Rapport n° 343 (1990-1991) de M. Etienne DAILLY , fait au nom de la commission des lois, déposé le 29 mai 1991
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I - Le régime juridique des commissions
spéciales
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II - La proposition de résolution du groupe
socialiste
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III - Le précédent de
l'Assemblée nationale
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IV - La proposition de résolution de votre
commission des Lois
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Proposition de résolution tendant à
modifier l'article 10 du règlement du Sénat
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Annexe - Incidence de l'accroissement de
l'effectif des commissions spéciales sur la représentation en
leur sein de chaque groupe politique
N° 343
SÉNAT
SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1990-1991 |
Annexe au procès-verbal de la séance du 29 mai 1991. |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de résolution de MM. Michel DREYFUS-SCHMIDT, Claude ESTIER et des membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés administrativement tendant à modifier l'article 10 du Règlement du Sénat.
Par M. Étienne DAILLY,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; Louis Virapoullé, François Giacobbi, Charles de Cuttoli, Michel Darras, vice-présidents ; Charles Lederman, Germain Authié, René-Georges Laurin, Marcel Rudloff, secrétaires ; Guy Allouche, Alphonse Arzel, Gilbert Baumet, Pierre Biarnès, Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Raymond Bouvier, Camille Cabana, Jean Chamant, Raymond Courrière, Étienne Dailly, André Daugnac, Luc Dejoie, Michel Dreyfus-Schmidt, Mine Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM. Jean-Marie Girault, Paul Graziani, Hubert Haenel, Daniel Hoeffel, Chartes Jolibois, Lucien Lanier, Bernard Laurent, Paul Masson, Daniel Millaud, Lucien Neuwirth, Charles Ornano, Georges Othily, Robert Pagès, Claude Pradille, Albert Ramassamy, Michel Rufin, Jacques Sourdille, Jacques Thyraud, Jean-Pierre Tizon, Georges Treille.
Voir le numéro :
Sénat : 290 (1990-1991).
Parlement
Mesdames, Messieurs,
Votre Commission a examiné la proposition de résolution (1990-1991 n° 290) présentée par MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Claude Estier et les membres du Groupe socialiste, apparentés et rattachés administrativement, tendant à modifier l'article 10 du Règlement du Sénat.
La modification proposée, qui porte sur le troisième alinéa dudit article 10 a pour objet de majorer de vingt-quatre à quarante-trois le nombre maximum des membres des commissions spéciales prévues à l'article 43 de la Constitution.
I - Le régime juridique des commissions spéciales
La Constitution de la Vème République, en rupture avec la pratique antérieure des Assemblées Parlementaires, a dans chaque Chambre limité à six le nombre des Commissions Permanentes et a posé le principe de la désignation d'une commission spéciale pour l'examen de tous les projets et propositions de loi.
Ce principe, défini à l'article 43 alinéa 1 de la Constitution, n'est toutefois pas applicable ipso jure puisque sa mise en oeuvre demeure subordonnée au dépôt d'une « demande du Gouvernement ou de l'assemblée » saisie du texte en cause. A défaut d'une telle demande, et conformément à l'article 43 alinéa 2 de la Constitution, les projets et les propositions de loi sont renvoyés à la Commission Permanente compétente.
Ce dispositif, - sans doute parce que trop étranger aux habitudes de travail du Parlement -, n'est pas parvenu à s'imposer, au point que les tout premiers textes législatifs examinés à l'Assemblée Nationale comme au Sénat après la mise en place des institutions de la Vème République furent, comme par le passé, renvoyés aux nouvelles Commissions Permanentes sans d'ailleurs que le Gouvernement de l'époque cherche à infléchir cette pratique. Cela mérite d'être rappelé, quand ce ne serait que pour faire litière de la thèse, souvent répandue, selon laquelle le renvoi quasi-systématique des projets ou des propositions de loi aux Commissions Permanentes ne serait pas conforme à la Constitution.
La nécessité d'une demande particulière pour qu'il soit procédé à la désignation d'une commission spéciale, a, au contraire, conforté la compétence de droit commun des Commissions Permanentes : de fait, la constitution de commissions spéciales est demeurée exceptionnelle depuis 1958 aussi bien à l'Assemblée Nationale qu'au Sénat.
L'article 16 du Règlement de notre Haute Assemblée définit les différents cas de figure dans lesquels des commissions spéciales peuvent ou doivent être créées, soit de droit à la demande du Gouvernement (art. 16 § 1) ou en cas de conflit de compétences entre des Commissions Permanentes (article 16 § 3), soit par décision du Sénat sur proposition de son Président (article 16 § 2) ou à la suite d'une demande formulée par le Président d'une Commission Permanente ou d'un Groupe politique (article 16 § 3).
Les commissions spéciales du Sénat, conformément à l'article 10 de notre Règlement sont constituées suivant la règle de proportionnalité et comprennent un nombre maximum de vingt-quatre commissaires.
II - La proposition de résolution du groupe socialiste
Ainsi que l'observent les auteurs de la proposition de résolution soumise à votre examen, un effectif maximum de vingt-quatre membres est, trop souvent, trop faible pour assurer, dans la commission spéciale que l'on constitue, la présence de tous les Sénateurs particulièrement compétents ou spécialement concernés par le projet ou la proposition de loi qu'elle est chargée d'examiner et de rapporter devant le Sénat. C'est pourquoi ils vous proposent de porter cet effectif de vingt-quatre membres à quarante-trois.
Il faut d'abord reconnaître que le respect de la règle de proportionnalité, appliquée à un nombre de sièges aussi réduit, accroît en effet cette difficulté, notamment dans la mesure où l'intérêt particulier que certains d'entre nous peuvent manifester envers un texte donné, - en raison de leurs compétences, ou par exemple, de l'incidence que ce texte peut avoir dans un quelconque Département -, ne peut être pris en compte pour la répartition des sièges entres les différents Groupes, laquelle ne relève que d'un calcul purement arithmétique.
Il faut ensuite rappeler que cet effectif maximum de vingt-quatre commissaires est demeuré strictement inchangé depuis l'adoption du Règlement du Sénat et qu'un effectif aussi réduit pouvait paraître à l'époque justifié, puisque un recours systématique à la procédure des commissions spéciales, - tel qu'on était fondé à l'envisager du fait de l'article 43 de la nouvelle Constitution -, aurait dû logiquement en multiplier le nombre et, dès lors, contraindre à faire fonctionner simultanément plusieurs de ces commissions spéciales.
La répartition proportionnelle, entre tous les Groupes du Sénat, d'un nombre maximum de vingt-quatre commissaires introduit ainsi, nécessairement, une trop importante et inutile distorsion entre la composition finale d'une commission spéciale et les Sénateurs qui, à titre ou à un autre, auraient eu, plus que d'autres, vocation à en être membres.
III - Le précédent de l'Assemblée nationale
Votre commission des Lois a d'abord observé que, confrontée aux mêmes difficultés, l'Assemblée nationale a, voici plus de deux ans déjà, modifié son Règlement (article 33) de façon à porter de 31 à 57 l'effectif des commission spéciales constituées en son sein.
Le seuil arithmétique permettant de résoudre les problèmes ci-dessus évoqués s'établissait en l'espèce à 57, chiffre représentant le dixième de l'effectif total de l'Assemblée nationale et inférieur à l'effectif de la Commission permanente de l'Assemblée la moins nombreuse qui comporte 73 membres.
Les Députés ont par ailleurs fait en sorte que les membres d'une seule Commission Permanente ne puissent à eux seuls détenir la majorité des sièges au sein d'une Commission Spéciale. À cette fin ils ont fixé à 28 le nombre maximum des commissaires spéciaux issus d'une même Commission Permanente.
IV - La proposition de résolution de votre commission des Lois
La formule retenue dans la proposition de résolution qui vous est soumise diffère sur deux points de celle adoptée, dès 1989, par l'Assemblée nationale.
D'une part, elle fixe l'effectif des commissions spéciales à 43, donc à un nombre très supérieur au dixième de l'effectif total du Sénat et à un nombre identique à celui de la Commission Permanente du Sénat la moins nombreuse, savoir la commission des Finances, dont l'effectif s'élève à 43 membres depuis le dernier renouvellement triennal.
D'autre part, cette proposition de résolution ne comporte pas de limite quant à la proportion des membres d'une même Commission Permanente au sein des commissions spéciales constituées au Sénat.
Tout en se ralliant au principe de l'accroissement de l'effectif des commissions spéciales, votre commission des Lois estime que le nombre de 43 sièges, proposé pour celles-ci, s'avère trop élevé.
Il convient en effet de maintenir, comme à l'Assemblée nationale, un certain écart d'effectif entre les commissions spéciales et les Commissions Permanentes, puisque par définition l'objet des premières est strictement limité, alors que la compétence étendue des secondes les amène à examiner simultanément un grand nombre de textes pouvant relever de domaines très variés.
D'autre part, - et à l'instar de l'Assemblée nationale -, il paraîtrait souhaitable de fixer l'effectif des commissions spéciales à un seuil aussi proche que possible du dixième de l'effectif total du Sénat, qui est de 321 sièges, compte tenu du siège désormais définitivement vacant de l'ancien Territoire des Affars et des Issas, devenu indépendant en 1977.
Il faut enfin que chaque Groupe politique puisse actuellement bénéficier de cette réforme, quand ce ne serait qu'à raison d'au moins un siège supplémentaire. Le tableau annexé au présent rapport, établi sur la base de la composition des Groupes à ce jour y compris la Réunion Administrative des Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, montre que pour qu'il en soit ainsi le seuil s'élève à 37 sièges.
Pour ces trois motifs c'est donc à 37 membres que votre Commission vous propose de fixer l'effectif réglementaire des commissions spéciales.
*
* *
Au bénéfice de ces observations, la commission des Lois propose donc à la Haute Assemblée d'adopter la proposition de résolution suivante :
Proposition de résolution tendant à modifier l'article 10 du règlement du Sénat
Article unique
Le troisième alinéa (3) de l'article 10 du Règlement du Sénat est ainsi rédigé :
« Une commission spéciale comprend trente-sept membres. »
Annexe - Incidence de l'accroissement de l'effectif des commissions spéciales sur la représentation en leur sein de chaque groupe politique
(les chiffres entre parenthèses retracent
l'augmentation pour chaque Groupe politique
par rapport à la situation actuelle)
GROUPE
|
Nombre
24 sièges) |
Effectif de 32 sièges
|
Effectif de
|
Effectif de
|
Effectif de
|
Communiste (16 membres) |
1 |
2 ( + l) |
2(+l) |
2( + l) |
2( + l) |
U.C. (68 membres) |
5 |
7 ( + 2) |
8( + 3) |
8 ( + 3) |
9 ( + 4) |
U.R.E.I. (51 membres) |
4 |
5 ( + l) |
6( + 2) |
6 ( + 2) |
7 ( + 3) |
R.D.E. (23 membres) |
2 |
2 (néant) |
2 (néant) |
3 ( + l) |
3 (+l) |
R.P.R. (91 membres) |
7 |
9 ( + 2) |
10 ( + 3) |
10 ( + 3) |
12 ( + 5) |
Socialiste (66 membres) |
5 |
6 ( + l) |
7( + 2) |
7 ( + 2) |
9 ( + 4) |
Non inscrits (6 membres) |
- |
1 ( +1) |
1 ( +1) |
1 ( +1) |
1 ( +1) |
321 sièges pourvus |
24 |
32 ( + 8) |
36 (+12) |
37 (+13) |
43 ( + 19) |
* Cet effectif de 32 sièges est le plus proche du dixième de l'effectif total du Sénat.
** Cet effectif de 37 sièges est le premier qui assure à tous les Groupes au moins un siège supplémentaire .
*** Cet effectif est celui de la proposition de résolution du Groupe socialiste.