EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 6 novembre 1996, sous la présidence de M. Jean Cluzel,
vice-président, puis de M. Christian Poncelet, président, et enfin, de M. François Trucy, sénateur, la commission a examiné les crédits de la recherche, sur le rapport de M. René Trégouët, rapporteur spécial.
M. René Trégouët, rapporteur spécial, a déclaré que les crédits de la recherche s'élèveraient en 1997 à 28,905 milliards de francs en dépenses ordinaires plus crédits de paiement, soit une progression de 0,16 %, après une progression sensible, l'année dernière (+4,91 %).
Les autorisations de programme, a-t-il ajouté, accusent, quant à elles, une baisse sensible par rapport à 1996 (-7,33 %) puisqu'elles passent 6,272 à 5,812 milliards de francs.
Le rapporteur spécial a ensuite précisé que les crédits affectés à l'administration centrale de la recherche étaient en baisse de 3 % en 1997 passant de 152,8 à 148,2 millions de francs.
Il a relevé que les actions d'incitation, de formation et de diffusion, en particulier les crédits destinés à la formation et les crédits du fonds de la recherche et de la technologie, verraient leur dotation passer de 2,942 à 2,904 milliards de francs, soit une légère diminution de 0,16 % tout en précisant que la baisse des dotations s'expliquait en partie par des modifications d'imputation budgétaire.
Il a ensuite indiqué que les dotations affectées aux établissements publics à caractère scientifique et technologique passeraient en dépenses ordinaires et en crédits de paiement de 21,099 à 21,294 milliards de francs, soit une progression de + 0,92 % en relevant que la priorité serait donnée au renouvellement des équipes de recherche et à leur potentiel de créativité. Le recrutement des chercheurs et des personnels techniques dans les établissements, a-t-il précisé, devrait augmenter de + 7,5 % (en particulier, par la création de 285 postes de chercheurs et de 298 postes d'ingénieurs-techniciens-administratifs au comité national de la recherche scientifique).
M. René Trégouët, rapporteur spécial, a encore signalé que les budgets des autres organismes (institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, commissariat a 1 énergie atomique, institut Pasteur de Paris...) progresseraient de 1,15 % en 1997.
Evoquant le budget civil de recherche et de développement pour 1997, le rapporteur spécial, a déclaré que le projet de loi de finances pour 1997 prévoyait, en dépenses ordinaires plus crédits de paiement, un montant de 52,306 milliards de francs contre 53,035 milliards de francs en 1996, soit une réduction de 1,4 %. Il a ajouté que l'enveloppe des autorisations de programme accusait, elle aussi, une baisse de -3,64% en passant de 22,665 à 21,841 milliards de francs.
Selon le Gouvernement, a-t-il souligné, les diminutions de crédits s'expliquent par le recentrage des recherches industrielles, l'effet de report des crédits de l'agence nationale pour la valorisation de la recherche, enfin, la diminution conjoncturelle du budget de l'aéronautique civile.
Après avoir indiqué que le comité interministériel de la recherche scientifique et technique du 3 octobre dernier avait défini un certain nombre de priorités, le rapporteur spécial a rappelé que l'on dénombrait 42.739 agents dans les établissements à caractère scientifique et technologique. Sur ce total, a-t-il précisé, le comité national de la recherche scientifique et les instituts qui lui sont liés représenteront 25.852 emplois dont 11.836 chercheurs et 14.466 ingénieurs-techniciens-administratifs.
M. René Trégouët, rapporteur spécial, a encore souligné que la politique statutaire en matière de recherche devrait désormais avoir pour objectif la relève progressive et équilibrée des générations. A cet égard, il a relevé que le Gouvernement s'était engagé à assurer un taux minimal de recrutement de 2,5 % dans les principaux établissements publics à caractère scientifique et technologique.
M. René Trégouët, rapporteur spécial, a ensuite estimé qu'il convenait d'apprécier les dotations budgétaires de la recherche avec réalisme, mais aussi avec vigilance. Il a rappelé que d'après les statistiques de l'OCDE, la France demeurait au troisième rang mondial parmi les grands pays industriels qui consacrent une partie significative de leur produit intérieur brut à la recherche.
Il a, par ailleurs, souligné la nécessité pour notre pays de ne pas relâcher son effort pour demeurer dans le peloton de tête.
En deuxième lieu, le rapporteur spécial a estimé que les orientations annoncées par le projet de budget allaient dans la bonne direction en relevant qu'elles rejoignaient très largement les préoccupations exprimées par la commission lors du dernier débat budgétaire, à savoir la mobilité des chercheurs publics vers l'enseignement supérieur, la redéfinition des grandes priorités de l'Etat en matière de recherche et l'assainissement financier et la restructuration des organismes publics de recherche.
M. René Trégouët, rapporteur spécial, a ensuite plaidé pour que le financement de l'innovation, en particulier en direction des petites et moyennes entreprises, ne soit plus seulement le fait d'institutions publiques comme l'agence nationale pour la valorisation de la recherche. A cet égard, il s'est félicité de la création des fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) tout en estimant que l'avantage fiscal consenti (réduction d'impôts de 25 % des sommes investies dans la limite d'un plafond fixé à 37.500 francs pour un célibataire et à 75.000 francs pour un couple) devrait être réévalué par exemple au niveau de celui qui est accordé à la création cinématographique dans le cadre des sociétés pour le financement de l'industrie cinématographique et audiovisuelle (SOFICA). Il a d'ailleurs relevé qu'en Grande-Bretagne le plafond de la réduction d'impôt dans un dispositif d'avantage fiscal comparable atteignait 400.000 francs.
M. René Trégouët, rapporteur spécial, a encore jugé indispensable de dresser un bilan de l'application du crédit d'impôt recherche créé par la loi du 28 décembre 1982.
Enfin, il s'est inquiété du retard que notre pays est en train de prendre dans le domaine de l'image, des réseaux et de l'informatique : il n'existe plus, a-t-il souligné, d'entreprises françaises "leaders" dans ces secteurs comme ce fut le cas jadis dans le domaine du nucléaire et de l'aérospatial. Le rapporteur spécial s'est interrogé sur le rôle qui pourrait être dévolu à un pôle "recherche" dans lequel seraient intégrés les organismes chargés de la recherche fondamentale et les écoles d'ingénieurs des télécommunications.
M. Alain Lambert, rapporteur général, a jugé souhaitable que les dispositifs fiscaux d'incitation à la recherche soient, dans toute la mesure du possible, améliorés.
M. Emmanuel Hamel a mis l'accent sur le paradoxe que pouvait représenter l'occupation par notre pays du troisième rang mondial pour la recherche et les importants retards soulignés par le rapporteur spécial.
Mme Maryse Bergé-Lavigne s'est inquiétée de la baisse des crédits alloués à la recherche aéronautique civile. Elle a estimé que notre pays devrait, au contraire, consacrer d'importants efforts de recherche dans le domaine du supersonique.
M. Jean-Philippe Lachenaud a exprimé son accord avec l'idée selon laquelle l'innovation en France devrait bénéficier d'avantages comparables à ceux qui sont consentis à la création cinématographique. Il s'est enfin interrogé, au même titre sur l'avenir du programme "Soleil".
En réponse, M. René Trégouët, rapporteur spécial, s'est notamment déclaré convaincu de la nécessité d'améliorer le nouveau dispositif des fonds communs de placement dans l'innovation de même que l'actuel régime de crédit d'impôt-recherche. Sur ce point, il a préconisé une mesure qui devrait permettre au bénéficiaire du crédit d'impôt de s'assurer de l'accord de l'administration fiscale. Il a ensuite estimé que le problème français en matière de recherche, plus qu'une question de moyens en valeur absolue ou relative, était aujourd'hui un problème de recentrage et de redéploiement comme dans bien d'autres secteurs.
La commission a ensuite décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits affectés à la recherche dans le budget de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.