Article 4 (art. 345 du code civil) - Allongement du délai d'adoption plénière d'un enfant âgé de plus de quinze ans
• L'article 345 du code civil prohibe l'adoption
plénière des enfants âgés de plus de quinze ans et
n'autorise l'adoption des enfants plus jeunes que six mois au moins
après leur accueil au foyer du ou des adoptants.
Il autorise toutefois l'adoption des mineurs de quinze ans accueillis avant cet âge par le ou les adoptants si ceux-ci ne remplissaient pas les conditions légales pour les adopter ou s'ils avaient procédé à une adoption simple avant cet âge.
• Dans un paragraphe I, la proposition de loi
n'apporte qu'une modification terminologique à ces dispositions par
coordination avec la nouvelle dénomination d'adoption complétive
qu'elle entend retenir pour l'adoption simple.
Le paragraphe II proroge de deux ans après la majorité la période pendant laquelle l'enfant accueilli par des personnes n'ayant pu l'adopter, faute de remplir les conditions légales pour ce faire, ou ayant fait l'objet d'une adoption simple, peut faire l'objet d'une adoption plénière.
Votre commission des Lois vous demande d' adopter un amendement tendant à supprimer cet article.
Il lui apparaît en effet que l'appellation d'adoption « complétive » ne servira en rien l'adoption aujourd'hui dite simple. Ce qualitatif, semble-t-il tiré de la grammaire, n'a pas sa place dans notre code civil. Il risque en outre de laisser croire qu'une filiation serait incomplète dès lors qu'il n'y aurait pas adoption complétive alors que l'adoption simple vient s'ajouter à la filiation originelle et non pas la compléter.
Quant à proroger jusqu'à 20 ans l'âge auquel il est possible de procéder à une adoption plénière si l'enfant a été accueilli depuis l'âge de 15 ans ou a fait l'objet d'une adoption simple, votre commission des Lois n'en voit pas la nécessité. Bien au contraire, il lui semble qu'après 15 ans, et a fortiori 18 ou 20 ans, l'adoption simple est beaucoup plus appropriée que l'adoption plénière.
Article 5 (art. 345-1 du code civil) - Atténuation des restrictions à l'adoption plénière de l'enfant du conjoint
• L'article 345-1 du code civil n'autorise
l'adoption plénière de l'enfant du conjoint que lorsque cet
enfant n'a de filiation légalement établie qu'à
l'égard de ce conjoint.
Cette restriction a été introduite par la loi du 8 janvier 1993 relative à la famille et aux droits de l'enfant pour éviter la rupture des liens avec la famille du parent décédé. La jurisprudence de la Cour de cassation avait toutefois répondu en partie à cette difficulté en admettant, de manière exceptionnelle, que les grands parents pouvaient se prévaloir d'un droit de visite et d'hébergement alors même que le lien juridique avec l'enfant avait disparu. En 1989, la Cour admettait en outre que les grands-parents pouvaient former une tierce opposition au jugement d'adoption dès lors que celle-ci avait pour objet détourné de les priver de tout lien avec l'enfant.
Face à certains abus, le législateur de 1993 a toutefois souhaité prévenir plus généralement de telles situations en privilégiant la solution de l'adoption simple par le conjoint, sauf dans le cas où l'enfant n'aurait de lien de filiation établi qu'à l'égard du conjoint ; en effet, dans ce cas, la question de la préservation des liens avec les grands-parents ne se posent pas.
ï La proposition de loi complète cette dernière exception en y ajoutant le cas dans lequel le parent décédé n'a laissé aucun ascendant au premier degré ou lorsque ceux-ci se sont manifestement désintéressés de l'enfant, cette dernière notion étant directement reprise de l'article 350 du code civil relatif à la déclaration d'abandon d'un enfant dont les parents se sont manifestement désintéressés.
ï La commission spéciale de l'Assemblée nationale, sur proposition de son rapporteur, avait souhaité aller au-delà en ouvrant au tribunal la faculté de prononcer, « en considération de situations exceptionnelles », l'adoption plénière même si l'enfant avait une double filiation légalement établie, sous réserve, si l'un des parents était décédé, qu'il n'ait pas laissé d'ascendants au premier degré ne s'étant pas manifestement désintéressés de l'enfant.
À la demande du Gouvernement, une rédaction plus simple a finalement été retenue. On observera toutefois que contrairement à ce que le Garde des Sceaux a indiqué, le texte voté par l'Assemblée nationale ne permet pas l'adoption plénière par le conjoint lorsque l'un des parents de l'enfant a été déchu de l'autorité parentale et que les grands-parents se sont manifestement désintéressés de l'enfant. En pareil cas en effet, le lien de filiation existe toujours et le texte interdit donc le prononcé d'une adoption plénière.
Votre commission des Lois observe que la notion de désintérêt manifeste appliquée grands-parents n'est pas d'un usage aisé et qu'eu égard au rôle des intéressés, il conviendrait d'éviter toute confusion avec le désintérêt manifeste des parents.
Pour ces motifs, elle vous propose de n'ouvrir au nouveau conjoint la faculté d'adopter plénière ment l'enfant du conjoint prédécédé qu'en cas d'absence d'ascendant dans cette branche de sa filiation.
Quant à la mention du caractère exceptionnel d'une telle mesure, elle préfère lui substituer celle des « justes motifs », déjà utilisés dans le code civil dès lors que le juge devra notamment prendre en compte l'existence d'oncles, de tantes et de cousins, éventuellement très proches de l'enfant et avec lesquels il serait important que celui-ci conserve des liens.
Pour tous ces motifs, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement tendant à limiter au seul cas d'un parent prédécédé sans ascendant la faculté pour le juge de prononcer, pour justes motifs, l'adoption plénière de l'enfant par le nouveau conjoint.