Rapport n° 454 (1997-1998) de M. Alfred RECOURS, député, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, déposé le 20 novembre 1997
N° 454
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 27 mai 1998 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces Armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification de la convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction,
Par M. Daniel GOULET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton, Charles-Henri de Cossé-Brissac, vice-présidents ; Michel Alloncle, Jean-Luc Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë, secrétaires ; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jacques Bellanger, Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, André Gaspard, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet, Jacques Habert, Marcel Henry, Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, André Rouvière, André Vallet.
Voir le numéro :
Sénat : 424 (1997-1998)
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi a
pour objet d'autoriser la ratification de la convention sur l'interdiction de
l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel
et sur leur destruction, signée à Ottawa le
3 décembre 1997.
Armes aveugles, qui frappent
indistinctement les combattants et les civils -hommes, femmes et enfants-, et
plus souvent ces derniers, elles ont été massivement
utilisées au cours des dernières décennies, en dehors de
toute précaution minimale d'emploi, tant par des armées
régulières que par des forces engagées dans des
guérillas. Ces armes défient l'un des principes fondamentaux du
droit international humanitaire, qui interdit l'attaque des populations civiles
et proscrit les armes frappant sans discrimination civils et militaires. Leur
dissémination massive est hors de proportion avec les capacités
de déminage, limitées par leur coût et leur lenteur, si
bien qu'elles continuent à tuer et à mutiler des années
après la (p. fin des hostilités et qu'elles constituent un
fléau durable pour les pays concernés, qui doivent assurer la
lourde charge des victimes et sont entravés dans leur vie
économique et sociale.)
Face à ce désastre
humanitaire, la Convention d'Ottawa constitue un grand pas en avant et un
espoir.
Les instruments internationaux existants, pour l'essentiel le
protocole II sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines,
annexé à la Convention de Genève de 1980 sur
l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques, ne
sont manifestement pas à la mesure du problème posé par
les mines antipersonnel. La Convention d'Ottawa, signée en
décembre 1997, interdit pour sa part totalement l'emploi, la
fabrication, la conservation et le transfert des mines antipersonnel, ordonne
la destruction des stocks existants et instaure un mécanisme de
vérification internationale. Elle constitue la seule norme acceptable
pour ce type d'armes qui a produit des effets dévastateurs, surtout sur
les populations civiles, sans rapport avec sa justification militaire.
La convention d'Ottawa constitue également un espoir car, si de
nombreux pays producteurs ou utilisateurs de mines antipersonnel ne l'ont pas
signée, et n'ont pas l'intention de le faire dans l'immédiat, il
était cependant remarquable, en l'espace d'un peu plus d'une
année, d'avoir réuni plus de 120 pays autour de l'objectif
d'élimination totale de ces armes. A n'en pas douter, l'adhésion
déjà recueillie par cette Convention peut provoquer un effet
d'entraînement de nature à faire évoluer la position des
Etats qui ne se sont pas encore fermement engagés sur cet objectif.
L'action persévérante menée par des organisations
non gouvernementales qui, depuis le début des années 1980,
dénonçaient ce fléau autant qu'elles oeuvraient en faveur
des victimes, a été un facteur déterminant de cette
dynamique dont la Convention d'Ottawa représente une étape
majeure et, espérons-le, décisive. Il était à cet
égard symbolique que coïncident pratiquement la signature de la
Convention d'Ottawa et la remise du Prix Nobel de la Paix 1997 à
l'organisation "Campagne internationale contre les mines antipersonnel",
regroupement de nombreuses organisations non gouvernementales.
En ce
qui concerne la France, les initiatives qu'elle a prises à titre
unilatéral depuis plusieurs années, telles que l'interdiction de
la fabrication et de l'exportation des mines antipersonnel, son rôle
actif dans les enceintes internationales et plus récemment sa
décision de renoncer définitivement à l'emploi de ces
armes alors même qu'elle expose nombre de ses soldats dans des
opérations extérieures, sont autant d'éléments qui
la placent à la pointe du combat contre les mines antipersonnel.
Avant de détailler le contenu de la Convention d'Ottawa, en
soulignant son apport au regard des instruments internationaux existants, votre
rapporteur rappellera les données essentielles de la question des mines
antipersonnel. Il analysera ensuite la position de la France face à la
convention et les actions qu'elle mène contre les mines
antipersonnel.
I. LES MINES ANTIPERSONNEL : LA SOURCE D'UN DÉSASTRE HUMANITAIRE
Les mines antipersonnel ne constituent pas une arme de
destruction massive. Dans l'opinion publique, elles n'ont jamais
égalé la crainte provoquée par les arsenaux
nucléaires, chimiques ou bactériologiques. Pourtant, elles tuent
ou mutilent chaque année dans le monde plus de 20 000 personnes,
presque toujours des civils et bien souvent des enfants.
A propos des
mines antipersonnel, on peut véritablement parler, comme M. Boutros
Ghali, de "désastre humanitaire". Leurs dégâts
considérables sont sans commune mesure avec la justification militaire
de leur usage. Alors que les conflits sont terminés depuis parfois
plusieurs années, elles continuent de frapper leurs victimes. Elles
maintiennent ainsi un "état de guerre en temps de paix". Leur
dissémination fait du déminage une tâche
démesurée, par son coût et sa lenteur, hors d'atteinte pour
les pays concernés. Ceux-ci doivent en outre supporter le coût des
dégâts humains causés par les mines antipersonnel et sont
pénalisés par l'entrave qu'elles constituent pour la reprise
d'une vie économique et sociale normale.
A. LA PROLIFÉRATION DES MINES ANTIPERSONNEL
Depuis la seconde guerre mondiale, l'usage des mines antipersonnel s'est considérablement accru, de sorte que des quantités massives de mines se trouvent aujourd'hui disséminées dans plus de 60 pays.
1. Un usage massif des mines antipersonnel détourné de sa justification première
La mine antipersonnel se définit comme un engin quelconque
placé sur ou dans le sol, ou sur une autre surface ou à
proximité et conçu pour exploser ou éclater du fait de la
présence, de la proximité ou du contact d'une personne.
Historiquement, l'apparition des mines antipersonnel a suivi celle des
mines antichars.
Utilisées tout d'abord pour protéger les
champs de mines antichar, les mines antipersonnel ont vu depuis lors leur
utilisation considérablement développée. L'apparition de
nouveaux types de mines, assortie de nouveaux moyens de pose, a
diversifié leur emploi qui s'est peu à peu détourné
des objectifs strictement militaires pour prendre une ampleur plus massive,
moins ciblée, et toucher indistinctement combattants et populations
civiles.
On compte actuellement
deux grandes catégories
de mines antipersonnel :
. les mines à effet de
souffle
,
à visée incapacitante
individuelle
,
posées en surface et
camouflées ou enfouies à faible profondeur dans le sol, qui
explosent sous la simple pression d'un pas,
. les mines
à fragmentation, qui projettent des billes ou des éclats
métalliques
en explosant et qui se subdivisent en mines dites
à "effet collectif", soit montées au-dessus du sol et
reliées à des fils pièges (mines à piquet), soit
enfouies puis propulsées sous l'effet d'une première charge avant
de détoner à hauteur d'homme (mines bondissantes), et en mines
"à effet directionnel" qui, après déclenchement,
dispersent leurs projectiles sur un large rayon.
Il existe près
de 400 modèles différents, pesant d'un centaine de grammes
à plusieurs kilogrammes. Cette diversité des modèles et de
leurs caractéristiques techniques, mais aussi la production de masse et
à faible coût, ont entraîné une utilisation de plus
en plus répandue et incontrôlée.
Les mines de
petite taille et de faible poids peuvent être directement
emportées par les combattants, ce qui favorise leur
dissémination.
De nombreux modèles peuvent être mis
en place à distance,
c'est-à-dire lancés depuis
un avion, un hélicoptère ou par un mortier, un lance-roquettes ou
une pièce d'artillerie. Cette dernière technique a notamment
été utilisée par les Américains au Vietnam et au
Laos et, plus massivement encore, par les Soviétiques en Afghanistan.
Outre qu'elle permet la dispersion d'une quantité beaucoup plus
importante de mines, la mise en place à distance a pour principale
caractéristique de ne permettre aucun relevé ou tracé
précis des zones minées, ce qui rend le déminage encore
plus difficile.
Enfin, les progrès techniques ont permis
d'élaborer de nombreux modèles présentant une teneur en
métal très minime, et donc beaucoup plus difficile à
détecter.
L'usage militaire des mines antipersonnel est en
principe lié au souci de protéger des installations sensibles ou
des objectifs spécifiques. Il vise également à limiter les
mouvements d'infanterie de l'adversaire. Mais il a rapidement donné lieu
à des
dérives
.
Loin de se limiter
à vouloir neutraliser un adversaire potentiel, les mines antipersonnel
ont volontairement été développées pour blesser ou
mutiler plus que pour tuer, afin d'accroître la désorganisation
des troupes adverses tout en exerçant à leur encontre un effet
psychologique démoralisant.
En dehors des conflits classiques,
les mines antipersonnel ont très largement été
utilisées dans les guerres civiles dans le but non dissimulé de
terroriser les populations, de désorganiser des régions
entières et de les affaiblir économiquement.
2. Une dissémination qui touche plus de 60 pays
Selon les estimations les plus couramment citées,
notamment par les Nations unies et les organisations non gouvernementales,
110 millions de mines antipersonnel
se trouvaient
enterrées ou posées au sol dans 64 pays en 1995, leur nombre
augmentant de 2 millions d'unités chaque année. En outre, 100
millions d'unités étaient stockés dans les arsenaux de
plus de 100 pays. Sur la seule période 1980-1995, 65 millions de mines
antipersonnel auraient été disséminées.
Ces
ordres de grandeur illustrent l'ampleur d'un phénomène qui est
loin de se réduire.
La liste des pays les plus gravement
touchés par les mines antipersonnel recoupe celle des conflits ayant
affecté les pays du sud au cours des dernières décennies.
L'Afghanistan, le Cambodge et l'Angola figurent incontestablement en
tête de cette liste, le nombre de mines disposées sur leur
territoire étant, selon les estimations, voisin et même
supérieur à la dizaine de millions d'unités.
En
Afghanistan,
les mines ont été massivement
larguées depuis des hélicoptères par les forces
soviétiques, dans des régions entières supposées
contrôlées par les Moudjahidins afghans. Ces mines à
ailettes, dites " mines papillons ", présentent, parmi
d'autres effets destructeurs, la particularité de ressembler à un
jouet et d'attirer les enfants, qui constituent la majorité de leurs
victimes.
Au
Cambodge,
l'armée vietnamienne
comme les Khmers rouges et l'ensemble des factions ont eu largement recours aux
mines antipersonnel et les ont répandues dans de vastes zones sans que
les emplacements n'aient été préalablement
enregistrés.
En
Angola,
l'usage des mines
antipersonnel tant par les forces gouvernementales que par celles de l'Unita, a
entraîné des dégâts considérables au sein des
populations civiles.
Le Mozambique, le Soudan, la Somalie, l'Ethiopie,
l'Erythrée, le Laos et le Vietnam compteraient pour leur part sur leur
sol plus de 1 million de mines antipersonnel. Il en va de même de l'Irak,
dans la région du Kurdistan.
En Amérique centrale, le
Salvador et le Nicaragua sont également touchés.
Enfin,
le phénomène n'est pas limité aux pays du sud et
l'utilisation des mines antipersonnel est apparue dans les conflits de
l'ex-Yougoslavie et de l'ex-URSS.
De 2 à 3 millions de mines
antipersonnel auraient été disséminés dans les
zones civiles de Croatie et de Bosnie, à la fois pour couper les lignes
d'approvisionnement et pour assurer le contrôle des territoires. Dans une
moindre mesure, les mines antipersonnel ont été utilisées
dans les conflits du Haut-Karabakh, de l'Abkhazie et de la
Tchétchénie.
B. UNE CHARGE INSUPPORTABLE POUR LES PAYS AFFECTÉS
Parce qu'elles continuent à frapper longtemps après la fin des hostilités et qu'elles touchent très majoritairement les populations civiles, les mines antipersonnel déstabilisent durablement les sociétés des pays affectés, dépourvus de moyens de déminage adaptés à l'ampleur du problème.
1. Le coût humain, social et économique des mines antipersonnel
Les mines antipersonnel causent tout d'abord des
dégâts humains
considérables, surtout dans
les populations civiles, et en particulier chez les enfants. La faible charge
explosive est plus calculée pour blesser, en vue de ralentir la marche
de l'adversaire et de le désorganiser, que pour tuer. Si elle survit
à l'explosion ou aux suites de l'explosion (hémorragies,
infections), la victime est le plus souvent atteinte de blessures très
graves qui nécessitent l'amputation d'un ou plusieurs membres.
Le comité international de la Croix Rouge estimait en 1995 que
chaque mois, 800 personnes étaient tuées et de 1 000 à 1
500 autres grièvement blessées par des mines antipersonnel. Le
nombre de victimes ayant dû subir un amputation est évalué
à 30 000 en Afghanistan et au Cambodge et entre 40 000 et 70 000 en
Angola.
Les soins, la rééducation, l'appareillage et la
réinsertion sociale et professionnelle sont autant de charges directes
qui pèsent sur les pays concernés.
A ces effets directs,
s'ajoutent des effets indirects, d'autant plus graves qu'ils perdurent tant que
le déminage n'a pas été effectué. En effet, la
persistance de vastes portions du territoire infestées de mines
entrave le retour à une vie économique et sociale
normale.
Le minage représente tout d'abord une limite
importante à l'action d'éventuelles forces de maintien de la paix
ou d'organisations humanitaires. Comme on l'a par exemple constaté en
Afghanistan, il empêche le retour des réfugiés dans leurs
régions d'origine et compromet la reconstruction.
Par ailleurs,
dans des pays où l'agriculture est dominante, le minage réduit
les surfaces cultivables et les zones pastorales, affaiblit les systèmes
d'irrigation et bien entendu frappe une main-d'oeuvre agricole très
exposée au danger.
Enfin, le minage désorganise
profondément l'économie en restreignant les possibilités
de communication et d'échanges.
La prolifération des
mines antipersonnel doit être considérée comme un
facteur aggravant de sous-développement.
2. Le déminage : une tâche démesurée, lente et coûteuse
Si l'on estime à 2 millions le nombre de mines
antipersonnel posées chaque année dans le monde, seules 100 000
sont éliminées dans le même temps dans le cadre de
programmes de déminage. On pose donc encore beaucoup plus de mines que
l'on en élimine.
On distingue généralement deux
types de déminage : le
déminage militaire,
destiné à ouvrir rapidement des brèches dans les
champs de mines afin de poursuivre les opérations militaires, et le
déminage humanitaire,
opération de bien plus
grande ampleur, qui consiste à " dépolluer " en
totalité des régions entières afin de permettre le retour
des habitants et la reprise des activités économiques et sociales
normales.
Le déminage humanitaire s'attaque à des zones
beaucoup plus étendues que le déminage militaire et il requiert
un degré de précision bien plus important, l'objectif
étant d'éliminer la totalité des mines. Il peut faire
appel à des moyens mécaniques mais repose essentiellement sur le
travail d'équipes de démineurs, " ratissant " le
terrain m² par m². Lent, fastidieux et dangereux, le déminage
humanitaire est également une activité très
coûteuse. L'enlèvement d'une mine représente un coût
pouvant varier de 300 à 1 000 dollars, ce qui est considérable si
l'on prend en compte le nombre d'engins disséminés et les
capacités financières des Etats concernés. Pour les aider
à faire face à cette tâche gigantesque, les Nations unies
ont lancé des programmes de déminage axés sur la formation
de démineurs locaux, particulièrement en Afghanistan, au
Cambodge, en Angola et au Mozambique. Plusieurs pays mènent
parallèlement des recherches en vue de perfectionner les techniques de
détection et de neutralisation des mines. Force est de constater que
même dans l'hypothèse, malheureusement démentie par les
faits, d'un arrêt de l'utilisation des mines antipersonnel,
l'élimination des millions de mines existantes impliquerait sur une
longue période, l'affectation de moyens financiers très
importants.
II. LA CONVENTION D'OTTAWA : UNE ÉTAPE MAJEURE DANS LA LUTTE CONTRE LES MINES ANTIPERSONNEL
La convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la
production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction,
signée par 121 Etats à Ottawa le 3 décembre 1997 permet de
réaliser un pas très important dans la lutte contre les mines
antipersonnel.
En effet, la prise de conscience par la
communauté internationale des effets dévastateurs de
l'utilisation massive des mines antipersonnel a été bien tardive
et il a fallu attendre 1980 pour qu'un instrument international se penche sur
l'emploi de ces armes. Le protocole II de la convention de Genève de
1980, modifié en 1996, ne fait qu'encadrer l'usage des mines
antipersonnel et ne se situe manifestement pas à la hauteur du
problème posé.
L'insatisfaction des organisations non
gouvernementales, partagée par de nombreux Etats, au regard du texte
adopté à Genève en 1996 a d'ailleurs servi de levier au
déclenchement du "processus d'Ottawa" qui s'est pour sa part fixé
un objectif plus ambitieux : placer les mines antipersonnel au ban des arsenaux
militaires.
Certes, le texte adopté à Ottawa n'a pas
recueilli la signature d'un nombre important de pays producteurs ou
utilisateurs de mines antipersonnel. De ce fait, il n'apporte pas, dans
l'immédiat, une réponse définitive à ce douloureux
problème. Il constitue cependant pour la sécurité
internationale une référence à laquelle de nouveaux pays
seront conduits, tôt ou tard, à se rallier.
En ce sens, la
convention d'Ottawa constitue plus une étape qu'un aboutissement. Elle
impose de poursuivre le combat contre les mines antipersonnel et leurs
effets.
A. LES LACUNES DU DROIT INTERNATIONAL
Il a fallu attendre 1980 pour qu'une convention internationale spécifique vienne compléter les principes généraux du droit humanitaire international afin de régir l'utilisation des mines antipersonnel. Cette convention comportait dès le départ certaines insuffisances qui ont conduit la France à actionner la procédure de révision et à provoquer le réexamen de l'un des trois protocoles annexés, le protocole II relatif aux mines. Mais le résultat de cette révision a été décevant.
1. Les principes issus du droit international humanitaire et la convention de 1980
Jusqu'en 1980, aucun texte particulier ne concernait
l'utilisation des mines antipersonnel. On ne pouvait se référer
qu'aux principes généraux du droit international humanitaire,
c'est-à-dire aux
conventions dites "de Genève"
sur la protection des victimes, civiles ou militaires, de la guerre et
aux
conventions dites "de La Haye"
, qui ont tenté
d'édicter un "droit de la guerre", encadrant les moyens et les
méthodes utilisés par les forces armées et proscrivant
certaines d'entre elles.
En dernier lieu, les quatre conventions de
Genève du 12 août 1949, qui portent notamment sur
l'amélioration du sort des blessés, le traitement des
blessés de guerre et la protection des personnes civiles, ont
été complétées par deux protocoles additionnels du
8 juin 1977 sur la protection des victimes de conflits armés
internationaux et sur celle des victimes de conflits armés non
internationaux.
Il ressort de cet ensemble de textes
deux
principes généraux
pouvant s'appliquer aux mines
antipersonnel
:
•
l'obligation de distinguer les
populations civiles et les combattants
, qui interdit l'attaque des
populations civiles et l'emploi d'armes frappant sans discrimination civils et
militaires,
•
l'interdiction d'employer des armes ou des
méthodes de guerre "de nature à causer des maux
superflus",
c'est-à-dire excessifs par rapport à
l'objectif militaire recherché.
Ces principes s'appliquent
à tous les Etats, quelles que soient les obligations qu'ils ont
contractées par voie de traités, mais ils restent définis
en termes généraux et ne visent aucune catégorie d'armes
particulière.
Aussi plusieurs textes ont-ils été
édictés pour interdire ou limiter plus précisément
l'emploi de certaines armes. Il en est ainsi du protocole de Genève de
1925 sur les gaz asphyxiants et les moyens bactériologiques, de la
convention de 1972 sur l'interdiction de la fabrication des armes
bactériologiques ou de la convention de Paris de 1993 sur les armes
chimiques.
C'est dans cette logique qu'a été
adoptée
le 10 octobre 1980
, dans le cadre d'une
conférence des Nations unies, la
convention sur l'interdiction
ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent
être considérées comme produisant des effets traumatiques
excessifs ou comme frappant sans discrimination.
La convention
de 1980 ne constitue en elle-même qu'un traité cadre. Si elle
rappelle en préambule le
"principe du droit international selon
lequel le droit des parties à un conflit armé de choisir des
méthodes ou des moyens de guerre n'est pas illimité"
et
celui
"qui interdit d'employer dans les conflits armés des armes,
des projectiles et des matières ainsi que des méthodes de guerre
de nature à causer des maux superflus",
ses onze articles
comportent essentiellement des dispositions relatives à son champ
d'application, à sa ratification et à sa révision.
La convention de 1980 est accompagnée de
trois
protocoles
:
- le protocole I sur les armes à
éclats non localisables,
-
le protocole II sur
l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et autres
dispositifs,
- le protocole III relatif aux armes
incendiaires.
Le
protocole II
s'applique aux mines,
à l'exception des mines antinavires. Il comportait, dans sa version
initiale, pour l'essentiel, les dispositions suivantes :
• il est
interdit de diriger les mines contre les populations civiles et
d'employer les mines sans discrimination
, c'est-à-dire sur un
objectif autre que militaire,
•
les
mines
mises en place à distance
ne peuvent être
utilisées qu'à la condition d'être équipées
d'un dispositif de neutralisation efficace ou de faire l'objet d'un
relevé précis de leur emplacement,
• les parties
doivent
enregistrer l'emplacement de leurs champs de mines
préplanifiés et des champs de mines qu'ils mettent en place au
cours du conflit,
• à la fin des hostilités, les
parties au conflit doivent prendre les
mesures nécessaires pour
dégager les champs de mines.
Une soixantaine de pays
seulement ont adhéré à ce protocole jugé
très insuffisant, dont la révision, initiée par la France,
est intervenue en 1996.
2. La révision du protocole II : des progrès trop mesurés
A l'issue d'un processus de plus de deux ans, un consensus a pu
être réalisé entre les différentes parties au
protocole II en faveur d'une révision minimale de cet instrument. Le
Sénat a procédé à l'examen de ce texte il y a
près d'un an, le 24 juin 1997. Le projet de loi autorisant la
ratification est depuis lors en instance à l'Assemblée nationale.
Le nouveau protocole II contient des dispositions destinées
à restreindre l'usage des mines antipersonnel. Il est désormais
applicable aux conflits armés non internationaux
,
c'est-à-dire aux guerres civiles et aux conflits
internes
.
Il
interdit l'emploi des mines
antipersonnel indétectables
, des mines explosant sans contact
sous l'effet d'un champ magnétique, et des
mines non pourvues de
mécanismes d'autodestruction
ou d'autoneutralisation limitant
leur durée de vie.
Il pose le principe de la
responsabilité du poseur de mines
, qui est tenu de les
enlever à la fin des hostilités. Il renforce les règles
imposant l'
enregistrement
des champs des mines, y compris pour
les mines mises en place à distance.
Enfin, il interdit les
transferts
de mines prohibées ou les transferts
à un destinataire autre qu'un Etat. Pour les mines dont l'usage demeure
autorisé, les parties s'engagent à ne pas les transférer
à un Etat qui n'a pas adhéré au protocole.
Ce
texte au contenu extrêmement technique témoigne du
souci
d'enrayer les dérives de l'utilisation des mines antipersonnel
,
tout en éliminant des arsenaux les armes les plus susceptibles de
frapper les populations civiles en dehors de toute phase de combat. Il
présente d'autre part le mérite de recueillir l'adhésion
d'importants pays producteurs tels que les Etats-Unis, la Russie, l'Inde, la
Chine, le Pakistan.
Mais le nouveau protocole II souffre aussi de
graves lacunes
.
Une période transitoire de
9 ans a été prévue pour permettre aux pays qui le
souhaitent de se conformer aux normes de détectabilité ou
d'autoneutralisation des mines. Par ailleurs, aucun mécanisme de
vérification ne permet de contrôler l'application par les parties
des innombrables prescriptions techniques du protocole.
Les
progrès apportés par le protocole II modifié sont
manifestement sans rapport avec l'acuité du problème des mines
antipersonnel. Il ne constitue que le corps de règles minimales sur
lequel un consensus international a pu être établi. C'est la
faiblesse des résultats obtenus qui a conduit à enclencher un
processus plus ambitieux, consacré par la convention d'Ottawa.
B. LA CONVENTION D'OTTAWA : UNE NORME DE RÉFÉRENCE POUR L'ÉLIMINATION TOTALE DES MINES ANTIPERSONNEL
En à peine plus d'une année a pu être élaboré un texte recueillant l'approbation de plus de 120 Etats, édictant une interdiction totale de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel, imposant la destruction des stocks existants et instaurant un régime de transparence assorti de mécanismes de vérification. Mais beaucoup d'Etats très impliqués dans la production ou l'utilisation des mines antipersonnel, à commencer par les Etats-Unis, la Russie ou la Chine, n'ont pas signé cette convention.
1. Les étapes du processus d'Ottawa
En octobre 1996, quelques mois après l'adoption à
Genève de la modification du protocole II, le Canada, par la voix de son
ministre des affaires étrangères M. Axworthy, lançait le
processus d'élaboration d'une convention d'interdiction totale de la
production, du stockage, du transfert et de l'utilisation des mines
antipersonnel, désormais dénommé "processus d'Ottawa".
Devant le caractère décevant de la révision du
protocole II, et considérant que la recherche d'un consensus, dans le
cadre de la conférence du désarmement, n'autoriserait que des
avancées très modestes et très lentes, plusieurs pays ont
considéré que face à l'ampleur du problème, une
telle convention d'interdiction totale devait être mise au point
rapidement, quand bien même elle ne recueillerait pas l'adhésion
de tous.
Un groupe d'une vingtaine d'Etats, aux premiers rangs desquels
le Canada, l'Autriche, la Belgique, la Norvège, l'Afrique du Sud, la
Suisse et l'Allemagne, ont ainsi mené à bien le processus
d'Ottawa marqué par la Conférence de Bruxelles en juin 1997, la
Conférence d'Oslo en septembre 1997, au cours de laquelle a
été élaboré et adopté le texte
définitif de la Convention et enfin la Conférence de signature
à Ottawa, au mois de décembre 1997.
Ce processus frappe
par son extrême rapidité, peu commune en matière de
négociations internationales. Il s'est déroulé en dehors
des enceintes multilatérales habituelles pour les questions de
désarmement et a été fortement soutenu et
accompagné par les organisations non gouvernementales les plus actives
dans le combat contre les mines antipersonnel et l'assistance aux victimes.
La rapidité du processus tient tout d'abord à la
clarté de l'objectif
: une interdiction totale, sans
aménagements, sans réserve, sans période transitoire. Dans
ces conditions, le texte était relativement simple à
élaborer. Elle tient également à la nature même du
processus, qui entendait fédérer les Etats poursuivant le
même objectif sans pour autant prétendre à
l'universalité.
C'est ainsi qu'ont été
écartées les demandes, notamment des Etats-Unis, en vue de
prévoir des exemptions ou des délais de mise en oeuvre.
Les principales discussions ont porté sur le régime de
vérification, qui constituait pour la France un point essentiel, et sur
la coopération internationale et l'assistance au déminage,
préoccupations premières des pays minés.
2. Une interdiction totale des mines antipersonnel
Le champ d'application de la convention d'Ottawa résulte
de la définition qu'elle donne des mines antipersonnel.
Pour la
convention,
"par mine antipersonnel, on entend une mine conçue pour
exploser du fait de la présence, de la proximité ou du contact
d'une personne et destinée à mettre hors de combat, blesser ou
tuer une ou plusieurs personnes. Les mines conçues pour exploser du fait
de la présence, de la proximité ou du contact d'un
véhicule et non d'une personne qui sont équipées de
dispositifs antimanipulation ne sont pas considérées comme des
mines antipersonnel du fait de la présence de ces dispositifs".
Cette définition est très proche de celle retenue par le
protocole II, du moins telle qu'elle avait été
interprétée par de nombreux pays dont la France. Elle englobe
toutes les mines à effet antipersonnel, y compris des mines dites mixtes
à la fois antivéhicules et antipersonnel. En revanche, elle
exclut les mines spécifiquement antivéhicules qui sont
équipées des dispositifs de protection empêchant leur
désamorçage.
L'article premier de le convention
définit les obligations générales des parties
Il
interdit l'emploi, la mise au point, la production, l'acquisition, le
stockage, la conservation et le transfert des mines antipersonnel
. Il
interdit également d'assister, d'encourager ou d'inciter quiconque
à s'engager dans une activité interdite par la convention.
Il oblige d'autre part les parties à
détruire
leurs stocks de mines antipersonnel
, dans un
délai
maximum de 4 ans
après l'entrée en vigueur de la
convention, ainsi que le précise l'article 4.
L'article 3
prévoit de
strictes exceptions
:
* la
conservation et le transfert d'un nombre minimum de mines antipersonnel sont
autorisés pour la
mise au point de techniques de
détection des mines, de déminage
et de
destruction
, et pour la formation à ces techniques ; la
négociation n'a pu s'accorder sur un plafond précis, la France
estimant pour sa part que la quantité nécessaire aux fins
précitées s'établit à 5 000 mines,
*
le
transfert de mines en vue de leur destruction
est
autorisé, ce qui permettra aux pays ne disposant pas de capacités
de destruction de faire appel aux services d'autres Etats parties.
Enfin, au rang des obligations, l'article 5 impose aux Etats parties de
détruire les mines antipersonnel dans les zones
minées
placées sous leur juridiction, dans un
délai maximum de 10 ans après l'entrée en vigueur de la
convention, et d'ici là de signaler et de protéger les
périmètres concernés. Si cette prescription est
relativement facile à suivre pour les utilisations classiques des mines,
elle paraît peu réaliste pour les pays frappés par une
dissémination à vaste échelle. Ainsi l'article 5
prévoit-il une possibilité de renouvellement de ce délai,
laissé à la décision de la majorité des Etats
parties statuant su une requête documentée et
argumentée.
3. Les mesures de transparence et le régime de vérification internationale
L'article 7, relatif aux
mesures de
transparence
, astreint chaque Etat partie au dépôt
auprès du Secrétaire général des Nations-Unies,
d'un
rapport annuel
comportant de nombreux renseignements
suivants :
- les mesures législatives ou réglementaires
prises à titre national pour l'application de la convention,
-
le total des stocks, avec une ventilation par type de mines, quantité et
numéro de lot,
- la localisation des zones minées
- un état précis des mines conservées ou
transférées, conformément à la convention, aux fins
de formation ou de destruction,
- l'état de mise hors service ou
de reconversion des sites de production,
- l'état des programmes
de destruction, qui mentionnera les techniques utilisées et les normes
de sécurité et de protection de l'environnement observées,
ainsi qu'une description détaillé des mines détruites.
L'article 8 instaure un
mécanisme de vérification
internationale
qui s'appuie tout d'abord sur des consultations et des
démarches d'éclaircissements et qui pourra entraîner, si
ces procédures sont insuffisantes et si les Etats parties le
décident à la majorité, une
mission
d'établissement des faits
, dotés d'un mandat
précis.
Inspirée de dispositif existants, notamment dans
la Convention sur les armes chimiques, la procédure de la mission
d'établissement des faits obéit à des règles
strictes qui concilient la rapidité d'exécution et la
possibilité d'accéder aux zones suspectes d'une part, et le
respect de la souveraineté des Etats d'autre part. L'Etat
inspecté peut ainsi prendre les mesures imposées par la
protection d'équipements, d'informations ou de zones sensibles et par la
protection des droits constitutionnels tels que le droit de
propriété.
4. La coopération internationale et l'assistance au déminage
L'arrêt de la production, du transfert ou de l'emploi des
mines antipersonnel ne saurait à lui seul apporter une réponse au
drame humanitaire engendré par l'utilisation de ces armes.
Aussi
les pays les plus affectés souhaitaient-ils que la Convention contienne
des dispositions sur l'assistance internationale pour le déminage et
l'aide aux victimes.
L'article 6 prévoit que chaque Etat partie
"qui est en mesure de le faire" fournira une assistance pour les
soins
aux victimes des mines
, pour leur réadaptation et leur
réintégration sociale, une
assistance pour le
déminage
, soit dans un cadre bilatéral, soit par le
biais d'organisations multilatérales.
La formulation retenue ne
pouvait guère aller au-delà de cette déclaration
d'objectif, tant il apparaissait difficile de fixer un niveau de contribution
contraignant pour l'ensemble des Etats-parties.
La Conférence a
toutefois été l'occasion de relancer la mobilisation
internationale sur les programmes d'assistance et de déminage, un grand
nombre de pays ayant annoncé un renforcement de leurs contributions.
5. Une convention dont l'universalité reste à réaliser
Il était prévisible, dès l'enclenchement du
processus d'Ottawa, que la Convention ne puisse recueillir un consensus de la
communauté internationale sur un objectif aussi tranché que
l'interdiction totale des mines antipersonnel.
Si la convention
réunit
125 Etats signataires
, dont la liste figure en
annexe, on ne peut qu'être impressionné par la liste des pays non
signataires.
En effet,
restent en dehors de la convention : les
Etats-Unis, la Russie, la Chine, l'Inde, le Pakistan, Israël, la Turquie,
le Liban, la Syrie, l'Ukraine, Cuba, la Finlande, les trois Etats baltes, la
République fédérative de Yougoslavie, les deux
Corées, le Vietnam, l'Afghanistan ou encore l'Egypte, l'Iran, et
l'Irak.
Les Etats-Unis ont tenté d'influer sur la
rédaction du texte, pour faire reconnaître une exception
géographique en faveur des mines qu'ils disposent le long du 38e
parallèle, entre les deux Corées et pour obtenir une
période transitoire de 9 ans, leur permettant de mettre au point des
systèmes de substitution. Les Etats-Unis disposent en effet de mines
à usage mixte, à la fois antivéhicules et antipersonnel,
qui entrent dans le champ de la convention. N'ayant pas obtenu satisfaction,
ils n'ont pas signé le texte tout en annonçant leur intention de
rejoindre la convention d'Ottawa à moyen terme.
La Russie a mis
en avant le coût de la destruction des stocks et la recherche de moyens
de substitution pour ne pas signer mais elle a annoncé son intention de
rejoindre rapidement la convention.
Les considérations
financières ont également été mises en avant par
l'Ukraine et la Biélorussie.
Des motifs de
sécurité nationale ont été invoqués par la
Chine, le Liban, Israël, Cuba et la Finlande, qui dispose de mines
à la frontière russe.
L'absence de bien des pays
producteurs et utilisateurs de mines antipersonnel au rang des signataires ne
fait pas obstacle à
l'entrée en vigueur de la
convention
. En effet, selon l'article 17, celle-ci interviendra
6 mois après le dépôt du 40e instrument de
ratification
. A la date de rédaction du présent rapport,
8 pays avaient déjà ratifié la convention.
Il n'en
demeure pas moins que le défaut d'adhésion de pays très
concernés par l'emploi et la production de mines antipersonnel
restreindra considérablement la portée pratique de la convention.
Si le processus d'Ottawa a permis à plusieurs pays qui avaient
déjà pris des mesures restrictives de franchir le dernier pas
vers l'interdiction totale des mines antipersonnel, il n'apporte qu'une
réponse partielle au problème et constitue surtout un texte de
référence, une norme humanitaire sur laquelle l'ensemble de la
communauté internationale sera incitée à s'aligner
progressivement.
6. La lutte contre les mines antipersonnel : un combat inachevé
Pour importante qu'elle soit, la convention d'Ottawa ne constitue
qu'une étape dans la lutte contre les mines antipersonnel.
Comme
l'a toujours indiqué la France, le processus d'Ottawa ne saurait rendre
caduques les négociations avec les Etats parties de la Conférence
du désarmement, pour garantir l'application du protocole II
modifié tout d'abord et pour améliorer cet instrument qui, en
pratique, sera le seul à s'appliquer à la plupart des pays
producteurs ou utilisateurs de mines antipersonnel.
Dans cette optique,
la France a manifesté son intention de reprendre les négociations
au sein de la Conférence de désarmement, enceinte qui
présente l'avantage de réunir tous les grands pays producteurs et
utilisateurs. Elle a notamment proposé que soit visé un objectif
réaliste : un accord spécifique intéressant les transferts
de mines antipersonnel. Bien des pays pourraient se rallier à ce
principe ne mettant pas en cause leurs préoccupations de
sécurité. Un tel accord aurait pour effet de limiter
considérablement le marché des mines antipersonnel auquel
s'approvisionnent certains Etats et plus souvent encore des mouvements
armés ou des organisations non régulières, qui jouent un
rôle majeur dans la dispersion des mines.
III. LES IMPLICATIONS DE LA CONVENTION D'OTTAWA POUR LA FRANCE
Par son action diplomatique et sa participation à
l'assistance internationale, la France s'est toujours située à la
pointe du combat contre les mines antipersonnel.
L'adhésion
à la Convention lui impose des obligations nouvelles, essentiellement en
matière d'emploi, auxquelles elle entend rapidement se conformer.
A. LE RÔLE ACTIF DE LA FRANCE DANS LA LUTTE CONTRE LES MINES ANTIPERSONNEL
La France a joué un rôle très actif dans la lutte contre les mines antipersonnel, tant sur le plan diplomatique que par ses décisions d'ordre interne et son action humanitaire.
1. L'action diplomatique de la France
La France a grandement contribué à porter dans les
enceintes internationales le débat sur les mines antipersonnel.
C'est elle qui, en application d'une disposition de la Convention de
Genève de 1980, a demandé au Secrétaire
général des Nations Unies en 1993 de convoquer une
Conférence d'examen pour la
révision du protocole
II
, afin de remédier à ses insuffisances.
Il
s'agissait pour la France d'étendre le champ d'application du protocole
aux conflits armés non internationaux, de renforcer les prescriptions
interdisant ou limitant l'emploi de certaines mines et de remédier
à l'absence de mesures relatives aux transferts et à la
vérification internationale.
Le protocole II modifié n'a
que partiellement répondu aux attentes de notre pays. Le consensus s'est
établi au prix de concessions importantes telles que la durée de
la période transitoire ou le refus de tout régime de
vérification, qui était pour la diplomatie française un
point crucial.
Même si elle n'a pas figuré parmi les
initiateurs du processus d'Ottawa, elle a participé activement aux
conférences de Bruxelles et d'Oslo. A cette occasion, elle s'est
posée en avocat vigilant de l'intégrité de la Convention,
face aux demandes tendant à en atténuer la portée. La
France a notamment fermement soutenu le principe d'une interdiction totale ne
souffrant aucune exception dans l'espace ou dans le temps. Alors que des pays
comme le Japon ou l'Australie soutenaient le souhait américain d'un
régime transitoire optionnel d'une durée de 9 ans, la France a
milité pour l'entrée en vigueur immédiate de la
convention.
De même, l'instauration d'un véritable
mécanisme de vérification internationale, auquel certains pays
auraient préféré un système peu contraignant,
fondé sur la coopération entre Etats, a été l'une
des principales préoccupations de la délégation
française, qui a obtenu la mise en place d'un régime minimal mais
cependant efficace, permettant de dépêcher des missions
d'établissement des faits.
Enfin, la France tenait beaucoup
à ce que l'adoption de la Convention n'occulte pas les efforts à
poursuivre dans le cadre de la Conférence du désarmement. Elle a
obtenu sur ce point une référence à cette enceinte dans le
Préambule de la Convention et préconise désormais une
reprise des négociations pour la mise au point d'un accord international
d'interdiction des transferts de mines antipersonnel.
2. Des mesures prises à titre unilatéral qui anticipent largement l'application de la Convention d'Ottawa
La France a déjà pris, à titre
unilatéral, des mesures qui l'ont placée en avance sur
l'application de la Convention.
Elle a adopté un
moratoire sur les exportations de mines antipersonnel
,
entré dans les faits dès 1986 et officialisé en 1993, plus
aucune autorisation n'étant délivrée par le gouvernement
pour l'exportation de ces matériels.
Elle a également
décidé, en septembre 1995, un
moratoire sur
la production des mines antipersonnel
, qui, de fait,
n'était plus produites depuis 1987.
Un projet de loi
déposé par le gouvernement de M. Alain Juppé sur le Bureau
du Sénat le 21 avril 1997 devait donner une consécration
législative à ces deux mesures et leur conférer un
caractère irréversible.
En ce qui concerne
l'emploi des mines antipersonnel
, celui-ci ne concernait plus
depuis plusieurs années, que des cas exceptionnels. En pratique, les
mines antipersonnel étaient utilisées pour protéger la
base aérienne de Solenzara et en opération, aucune utilisation
n'est intervenue depuis 1983, lorsque des mesures particulières de
protection du contingent français au Liban avaient été
prises après l'attentat du Drakkar.
Encore faut-il ajouter que
l'utilisation des mines antipersonnel par les armées françaises a
toujours obéi à des règles extrêmement strictes de
marquage et de plan de pose en aucun cas comparables à l'usage massif,
aléatoire et indiscriminé qui a causé tant de dommages
dans de nombreux pays.
En dernier lieu, la doctrine d'emploi avait
été formalisée par le gouvernement d'Alain Juppé
dans un communiqué du Conseil des ministres du 2 octobre 1996
précisant que
la France renonçait à l'emploi des
mines antipersonnel
"sauf en cas de nécessité
absolue imposée par la protection de ses forces. Dans ce dernier cas,
toute dérogation ne pourrait être autorisée que par une
décision des autorités gouvernementales. L'emploi se ferait dans
le strict respect des conditions de sécurité et en toute
conformité avec les conventions internationales en vigueur".
En juin dernier, à l'occasion de la Conférence de
Bruxelles qui préparait l'élaboration de la convention
d'interdiction totale, la France annonçait sa renonciation sans
réserve à l'emploi des mines antipersonnel
"dès
l'entrée en vigueur d'un traité efficace et au plus tard fin
1999".
La portée de ce ralliement de la France à
l'interdiction totale des mines antipersonnel doit être soulignée
dans la mesure où notre pays, plus que d'autres, est engagé sur
de multiples théâtres extérieurs, notamment dans le cadre
d'opérations de maintien de la paix, et qu'il expose ainsi en permanence
la vie de plusieurs milliers de ces soldats.
3. L'action humanitaire de la France
L'action humanitaire de la France, se traduit par une assistance
au déminage et par l'aide aux victimes.
Depuis 1994, on estime
à 120 millions de Francs le montant des crédits
consacrés par l'Etat aux activités de déminage, dans le
cadre d'initiatives nationales ou par le biais de participation à des
programmes des Nations Unies et de l'Union européenne.
Les
formations spécialisées du génie sont intervenues dans de
nombreux pays, comme au Cambodge, au Liban, au Tchad, à Djibouti, au
Pakistan, en Irak, au Koweït ou en Somalie.
Plusieurs actions sont
actuellement en cours en Angola, pour un important programme de formation au
déminage, au Mozambique, au Laos, en Bosnie-Herzégovine ou encore
en Afghanistan. Ces actions visent tant le déminage lui-même que
la formation de démineurs locaux, la mise en place d'ateliers
d'appareillage ou le soutien institutionnel aux pouvoirs publics locaux.
Il est par ailleurs prévu d'ouvrir plus largement l'accueil de
stagiaires étrangers au sein de l'Ecole supérieure d'application
du Génie d'Angers.
B. LES OBLIGATIONS NOUVELLES CONTRACTÉES PAR LA FRANCE DANS LE CADRE DE LA CONVENTION D'OTTAWA
La France se conforme déjà à certaines prescriptions de la convention d'Ottawa mais elle devra néanmoins prendre des mesures nationales d'application pour en assurer le plein effet. Par ailleurs, l'adhésion à la convention entraîne des conséquences opérationnelles pour les forces armées.
1. La nécessité de mesures d'application nationales
Dans son article 9, la Convention d'Ottawa dispose que
"chaque Etat partie prend toutes les mesures législatives,
réglementaires et autres, qui sont appropriées, y compris
l'imposition de sanctions pénales, pour prévoir et
réprimer toute activité interdite à un Etat partie en
vertu de la présente convention, qui serait menée par des
personnes, ou sur un territoire, sous sa juridiction ou son
contrôle."
De fait, certains aspects de la Convention ne
nécessitent aucun texte particulier. Ainsi, la
destruction des
stocks de 1 400 000 mines antipersonnel
détenues par
l'armée française a-t-elle débuté en septembre
1996, c'est-à-dire avant l'adhésion à la convention. Ces
opérations ont été réalisées dans un premier
temps par l'armée de terre elle-même, à un rythme assez
lent imposé par les moyens techniques dont elle dispose. Le recours
à partir de cette année à un procédé
industriel de brûlage mis en oeuvre par des sociétés
extérieures doit permettre d'accélérer très
fortement le rythme des destructions, la moitié du stock devant
être en principe résorbé d'ici la fin de 1998. Par
ailleurs, alors que la convention laisse un délai de 4 ans
après son entrée en vigueur pour la destruction des stocks, la
France s'est engagée à atteindre plus vite cet objectif, la
destruction de la totalité du stock étant prévue d'ici la
fin de l'année 2000. Selon l'étude d'impact annexée au
présent projet de loi, le coût de ces opérations se
situerait entre 5 et 8 millions de francs, à la charge du budget de la
Défense.
Comme on l'a également indiqué, la France
avait déjà interdit l'exportation en 1993 et la production en
1995 des mines antipersonnel, sur la base du décret loi de 1939 relatif
à l'exportation et à la fabrication des matériels de
guerre.
Néanmoins, l'application pleine et entière de la
convention d'Ottawa exige un
texte législatif interne
,
à l'image de la procédure suivie pour l'application de la
convention d'interdiction des armes chimiques.
La première
fonction d'un tel texte est de prévoir des sanctions pénales
appropriées pour l'ensemble des infractions prévues par la
convention.
Il s'agit aussi de prendre des dispositions
législatives pour permettre le déroulement des missions
d'établissement des faits prévues par la convention, en vue
notamment de concilier l'efficacité de ces missions et le respect des
obligations constitutionnelles, par exemple pour la protection des droits de la
personne et du droit de propriété.
Ces diverses mesures
nationales d'application sont actuellement en cours d'élaboration, selon
un cheminement inhabituel qui permettra néanmoins de réaliser
rapidement la mise en oeuvre de la convention. En effet, l'Assemblée
nationale a adopté le 24 avril dernier -c'est-à-dire avant
même que le projet de loi autorisant la ratification de la convention
d'Ottawa ne soit déposé devant le Parlement- une proposition de
loi tendant à l'élimination des mines antipersonnel dont le
dispositif vise précisément à appliquer la convention. Le
Sénat sera donc appelé à débattre de ce texte
(proposition de loi n° 410, 1997-1998) en même temps que la
présente convention.
La France comptera ainsi parmi les premiers
Etats à se doter d'une législation proscrivant les mines
antipersonnel.
Elle a été précédée
par la Belgique qui, avec les lois du 9 mars 1995 et du 24 juin 1996 a interdit
l'utilisation, le stockage, la vente, l'acquisition et la délivrance par
l'Etat de mines antipersonnel. Cette interdiction a cependant été
édictée pour une période de cinq ans.
L'Autriche,
par la loi du 13 décembre 1996, et l'Italie, par une loi de 1997, ont
également interdit la production, l'emploi, le stockage et le transport
de mines antipersonnel.
2. Les conséquences de la Convention d'Ottawa pour les forces armées
Si l'on excepte la protection de la base aérienne de
Solenzara, les mines antipersonnel n'ont pas été utilisées
par les armées en opération depuis les actions menées
contre le contingent français au Liban en 1983. Ce fait
révèle une certaine retenue dans l'emploi des mines antipersonnel
par nos armées mais pour autant, celles-ci n'ont pas renoncé
à leur stock et, jusqu'à une date récente, elles ont
conservé une doctrine d'emploi des mines antipersonnel,
"en cas de
nécessité absolue pour la protection des forces".
Le
renoncement définitif à l'emploi de ces armes ne fait bien
entendu en rien disparaître la
nécessité de cette
protection
et impose la mise en oeuvre de moyens palliatifs.
Dans cette optique des équipements susceptibles d'assurer les
fonctions d'alerte traditionnellement dévolues aux mines antipersonnel
sont en cours de mise au point. A la différence des mines antipersonnel
qui frappent de manière automatique et aveuglément, ces
équipements nécessiteront l'action positive d'un
opérateur.
Deux types de matériels équiperont les
armées à compter de 1999 :
- le système Cougar,
nouveau système d'alerte et de protection à base de
clôtures de détection faiblement électrifiées
associées à des radars,
- le
système
Moder
(moyen de défense rapproché), qui, sur commande
manuelle d'un opérateur, projette à distance des projectiles
vulnérants et assourdissants susceptibles de neutraliser une
éventuelle intrusion dans un périmètre
protégé.
Le calendrier d'équipement de
l'armée de terre en systèmes Moder prévoit une
montée en charge à partir du début de l'année 1999
jusqu'en 2001. Ainsi, la capacité de protection d'un contingent
projetable sera-t-elle dans un premier temps limitée, ce qui veut dire
que du strict point de vue des impératifs de protection, le risque
d'exposition de nos forces, lors d'opérations extérieures, sera
d'autant plus faible que la durée de la période transitoire entre
l'entrée en vigueur de l'interdiction des mines antipersonnel et
l'équipement définitif des armées en Moder sera courte.
Par ailleurs, le refus des Etats-Unis d'adhérer à la
convention d'Ottawa et de renoncer à ses mines antipersonnel pose le
problème d'un emploi éventuel de mines antipersonnel dans le
cadre d'une opération multinationale sous l'égide de l'OTAN.
Cette question est en cours d'examen au sein de l'OTAN mais il apparaît
d'ores et déjà, selon les informations fournies à votre
rapporteur, que la France qui, par définition, et à la
différence d'autres membres de l'OTAN, ne dispose pas sur son sol de
stocks de mines américaines en dépôt, n'admettrait en aucun
cas que par le biais d'une opération multinationale, l'un de ses
ressortissants soit contraint d'utiliser des mines antipersonnel.
CONCLUSION
La signature de la convention d'Ottawa a
bénéficié à juste titre d'un retentissement
considérable dans l'opinion publique internationale.
Alors que
le droit international s'était jusqu'alors limité à tenter
d'encadrer l'emploi des mines antipersonnel, pour en éviter les usages
les plus contestables, la Convention d'Ottawa représente à la
fois un
changement de degré et un changement de nature
par rapport aux textes existants :
- un changement de degré, car
elle édicte la
contrainte maximale
, à savoir
l'interdiction totale de l'emploi, de la conservation, de la production et du
transfert des mines antipersonnel,
- un changement de nature, car elle
place les mines antipersonnel au rang des armes inhumaines
,
dont l'usage doit être banni.
Ce résultat spectaculaire,
acquis en l'espace d'à peine plus d'une année, ne doit pas
occulter une autre réalité : les Etats-Unis, la Russie, la Chine,
l'Inde, le Pakistan, Israël, la Turquie, l'Ukraine, le Vietnam et bien
d'autres grands pays encore n'ont pas adhéré à la
convention d'Ottawa.
Pour une large partie des pays impliqués
dans la production, dans l'exportation ou dans l'utilisation des mines
antipersonnel, la convention d'Ottawa demeure sans portée pratique, du
moins dans l'immédiat
.
Dans ce contexte,
notre
pays apparaît à l'avant-garde de la communauté
internationale
. Alors même qu'il s'est toujours astreint
à un emploi très strictement contrôlé de ce type
d'armes et qu'il en avait déjà proscrit la fabrication et
l'exportation, il renonce définitivement à les utiliser. Cette
décision vaut essentiellement par sa portée politique car l'usage
très encadré des mines antipersonnel par les armées
françaises ne pouvait être soupçonné d'en favoriser
la prolifération et les effets dévastateurs que l'on
connaît, et d'autre part, sur un plan pratique, ce renoncement impose de
donner des réponses appropriées à la
nécessité, toujours actuelle, de protéger les forces en
opération.
Il est donc important d'apprécier à sa
juste mesure la portée de l'adhésion française à ce
nouvel instrument international alors que d'autres pays ont avancé des
justifications de sécurité nationale pour ne pas y souscrire.
L'absence d'universalité de la Convention d'Ottawa impose une
autre exigence : poursuivre le lent travail de négociation, au sein de
la Conférence du désarmement, pour conduire les pays qui n'ont
pas renoncé à l'emploi ou à la production des mines
antipersonnel à franchir de nouvelles étapes. A ce titre, la
proposition française d'accord sur l'interdiction des transferts
paraît réaliste et mérite d'être rapidement
étudiée.
Il est clair que bien des années seront
nécessaires pour réduire de manière significative les
dégâts considérables causés aux populations civiles
par les mines antipersonnel, ne serait-ce qu'en raison de l'ampleur
démesurée de l'oeuvre de déminage.
La Convention
d'Ottawa ne peut être considérée que comme une étape
dans le long cheminement qui a suivi la prise de conscience par la
communauté internationale du drame des mines antipersonnel.
Son
principal mérite et de constituer une norme de référence,
la seule acceptable pour des armes qui ont produit des méfaits sans
commune mesure avec leur justification militaire.
Sous le
bénéfice de ces observations, votre commission des Affaires
étrangères, de la Défense et des Forces armées vous
propose d'adopter le présent projet de loi
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des Affaires étrangères, de la
Défense et des Forces armées a examiné le présent
rapport lors de sa réunion du mercredi 27 mai 1998.
A l'issue de
son exposé et en réponse à une question de M. Xavier
de Villepin, président, M. Daniel Goulet, rapporteur, a apporté
des précisions sur le système "MODER", appelé à
remplir à l'avenir les fonctions de protection jusqu'alors
dévolues aux mines antipersonnel. Il a rappelé que ce
système imposait l'intervention d'un opérateur repérant
une intrusion et qu'il se différenciait donc fondamentalement des mines
antipersonnel frappant de manière aveugle.
La commission a
alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé le projet de
loi
qui lui était soumis.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée la ratification de la convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, signée à Ottawa le 3 décembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi 1( * ) .
ANNEXE I
Liste des Etats signataires de la Convention sur
l'interdiction de l'emploi,
du stockage, de la production et des
transferts des mines antipersonnel
et sur leur destruction
(Les Etats signalés en gras sont ceux qui ont
déposé leur instrument
de ratification)
Afrique du Sud |
Côte d'Ivoire |
Kenya |
Rép. tchèque |
Algérie |
Croatie |
Lesotho |
Roumanie |
Allemagne |
Danemark |
Liechtenstein |
Royaume-Uni |
Andorre |
Djibouti |
Luxembourg |
Rwanda |
Angola |
Dominique |
Madagascar |
Saint-Kitts et Nevis |
Antigua et Barbude |
Equateur |
Malawi |
Sainte-Lucie |
Argentine |
El Salvador |
Malaisie |
Saint-Siège |
Australie |
Espagne |
Mali |
Saint-Marin |
Autriche |
Ethiopie |
Malte |
Samoa |
Bahamas |
Fidji |
Maurice |
Sénégal |
Barbade |
France |
Mauritanie |
Seychelles |
Belgique |
Gabon |
Mexique |
Slovaquie |
Belize |
Gambie |
Monaco |
Slovénie |
Bengladesh |
Ghana |
Mozambique |
Soudan |
Bénin |
Grèce |
Namibie |
Suède |
Bolivie |
Grenade |
Nicaragua |
Suisse |
Bosnie-Herzégovine |
Grenadines |
Niger |
Surinam |
Botswana |
Guatemala |
Ile Niue |
Swaziland |
Brésil |
Guinée |
Norvège |
Thaïlande |
Brunei Darussalam |
Guinée-Bissau |
Nouvelle-Zélande |
Togo |
Bulgarie |
Guyana |
Ouganda |
Trinité et Tobago |
Burkina Faso |
Haïti |
Panama |
Tunisie |
Burundi |
Honduras |
Paraguay |
Turkménistan |
Cambodge |
Hongrie |
Pays-Bas |
Uruguay |
Cameroun |
Iles Marshall |
Pérou |
Vanuatu |
Canada |
Iles Salomon |
Philippines |
Venezuela |
Cap-Vert |
Indonésie |
Pologne |
Yémen |
Chili |
Irlande |
Portugal |
Zambie |
Chypre |
Islande |
Qatar |
Zimbabwe |
Colombie |
Italie |
République Dominicaine |
|
Iles Cook |
Jamaïque |
République de Moldavie |
|
Costa Rica |
Japon |
Répub. unie de Tanzanie |
ANNEXE II -
ETUDE
D'IMPACT2(
*
)
- Etat de droit et situation de fait existants et leurs
insuffisances :
La France est Partie à la Convention de
1980 sur l'interdiction ou la limitation de certaines armes classiques et a
approuvé, le 3 mai 1996, le Protocole II modifié annexé
à cette Convention qui prévoit une première limitation
significative à l'emploi des mines antipersonnel.
Les nouvelles
dispositions contenues dans la Convention signée à Ottawa
dépassent cet objectif en posant, à l'encontre des mines
antipersonnel, une norme d'interdiction totale de la production, du stockage,
du transfert et de l'emploi.
-
Bénéfices
escomptés : indications concrètes et de préférence
chiffrées en matière :
.
d'emploi :
impossible à quantifier ;
.
d'intérêt général :
cette
convention constitue une avancée déterminante sur la voie de
l'élimination totale des mines antipersonnel dans le monde.
L'adhésion d'un grand nombre d'Etats sera, par ailleurs, de nature
à accroître la sécurité de la France.
.
financière
: la France devra assurer la destruction de
l'ensemble de son stock de mines antipersonnel (environ 1,4 million
d'unités). En fonction des méthodes de destruction qui seront
retenues à l'issue de la procédure d'appel d'offre, le coût
des opérations de destruction de la totalité de notre stock de
mines antipersonnel est estimé entre 5 et 8 MF. Ce coût sera
intégralement pris en charge par le budget du ministère de la
Défense.
Par ailleurs, la France devra contribuer au financement
des conférences annuelles des Etats parties selon le barème des
quote-parts de l'Organisation des Nations unies, dûment ajusté. Le
montant de cette contribution sera imputé sur le budget du
ministère des affaires étrangères.
.
de
simplification des formalités administratives :
sans objet
.
de complexité de l'ordonnancement juridique :
sans objet
I.
1
Voir le texte
annexé au document Sénat n° 424 (1997-1998).
2
Texte transmis par le Gouvernement pour
l'information des parlementaires.