N° 270
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996
Annexe au procès-verbal de la séance du 13 mars 1996.
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, Portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.
Par M. Alain LAMBERT.
Sénateur ,
Rapporteur général.
TOME I
Fascicule 1
Exposé général - Examen des articles des titres I à IV.
Voir les numéros
Assemblée nationale (10ème législ.) : 2548. 2585 et TA 490.
Sénat : 259 ( 1995-1996).
Politique économique et sociale
(1) Cette commission est composée de : MM Christian Poncelet. président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, vice présidents ; Emmanuel Hamel, René Régnault, Alain Richard, François Trucy, sécrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré,. René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët
EXPOSÉ GÉNÉRAL
INTRODUCTION
Le présent projet de loi comporte deux volets bien distincts : un volet économique et fiscal inhabituel dans un texte de cette nature ; un volet "DDOEF" plus traditionnel.
1. Un projet d'une dimension économique incontestable
Il convient, dès l'abord, de souligner que ce DDOEF, par rapport aux Précédents, est un texte au contenu économique et fiscal particulièrement dense. Ses principales dispositions s'articulent autour de trois axes :
- l'application du plan "PME" du 27 nombre 1995,
- la mise en oeuvre des décisions relatives aux fonds d'épargne du 21 décembre 1995,
- le plan complémentaire de soutien à l'activité du 30 janvier 1996.
Ces trois points font l'objet d'analyses détaillées dans les commentaires d'articles ci-après. Quelques enseignements d'ordre général Peuvent toutefois être esquissés.
* L'opportunité de la relance
Plusieurs mesures de relance ont été prises, voici quelques mois, dans une conjoncture dégradée. A cette époque, la lecture des courbes d'évolution de la consommation des ménages, des prévisions d'investissement, ou des dépôts de demande de permis de construire pouvait légitimement inquiéter. Il y avait donc nécessité à agir. Aujourd'hui, cette dégradation de l'activité économique semble stoppée. Tel est le contexte dans lequel se présentent les dispositions contenues dans ce DDOEF.
* Les conséquences de l'urgence
Il apparaît difficile, voire impossible, de revenir sur ces mesures, même si l'opportunité de certaines d'entre elles apparaît peu évidente. Beaucoup ont fait l'objet d'annonces auprès de nos concitoyens, ce qui interdit toute marche arrière, qu'il s'agisse du "Livret Jeunes" ou de la déduction des intérêts d'emprunt. Ce constat est désagréable à l'endroit du Parlement, qui se trouve ainsi privé de l'exercice d'une partie de sa mission. Mais l'urgence commandait.
* La poursuite des objectifs majeurs du gouvernement
A l'évidence, la mise en oeuvre de ces mesures, limitée dans le temps, peut retarder et gêner la poursuite d'objectifs majeurs du gouvernement, au premier rang desquels figurent notamment la réforme fiscale, la recherche d'un équilibre entre les formes et les rémunérations de l'épargne, la stabilité et la lisibilité de la loi fiscale. Ce retard et cette gêne seront d'autant plus passagers que la croissance sera au rendez-vous du second semestre. Le bon cap, celui de la relance, doit donc être réaffirmé. Cette croissance permettra en outre de financer le coût budgétaire des plans de relance successifs.
* Les réflexions à conduire
La sphère de l'économie a profondément évolué en quelques années. Cette évidence se décline en plusieurs composantes : mondialisation des échanges, volatilité de la conjoncture, concurrences monétaires, ... Face à cette évolution, nos outils de réglage de la conjoncture ont peu évolué et apparaissent parfois faiblement opérants.
Ce sera peut être l'un des enseignements majeurs que ce DDOEF nous invite à méditer, dans la perspective de la monnaie unique et de l'harmonisation des politiques économiques nationales.
2. Un texte révélateur du fonctionnement des pouvoirs publics
L'examen d'un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier est un exercice instructif de science administrative. Au-delà des boutades habituelles sur le caractère composite d'un texte qualifié ici ou là de "fourre-tout", de "manteau d'Arlequin" ou "d'inventaire à la Prévert", cet exercice est, en effet, révélateur du fonctionnement des institutions publiques.
Ses enseignements portent notamment sur :
* L'imperfection des lois
Plusieurs articles du présent projet, comme trop souvent modifient des dispositions législatives parfois récemment adoptées faute d'avoir reçu un début d'application en raison de leur complexité ou de leur inadéquation.
* Les dysfonctionnements des administrations
D'autres articles tendent à réparer des erreurs ou omissions (absence de base juridique nécessaire à la perception d'une contribution, défaut d'outil informatique permettant de recouvrer une taxe, ...) qui nuisent à une bonne application de la loi. D'autres encore témoignent de luttes ou de querelles de bornage de compétences entre administrations.
* L'équilibre délicat entre la loi et le règlement
Divers articles, qu'il s'agisse des collectivités locales ou de l'agriculture, illustrent que l'administration est parfois conduite à compléter ou soumise à la tentation de modifier par voie réglementaire des dispositions votées par le Parlement. Force est cependant de reconnaître que certaines d'entre elles ne brillent pas toujours par leur "lisibilité".
* Le recours fréquent à la validation de dispositions censurées par le juge
D'assez nombreux articles du présent projet de loi constituent des mesures de validation d'actes administratifs censurés par le conseil d'Etat ou de dispositions diverses interprétées par la Cour de Cassation dans un sens jugé non conforme à l'intention du législateur ou du pouvoir exécutif. Ces nombreuses validations, expresses ou implicites, rétrospectives ou Préventives, appellent une réflexion d'ensemble dès lors qu'elles ne semblent plus exceptionnelles.
Cette liste d'enseignements n'est pas exhaustive. Elle confirme toutefois la réalité de l'inflation législative et réglementaire. Elle justifie la tentative de réforme de l'État. Elle appelle le Parlement à une plus grande vigilance.