Rapport n° 311 - Proposition de loi tendant à compléter l'article L 30 du Code éléctoral relatif à l'inscription sur les listes électorales en dehors des périodes de révision
M. Michel Dreyfus-Schmidt, Sénateur
Commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du réglement et d'administration générale - Rapport n° 311 (1997-1998)
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Table des matières
- I. LA PROCÉDURE DE L'INSCRIPTION ANNUELLE SUR LES LISTES ÉLECTORALES
- II. LES MODIFICATIONS DES LISTES ÉLECTORALES EN DEHORS DES PÉRIODES DE RÉVISION
- III. LA PROPOSITION DE LOI : UN ASSOUPLISSEMENT LIMITÉ EN FAVEUR DES PERSONNES RADIÉES TROP TARD POUR QU'ELLES PUISSENT S'INSCRIRE DANS UNE AUTRE COMMUNE
- PROPOSITION DE LOI
N° 311
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 février 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi de M. Michel DREYFUS-SCHMIDT et des membres du groupe socialiste et apparentés, tendant à compléter l' article L. 30 du code électoral relatif à l' inscription sur les listes électorales en dehors des périodes de révision,
Par M. Michel DREYFUS-SCHMIDT,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jacques Larché,
président
;
René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles
Jolibois, Robert Pagès, Georges Othily,
vice-présidents
;
Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson,
secrétaires
; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert
Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl,
Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel
Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli,
Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Jean Derian, Michel
Dreyfus-Schmidt, Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault,
Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel
Millaud, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre
Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.
Voir le numéro
:
Sénat
:
13
(1997-1998).
Elections et référendums.
Mesdames, Messieurs,
Le code électoral prévoit de manière précise les
conditions et le calendrier de révision annuelle des listes
électorales.
Il prescrit, en particulier, que la commission administrative procède,
entre le 1er septembre et le 31 décembre, à la radiation des
électeurs qui, tout en n'étant pas privés de leur
capacité électorale, ne répondent plus aux conditions pour
être maintenus sur la liste électorale de la commune où
elles ont été inscrites.
Par ailleurs, la publication du tableau rectificatif par la commission
administrative, le 10 janvier, ouvre un délai de dix jours pendant
lequel tout électeur de la commune, le préfet ou le
sous-préfet peut demander la radiation d'un électeur
indûment inscrit.
Aucune sanction n'est prévue par la loi pour les personnes ayant omis de
procéder à une nouvelle inscription. A cet égard,
l'article L. 88 du code électoral ne concerne que les personnes
s'étant
frauduleusement
fait inscrire, ou ayant
fait
inscrire ou
rayer autrui
(ou ayant tenté de le faire) et non pas
celles qui se sont abstenues de solliciter une nouvelle inscription dans la
commune où elles devraient voter.
L'inscription sur les listes électorales n'étant plus possible
après le 31 décembre, il en résulte que les
électeurs dont la radiation aura été notifiée
après cette date ou dans les derniers jours de décembre ne
disposeront pas en droit ou connaîtront quelques difficultés en
pratique pour s'inscrire dans les délais requis.
Il s'en suit que les électeurs radiés dans ces conditions
parce qu'ils ont changé de domicile ou ont cessé d'être
contribuables dans leur commune d'inscription sans s'inscrire en temps utile
dans une autre commune, ne pourront pas voter pendant un an, alors qu'ils n'ont
pas été privés de leurs droits civiques, la
décision les concernant ayant pour unique objet de faire obstacle au
maintien de leur inscription dans une commune déterminée.
Afin de remédier à cette situation, la
proposition de loi
initiale,
soumise à la commission des Lois, tendait à ouvrir
pour les personnes en cause, pendant une période limitée à
quinze jours après leur radiation, une possibilité d'inscription
sur la liste électorale.
Il s'agissait de maintenir la possibilité d'exercer effectivement leur
droit de vote pour les personnes informées trop tardivement d'une
radiation pouvant résulter d'une mauvaise appréciation de leur
situation juridique, voire d'une négligence.
En revanche, il ne s'agissait pas d'accorder une " nouvelle
chance " à des fraudeurs éventuels.
La proposition de loi était destinée à accompagner
positivement le travail d'actualisation des listes électorales par les
commissions administratives pour n'y laisser figurer que les personnes
répondant strictement aux conditions légales en vigueur.
Faute de quoi, il y aurait inégalité de traitement entre les
personnes dont la radiation est notifiée bien avant le 31
décembre, qui peuvent alors s'inscrire sans difficulté dans une
autre commune et celles qui sont prévenues trop tard pour demander une
autre inscription.
I. LA PROCÉDURE DE L'INSCRIPTION ANNUELLE SUR LES LISTES ÉLECTORALES
La commission administrative procède aux inscriptions
et aux radiations du 1er septembre au 31 décembre de l'année, en
prenant en considération les demandes déposées jusqu'au
dernier jour de l'année (article R. 5 du code électoral).
Les radiations concernent, outre les personnes décédées et
celles ayant fait l'objet d'une privation de leurs droits électoraux,
les électeurs qui n'entrent plus dans l'une des situations de l'article
L. 11 du code électoral permettant leur maintien sur la liste
électorale de la commune (domicile réel ou habitation depuis 6
mois ; contribuable de la commune pour la cinquième année
consécutive et conjoint ; fonctionnaire assujetti à
résidence obligatoire dans la commune).
Lorsque la commission administrative radie d'office un électeur pour
d'autres causes que le décès, la décision, motivée,
est notifiée dans les deux jours à l'intéressé par
écrit et à son domicile, l'électeur disposant alors de
24 heures pour présenter ses observations.
Au vu de ces observations, la commission administrative prend une nouvelle
décision, notifiée dans les mêmes formes et délais
(article R. 8 du code électoral).
Dans la plupart des cas, l'électeur radié par la commission
administrative aura été informé suffisamment à
l'avance pour pouvoir solliciter son inscription dans une autre commune avant
le 31 décembre.
Il pourra cependant se produire que la notification intervienne après le
31 décembre ou à une date trop proche de celle-ci pour lui
permettre matériellement de demander une autre inscription en temps
utile.
Le 10 janvier, les tableaux rectificatifs sont affichés pendant 10
jours aux lieux accoutumés, les tableaux originaux étant en outre
tenus en mairie à la disposition de tout requérant
(article R. 10 du code électoral).
Si le préfet estime que les formalités et les délais n'ont
pas été observés, il défère, dans les
deux jours de la réception du tableau, les opérations de la
commission administrative au tribunal administratif qui statuera dans les
trois jours et fixera, le cas échéant, un nouveau
délai dans lequel les opérations annulées devront
être refaites (articles L. 20 et R. 12 du code
électoral).
Selon les articles L. 25 et R. 13 à R. 15 du
même code, les électeurs intéressés peuvent
contester les décisions de la commission administrative devant le
tribunal d'instance, entre le 11 et le 20 janvier.
Selon les mêmes articles,
tout électeur inscrit sur la liste de
la commune peut réclamer devant le tribunal d'instance la radiation d'un
électeur indûment inscrit, entre le 11 et le 20 janvier
.
Le même droit est reconnu au préfet ou au sous-préfet dans
les dix jours de la réception du tableau rectificatif.
Le tribunal statue après simple avertissement donné aux parties
au moins trois jours à l'avance, dans les dix jours du recours
ou, le cas échéant, de la décision du tribunal
administratif.
La décision prise par le tribunal est notifiée dans les
trois jours à l'électeur intéressé, au
préfet et au maire. Cette décision n'est pas susceptible d'appel.
En revanche l'électeur, le tiers requérant et le préfet
peuvent se pourvoir en cassation dans les dix jours de la notification,
mais
le pourvoi n'est pas suspensif
(article R. 15-1 du code
électoral).
L'électeur radié à la suite d'un recours exercé
après la publication du tableau rectificatif n'a, par définition,
pas été informé avant l'expiration du délai
d'inscription sur les listes électorales. Il ne pourra donc pas voter
jusqu'à la révision annuelle suivante, donc du 1er mars au
dernier jour de février.
En effet, c'est le dernier jour du mois de février, que la commission
administrative arrête définitivement la liste électorale,
celle-ci étant maintenue jusqu'au dernier jour du mois de février
suivant (articles R. 16 et R. 17 du même code).
Toutefois, dans certains cas, des inscriptions ou des radiations peuvent
être opérées en dehors des périodes de
révision.
II. LES MODIFICATIONS DES LISTES ÉLECTORALES EN DEHORS DES PÉRIODES DE RÉVISION
A. L'INSCRIPTION EN DEHORS DES PÉRIODES DE RÉVISION
L'article L. 30 du code électoral, que la
présente proposition de loi tend à compléter, a
prévu limitativement des cas d'inscription en dehors des périodes
de révision .
Ces dispositions concernent :
- les fonctionnaires et agents des administrations publiques mutés ou
admis à faire valoir leurs droit à pension après la
clôture des délais d'inscription, ainsi que les membres de leur
famille domiciliés avec eux ;
- les militaires libérés ou démobilisés ,
également après le 31 décembre ;
- les personnes remplissant la condition d'âge exigée pour
être électeur après la clôture des délais
d'inscription ;
- les personnes ayant acquis la nationalité française
après la clôture des délais d'inscription et celles ayant
recouvré l'exercice du droit de vote dont elles avaient
été privées par décision de justice.
Les demandes d'inscription en dehors des périodes de révision,
recevables jusqu'au dixième jour précédent le scrutin et
déposées à la mairie, font l'objet d'une décision
du juge d'instance dans un délai de quinze jours et au plus tard quatre
jours avant l'élection (articles L. 31 et L. 32 du même code).
Par ailleurs, l'article L. 34 du code électoral donne compétence
au
juge d'instance
pour
statuer, jusqu'au jour du scrutin, sur les
réclamations
de personnes qui prétendent avoir
été omises par suite d'une
erreur purement
matérielle
ou avoir été
radiées sans
observation des formalités prescrites
par les articles L. 23 et L.
25 du même code (l'électeur dont l'inscription est
contestée par la commission administrative doit être averti et
pouvoir présenter ses observations ; les décisions de la
commission administrative peuvent être contestées devant le
tribunal d'instance).
L'article L. 34 permettrait donc à l'électeur radié sans
en avoir été informé dans les conditions fixées par
ces articles de solliciter, jusqu'au jour du scrutin, son inscription sur les
listes électorales.
Il en résulte que, en dehors de cette hypothèse,
l'électeur radié ne dispose pas de la possibilité de
s'inscrire en dehors des périodes de révision.
B. LA RADIATION EN DEHORS DES PÉRIODES DE RÉVISION
1. La radiation sans formalités
La radiation en dehors de la période de révision annuelle, dans un nombre limité de cas, s'effectue sans formalité particulière. Cette disposition s'applique aux électeurs décédés et à ceux ayant fait l'objet d'une décision de justice comportant privation des droits électoraux , principalement (art. R. 18 et R. 21 du code électoral)
2. La radiation après notification
Lorsque l'INSEE détecte, à la suite d'une
contrôle, qu'un électeur se trouve en situation
d'inscriptions
multiples
, la radiation peut être prononcée, nonobstant la
clôture de la période de révision, après
le suivi
d'une procédure
définie aux articles L. 39 et L. 40 du code
électoral.
L'INSEE avise le préfet du département où se trouve la
commune de la dernière inscription qui saisit à son tour le maire
de cette commune.
Le maire doit aussitôt notifier à l'électeur que, sauf
opposition de sa part, il sera maintenu sur la liste de la commune où il
s'est inscrit en dernier lieu et rayé d'office de toutes les autres
listes.
L'électeur dispose de huit jours pour répondre.
S'il désire être maintenu sur la liste de dernière
inscription ou s'il n'a pas répondu dans le délai requis, il
restera inscrit sur la liste de cette commune et radié des listes des
autres communes.
Si l'électeur exprime le souhait de figurer sur la liste d'une autre
commune, il sera en conséquence radié des listes des communes
pour lesquelles il n'aura pas opté (et maintenu sur la liste
électorale de la commune de son choix).
Les radiations opérées en dehors de la période de
révision n'ont donc
pas pour conséquence
, sauf cas de
privation des droits électoraux,
d'empêcher les personnes
concernées de participer aux scrutins organisés dans
l'année.
La présente proposition de loi ne concerne donc pas les électeurs
radiés dans ces conditions.
III. LA PROPOSITION DE LOI : UN ASSOUPLISSEMENT LIMITÉ EN FAVEUR DES PERSONNES RADIÉES TROP TARD POUR QU'ELLES PUISSENT S'INSCRIRE DANS UNE AUTRE COMMUNE
La proposition de loi initiale prévoyait d'ajouter
à l'article L. 30 du code électoral un nouveau cas d'inscription
sur les listes électorales en dehors des périodes de
révision pour les personnes rayées de listes dans une autre
commune, à condition d'en faire la demande dans les quinze jours
à compter de celui où leur radiation a pris effet,
c'est-à-dire le dernier jour de février, date à laquelle
la liste électorale de l'année est définitivement
arrêtée.
Les modifications apportées au texte initial par votre commission des
Lois, sur l'initiative de son rapporteur, sont destinées à
encadrer le dispositif proposé afin de répondre pleinement et
efficacement à ses objectifs.
Outre une correction purement formelle, ces modifications tendent à
apporter des précisions d'une part, sur les bénéficiaires
et, d'autre part, sur la procédure d'inscription.
A. LES BÉNÉFICIAIRES
Le texte adopté par la commission exclut
expressément les personnes dont la radiation serait motivée par
une fraude.
En dehors de cette réserve, l'inscription en dehors de la période
de révision serait ouverte, non pas à toutes les personnes
radiées mais seulement à celles dont la radiation aurait
été notifiée à une date ne permettant pas
l'inscription dans une autre commune.
Se trouveraient concernés par ces dispositions :
- les électeurs radiés à la suite de l'action d'un autre
électeur de la commune ou du préfet (articles L. 25 et R. 13 du
code électoral), celle-ci ne pouvant pas avoir été
engagée avant la publication du tableau rectificatif, le 10 janvier.
- les électeurs dont la radiation par la commission administrative aura
été notifiée après la date du 1er
décembre.
En effet, ceux dont la radiation est notifiée après le 31
décembre ne disposent plus du droit de s'inscrire dans une autre commune.
Les personnes dont la radiation est notifiée dans le courant du mois de
décembre peuvent certes encore s'inscrire dans une autre commune
jusqu'au 31 décembre, mais la brièveté du délai
dont elles disposent alors, dans une période particulière de
l'année, soulève des difficultés pratiques.
B. LE DÉLAI D'INSCRIPTION
La proposition de loi initiale limitait cette
possibilité d'inscription à une période de quinze jours
à compter de la date d'effet de la radiation, soit entre le 1er et le 15
mars.
Or, rien ne s'oppose à l'inscription sur une liste électorale
dès avant le 1er mars, ce qui aurait, en outre, l'avantage que, le cas
échéant, l'électeur puisse voter effectivement en mars si
-comme cela est fréquent- une consultation électorale
était organisée, notamment dans les premiers jours de ce mois.
Selon le texte adopté par votre commission des Lois,
la demande
d'inscription
pourrait être présentée
à
partir de la date d'expiration des délais
de recours
contre
les décisions des commissions administratives,
si aucun recours
n'était engagé, soit 10 jours après la réception
par le préfet du tableau rectificatif, établi le 10 janvier.
.
En cas de recours
, l'inscription ne serait possible qu'
après
la notification de la décision
du tribunal d'instance, celle-ci
intervenant au plus tard 3 jours après la décision,
elle-même prise dans un délai de 10 jours à compter du
recours (donc, au plus tard le
3 février
).
Il convient de rappeler que la décision du juge d'instance n'est pas
susceptible d'appel. Elle peut, certes, faire l'objet d'un pourvoi en
cassation, mais le pourvoi n'est pas suspensif.
Il résulte de ce qui précède que, dans la grande
majorité des cas, l'inscription dans une autre commune serait possible,
au plus tard, dès les premiers jours de février.
Le dispositif proposé par la commission des Lois ne fixe pas de date
limite pour l'inscription des personnes radiées, tout comme l'article
L.30 en vigueur n'en fixe aucune pour les catégories
bénéficiant actuellement de la possibilité de s'inscrire
en dehors des périodes de révision.
Il convient enfin de préciser que les articles L. 31 à L. 33 du
code électoral concernant la procédure d'inscription en
application de l'article L.30, ne seraient pas modifiés par la
proposition de loi.
Cette procédure serait donc applicable aux bénéficiaires
du texte proposé.
En conséquence, les demandes d'inscription ne seraient recevables que
jusqu'au dixième jour précédant le scrutin.
Le juge d'instance statuerait dans un délai de quinze jours et au plus
tard quatre jours avant le scrutin.
*
* *
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des Lois vous demande d'adopter les conclusions qu'elle vous soumet pour cette proposition de loi et qui sont reproduites ci-après.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
L'article L. 30 du code électoral est
complété par deux nouveaux alinéas ainsi
rédigés :
" 6° Les personnes auxquelles leur radiation d'une liste
électorale a été notifiée après le 1er
décembre, à condition que la radiation ne soit pas motivée
par une fraude de leur part.
" Dans le cas prévu au 6°, la demande d'inscription peut
être présentée à partir de la date d'expiration des
délais de recours contre les décisions des commissions
administratives, ou, en cas de recours, après la notification de la
décision du tribunal d'instance. "