2. La question de l'attitude des pays d'origine
.
La géographie de l'adoption internationale
fait apparaître une
diversification progressive des pays d'origine
: de 7 en 1975, ce nombre est passé à 65 en 1996. La part de
l'Afrique a augmenté assez régulièrement depuis 1987, de
même que celle de l'Asie. Le nombre d'enfants adoptés originaires
d'Europe a connu un certain pic en 1990-1991, probablement lié aux
événements de Roumanie et à l'ouverture de la Pologne et
de l'ex-URSS, mais ce mouvement paraît régresser, de même
que diminue le nombre d'adoptions d'enfants originaires d'Amérique. La
part de l'
Asie
connaît, en revanche, une expansion importante.
En 1996, les adoptions internationales effectuées par des adoptants
français étaient ainsi réparties entre les régions
d'origine des enfants :
- Asie : 45,06 % ;
- Amérique : 22,04 % ;
- Afrique : 16,86 % ;
- Europe : 16,04 %.
.
L'
opinion publique des pays d'origine
perçoit de
manière contrastée le développement des adoptions
internationales. Certains considèrent ce phénomène comme
une forme de
néocolonialisme,
et l'assimilent à un
appauvrissement au profit des pays riches
. Certains pays, comme le
Sri-Lanka, se sont fermés à l'adoption internationale
après avoir découvert d'importants trafics d'enfants. En
Colombie, l'opinion s'est émue de l'inculpation pour mauvais traitements
à enfants d'un couple français qui avait adopté un
bébé colombien. Des témoignages d'adoptants
français font état de gestes d'hostilité de la part de
Vietnamiens, à la vue d'occidentaux en compagnie d'enfants vietnamiens
5(
*
)
.
3. Un phénomène complexe, dont les conséquences doivent être mesurées par les adoptants
Si l'adoption d'enfants français peut, le cas
échéant, reposer sur la fiction de la ressemblance entre l'enfant
adopté et ses parents adoptifs, qui pourrait tenir lieu de filiation
biologique, cette filiation disparaît, dans la plupart des cas, avec
l'adoption internationale. L'enfant adopté à l'étranger
est, en effet, souvent confronté à des difficultés
identitaires liées à la différence physique avec ses
parents adoptifs. Selon certains psychologues, la découverte par
l'enfant adopté de la différence entre son visage et celui de ses
parents peut produire un sentiment de honte et de confusion, susceptible
d'être à l'origine de troubles psychologiques graves
6(
*
)
. De manière
générale, les enfants et adolescents nés à
l'étranger qui évoquent le moment de l'adoption se rappellent un
profond sentiment de désorientation, de détresse et d'angoisse,
à l'origine d'une tendance à la passivité, imputée
par certains thérapeutes
7(
*
)
à
l'obligation, pour l'enfant,
lors de son arrivée dans son nouveau pays, de s'intégrer à
tout prix à son nouveau milieu, cette intégration passant par une
tendance très nette à se décharger sur une personne,
généralement la mère adoptive, de toute initiative.
Il est donc clair que la sensibilisation des adoptants à l'effort
qu'implique une adoption internationale est primordiale pour la réussite
de l'accueil de l'enfant. Comme le souligne le rapport Mattei, " les
différences physiques, linguistiques et culturelles peuvent
entraîner des problèmes et susciter des dysfonctionnements dans
les relations entre l'enfant et les parents. Chaque famille doit savoir que les
enfants, quel que soit leur âge, ont souffert, et que quelquefois cette
souffrance a laissé des traces très profondes ". Ainsi
importe-t-il d'accompagner les adoptants en leur prodiguant conseils,
informations et soutien psychologique.
En France, ce rôle est généralement tenu par des
associations de parents adoptifs. Parmi les gestes à entreprendre
vis-à-vis de l'enfant, à la nécessité desquels
doivent être sensibilisés les adoptants, figure l'acquisition de
connaissances du pays d'origine de l'enfant, devant conduire à un voyage
de découverte, qui permet à l'enfant de découvrir ses
attaches. L'écueil à éviter est néanmoins de
compromettre l'intégration et l'épanouissement de l'enfant dans
son pays d'accueil, en développant de manière
exagérée ses particularismes culturels.