B. UN ÉQUILIBRE À TROUVER ENTRE FLOTTE PATRIMONIALE ET FLOTTE DE LOCATION
1. Un dispositif « feux de forêt » renforcé par la location de plusieurs aéronefs depuis 2022
En complément de sa flotte aérienne de lutte contre les feux de forêts, la DGSCGC s'est progressivement dotée de moyens bombardiers d'eau auprès d'opérateurs privés. Historiquement, les locations portaient uniquement sur les hélicoptères bombardiers d'eau (HBE) d'une capacité de 3 000 litres, puis à compter de 2022 - véritable tournant dans le renforcement de la flotte aérienne en réaction notamment à des incendies d'une rare intensité sur l'ensemble du territoire -, la DGSCGC s'est tournée vers des moyens héliportés plus légers (1 000 litres) ainsi que vers des avions bombardiers d'eau (ABE).
Ainsi, conformément aux engagements du Président de la République du 28 octobre 2022, la DGSCGC s'est dotée de 15 appareils supplémentaires (10 HBE et 5 avions) pour la campagne 2023, soit 5 de plus par rapport à 2022.
2. Une pérennisation d'un mix entre flotte patrimoniale et flotte de location trouvant désormais une traduction dans la programmation budgétaire 2025
Ce dispositif a été maintenu pour 2024, avec le marché de location des HBE (jusqu'à 10 appareils mobilisables) complété par la location de 6 aéronefs ABE de type Air Tractor dans le cadre d'un marché pluriannuel. Prépositionnés en zone sud-ouest, ces avions sont disponibles de juillet à septembre et peuvent intervenir dans les zones sud-ouest, ouest et sud en renfort des moyens nationaux et territoriaux
Modalités d'engagement des HBE loués par la DGSCGC
Source : réponses de la DGSCGC au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial
Sur le volet financier, le marché des hélicoptères bombardiers d'eau est fondé d'une part sur des coûts d'immobilisation et d'autre part sur le paiement de la consommation effective des heures de vol, sans forfaitisation de ces dernières, permettant ainsi une dépense au plus juste du besoin réel.
Le coût total des HBE loués s'élevait à 14,4 millions d'euros HT soit 17,2 millions d'euros TTC pour la première année d'exécution du marché en 2023, contre 10,7 millions d'euros TTC pour 2022 (marché et réquisitions incluses). Cette hausse de presque 7 millions d'euros s'expliquait logiquement à la fois par l'immobilisation d'un plus grand nombre d'appareils et par un emploi sur une période plus étendue que l'année précédente. Au 31 juillet 2024, année alors caractérisée par une faible intensité des feux, le coût des HBE représentait un total de 7,5 millions d'euros TTC.
Les estimations des coûts pour 2025 sont de l'ordre de 18,4 millions d'euros TTC, comprenant à la fois la révision des prix du marché et la possible activation des moyens de renfort en dehors de la saison estivale, du 1er octobre de l'année n au 31 mai de l'année n+ 1, comme l'autorise désormais le marché.
Contrairement à l'année dernière, ces estimations des coûts des contrats de location des HBE et des avions légers de type Air Tractor trouvent une traduction budgétaire claire et réaliste dans le PLF 2025 avec 30 millions d'euros d'AE et de CP prévus pour la location d'aéronefs.
3. Articulation entre flotte patrimoniale et flotte de location : une réflexion stratégique et budgétaire de long terme à mener dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile
Les travaux qui seront menés dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile doivent contribuer à la réflexion sur la définition des moyens aériens nécessaires en fonction de l'évolution des risques et l'adaptation de la doctrine qui sera décidée en conséquence.
La réflexion concernant l'intégration dans la flotte de la sécurité civile d'hélicoptères lourds multi-missions (lutte contre les feux de forêt et transport logistique) pour répondre aux catastrophes naturelles pose notamment la question du choix entre des appareils en pleine propriété de l'État, en propriété partagée ou en location.
Le rapporteur spécial a déjà eu l'occasion de souligner les limites du recours à la location d'aéronefs pour renforcer le dispositif, en raison notamment de son coût budgétaire important, et d'éventuelles difficultés d'intégration de ces appareils loués dans le dispositif aérien6(*).
Il convient cependant de prendre en compte les délais importants de fabrication de ces appareils (3 ans) auxquels viennent s'ajouter les délais de contractualisation d'un marché spécifique (18 mois minimum).
En outre, il s'agit d'appareils lourds et les coûts associés à leur acquisition en propre dépassent significativement le seul prix d'achat de l'hélicoptère : contrat pluriannuel de MCO, adaptation des infrastructures (hangars...), création d'ETP (personnel navigants, techniciens...). Ainsi, le coût d'acquisition d'un seul appareil (estimé à d'environ 46 millions d'euros pour un H225 neuf en configuration HBE) associé aux coûts d'exploitation dépasse très largement le coût des locations saisonnières (environ 15 millions d'euros par an comme expliqués précédemment) qui permettent de prépositionner jusqu'à 6 hélicoptères lourds simultanément sur le territoire durant plusieurs mois.
Une demande de subvention a été déposée par la DGSCGC auprès de la Commission Européenne le 15 juin 2023 pour l'acquisition d'un hélicoptère lourd. La demande de la DGSCGC incluait l'infrastructure immobilière, la formation, et les personnels associés pour un montant de 77 millions d'euros. Le retour de cette demande, en novembre 2023, montrait plusieurs inconvénients. Tout d'abord, une part importante des coûts ne pouvait être prise en charge par l'Union européenne, dont la TVA et les infrastructures immobilières. D'autre part, cette acquisition était subordonnée à l'obligation d'un positionnement opérationnel de l'appareil dans le quart nord-est de la France, qui ne correspond pas à la zone de risque critique ni donc à la localisation première du besoin capacitaire au niveau national. Dans ces conditions, la DGSCGC a logiquement été conduite à ne pas donner suite à ce projet.
* 6 Sur ce point, voir les développements du rapport d'information n° 838 (2022-2023), déposé le 5 juillet 2023.