improbable du tout que DASA apporte certains
aménagements au sien, si ceux-ci devaient se révéler
indispensables pour parvenir à une fusion avec British Aerospace.
Il a alors observé que l'on avait pu, en revanche, longtemps
s'interroger sur la capacité d'Aérospatiale à modifier son
actionnariat, rappelant qu'alors même que l'idée d'une entreprise
européenne avait été lancée par lui, notre
Gouvernement n'avait pas annoncé d'intention particulière
à ce sujet. Il a alors souligné que, depuis l'été,
tout avait beaucoup évolué à la suite de la
déclaration du Premier ministre du 27 mai : en échange des
apports par Lagardère des activités de Matra Hautes Technologies,
Lagardère SCA disposerait d'une quotité du capital
d'Aérospatiale estimée entre 30 et 33 % ; quelque 20 % du
capital d'Aérospatiale seraient cédés dans le public, si
bien qu'au terme de ces deux opérations, l'Etat ne disposerait plus que
d'environ 48 % du capital d'Aérospatiale et que du même coup,
celle-ci se trouverait privatisée.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a alors jugé que le
chemin parcouru était très important, mais qu'il convenait
d'achever le travail. Il a toutefois indiqué que l'opération
d'apport de Matra Hautes Technologies à Aérospatiale devait
être suivie avec beaucoup d'attention et qu'en particulier, il fallait
veiller à son équilibre financier et surveiller sa
réalisation concrète. Il a insisté sur l'importance de
configurer le capital d'Aérospatiale de sorte que cette entreprise
puisse pleinement participer à la structuration en cours. Il a alors
rappelé que malgré l'importance du retrait annoncé de
l'Etat dans le capital de l'entreprise, au terme duquel celle-ci serait
privatisée, le reliquat de la participation étatique (48 %)
était jugé excessif par les autres industriels européens
du secteur. Il a jugé qu'il fallait alors choisir entre deux objectifs
contradictoires : celui de maintenir la place de l'Etat dans
l'Aérospatiale à son niveau actuel et celui de fusionner avec les
autres industriels. Préférant la deuxième branche de
l'alternative, il a ajouté que le formatage capitalistique qu'elle
impliquait pouvait prendre deux aspects : soit la mise sur le marché
d'une proportion du capital de l'entreprise plus importante que les 20 %
envisagés, soit un réaménagement des droits
attachés aux actions détenues par l'Etat. Il a souligné
que, quelle que soit la solution choisie, elle n'impliquait aucunement que
l'Etat perde toute maîtrise sur l'avenir d'Aérospatiale et
qu'à l'image de la situation existant au Royaume-Uni, il était
souhaitable que les pouvoirs publics conservent les droits de contrôle
attachés à une "action spéciale". Il a alors
indiqué que, par cohérence avec ces observations sur la place de
l'Etat dans le capital d'Aérospatiale, il faudrait veiller à ce
qu'à l'occasion des accords de Matra Hautes Technologies, il soit bien
entendu que ce nouvel actionnaire s'inscrive dans la logique de la fusion avec
les autres industriels européens.
Il a alors formulé une autre condition indispensable, le rattachement
complet des activités aéronautiques de Dassault Aviation à
Aérospatiale. Il a justifié cette exigence par deux
considérations majeures :
- le lien existant entre la valeur d'un groupe aéronautique et sa
capacité à maîtriser la dualité des métiers
d'avionneur commercial et militaire ;
- le caractère irréaliste d'une solution où notre
industrie aéronautique militaire demeurerait isolée, la
conduisant à rechercher des rapprochements avec des partenaires
étrangers.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a alors
présenté une synthèse de ses conclusions :
- poursuivre sur le chemin emprunté et finir de modeler le capital
d'Aérospatiale pour que cette entreprise puisse fusionner ses
activités dans la future grande entreprise européenne ;
- incorporer les activités de production d'avions de combat de
Dassault Aviation dans Aérospatiale ;
- adresser un message clair, dans les plus brefs délais, à
nos partenaires européens.
Il a souhaité conclure sa communication en soulignant que le processus
en cours, s'il obéissait à une nécessité
industrielle et économique, était essentiellement un processus
politique. Il a rappelé que l'existence d'une industrie
aéronautique compétitive était un élément de
la puissance européenne. Il a alors souhaité que les
gouvernements ayant mis en ordre de marche leurs entreprises rappellent
solennellement aux industriels cette dimension du processus en cours. Il a
insisté sur le fait que ceux-ci auraient besoin des gouvernements pour
se développer et qu'il ne faudrait pas que, par inertie ou par des
initiatives malheureuses, soit gâchée la chance d'un formidable
succès européen.
M. Philippe Marini, rapporteur général
, a souligné
l'extrême importance de la communication du rapporteur spécial. Il
a insisté sur la nécessité pour la commission de se saisir
d'un sujet dont les enjeux économiques sont à l'évidence
majeurs, et qui concerne également les intérêts
patrimoniaux de l'Etat. Il a souligné que les conditions dans lesquelles
le rapprochement de certaines activités du groupe Lagardère avec
Aérospatiale avait été annoncé supposaient qu'on se
montre très attentif à l'équilibre financier de cette
opération. De la même manière, a-t-il ajouté, il
faudra suivre de très près les travaux de la commission des
participations et des transferts à l'occasion de la mise sur le
marché d'une part du capital d'Aérospatiale. Il a
suggéré que le rapporteur spécial exerce une
particulière vigilance sur ces questions, estimant qu'elles
étaient au coeur de la mission de contrôle conférée
à la commission des finances. Il a enfin souhaité que des
précisions puissent être apportées sur le sort des droits
de vote double détenus par l'Etat du fait de sa participation au capital
de Dassault Aviation.
En réponse,
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a
remercié le rapporteur général de son intervention,
estimant qu'elle confortait la réflexion entreprise. Il a souscrit
à l'objectif d'approfondir les divers éléments d'un
dossier complexe sur lequel la commission des finances a pour vocation
d'éclairer le Sénat, mais aussi peut-être le Gouvernement,
en particulier sous l'angle de la défense des intérêts
patrimoniaux de l'Etat.
Mme Maryse Bergé-Lavigne
, ayant déclaré qu'elle
n'avait pas, à ce stade, d'objection sur le fond de la communication du
rapporteur spécial, a souligné la difficulté de se former
une opinion tranchée sur le montage à venir. Ayant estimé
que le jeu des différents acteurs de ce dossier ne devait pas conduire
à l'affolement, elle a dit son accord sur le volet financier de la
communication mais a souhaité que l'aspect industriel du dossier soit
étudié avec beaucoup de vigilance. Elle s'est en particulier
demandé si les savoir-faire technologiques d'Aérospatiale ne
garantissaient pas cette entreprise contre des initiatives susceptibles de la
marginaliser. Elle a enfin souligné qu'une alliance partielle de
quelques industriels jouerait contre l'Europe.
En réponse,
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a
abondé dans le sens des observations faites sur l'importance du
patrimoine technologique d'Aérospatiale. Il a toutefois souligné
qu'au regard de la composante financière du processus en cours, notre
entreprise ne réunissait pas encore les meilleures conditions d'un
succès durable. Il a jugé que la perspective d'un rapprochement
entre les autres industriels européens devait être
considérée avec le plus grand sérieux. Il a ajouté
que cette considération, en même temps que la
nécessité politique de promouvoir la constitution d'une
entreprise aéronautique européenne, supposait de la part du
Gouvernement d'annoncer et de mettre en oeuvre les mesures nécessaires
et simples pour, dans le respect des intérêts nationaux,
participer activement au succès d'un projet réellement
européen.
Mme Marie-Claude Beaudeau, vice-président
, a souhaité
que, dans l'avenir, le rapporteur spécial puisse poursuivre ses
investigations afin de présenter tous les enjeux de la restructuration
de l'industrie aéronautique en Europe, notamment au plan social.
En réponse,
M. Yvon Collin, rapporteur spécial
, a
indiqué que telle était bien son intention et qu'il avait pris la
précaution de préciser que son intervention du jour était
centrée sur le processus de "structuration" plutôt que sur celui
de "restructuration" qui, à l'évidence, en dépendait, mais
devait faire l'objet de travaux complémentaires. Il a, à ce
propos, rappelé que des enseignements très intéressants
pourraient être tirés de l'expérience résultant de
la fusion entre Boeing et Mc Donnell-Douglas.
La commission a alors
donné acte de sa communication au rapporteur
spécial.
Au cours d'une réunion ultérieure tenue le jeudi
19 novembre 1998, la commission a décidé d'
adopter le
budget annexe de l'aviation civile.
ANNEXE 1
LA SÉCURITÉ DU TRANSPORT
AÉRIEN
Le
niveau de sécurité des services de la circulation aérienne
est traditionnellement évalué sur la base du nombre
d' "Airprox" enregistré. Une procédure Airprox est
déclenchée par un commandant de bord lorsque celui-ci estime que
la sécurité de son aéronef a été ou aurait
pu être compromise par un risque d'abordage entre aéronefs.
Cet indicateur doit être considéré avec prudence en raison
du faible nombre d'Airprox enregistré, qui dépendent en outre de
paramètres sociologiques difficiles à évaluer (tels que,
notamment le climat général entre contrôleurs et pilotes,
des consignes ponctuelles de compagnies ou de syndicats de pilotes concernant
tel ou tel type d'incidents) qui peuvent entraîner un suivi plus ou moins
rigoureux.
Enfin, il faudrait tenir compte de l'augmentation d'une année sur
l'autre du nombre d'avions équipés de systèmes
anti-collision (TCAS), systèmes qui permettent aux commandants de bord
de connaître la position relative des autres avions, et leur permettent
donc d'identifier plus facilement les situations d'Airprox, y compris celles
qu'ils n'auraient pas détectés auparavant.
L'évolution des Airprox durant les 9 dernières années
est la suivante :
Airprox |
En route |
Approche |
Total civils |
Civils/
|
Total |
Par million de vol en route |
1989 |
25 |
63 |
88 |
22 |
110 |
74 |
1990 |
17 |
49 |
66 |
25 |
91 |
58 |
1991 |
14 |
62 |
76 |
11 |
87 |
54 |
1992 |
14 |
44 |
58 |
17 |
75 |
44 |
1993 |
12 |
57 |
69 |
26 |
95 |
57 |
1994 |
14 |
52 |
66 |
22 |
88 |
50 |
1995 |
12 |
42 |
54 |
18 |
72 |
39 |
1996 |
21 |
64 |
85 |
18 |
103 |
53 |
1997 |
20 |
75 |
95 |
24 |
119 |
58 |
1998 (8 mois) |
|
|
|
|
|
|
Si le
nombre d'Airprox en 1997 et en début 1998 est légèrement
plus élevé que celui des années précédentes,
il est prématuré, selon l'administration, de conclure à
une détérioration du niveau de sécurité .En effet,
d'une part, rapporté au nombre de vols, cette tendance devient moins
nette et, d'autre, part, l'ensemble des éléments cités en
introduction peut expliquer cette tendance.
Par ailleurs, un autre indicateur considéré comme plus fiable
s'améliore de façon sensible durant l'année 1997, pour se
détériorer nettement durant les 7 premiers mois de
l'année en cours : il s'agit des alertes "filet de sauvegarde".
Le filet de sauvegarde est une fonction du système "CAUTRA" d'assistance
automatisée au contrôle pour la phase en route
8(
*
)
qui sert à attirer l'attention du
contrôle sur d'éventuels risques de collision qu'il n'aurait pas
détectés. Ces alertes sont enregistrées automatiquement
puis toutes analysées. Elles constituent un échantillon
statistique plus représentatif et plus systématique, dans
lesquelles les incertitudes citées ci-dessus sont levées.
Le nombre d'alertes "filet de sauvegarde" conséquences d'espacements
réellement insuffisants entre avions est donné dans le tableau
suivant (événements par million de mouvements
traités).
1989 |
22 |
1990 |
32 |
1991 |
42 |
1992 |
35 |
1993 |
30 |
1994 |
38 |
1995 |
37 |
1996 |
35 |
1997 |
28 |
1998 (7 mois) |
34 |
En tout
état de cause, l'ensemble des éléments dont disposent les
services de la navigation aérienne ne permet pas de dégager une
tendance significative de variation du niveau de sécurité dans un
sens ou dans l'autre, sur l'ensemble de la période
considérée.
La situation en Europe est encore plus délicate à
appréhender car certains Etats ne communiquent pas les chiffres
correspondants. Néanmoins, selon les sources de l'IATA (International
Air Transport Association) représentant un grand nombre de compagnies
aériennes, mais qui incluent uniquement les Airprox dans lesquels une
compagnie membre est concernée, l'évolution des Airprox en Europe
serait la suivante :
1989 |
238 |
1990 |
245 |
1991 |
200 |
1992 |
190 |
1993 |
196 |
1994 |
221 |
1995 |
235 |
1996 |
213 |
1997 |
Non encore disponibles |
ANNEXE 2
LA PONCTUALITÉ DES TRANSPORTS
AÉRIENS
Les
indicateurs de retard toutes causes confondues prennent en compte plus de
soixante-dix causes. Les principales causes sont liées à
l'appareil (problème technique), au traitement des passagers (retards
à l'enregistrement, problèmes de sûreté), à
la météorologie, aux infrastructures au sol (problèmes
aéroportuaires) et en l'air (contrôle aérien). Ces retards
mesurent la différence entre l'heure de départ prévue
(heure annoncée au passager sur son billet) et l'heure de départ
réelle. C'est de ce constat factuel qu'on tire une moyenne.
La ponctualité s'est très nettement dégradée en
1997.
Le retard moyen par vol réalisé a été,
selon les mois, de 14 à 20 minutes.
Selon le mois, 25 à 40 % des vols ont été
retardés de plus de 15 minutes et de 3 à 5 % des vols
l'ont été de plus de 60 minutes.
Sur les premiers mois de l'année 1998, la ponctualité s'est
pratiquement maintenue au même niveau et au second trimestre le retard
moyen par vol a été de 18 minutes.
Cette situation a des origines multiples :
- difficultés rencontrées par les compagnies
aériennes en raison d'une utilisation tendue des flottes et des
équipages ou de mouvements sociaux ;
- sensibilité accrue au retard due à la création de
plates-formes de correspondance ("hubs") qui, en concentrant les vols,
multiplient l'effet de cascade d'un retard sur un vol;
- progression du trafic en 1998 qui, en nombre de mouvements, devrait
être une des plus fortes enregistrée ces dix dernières
années (+ 8,1 % sur les sept premiers mois de l'année).
Sur ce dernier point, des études ont montré qu'une augmentation
de trafic de 1 % était de nature à générer
5 % de délai supplémentaire, ce qui démontre une
certaine rigidité d'adaptation face au développement du transport
aérien.
Le retard dû au contrôle aérien (ATC) est calculé
à partir de la différence entre le créneau de
départ attribué par le système de contrôle
aérien et l'heure de départ demandée par la compagnie (ce
calcul se fait sur 16 aéroports français). Il ne correspond
pas à un constat factuel puisque le départ réel peut
encore être retardé suite aux autres causes potentielles
citées ci-dessus.
Les retards générés par l'ATC représentent de 20
à 25 % des retards "toutes causes". Ils ont, selon
l'administration, trois causes essentielles :
- la forte croissance du trafic, la "pointe" du trafic 1997
(6.981 mouvements dans la journée) a été atteinte
20 fois pendant les premiers 9 mois de 1998 (avec une pointe à
7.599 mouvements en augmentation de 8,8 % sur la pointe 1997) ;
- un manque d'espace, particulièrement dans le quart Nord-Nord-Est
de la France, entraînant une saturation à certaines
époques ; cette partie de la France génère à
elle seule 70 % des retards français ;
- les phénomènes de pointe de trafic renforcés par la
création des hubs (Paris-Charles-de-Gaulle, Nice, Bâle-Mulhouse,
Clermont-Ferrand).
C'est ainsi que les retards accusent une augmentation pendant la période
d'été. La part de l'ATC dans le retard moyen par vol
réalisé varie de 2 à 6 minutes mais, en juillet
98, 16 % des vols ont été retardés de plus de
15 minutes à cause du contrôle aérien.
Dans ce domaine, un début d'amélioration est cependant
perceptible. Une comparaison entre les résultats enregistrés en
septembre 1997 et en septembre 1998 met en évidence une diminution en
pourcentage des retards imputables aux centres français de navigation
aérienne.
L'amélioration est particulièrement sensible pour deux centres.
Celui d'Aix-en-Provence voit son pourcentage européen de retards passer
de 7,1 % à 2,3 % et celui d'Athis-Mons de 11,2 % à
7,3 %.
Le centre de Reims diminue légèrement ses retards -de 9,4 %
à 8,5 %- malgré une hausse du trafic contrôlé
(+ 7 % depuis le 1er janvier 1998).
Par ailleurs, on note une stabilisation du pourcentage des retards
enregistrés à Brest et Bordeaux dont le nombre de vols a
respectivement augmenté de 26,3 % et 9,2 % pendant la
période du 1er janvier au 30 septembre 1998.
Cette tendance à l'amélioration devrait se confirmer à la
suite de l'accord intervenu entre le ministre de la défense et le
ministre de l'équipement, des transports et du logement sur une
meilleure utilisation de l'espace aérien. La mise en oeuvre de cet
accord prendra tout son effet en 1999, dégagera de l'espace au profit du
trafic civil dans le quart Nord-Nord-Est et augmentera la capacité du
contrôle aérien dans des zones à haute
fréquentation.
1
Y compris les produits financiers.
2
En année pleine, les besoins s'élèveraient
sur la base des dépenses pour 1999 à 1.408,8 millions de
francs. En tenant compte du financement de la péréquation des
lignes aériennes, il serait de 1.460 millions de francs.
3
Rapport général 86 M. Alain Lambert, annexe
n° 20 Aviation civile - M. Yvon Collin du 21 novembre 1996
4
Et, dans le même temps, indiquer les recettes pouvant
être affectées à chaque type de dépenses.
5
Budget annexe de la navigation aérienne.
6
Il faudrait, pour en rendre entièrement compte, prendre en
considération la taxe perçue au profit du Fonds de
péréquation du transport aérien.
7
Alors même que le Sénat a, à l'instigation de
sa commission des affaires économiques, enrichi le texte de validation
des redevances aéroportuaires en accord avec le gouvernement pour porter
la date limite d'effet de cette validation au 1er juillet 1999.
8
Caractéristique qui, compte tenu du fait que
l'essentiel des problèmes se rencontre en phase d'approche, limite la
signification de la méthode.