2. La vanité de penser que l'on peut commander à l'économie, et faire le bonheur des citoyens malgré eux
a) Commander à l'économie
La décision de réduire à 35 heures
hebdomadaires la durée légale du travail repose sur l'idée
qu'il serait possible, en agissant sur les différentes variables de
l'économie par le biais, d'une part, de la réglementation et,
d'autre part, d'un système adéquat d'aides publiques, de
procéder à un "
réglage fin "
de
l'économie permettant de maximiser les gains et de minimiser les pertes.
C'est en somme l'idée exprimée par M. Jean-Paul
Fitoussi
91(
*
)
que :
"
pour les économistes habitués à raisonner en
termes d'agents micro-économiques rationnels surtout en ces temps de
montée de l'individualisme la seule chose qu'il soit possible d'affirmer
est que la loi sera d'autant plus efficace qu'elle mettra en place un
système d'incitations et de contraintes tel que les choix individuels
égoïstes conduisent spontanément au bien commun. Elle
jouerait alors le rôle de la main invisible qui harmonise les
intérêts individuels, selon la métaphore d'Adam
Smith. "
Mais l'Etat est-il vraiment à même de jouer ce rôle ? Que
fait-il pour combattre le travail au noir ?
b) Faire le bonheur des citoyens malgré eux
Pour M. Jean-Paul Fitoussi
92(
*
)
: "
La réduction du
temps de travail est un objectif en soi de toute société humaine.
Il témoigne de ce que la lutte contre la rareté, qui est le
contenu même de l'activité économique, est victorieuse. La
" fin du travail " est éminemment désirable car elle
signifierait alors que nous aurions trouvé le secret de
l'abondance
. " C'est peu ou prou l'idée qui inspire la
réduction du temps de travail et selon laquelle c'est le travail qui
avilit, c'est le loisir qui libère.
Non seulement cette idée nous semble contestable, mais surtout, elle
suppose qu'il appartient à l'Etat de substituer, sur la base
d'appréciations forcément technocratiques, son propre choix
à celui des citoyens et de dire à chacun quelle doit être
la part du temps libre et celle du travail. Comment, et sans vouloir
polémiquer, qualifier cette décision autrement que par le
qualificatif "
d'étatiste
" ?