Rapport n° 31 - Projet de loi adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier
M. Alain LAMBERT
Commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation - Rapport n° 31 - 1997-1998
Table des matières
- EXPOSE GENERAL
- EXAMEN DES ARTICLES
- ARTICLE PREMIER
-
Contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés pour les entreprises réalisant au moins 50 millions de francs de chiffre d'affaires -
ARTICLE 2
Régime fiscal des cessions d'éléments d'actif pour les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés -
ARTICLE 3
Versement anticipé de la contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés et modification du régime des acomptes -
ARTICLE 5 BIS
Rapport d'évaluation de l'utilisation par les collectivités locales des prêts sur ressources CODEVI -
ARTICLE 7
Modification de la limite de déductibilité des intérêts des comptes courants d'associés -
ARTICLE 8 (nouveau)
Report des élections des conseils consultatifs et des conseils d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance
N° 31
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 14 octobre 1997
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , EN NOUVELLE LECTURE , portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier,
Par M. Alain LAMBERT,
Sénateur,
Rapporteur général.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Christian Poncelet,
président
; Jean Cluzel, Henri Collard,
Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini,
René Régnault,
vice-présidents
; Emmanuel
Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Alain Lambert,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré,
René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot,
Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël
Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon
Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut,
Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel
Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann,
Henri Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
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Politique économique. |
EXPOSE GENERAL
L'Assemblée nationale a rétabli en nouvelle
lecture les trois premiers articles du présent projet de loi que le
Sénat avait supprimés, pour revenir au texte tel qu'il avait
été transmis au Sénat en première lecture.
Elle a également supprimé les deux articles additionnels
ajoutés par le Sénat et qui prévoyaient respectivement le
dépôt d'un rapport sur les effets des prêts accordés
aux collectivités locales sur ressources Codévi, et la
modification de la limite de déductibilité des
intérêts des comptes courants d'associés.
Elle a enfin adopté un amendement tendant à prolonger jusqu'au
1
er
mars 1999 les mandats des membres des conseils consultatifs
et des conseils d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne
et de prévoyance.
Le rapporteur général de la commission des finances de
l'Assemblée nationale a motivé le rétablissement des
articles 1
er
à 3 du projet de loi par la
nécessité de retrouver un niveau de déficit
budgétaire permettant à notre pays de se qualifier, au printemps
prochain, en vue de la mise en uvre de la monnaie unique européenne.
Il a considéré que les nouveaux prélèvements
fiscaux prévus par les articles 1
er
à 3 étaient
légitimes dans la mesure où ils pèsent surtout sur les
grosses entreprises soumises à l'impôt sur les
sociétés dont il a estimé la bonne santé
financière évidente. Il a rappelé que le Sénat
avait adopté la mesure ouvrant aux petites entreprises la
possibilité d'être taxées au taux réduit de
l'impôt sur les sociétés en cas d'incorporation de
bénéfices au capital, mesure qui introduisait une discrimination
entre les entreprises. Il a enfin souligné que le Sénat avait
approuvé l'augmentation de l'impôt sur les sociétés
engagée avec l'institution de la contribution supplémentaire de
10 % prévue par la loi du 4 août 1995.
Votre rapporteur général maintient pour sa part les observations
qu'il avait émises en première lecture :
- la résorption du déficit budgétaire doit reposer en
priorité sur la réduction des dépenses publiques et non
sur l'augmentation des prélèvements obligatoires ;
- le creusement du déficit budgétaire évoqué par
MM. Nasse et Bonnet doit être relativisé au vu, non seulement des
derniers
résultats de l'exécution de la loi de finances
pour 1997, mais aussi des prévisions de croissance pour 1997 ;
- l'alourdissement de la fiscalité pesant sur les entreprises risque de
conforter l'attentisme des chefs d'entreprises et de retarder la reprise des
investissements et de la croissance ;
- la contribution de 15 % sur l'impôt sur les sociétés
porterait le taux de l'IS à 41,66 %, et placerait la France dans le
peloton de tête des pays européens les plus sévères
à l'égard de leurs entreprises, à l'heure où la
plupart de nos partenaires économiques réduisent la
fiscalité pesant sur leurs entreprises ;
- la taxation au taux de droit commun des plus-values à long terme des
sociétés assujetties à l'impôt sur les
sociétés exposerait la France à la concurrence fiscale
internationale : en effet, non seulement, la législation fiscale
française ne prévoit pas de régime d'exonération
des plus-values à long terme sous condition de remploi, contrairement
à tous nos concurrents économiques, mais les actifs des
entreprises françaises continuent à être valorisés
au coût historique, ce qui induit des plus-values purement
nominales ;
-
enfin, le dispositif fiscal est critiquable en raison de sa
rétroactivité et de sa complexité.
S'agissant de l'adoption par le Sénat de la disposition instituant un
taux réduit d'imposition au profit des petites entreprises qui
incorporent les bénéfices ainsi taxés à leur
capital, votre rapporteur général tient à faire deux
observations :
- En premier lieu, la commission des finances du Sénat avait jugé
cette disposition peu lisible et contraire au principe de neutralité du
droit fiscal
1(
*
)
. Sa position actuelle est donc
cohérente avec la position de principe adoptée lors de la
discussion du projet de loi de finances pour 1997.
- En second lieu, la discrimination positive prévue par la disposition
susvisée n'est pas équivalente à la discrimination
négative envisagée par le présent dispositif. En effet, il
s'agit ici d'exonérer les petites entreprises d'une surtaxation et non
de les faire bénéficier d'un allégement de la
fiscalité. La différence de traitement fiscal ainsi
instituée est d'autant moins justifiée ici qu'en raison du seuil
choisi (50 millions de francs de chiffre d'affaires), ce sont les entreprises
moyennes à rayonnement national qui seront pénalisées.
Au total, bien que votre commission des finances souscrive sans réserve
à la nécessité de respecter toutes les conditions du
passage à la monnaie unique, elle maintient sa proposition de supprimer
le volet fiscal du présent projet de loi qui n'est ni nécessaire,
ni opportun.
S'agissant des autres dispositions du projet de loi, elle vous propose de voter
conformes les articles 7 et 8 et d'adopter avec modifications l'article 5
bis
supprimé par l'Assemblée nationale.
EXAMEN DES ARTICLES
ARTICLE PREMIER
Contribution temporaire sur l'impôt sur les
sociétés pour les entreprises réalisant au moins 50
millions de francs de chiffre d'affaires
Sous le bénéfice des observations émises dans l'exposé général, votre commission vous propose de supprimer cet article .
ARTICLE 2
Régime fiscal des cessions
d'éléments d'actif pour les entreprises soumises à
l'impôt sur les sociétés
Sous le bénéfice des observations émises dans l'exposé général, votre commission vous propose de supprimer cet article .
ARTICLE 3
Versement anticipé de la
contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés et
modification du régime des acomptes
Sous le bénéfice des observations émises dans l'exposé général, votre commission vous propose de supprimer cet article .
ARTICLE 5 BIS
Rapport d'évaluation de
l'utilisation par les collectivités locales des prêts sur
ressources CODEVI
L'Assemblée nationale a supprimé cet article
adopté par le Sénat à l'initiative de notre
collègue Philippe Marini, et qui prévoyait un rapport annuel
d'évaluation de la loi "Gest".
Il n'est pas satisfaisant de se refuser à recenser les résultats
d'un dispositif à finalités économiques au seul motif que
ce dispositif serait temporaire. La plupart des dispositifs fiscaux ou
financiers ayant un but de relance le sont.
Il reste que la rédaction initiale de cet article additionnel pouvait
laisser entendre que le dispositif devrait être pérennisé,
puisqu'elle prévoit un rapport annuel.
Votre rapporteur vous propose donc une nouvelle rédaction, tendant
à la remise d'un rapport unique.
De plus, l'avènement de l'euro et sa gestion par une banque centrale
unique nous contraindront à mener la réflexion sur les taux
d'intérêt comme sur les circuits de l'épargne
administrée. Or, c'est bien une telle réflexion, et non le refus
de la mener, qui pourra nous aider, le cas échéant, à
convaincre nos partenaires européens de l'utilité de cette forme
d'épargne.
Décision de la commission : votre commission vous propose une
nouvelle rédaction de cet article.
ARTICLE 7
Modification de la limite de
déductibilité des intérêts des comptes courants
d'associés
L'Assemblée nationale a supprimé cet article
adopté par le Sénat à l'initiative de notre
collègue Philippe Marini, qui se proposait de modifier le plafond de
déductibilité des intérêts versés par une
filiale à sa maison-mère.
Bien que méritant certainement des améliorations, le dispositif
proposé par M. Marini se proposait de régler un vrai
problème. En effet, les intérêts afférents aux
sommes que les associés (et donc les maisons-mères) d'une
société laissent ou mettent à disposition de la
société sont admis dans les charges déductibles du
résultat de l'associé. L'article 39.1.3° du code
général des impôts plafonne cependant le montant
déductible de ces intérêts à un taux égal
à la moyenne annuelle des taux de rendement brut à
l'émission des obligations des sociétés privées
(TMO).
Or, non seulement une telle référence - qui certains mois, faute
d'émissions suffisantes, ne peut être calculée et est
souvent remplacée par un taux de substitution, le PVLT (privé
long terme) - est manifestement obsolète, mais la France est le seul
pays de l'Union européenne à fixer un taux limite à la
déductibilité des intérêts versés par une
filiale à sa maison-mère.
La nécessité de trouver un taux de substitution avait
déjà été soulevée lors de la discussion du
projet de loi portant diverses mesures d'ordre économique et financier
adopté le 12 avril 1996. Le Gouvernement s'était alors
engagé à mener à bien une réflexion sur le sujet.
Il convient donc de mener cette réflexion à son terme afin de ne
pas dissuader les groupes étrangers d'implanter leurs centrales de
trésorerie hors de France.
Décision de la commission : sous réserve de
l'approfondissement de la réflexion du Gouvernement sur ce sujet, votre
commission vous propose de confirmer la suppression de cet article.
ARTICLE 8 (nouveau)
Report des élections des
conseils consultatifs et des conseils d'orientation et de surveillance des
caisses d'épargne et de prévoyance
Adopté à l'initiative du Gouvernement, cet
article additionnel a pour objet de reporter d'environ un an les
élections des conseils consultatifs de clients et des conseils
d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne.
Les conseils consultatifs de clients (CC) sont prévus par les
articles 10 et 10-1 de la loi n° 83-557 du 1
er
juillet
1983 portant réforme des caisses d'épargne et de
prévoyance. Les membres de ces conseils sont élus pour six ans.
Ils assurent en principe la représentation des clients auprès de
chaque caisse d'épargne mais en pratique, ils ne fonctionnent pas
toujours.
Les conseils d'orientation et de surveillance (COS), prévus par
l'article 11, jouent à la fois un rôle d'assemblée
générale et celui de conseil d'administration ou de surveillance.
Cette double fonction est liée au statut particulier des caisses
d'épargne qui sont dépourvues d'actionnaires ou de
sociétaires. Le nombre de leurs membres est de 17, 21 ou 25 selon la
taille de la caisse. Ces membres sont élus pour six ans.
Les mandats de ces organes arrivent à expiration au printemps prochain.
Or, le centre national des caisses d'épargne juge urgente une
réforme du statut des caisses et en a convaincu le Gouvernement. Comme
pour la réforme de 1991, celui-ci propose donc une prorogation des
mandats des C.O.S et des C.C. de façon à éviter
d'interrompre précocement les mandats des nouveaux membres de ces
organes.
Sur le fond, votre rapporteur est d'accord avec ce dispositif
. Il a
lui-même déposé une proposition de loi tendant à
réformer les caisses d'épargne et de prévoyance
2(
*
)
qui prévoit, en son article 47, une disposition
de même nature permettant aux actuels titulaires des sièges des
C.O.S. de mener à bien la réforme.
Par ailleurs, cet article
additionnel ne présume en rien du fond de cette réforme, à
laquelle votre commission des finances entend prendre toute sa part.
Sur la forme, votre rapporteur ne peut qu'émettre certaines
réserves
. D'une part bien qu'opposé à une partie des
dispositions du présent projet, il s'était rendu à sa
logique en proposant peu d'amendements et aucun article additionnel. Il
s'était donc refusé, par principe, à insérer des
dispositions entièrement nouvelles par rapport au projet du
Gouvernement
. Cet amendement précipité a suscité
l'incompréhension des députés
. Dès lors qu'il
ne faisait pas partie du projet initial, il aurait été plus
convenable, pour la sérénité des débats, que cet
article fît l'objet d'un projet ou d'une proposition de loi autonome.
D'autre part, le débat a quelque peu dérivé à
l'Assemblée nationale car, tout en annonçant la nomination d'un
parlementaire en mission sur ce sujet, M. Raymond Douyère, le
Gouvernement a présumé d'une partie de ses conclusions, notamment
quant à la distribution du livret A, ou au financement du logement
social.
Il est donc nécessaire de rappeler que cet article additionnel, de
portée purement procédurale, ne reflète que la
volonté du Gouvernement d'accélérer le processus de
réforme des caisses d'épargne et de prévoyance, ce qui est
souhaitable, mais n'anticipe en rien sur les conclusions de la concertation
à venir.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
le présent article dans la rédaction de l'Assemblée
nationale.
1
Cf. Rapport n° 86 sur le
projet de loi de finances pour 1997, tome II, fascicule 1, p. 67 et s.
2
Proposition de loi relative au statut et à
l'activité des caisses d'épargne et de prévoyance et
portant création d'un premier livret bancaire. Sénat n° 387.
Enregistré à la Présidence le 11 juillet 1997.