B. LA POLITIQUE DE GESTION DU PERSONNEL MANIFESTE UNE CERTAINE RIGIDITÉ COMPTABLE
Le budget des services financiers est essentiellement un
budget d'effectifs. C'est pourquoi votre rapporteur entend se livrer à
une étude approfondie de la gestion des personnels du ministère
dès l'an prochain.
La méthode employée pour réduire le nombre des emplois du
ministères a consisté pour l'essentiel à pratiquer un
abattement uniforme de l'ordre de 0,3 % par rapport aux emplois
budgétaires de 1997 des grandes directions à réseaux du
ministère.
Cette méthode uniforme peut être jugée un peu aveugle. Elle
ne tient guère compte des évolutions de moyenne période
qui avait vu certains services, en particulier ceux de la DGI, perdre un nombre
significatif d'emplois, tandis que d'autres étaient relativement
épargnés.
Elle ne serait pas fondée sur une analyse fine des gains de
productivité potentiels de chaque service pas plus que sur le rendement
des missions.
Elle semble avoir peu tenu compte des capacités d'adaptation des
services au vu des contraintes de leur démographie propre -nombre
d'emplois, pyramide des âges- de l'extension de leurs missions ou des
engagements de maintien des réseaux sur le territoire.
Le niveau des effectifs des services financiers a baissé de 1,9 %
depuis 1991 (3.340 emplois). Cette évolution moyenne dissimule des
contrastes : les effectifs de la DGI, ceux du Trésor et ceux des
services d'expansion économique à l'étranger ont
décliné relativement plus que la moyenne. Le maintien des
missions et des implantations territoriales du ministère risque de faire
apparaître peu raisonnable la poursuite des réductions d'effectifs
sur le rythme acquis depuis deux ans (- 1,3 %). En outre, le
ministère doit continuer à résorber l'emploi
précaire qui concerne encore 1,1 % des effectifs et qui voit des
personnels non titulaires associés à l'exercice de missions
régaliennes dans des conditions peu satisfaisantes au regard des
principes sur lesquels leur exercice devrait être fondé.
C. DES SERVICES SOUS TENSION
Les très importantes missions du ministère sont de plus en plus difficilement exercées par lui, ce qu'illustre les cas de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et de la Direction générale des impôts (DGI).
1. La DGCCRF
Les missions de la DGCCRF sont considérables.
Mais ses services, disposant de peu de moyens, paraissent
débordés par nombre d'entre elles.
Les missions de la DGCCRF sont à l'image de sa raison sociale,
nombreuses et hétérogènes mais elles ont cependant une
unité qu'on peut présenter ainsi :
la DGCCRF est le
service du ministère de l'économie et des finances destiné
à veiller au respect des règles d'ordre public économique
imposées aux marchés
. Ces règles sont essentiellement
relatives à la concurrence et à la loyauté commerciale
entre entreprises et aux relations entre entreprises et consommateurs.
Dans le domaine de la concurrence
, la DGCCRF a pour mission
d'informer les professionnels des règles existantes et de proposer au
ministre de l'économie les mesures susceptibles d'améliorer les
conditions de la concurrence dans l'économie française.
Dans le domaine de la surveillance du marché
, la DGCCRF
suit de façon régulière l'évolution des
prix
des produits alimentaires sensibles (fruits et légumes, produits
laitiers et carnés, poissons frais), des prestations de service
(réparation automobile, pressing, cafés, hôtels,
restaurants) et des carburants et fioul domestique.
Elle contrôle l'application des mesures législatives ou
réglementaires.
La DGCCRF participe également beaucoup à l'action
spécifique relative à l'achat public.
La direction générale intervient dans le domaine de
l'
assistance économique aux collectivités publiques
en
contribuant à l'amélioration des conditions de passation des
marchés
et de négociation des contrats, ainsi qu'en
donnant son avis sur les prix des services publics locaux.
La DGCCRF est chargée de surveiller le respect des règles de
passation des marchés publics. Ses agents participent à cet effet
au fonctionnement des commissions d'appels d'offres.
Mais, les moyens de la DGCCRF sont insuffisants.
Selon plusieurs indicateurs, notre pays connaîtrait un taux d'encadrement
des pratiques concurrentielles inférieur à de nombreux
partenaires, parmi lesquels l'Allemagne. En tout état de cause, un
déséquilibre apparaît entre les objectifs de la DGCCRF et
ses moyens ainsi qu'entre les moyens accordés à chacune des
missions poursuivies.
Deux types d'activités émergent
: les contrôles
techniques et les contrôles économiques.
L'activité de contrôle économique
occupe environ le
tiers des agents.
L'activité de contrôle technique
mobilise le reste des
agents. Elle est donc très consommatrice de moyens.
En ce qui concerne la
surveillance des marchés publics,
l'objectif de participer au tiers des réunions des commissions
d'appel d'offres n'est pas atteint : le taux de participation est d'environ
25 %. Mais ce taux suppose un effort considérable avec la
participation à 33.000 procédures de mise en concurrence des
marchés publics.
Afin de développer le processus de sélection des marchés,
il serait souhaitable
de mettre en oeuvre un dispositif de sélection
des marchés dès le stade de leur publication
et de centrer
l'action sur les professionnels "douteux" impliqués à la fois
dans les marchés publics et dans les marchés privés.
La simplification du code des marchés publics doit également
être une priorité.
Actuellement, 85 % des marchés avec appel d'offres seraient
déclarés infructueux. Le formalisme actuel peut donc être
jugé excessif et inefficace. Il va de soi que le
démantèlement des formalités actuelles ne doit servir
qu'au renforcement de la régularité des marchés et de
l'efficacité des contrôles.
L'idée de mettre en place un système de marchés
négociés encadrés appelés à concerner des
tranches de marché plus importantes qu'actuellement est à
étudier.
Cette réforme devrait cependant éviter les écueils
actuels, la relative impuissance de l'administration à exercer sa
mission de surveillance et, en particulier, résoudre la question de
l'engorgement des commissions qui seraient appelées à examiner
les comptes rendus.
L'activité de surveillance du respect des règles de la
concurrence n'est pas entièrement exercée.
La surveillance des marchés publics et les activités techniques
étant très consommatrices de moyens, il reste à veiller au
respect des règles organisant la concurrence.
Outre que les moyens disponibles à cet effet sont trop réduits,
cette mission est malaisée à remplir :
·
Les pratiques anticoncurrentielles se sophistiquent et
la législation réagit avec retard ;
·
L'administration ne dispose le plus souvent pas de
l'action en cassation à l'encontre de ce qui se produit dans les
affaires de concentration ou de discrimination.
L'exercice du contrôle par les services de la DGCCRF subit les
conséquences de cet ensemble de difficultés :
·
alors qu'en 1996, la lutte contre les ententes et abus
de position dominante s'était traduite par le lancement de
225 enquêtes -soit un nombre très inférieur à
celui des indices de pratiques anticoncurrentielles ayant, cette
année-là, été relevés-, le nombre
d'enquêtes lancées ou achevées en 1997 n'est plus que de
210 ;
2. La D.G.I.
La direction générale des impôts est
soumise dans chacune de ses missions à de fortes pressions.
Selon la présentation qui en est faite dans le document
présentant le budget des services financiers, la direction
générale des impôts exerce quatre missions principales :
l'assiette de la quasi totalité des impôts perçus
pour le compte de l'Etat et des collectivités territoriales et des taxes
collectées au profit de divers organismes ;
le contrôle de l'impôt ;
le recouvrement de certains impôts ;
la conduite des activités foncières et domaniales avec, en
particulier, les activités cadastrales -évaluations
foncières et mise à jour du cadastre-, les activités de
publicité foncière et les activités domaniales
-administration du patrimoine mobilier et immobilier de l'Etat,
évaluation de certains biens immobiliers...-.
L'une des priorités de la DGI est d'améliorer les travaux
d'assiette.
Cet effort répond à la préoccupation de disposer plus
rapidement dans l'année des recettes fiscales ce qui est
évidemment de nature à améliorer les conditions de gestion
de la trésorerie de l'Etat.
Mais, l'accélération des travaux d'assiette ne doit pas nuire
à leur qualité.
De ce point de vue, il faut remarquer que si la part des déclarations
traitées avant le 15 septembre a augmenté pour l'impôt
sur le revenu et pour la taxe d'habitation notamment -pour cette
dernière, la part des avis d'imposition compris dans le premier
rôle payable au 15 novembre est passée de 64,2 à
71,1 % du total entre 1992 et 1996-, le nombre des réclamations,
qui était resté stable jusqu'en 1995, s'est
considérablement accru en 1996 (+ 8 %).
Afin de corriger cette situation des mesures ont été prises qui
représentent une forte contrainte pour les services et ne doivent pas
conduire à renoncer à d'autres tâches importantes de
gestion de l'impôt comme le contrôle de la réalité
des bases imposables non plus qu'elles ne doivent être exclusives d'un
effort pour améliorer l'insertion des services dans leur milieu et les
relations nouées avec les contribuables.
Une deuxième priorité de la DGI doit être
d'améliorer le contrôle fiscal.
La fraude atteint des montants importants. En ce domaine, le montant des droits
nets rappelés au titre du contrôle externe a beaucoup
progressé depuis 1992 -+ 49,4 %- et s'est élevé
en 1996 à 39,9 milliards de francs. Au total, les produits du
contrôle fiscal ont atteint 60,9 milliards de francs en 1996, soit
9,7 % de plus qu'en 1995.
Est-ce à dire que les résultats obtenus sont satisfaisants ?
La réponse à cette question suppose de produire des estimations
de la fraude, exercice périlleux puisqu'en la matière, seule la
fraude constatée est réellement connue mais aux termes duquel il
est généralement reconnu que les résultats du
contrôle fiscal n'appréhendent qu'une partie de la fraude.
Une observation s'impose :
Si les résultats des contrôles fiscaux ne sont pas
mécaniquement fonction du nombre des agents de la DGI, ils en
dépendent cependant beaucoup
. La baisse programmée en 1998
des moyens de la direction générale s'accompagnera
nécessairement d'une dégradation des performances
réalisées en ce domaine comme d'ailleurs en matière de
recouvrement plus généralement. Le bilan des mesures de
réduction d'emplois budgétaires devrait donc être
dressé avec le plus grand sérieux afin d'établir le solde
des dépenses évitées et des recettes perdues.
En outre, l'internationalisation de la fraude suppose une mobilisation plus
forte des services, qu'il s'agisse des problème posés par la TVA
intra-communautaire ou du développement des phénomènes
d'évasion et de fraude fiscales internationale portant sur les
opérations financières.
Enfin, le déploiement des effectifs doit continuer à s'adapter
aux réalités de la fraude. Il est, à cet égard,
frappant d'observer que 2,4 % du nombre des contrôles externes
permettent de rappeler le tiers des droits éludés.