2. Le maintien d'une forme de service national néanmoins justifié par des arguments étrangers à toute considération opérationnelle
Le débat organisé dans tout le pays au printemps dernier a fait une large part, pour les partisans du service national, à des arguments "dérivés", étrangers aux aspects opérationnels de celui-ci : contribution à la cohésion nationale, au "brassage social", à la formation professionnelle, au lien armées-Nation et à l'esprit de défense.
Ces différents arguments ne sauraient à eux seuls justifier le maintien du service national actuel. Ils ont néanmoins validé la formule de la rénovation du service national, simultanément au passage à l'armée professionnelle.
a) Service national, cohésion nationale et brassage social
C'est ainsi qu'a été exprimée la crainte que disparaisse, avec le service national obligatoire, un élément important de notre cohésion nationale . Dans cette perspective, la possibilité de faire cohabiter pendant quelques mois des jeunes issus de milieux très différents constituerait l'une des justifications du service national.
Certes, celui-ci a très certainement assuré une fonction de " brassage social ", qui a joué un rôle positif à une époque où la France était caractérisée par des particularismes locaux et sociaux très prononcés, ces derniers se reflétant notamment dans les habitudes vestimentaires et alimentaires.
Cet argument n'est cependant plus pertinent de nos jours. En effet, les nombreuses inégalités devant le service national permettent aux catégories privilégiées d'échapper, grâce notamment aux formes civiles, aux modalités les plus contraignantes d'accomplissement du service national. Quant aux catégories les plus vulnérables, elles sont fréquemment exemptées, ce que les spécialistes attribuent à la corrélation constatée entre faible niveau de lecture et état de santé médiocre (52,9 % des jeunes gens non scolarisés étaient ainsi exemptés en 1994).
Malgré les limites de l'argument relatif au brassage social, le fait qu'il ait été à plusieurs reprises évoqué dans le cadre du débat sur l'avenir du service national confirme très clairement que ce débat excédait largement des considérations d'ordre opérationnel.