II. AUDITION DU MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ ET DU SECRÉTAIRE D'ÉTAT À LA SANTÉ
Réunie le 20 novembre sous la présidence de
M. Christian Poncelet, président, la commission des finances a
procédé à l'audition de
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le ministre a rappelé tout d'abord que la progression de ces
crédits était de 3,6 % pour l'emploi, de 4,4 % hors
budget des charges communes.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a ensuite insisté sur le fait que le budget de l'emploi pour 1998
constituait, à ses yeux, un budget de rupture par rapport à la
démarche traditionnelle du ministère du travail, centrée
sur le traitement et l'accompagnement social du chômage. Elle a
insisté sur deux mesures pour illustrer ce tournant vers une politique
offensive de l'emploi : la création d'activités et d'emplois
nouveaux pour les jeunes et la réduction de la durée du travail.
S'agissant des emplois jeunes,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi
et de la solidarité,
a estimé que le dispositif permettait de
passer de la logique des contrats aidés à une logique
économique, ces emplois ne devant pas concurrencer des emplois
préexistants du secteur privé ni du secteur public.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
rappelé que 8,35 milliards de francs étaient ouverts pour
les emplois-jeunes en 1998, dont 300 millions de francs affectés
aux départements d'outre-mer, et que cette enveloppe avait
été précédée par l'ouverture de
2 milliards de francs par décret d'avance en juillet dernier. Elle
a rappelé également que la loi du 16 octobre 1997
créait aussi un dispositif d'encouragement des jeunes à la
création d'entreprises, sous forme d'une avance remboursable assortie
d'un suivi pendant les trois premières années.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a ensuite présenté l'orientation du budget de 1998 vers la
réduction du temps de travail, le Gouvernement s'étant
engagé sur le passage aux 35 heures au 1er janvier 2000, pour
les entreprises de plus de 10 salariés ; l'Etat accompagnera
le mouvement et aidera les entreprises à l'anticiper par une incitation
sous forme d'abattement forfaitaire de cotisations sociales, que la loi
d'orientation et d'incitation mettra en place. Dans cette perspective, une
provision de 3 milliards de francs est constituée, sans être
individualisée, à l'intérieur des 43,2 milliards de
francs inscrits aux crédits des charges communes sur la ligne de
l'allégement de cotisations sur les bas salaires, cette provision
permettant de financer le passage aux 35 heures pour environ
1 million de salariés, au fil des accords de branches ou
d'entreprises.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a précisé que cette provision s'ajouterait à
l'enveloppe de 2,14 milliards de francs destinée à financer
la loi "de Robien", soit 1,3 milliard de francs de plus que la
dotation
1997.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a ensuite souligné que les dispositifs traditionnels de traitement
social du chômage étaient replacés dans une perspective de
prévention et de lutte contre les exclusions. Ainsi, les contrats
emploi-solidarité (CES) seront maintenus au niveau de
500.000 entrées et seront réservés aux personnes les
plus défavorisées ; les contrats consolidés à
l'issue d'un CES seront renforcés de 50 % afin d'aider notamment
les chômeurs âgés qui ont peu de chances de se
réintégrer dans un emploi classique. Les emplois de ville
devraient être englobés par les emplois-jeunes, et lorsque cette
conversion ne sera pas possible, ils pourront se poursuivre jusqu'à
terme : 414 millions de francs de crédits sont prévus
à cette fin dans le budget de 1998.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a insisté sur le moyens affectés aux personnes les plus
touchées par le chômage : au total, 484 millions de
francs, en hausse de 6 % sont consacrés à l'insertion par
l'économique à raison de 349 millions de francs sur le
budget de l'emploi et 135 millions de francs sur le budget de la
solidarité pour l'accompagnement social nécessaire à ces
publics.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
s'est félicitée de ce que les contrats initiative-emploi
aient été recentrés par le Gouvernement
précédent sur les publics prioritaires :
200.000 entrées sont prévues en 1998, ce qui correspond au
niveau atteint cette année, même si les crédits
nécessaires diminuent fortement (13,2 milliards de francs contre
17,9 milliards de francs budgétés en 1997), car le freinage
des entrées 1997 se répercute sur le coût 1998.
Enfin,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité,
a rappelé que la capacité d'accueil dans
les stages collectifs pour les chômeurs de longue durée serait
portée à 160.000 places, soit 30.000 places de plus
qu'en 1997.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a souligné que les préretraites ne devaient plus être
l'instrument prioritaire des restructurations des entreprises alors que les
préretraites progressives, moins coûteuses pour la
collectivité, étaient maintenues au même niveau qu'en 1997.
En revanche, la contribution des grandes entreprises aux préretraites
serait augmentée, de façon à cibler les mesures sur les
entreprises en difficulté, les petites entreprises, les régions
en crise, et à porter la part des préretraites de 80 %
à 30 % dans les instruments des plans sociaux.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a aussi insisté sur l'extension de l'allocation de remplacement pour
l'emploi, auquel le Gouvernement contribuera à hauteur de 40 %
dès lors que les partenaires sociaux auront conclu des
négociations au niveau interprofessionnel ou par branche, et aussi sur
les 8,115 milliards de francs prévus dans le budget de 1998, qui
permettront à la fois de couvrir une revalorisation
générale de l'allocation de solidarité spécifique
et une majoration spéciale pour les allocataires ayant validé
40 annuités de cotisations.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a ensuite abordé la problématique de l'allégement du
coût du travail en reconnaissant que la lourdeur des charges sociales sur
les bas salaires constituait un véritable problème. Dans un
contexte où l'importance du coût par poste de travail
s'avère difficile à chiffrer, l'enveloppe consacrée
à la ristourne dégressive est maintenue à
40 milliards de francs en 1998. La principale mesure qui permet de tenir
dans cette enveloppe est la proratisation de l'exonération pour les
emplois à temps partiel. La deuxième mesure ramène le
plafond d'exonération de 1,33 à 1,30 SMIC, l'effet de
cette mesure sur le montant en francs de l'exonération étant
atténué par la revalorisation du SMIC de 4 % intervenue en
juillet 1997.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a souligné que par ailleurs le basculement des cotisations
d'assurance maladie sur la contribution sociale
généralisée (CSG) contribuerait à
l'allégement des charges sociales et que le Gouvernement étudiait
la voie de l'élargissement de l'assiette des cotisations patronales.
Par ailleurs,
Mme Martine Aubry
a rappelé que la France
était contrainte de mettre fin au plan spécifique
d'allégement de charges pour le secteur textile-habillement,
condamné par la commission de Bruxelles, et que le Gouvernement
s'efforçait d'aménager l'obligation de remboursement des aides
perçues à ce titre ; toutefois, l'application du plan
pourrait être poursuivie en 1998 dans les limites autorisées dans
le cadre de la règle de minimis, c'est-à-dire à hauteur de
650.000 francs par entreprise sur trois ans.
S'agissant des exonérations applicables dans les zones de
redynamisation urbaine et de revitalisation rurale et dans les zones franches,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a rappelé qu'elles avaient été maintenues, dans leur
principe, pour les zones franches jusqu'à l'établissement d'un
bilan du pacte de relance pour la ville.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a ensuite présenté les crédits de la formation
professionnelle : à champ constant, c'est-à-dire en
rétablissant dans le budget de l'emploi les primes des contrats
d'apprentissage qui figuraient aux charges communes, les crédits de la
formation professionnelle augmentent de 2 %, avec un montant de
24,5 milliards de francs, dont la moitié pour les contrats en
alternance ; si l'on y ajoute le financement des formations de
l'association pour la formation professionnelle des adultes, composé de
la subvention de l'Etat et des rémunérations des stagiaires, le
budget de la formation professionnelle est porté à
30 milliards de francs, soit 27 % des 112,6 milliards de francs
du budget de l'emploi, hors budget des charges communes.
Mme Martine
Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a insisté
sur la nécessité de développer la formation en alternance,
le nombre des jeunes actifs de moins de 26 ans diminuant
régulièrement dans les entreprises.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a rappelé que le nombre de contrats d'apprentissage prévus
dans le budget 1998 était porté de 220.000 à 240.000, les
contrats de qualification étant ramenés au niveau de la tendance
réelle de 1997, soit 100.000 contre 130.000 prévus en 1997, la
faiblesse de ces contrats étant au demeurant préoccupante.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a indiqué qu'elle souhaitait entreprendre une remise à plat
des circuits de financement de la formation, ainsi que de son contenu et de ses
objectifs.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
ensuite présenté le budget de la santé, de la
solidarité et de la ville pour 1998 qui s'élève à
73,2 milliards de francs, en augmentation de près de 3 %. La
première priorité de ce budget est d'assurer pleinement la
mission de protection des plus fragiles : cette priorité est au
centre de l'aide sociale de l'Etat et des programmes d'action sociale
confiés aux associations. Ce bloc de crédits regroupe
20 milliards de francs sur les 63,7 milliards de francs du budget de
la solidarité. Le budget prévoit la création de
2.000 places supplémentaires de centres d'aide par le travail
(CAT), pour un montant de 135 millions de francs, auxquelles il faut
ajouter les 500 places d'ateliers protégés
créées sur le budget de l'emploi. Les centres d'aide par le
travail représentent 6 milliards de francs sur les
10,5 milliards de francs de l'aide sociale de l'Etat.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité
, a estimé que la progression de l'allocation aux
adultes handicapés était préoccupante : elle a
conduit à inscrire 23,4 milliards de francs à ce titre, en
hausse de 5 % sur les 22,3 milliards de francs de 1997. Une mission
d'analyse de la politique d'attribution et du fonctionnement des COTOREP vient
donc d'être confiée à l'inspection générale
des affaires sociales et à l'inspection des finances. Par ailleurs, les
crédits de l'aide sociale, ajustés en hausse de 29 millions
de francs sont portés à 350 millions de francs et la
dotation de 807 millions de francs pour l'aide médicale permet
d'apurer des dettes auprès des fournisseurs de soins, dans l'attente de
l'assurance maladie universelle.
S'agissant des mesures de tutelles décidées par les juges, dont
l'Etat doit honorer le financement, une mission d'enquête a
été lancée pour mieux cerner le sujet :
80 millions de francs supplémentaires portent la dotation de 1998
à 515 millions de francs, afin d'apaiser les craintes des
associations tutélaires. La baisse des crédits inscrits pour 1998
pour les objecteurs de conscience qui représentait 118 millions de
francs contre 201 millions de francs en 1997, s'explique par la diminution
rapide du nombre de jeunes appelés sollicitant le bénéfice
du statut d'objecteur dans la perspective de la suppression de la conscription.
Concernant les personnes âgées,
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité
, a signalé que les
227 millions de francs de crédits du titre VI affecté
à l'humanisation des hospices permettaient d'envisager, en 1999, le
terme de ce plan commencé il y a plus de 20 ans.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité
, a souligné que la prise en charge des personnes
âgées dépendantes était un sujet majeur, qui devait
être traité dans son ensemble : l'augmentation du nombre de
lits en cure médicale et en long séjour et la
réorganisation de la tarification en sont des éléments
essentiels. S'agissant des modes de garde à domicile, le comité
national de gérontologie sera bientôt réuni pour faire un
bilan de la mise en place de la prestation spécifique dépendance,
qui se traduit aujourd'hui par des différences de traitement sur le
territoire national.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
ensuite estimé nécessaire d'envisager la réforme de loi de
1975 sur les institutions sociales et médico-sociales, afin d'assurer
une plus grande égalité sur le territoire.
S'agissant de la future loi cadre sur l'exclusion,
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité
, a précisé
qu'une provision de 225 millions de francs inscrite au budget des charges
communes en constituait un premier élément.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
ensuite rappelé que la hausse de 4,5 % de la dotation du revenu minimum
d'insertion d'environ 25,3 milliards de francs, était à la
fois ajustée aux besoins estimés et cohérente avec la
mobilisation des dispositifs d'insertion, et que 500 places
supplémentaires de centres d'hébergement et de
réadaptation sociale seraient financées en 1998, ces centres
devant être désormais ouverts toute l'année.
S'agissant de l'accueil et l'intégration des populations
étrangères,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de
la solidarité
, a rappelé que l'essentiel des moyens
était porté par le budget des établissements publics,
l'office pour les migrations internationales et surtout le fonds d'accueil
social, qui seraient utilisés pour l'insertion en France mais aussi, le
cas échéant une aide au retour pour les étrangers non
régularisés.
S'agissant de la politique de la ville,
Mme Martine Aubry, ministre de
l'emploi et de la solidarité
, a rappelé que serait
lancée au début de l'année prochaine une loi cadre de
lutte contre les exclusions. Le total des moyens affectés à la
politique de la ville en 1998 se monte à 15 milliards de francs,
soit 1 milliard de plus qu'en 1997.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
estimé que cette politique devrait être réexaminée
en s'interrogeant sur l'utilité des crédits et l'adaptation des
procédures ; 1998 étant la dernière année des
contrats de ville, un bilan des contrats de ville et du pacte de relance sera
établi en 1999, ce qui justifie un budget de continuité pour 1998.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
ensuite évoqué l'action en faveur des droits des femmes :
l'égalité des droits entre les femmes et les hommes
n'étant pas acquise, qu'il s'agisse de l'accès à l'emploi,
de la formation et des salaires, il est nécessaire de les promouvoir,
avec l'appui de l'Etat. Tel est l'objet des 72 millions de francs
consacrés au soutien des initiatives et des mouvements qui s'emploient
à défendre l'égalité des droits, la parité
dans la vie politique et la vie publique, ainsi que les droits propres comme
l'accès à la contraception et à l'interruption volontaire
de grossesse.
S'agissant enfin des moyens du service public de l'emploi et de
l'administration sanitaire et sociale,
Mme Martine Aubry
a
rappelé que les mesures essentielles du budget de 1998 concernaient le
personnel et correspondaient à deux priorités, la
résorption de l'emploi précaire et le renforcement de
l'encadrement pour lesquels il a été dérogé
à la norme de stabilité des effectifs prescrite en 1998 : on note
en effet la création nette de 369 emplois budgétaires, 199 du
côté solidarité, 170 du côté emploi,
auxquelles il faut y ajouter les 70 créations d'emplois
autorisées à l'agence nationale pour l'emploi, qu'elle financera
à l'intérieur de l'enveloppe de subvention de fonctionnement.
M. Alain Lambert, rapporteur général
, a admis la
proratisation de l'exonération de charges au titre du travail à
temps partiel, mais s'est inquiété de la façon dont les
entreprises réagiraient à la diminution de l'exonération
sur les bas salaires. Il a, par ailleurs, souhaité savoir si le
Gouvernement envisageait de prolonger les contrats de ville jusqu'en 1999.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
fait valoir que le volume global de la ristourne dégressive sur les bas
salaires serait maintenu à 40 milliards de francs pour 1998,
l'abaissement du seuil de 1,33 SMIC à 1,30 SMIC étant
compensé par l'effet volume de la hausse du SMIC. Elle a estimé
que ce système coûteux constituait une trappe à bas
salaires et générait d'importants effets de seuil, mais qu'il
devait être maintenu dans l'immédiat faute de meilleure solution.
Elle a considéré que la modification marginale qui lui serait
apportée n'aurait pas d'effet au niveau micro-économique sur les
comportements des entreprises, et a souligné la nécessité
d'aller plus loin dans l'allégement des charges sur les bas salaires,
notamment par une réforme de l'assiette des cotisations sociales
patronales et de la taxe professionnelle. Elle a assuré que, si
l'expérience du contrat de ville apparaissait plus fructueuse, celle-ci
serait prolongée en 1999, et qu'il n'y aurait pas de rupture des
engagements de l'Etat en toute hypothèse. Elle a ajouté qu'une
véritable déconcentration des crédits lui paraissait
nécessaire en la matière.
M. Jacques Oudin
,
rapporteur spécial des crédits
de la santé et de la solidarité,
s'est félicité
de l'approche rigoureuse du ministre sur le revenu minimum d'insertion (RMI) et
l'allocation aux adultes handicapés (AAH), qui sont deux postes de
dépenses en forte progression et constituent l'essentiel de ce budget.
Il a estimé nécessaire de réviser ces dispositifs et utile
de solliciter l'éclairage de la Cour des Comptes. Relevant la
progression continue du nombre de places dans les centres d'aide par le travail
(CAT), il a souhaité savoir quel était l'objectif poursuivi. Il
s'est enfin déclaré inquiet du démembrement des
compétences de l'administration sanitaire résultant de la
multiplication des agences et des offices dans ce secteur.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
indiqué que la hausse du revenu minimum d'insertion était
très directement liée au reprofilage de l'allocation
supplémentaire de solidarité intervenu en 1997. Elle a
estimé souhaitable une diminution du nombre des allocataires du RMI, par
une relance des dispositifs d'insertion. Elle a constaté que le
resserrement des critères d'attribution de l'AAH en 1995 n'avait eu
aucun effet, les COTOREP continuant de l'accorder très largement. Elle a
estimé opportun de recentrer l'AAH sur les véritables
handicapés. Elle a rappelé avoir été à
l'origine en 1991 de la première programmation sur cinq ans des places
en CAT, mais que "l'amendement Creton" avait entre temps perturbé ces
prévisions. Elle a estimé qu'il existait d'autres solutions que
la multiplication des places, notamment le développement du travail
à mi-temps dans les CAT et de celui de l'emploi en milieu ordinaire.
Elle a fait valoir que la création prochaine des agences de veille et de
sécurité sanitaires répondrait à un vrai besoin,
mais que d'une façon générale, elle était
opposée à la dilution des responsabilités et
préférait disposer de directeurs d'administration centrale forts
plutôt que d'une multitude de délégués
spécialisés.
M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial des crédits de
l'emploi
, a souhaité connaître l'appréciation du
ministre sur les résultats obtenus par l'agence nationale pour l'emploi
(ANPE) et l'agence pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) dans le
cadre des contrats de progrès. Il a également souhaité
connaître la justification de la diminution du nombre des contrats de
formation en alternance et des contrats initiative emploi en 1998. A l'inverse,
il s'est demandé si l'objectif de 150.000 emplois jeunes dans le
secteur public en 1998 ne risquait pas d'être dépassé. Il a
enfin souhaité savoir quel résultat le ministre espérait
des incitations à la réduction collective du temps de travail.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
indiqué que l'AFPA avait beaucoup progressé sur la qualité
de l'accueil et la gestion de son personnel, conformément à ses
engagements dans le cadre du contrat de progrès. Elle a
précisé que l'AFPA, qui avait eu tendance à
empiéter sur le marché concurrentiel de la formation, avait
été recentrée sur ses missions de service public en faveur
des demandeurs d'emplois et des publics les plus fragiles. Elle a
néanmoins estimé que des progrès pouvaient encore entre
être réalisés dans la coordination entre l'AFPA et l'ANPE.
S'agissant de cette dernière, le ministre a indiqué que l'agence
avait bien réussi son recentrage en direction des entreprises, puisque
désormais 40 % des offres d'emplois sont déposées
à l'ANPE et que les employeurs reconnaissent la qualité du
travail de présélection des candidatures que celle-ci
réalise pour leur compte. Néanmoins, elle a estimé que
l'ANPE devait encore progresser dans le traitement individualisé des
chômeurs.
Le ministre a justifié la baisse de 25 % du nombre de contrats
initiative-emploi par le recadrage du dispositif sur les publics les plus en
difficulté, et indiqué que le nombre de contrats
emploi-solidarité serait maintenu au niveau atteint en 1997, au moins
jusqu'au bilan qui sera réalisé en juin 1998.
S'agissant de la réduction de la durée du travail, elle s'est
déclarée convaincue que les entreprises se saisiraient de
l'opportunité qui leur était offerte lorsqu'elles auraient pris
conscience des souplesses de la loi. A cet égard, elle a estimé
que la réalité des réactions des entreprises sur le
terrain était très différente de la position de la
confédération nationale du patronat français (CNPF). Elle
a fait valoir que des inquiétudes comparables avaient été
exprimées à propos de la loi de Robien, qui est désormais
un succès reconnu, et s'est déclaré optimiste sur la
nouvelle étape proposée car les entreprises ont toujours
intérêt à repenser leur organisation du travail.
Le ministre a affirmé que le nombre de 150.000 emplois-jeunes ne
serait pas dépassé en 1998, car elle avait donné des
instructions pour que les préfets soient très fermes sur les
critères d'accès au dispositif et n'y admettent que des emplois
pérennes. Elle a fait valoir l'expérience réalisée
à Lille, où la part du financement de la municipalité pour
des emplois de ce type avait pu être réduite de 80 % à
35 % en trois ans.
M. Philippe Adnot
, après avoir pris acte du maintien global
du nombre des contrats emploi-solidarité, a néanmoins
constaté que, dans son département, ceux-ci étaient en
réduction sensible. Il s'est déclaré entièrement
d'accord avec l'analyse du ministre sur les préretraites, estimant
néfaste de donner aux entreprises un accès trop facile à
ce dispositif, alors que bien d'autres solutions existent. Il s'est
inquiété de l'impact de la réduction des
exonérations de charges sociales sur la compétitivité des
entreprises, et a estimé que l'on faisait un mauvais procès aux
conseils généraux qui cherchent à s'assurer de la
réalité de l'aide aux personnes handicapées
financée par l'allocation compensatrice pour tierce personne.
Mme Maryse Bergé-Lavigne
, évoquant le sommet
européen sur l'emploi, a estimé qu'après la
réalisation de l'euro et du marché unique pour les marchandises,
le prochain chantier était celui de l'harmonisation sociale
européenne. Elle a regretté qu'il n'y ait toujours pas de statut
de la société européenne, et a fait part des
inquiétudes des salariés du consortium Airbus, dans la
perspective de la transformation de celui-ci en société.
M. Marc Massion
s'est félicité de la progression des
crédits en faveur des entreprises d'insertion, tout en espérant
que celles-ci n'auraient plus à souffrir de retard dans le versement de
leurs subventions et en regrettant qu'elles n'aient pas accès aux
dispositifs d'exonération de cotisations sociales.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
,
s'est étonnée de la diminution des contrats
emploi-solidarité observé par M. Philippe Adnot dans son
département, et a supposé que cela tenait peut-être
à l'épuisement du contingent attribué au préfet.
Elle a estimé que l'ajustement de la ristourne dégressive sur les
bas salaires n'aurait pas d'effet sensible au niveau de chaque entreprise, et
s'est déclarée convaincue qu'à la fin de 1998 le volume
global des allégements de charges sociales serait supérieur
à celui de 1997, du fait de l'incitation à la réduction du
temps de travail.
Le ministre a estimé parfaitement normal que les départements
contrôlent l'effectivité de l'aide financée par
l'allocation compensatrice pour tierce personne, mais a constaté que,
pour l'instant, la loi ne leur permettait pas de le faire. D'une façon
plus générale, elle a considéré que les aides aux
personnes handicapées et aux personnes âgées devaient
être revues au regard des progrès de la longévité. A
cet égard, elle a fait valoir que le grand progrès apporté
par la prestation spécifique dépendance résidait dans la
mesure précise du handicap et dans la proportionnalité de l'aide
en fonction de ce handicap. Elle a estimé que les aides publiques
devraient être attribuées selon les deux critères de la
dépendance physique et de la dépendance financière, les
solidarités familiales devant jouer pleinement.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
,
s'est déclarée en parfait accord avec l'analyse de M. Marc
Massion sur les entreprises d'insertion et a regretté que celles-ci ne
puissent pas bénéficier des exonérations de charges
offertes aux entreprises classiques pour l'embauche de chômeurs de longue
durée. Elle a jugé nécessaire de simplifier les statuts
des différents types d'entreprises d'insertion, et d'introduire une
"clause sociale" dans les procédures de marché public afin de
rétablir une égalité de concurrence entre celles-ci et les
entreprises ordinaires.
Elle a affirmé que le sommet pour l'emploi serait une grande date pour
la construction européenne, et que les Gouvernements devaient enfin
reconnaître la nécessité d'efforts convergents pour
réduire le chômage, sauf à discréditer l'Europe
auprès des opinions publiques. Elle a estimé qu'il convenait de
faire preuve de la même détermination contre le chômage que
pour la rigueur monétaire et budgétaire. Elle s'est
déclarée convaincue de la nécessité d'examiner en
même temps le coût et la durée du travail. Elle a fait
valoir que le modèle européen commun n'était certainement
pas le libéralisme dérégulé, car chacun des Etats
membres reconnaît qu'il n'est pas possible de progresser
économiquement avec des salariés en situation précaire,
même si les entreprises ont par ailleurs impérativement besoin de
souplesse.
M. Guy Cabanel
a estimé que la loi de 1985 sur la formation
professionnelle et l'apprentissage n'avait eu que très peu d'effets, et
que la France aurait eu intérêt à s'inspirer du
modèle allemand, même si celui-ci apparaissait aujourd'hui en
perte de vitesse. Après avoir rappelé la baisse d'activité
préoccupante dans le secteur du thermalisme, il a fait valoir que cette
thérapeutique n'était certainement pas dépassée
dans toutes les disciplines et s'est inquiété qu'aucune
décision ne soit prise à l'approche de la prochaine saison
thermale. Evoquant la prestation spécifique dépendance, il a fait
valoir qu'il ne s'agissait que d'un dispositif transitoire, encore incomplet en
l'absence de réforme de la tarification des établissements, et a
mis en garde contre l'égalitarisme qui conduit à critiquer la
disparité des efforts consentis par des départements aux
ressources très variables.
M. Michel Moreigne
s'est déclaré favorable à
une majoration du minimum vieillesse, notamment en faveur des artisans,
commerçants et agriculteurs.
M. Jacques Chaumont
s'est inquiété des pratiques
d'une minorité de médecins qui accordent des arrêts de
travail de complaisance, ainsi que de la diminution des contrats
emploi-solidarité dans le secteur sanitaire.
M. Gérard Miquel
a regretté que les entreprises
d'insertion, en dépit de leurs efforts méritoires, ne parviennent
que très rarement à rompre pour leur personnel le cercle des
contrats aidés, du chômage et du RMI.
M. François Trucy
s'est interrogé sur les raisons ayant
conduit le Gouvernement à desserrer le frein mis à la croissance
des dépenses d'assurance maladie, et s'est inquiété du
niveau des prix des appareillages médicaux.
M. Yvon Collin
s'est inquiété de la progression de
la toxicomanie, contre laquelle ni la prévention ni la répression
ne semblaient avoir d'effet, et qui touchaient désormais même les
communes rurales.
M. Roland du Luart
a estimé indispensable que des directives
soient adressées aux COTOREP afin que celles-ci fassent preuve de plus
de rigueur, et surtout harmonisent leurs pratiques à travers l'ensemble
du pays.
En réponse aux intervenants précédents,
M. Bernard Kouchner
, secrétaire d'Etat à la
santé, a rappelé que le seul Premier ministre qui avait
cherché à transposer en France le modèle allemand
d'apprentissage était Mme Edith Cresson, sans grand succès.
Il a considéré que le thermalisme n'était pas
menacé, même si son efficacité n'est pas prouvée
pour toutes les spécialités. Il a fait valoir que la
réforme de la tarification des établissements accueillant des
bénéficiaires de la prestation spécifique
dépendance se heurtait à l'invraisemblable opacité des
pratiques actuelles.
S'agissant de la revalorisation du minimum vieillesse, il a rappelé que
le Gouvernement avait déjà fait un effort en faveur des veuves et
des agriculteurs, et a estimé difficile d'aller plus loin dans
l'immédiat.
S'agissant des arrêts de travail de complaisance, il a
considéré que les médecins étaient pris en otage
par le système de rémunération à l'acte, qui les
contraint à accorder les arrêts demandés, sauf à
perdre leur clientèle. Il a souligné que le contrôle en la
matière était de la responsabilité des caisses d'assurance
maladie, et que les abus provenaient également des employeurs qui
utilisent les arrêts de travail de longue durée pour
écarter certains salariés qu'ils ne veulent pas licencier dans
les règles.
S'agissant de la progression de l'objectif national d'assurance maladie, le
secrétaire d'Etat l'a justifiée par la situation des
hôpitaux, qui se sont trouvés étranglés par la
rigueur de l'objectif fixé l'an dernier. Il a néanmoins
affirmé que le Gouvernement continuait dans la voie de la réforme
hospitalière, et avait notamment relancé la procédure des
schémas régionaux d'organisation sanitaire qui serviront aux
agences régionales de l'hospitalisation pour répartir les
dotations entre les établissements.
S'agissant de la toxicomanie, il a estimé qu'il convenait à la
fois de diminuer le nombre de toxicomanes, de limiter les conséquences
néfastes pour les personnes concernées, et surtout de
contrôler les aspects économiques du marché de la drogue,
ce qui impliquait une action européenne et même mondiale. Il a
souligné qu'il convenait de bien distinguer le simple usager de drogue
du toxicomane, et d'informer aussi bien sur les toxiques légaux
qu'illégaux. Il s'est inquiété de la consommation massive
de psychotropes en France, qui est de l'ordre de 18 millions de
boîtes par mois, car ces drogues légales et remboursées par
la sécurité sociale semblent très largement
associées aux accidents de la route. Il a estimé que l'absence de
toute distinction au regard du droit pénal entre drogue douce et drogue
dure méritait d'être débattue et que la prison ne
constituait en aucun cas une solution, même s'il convenait de maintenir
un interdit.
Réunie le 19 novembre 1997 sous la présidence de
M. Christian Poncelet, président,
la commission des finances a
adopté les crédits de la santé, de la solidarité et
de la ville, réduits par deux amendements portant sur les titres III et
IV.