EXAMEN DES ARTICLES
Article premier - Chapitre premier bis du titre IV du livre IV du code du domaine de l'État.
Cet article tend à insérer au titre IV du livre IV du code du domaine de l'État (partie législative) un chapitre premier bis intitulé :
Dispositions spéciales aux départements de la Guadeloupe et de la Martinique.
Ce chapitre comprendra six articles (L.89-1 à L.89-6) regroupant les dispositions relatives à la délimitation des espaces urbains et des secteurs occupés par une urbanisation diffuse, à la cession des terrains, à la remise des espaces naturels au conservatoire du littoral.
Article L.89-1 du code du domaine de l'État
Délimitation de l'étendue des espaces urbains et des secteurs occupés par une urbanisation diffuse
Cet article propose de confier au préfet la mission de « constater » l'existence et de fixer la délimitation :
- des espaces urbains ;
- des secteurs occupés par une urbanisation diffuse ;
- des espaces naturels ;
dans la zone « comprise entre la limite du rivage de la mer et la limite supérieure de la zone dite des cinquante pas géométriques », définie à l'article L 87 du code du domaine de l'État.
Cet article répond au besoin de clarifier l'affectation des terrains et d'élaborer une cartographie faisant l'inventaire des terrains, besoin exprimé dans le rapport Rosier.
On notera que le rapport Rosier recommandait cette nécessaire clarification que votre commission approuve. Toutefois, le projet de loi ne précise pas selon quelles modalités le préfet opérera le constat en vue de la délimitation des zones.
Cette opération lourde et délicate ne doit prêter à aucune confusion pour éviter les contentieux ultérieurs.
Aussi votre commission souhaite-t-elle que la délimitation soit effectuée par arrêté préfectoral, afin d'éviter toute ambiguïté. Tel est l'objet de l'amendement qu'elle vous présente.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.
Article L.89-2 du code du domaine de l'État
Cession de terrains à titre gratuit
Cet article tend à autoriser l'État à céder des terrains appartenant à son domaine maritime, situés dans la zone « comprise entre la limite du rivage de la mer et la limite supérieure de la zone dite des cinquante pas géométriques », précitée.
Cette cession serait consentie gratuitement aux communes et aux organismes ayant pour objet la réalisation d'opérations d'habitat social.
Cependant cette cession ne pourrait intervenir que dans des conditions strictes :
- elle supposerait le déclassement préalable de ces terrains ;
- elle ne pourrait intervenir que dans des « espaces urbains » ou dans des « secteurs occupés par une urbanisation diffuse » ;
- elle devrait avoir pour but la réalisation d'opérations d'aménagement à des fins d'utilité publique par la commune, ou la réalisation d'opérations d'habitat social « par des organismes compétents ».
En outre, le présent article introduit un correctif à la gratuité.
Lorsque l'agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques, dont la création est proposée par l'article 3 du projet de loi, aura réalisé des aménagements sur ces terrains, la cession pourra s'effectuer au prix « correspondant au coût des aménagements réalisés et financés par l'agence ».
Enfin, l'alinéa 5 de cet article dispose que si, dans un délai de dix ans à compter de la date de la cession, les terrains n'avaient pas été utilisés conformément à l'objet qui a justifié la cession, les terrains cédés reviendraient dans le patrimoine de l'État, celui-ci étant tenu de rembourser le coût des aménagements réalisés.
Votre commission approuve l'économie générale de cet article, qu'elle vous demande d'adopter sans modification.
Article L.89-3 du code du domaine de l'État
Cession à titre onéreux de terrains affectés à un usage professionnel
Cet article tend à stabiliser la situation des occupants à titre professionnel des « espaces urbains » et des « secteurs occupés par une urbanisation diffuse » de la zone des cinquante pas géométriques. Il prévoit qu'après déclassement, les terrains actuellement occupés sans titre pourront être vendus aux personnes y ayant édifié ou fait édifier avant le 1er janvier 1995 des constructions à usage professionnel.
Le prix de vente des terrains sera calculé d'après les règles applicables à l'aliénation des immeubles du domaine privé, comme en dispose l'article R. 165 du code du domaine de l'État.
L'estimation des biens cédés sera fonction de leur valeur vénale au jour du transfert de propriété. Or, les délais d'instruction des demandes de cession peuvent atteindre plusieurs années, si bien que le prix du bien au jour du transfert de propriété pourra s'avérer beaucoup plus élevé que celui résultant d'une évaluation au jour du dépôt de la demande.
Votre commission estime nécessaire d'éviter que les acquéreurs ne supportent l'incidence financière d'éventuelles lenteurs administratives. Aussi, souhaite-t-elle que l'évaluation soit effectuée au jour du dépôt de la demande.
Elle vous présente un amendement en ce sens et vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.
Article L.89-4 du code du domaine de l'État
Cession à titre onéreux de terrains affectés à un usage d'habitation
Cet article a pour objet de permettre, après déclassement, l'acquisition des terrains situés dans les « espaces urbains » et des « secteurs occupés par une urbanisation diffuse » par les personnes qui y ont fait édifier des constructions à usage d'habitation, ainsi que par les personnes qui occupent des constructions qu'ils n'ont pas construites ou fait construire.
Les personnes ayant fait édifier des constructions à usage d'habitation avant le 1er janvier 1995, qui les occupent à titre principal ou les donnent à bail en vue d'une occupation à titre principal, ou leurs ayants droits, pourront les acheter.
L'article L. 89-4 propose également que les personnes qui occupent des constructions qu'elles n'ont ni construites ni fait construire puissent acquérir les terrains sur lesquels, ces constructions sont édifiées « à défaut d'identification des personnes qui y ont construits ou fait construire des habitations ».
Le prix de vente des terrains est calculé d'après les règles applicables à l'aliénation des immeubles du domaine privé, c'est-à-dire au jour du transfert de propriété, comme en dispose l'article R. 165 du code du domaine de l'État.
Afin d'éviter que l'acquéreur ne supporte la charge financière d'éventuelles lenteurs administratives, il est nécessaire de fixer la date de l'évaluation du bien au jour du dépôt de la demande, tout comme pour les cessions de terrains affectés à usage professionnel visées à l'article précédent.
Votre commission vous présente un amendement en ce sens et vous demande d 'adopter cet article ainsi modifié.
Article L.89-5 du code du domaine de l'État
Gestion des espaces naturels
Cet article propose que les « espaces naturels » délimités par le préfet soient remis au conservatoire de l'espace littoral. Ce dernier les gérera, comme le reste de son patrimoine, dans les conditions prévues aux articles L.243-1 à L.243-10 du code rural.
Si le conservatoire du littoral refusait de gérer ces espaces, ceux-ci pourraient être « confiés en gestion » à une collectivité territoriale, en vertu d'une convention de gestion dont le régime résulte de l'article 51-1 du code du domaine de l'État, après accord du conservatoire du littoral. L'article 51-1 précité permet notamment que la convention « [...] habilit[e] le gestionnaire à accorder des autorisations d'occupation et à consentir des locations ».
Sous réserve d'un amendement rédactionnel, votre commission vous demande d'adopter cet article.
Article additionnel après l'article L. 89-5 du code du domaine de l'État
Exercice du droit de préemption en cas de revente du bien cédé
Votre commission s'est préoccupée d'une part des risques de spéculation que peuvent engendrer les cessions effectuées sur la zone des cinquante pas, après déclassement, et d'autre part de la pression foncière qui pourrait résulter de la réforme.
L'accroissement subit du prix des terrains pourrait faire peser sur leurs occupants une pression telle qu'il leur serait difficile de résister à des offres d'achat qui bien qu'alléchantes, auraient un « effet d'éviction », quelque soit l'attachement des occupants pour cette terre
Afin de prévenir d'éventuelles dérives, il vous est proposé d'instituer un droit de préemption en faveur de l'État, au prix où s'est effectuée la cession après déclassement, majoré du coût des aménagements réalisés par le propriétaire et de l'indice du coût de la construction.
Ce droit de préemption serait ouvert durant un délai de dix ans après l'achat initial.
Toutefois, afin de ne pas faire peser une trop lourde incertitude sur la situation des vendeurs, l'État n'aurait la possibilité d'exercer son droit de préemption que dans un délai de six mois après la revente.
Tel est l'objet de cet article additionnel que votre commission vous propose d'adopter.
Article L.89-6 du code du domaine de l'État
Fixation des conditions d'application du chapitre par décret en Conseil d'État
Cet article précise qu'un décret en Conseil d'État fixera les conditions d'application du chapitre premier bis du code du domaine de l'État.
Ce décret devra notamment déterminer les modalités pratiques d'application de l'article premier telles que les modalités de déclassement, de cession, de gestion des espaces naturels. Il aura également à fixer les modalités d'octroi de l'aide, à établir un barème en fonction des ressources de l'acquéreur et de l'ancienneté de l'occupation, ainsi que les procédures de dépôt des demandes et d'instructions des dossiers.
Il ne faudrait pas que l'absence de publication dans un délai raisonnable d'une mesure réglementaire d'application, fasse échec à la réforme, à l'image de ce qui s'est passé après la parution du décret de 1955.
Sous réserve de cette observation, votre commission vous demande d'adopter le présent article, sans modification.
Sous réserve de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous demande d'adopter l'ensemble de l'article premier ainsi complété.