TROISIÈME PARTIE
LES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances pour 2024 au titre du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » s'élèvent à 134,09 milliards d'euros en AE comme en CP soit une hausse de 0,9 % par rapport à la LFI 2024.

Le compte de concours financiers retrace essentiellement le produit des impositions locales, versé par douzième aux collectivités territoriales et, plus à la marge, le versement puis le remboursement d'avances de l'État aux collectivités. Il est composé de trois sections qui correspondent chacune à un programme :

- une section sur laquelle sont retracés le versement puis le remboursement des avances de trésorerie aux collectivités, établissements publics et à la Nouvelle-Calédonie (programme 832) ;

- une section sur laquelle sont retracés le versement puis le remboursement des avances mensuelles sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes (programme 833).

- une troisième section, relative aux avances remboursables de droits de mutation à titre onéreux destinées à soutenir les départements et d'autres collectivités affectées par les conséquences économiques de l'épidémie de covid-19 (programme 834), ne fait l'objet d'aucune AE ni d'aucun CP : seuls des remboursements d'avances par certaines collectivités (cf. infra) y sont encore rattachés.

Le programme 834, ni autorisations d'engagement, ni crédits de paiement

Le programme temporaire visait à soutenir les collectivités confrontées à une perte de recettes des DMTO en raison du ralentissement de l'activité en 2020 lié aux mesures d'endiguement sanitaire mises en oeuvre afin de lutter contre l'épidémie de Covid- 19.

Il avait alors été doté de 2 milliards d'euros en AE et CP en 2020 et de 700 millions d'euros en 2021 à partir d'une estimation de baisse des DMTO de 25 %. En raison du recul finalement très limité des recettes de DMTO en 2020, la majorité des départements, inéligibles in fine au dispositif, ont remboursé spontanément leurs avances en 2020 et 2021.

Au 1er janvier 2022, seules quatre collectivités ont réellement été éligibles au dispositif (la collectivité européenne d'Alsace, la ville de Paris, les départements de l'Essonne et de Guadeloupe) pour un total d'avances de 54 934 712 euros. En application du 2° de l'article 25 précité, ces avances doivent faire l'objet d'un remboursement par chaque collectivité territoriale bénéficiaire, sur une période de trois ans, à compter de l'année suivant celle au cours de laquelle le montant de ses recettes fiscales a été égal ou supérieur à celui constaté en 2019.

Au 31 juillet 2024, les remboursements restant à effectuer s'élevaient à 24,58 millions d'euros et ne concernaient plus que 3 collectivités43(*).

Les seuls mouvements enregistrés sur le programme 834 sont les recettes des remboursements effectués par les collectivités.

Source : Commission des finances du Sénat

Les crédits du Compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales » sont, comme lors des exercices précédents, très largement portés par le programme 833, ainsi que le récapitule le tableau ci-après.

Évolution des crédits du CCF « Avances aux collectivités territoriales »
entre la LFI 2024 et le PLF 2025

(en millions d'euros)

Programme

LFI 24

PLF 25

24/25

AE

CP

AE

CP

AE

CP

832

Avances aux collectivités et établissements publics, à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution

6,0

6,0

6,0

6,0

-

-

833

Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

132 894,4

132 894,4

134 087,6

134 087,6

+ 0,9 %

+ 0,9 %

Total du compte de concours financier

132 900,4

132 900,4

134 093,6

134 093,6

+ 0,9 %

+ 0,9 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Au total, avec des recettes prévisionnelles pour 2025 de 133,72 milliards d'euros pour des dépenses estimées à 134,09 milliards d'euros, le déficit pour 2025 de ce compte d'avances s'établirait à 369 millions d'euros. La répartition prévisionnelle de ces recettes s'établit comme suit dans le présent tableau :

Évolution des recettes du compte d'avances entre 2024 et 2025

(en millions d'euros)

Ligne de recettes

LFI 2024

PLF 2025

24/25

Recettes diverses (TASCOM, TICPE sur RSA, frais de gestion)

62 248,3

62 543,0

294,6

TH et taxes annexes, TVA transférée

3 755,2

3 797,0

41,8

TFPB, TFNB et taxes annexes

53 200,8

55 355,1

2 154,4

CVAE

333,8

341,0

7,2

CFE et taxes annexes, IFER

10 945,3

11 688,4

743,1

Total compte d'avances

130 485,4

133 724,5

3 239,1

Note : TASCOM : taxe sur les surfaces commerciales - TICPE : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques - TH : taxe d'habitation - CVAE : cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises - TFPB : taxe foncière sur les propriétés bâties - TFPNB : taxe foncière sur les propriétés non bâties - CFE : cotisation foncière des entreprises - IFER : imposition forfaitaire des entreprises de réseaux.

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

I. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS ALLOUÉS AU PROGRAMME 833 : UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS SI MODESTE QU'ELLE TRADUIT EN RÉALITÉ UN RECUL DE LA MARGE DE MANoeUVRE DES COLLECTIVITÉS

Le programme 833, de loin le plus important en volume du compte de concours financiers (99,99 % du total en AE comme en CP pour 2025) se compose de 4 actions ayant toutes pour objectif le versement, par douzième, des avances des produits issus de la fiscalité locale directe, des compensations ou des frais de gestion de certains impôts locaux.

En PLF 2025, les crédits du programme enregistrent une hausse de 0,9 % par rapport à la LFI 2024, soit 1,193 milliard d'euros supplémentaires et s'établissent à 134,1 milliards d'euros. Cette augmentation est considérablement inférieure à celle que le programme avait connu l'an dernier, lorsqu'il avait bénéficié de 7,6 milliards d'euros supplémentaires sur une année (+ 6,1 % entre la LFI 2023 et le PLF 2024). Comme lors des exercices précédents, l'évolution du programme dépend principalement de l'action 01 qui porte 94,5 % des moyens du programme en AE comme en CP, et bien plus subsidiairement des trois autres actions, même si elles connaissent des rythmes d'évolution disparates pour 2025 (cf. infra).

Évolution des crédits (AE comme CP) du programme 833
entre la LFI 2024 et le PLF 2025

(en millions d'euros)

Action

Libellé

LFI 24

PLF 25

24/25

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01

Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

125 627,1

125 627,1

126 692,4

126 692,4

+ 0,8 %

+ 0,8 %

02

Avances aux départements sur le produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

5 083,4

5 083,4

5 083,0

5 083,0

- 0,0 %

- 0,0 %

03

Avances aux départements sur les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties

1 080,5

1 080,5

1 198,5

1 198,5

+ 10,9 %

+ 10,9 %

04

Avances aux régions sur les frais de gestion de la contribution foncière des entreprises (CFE) et de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et sur le produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

1 103,3

1 103,3

1 113,7

1 113,7

+ 0,9 %

+ 0,9 %

Total du programme 833

132 894,4

132 894,4

134 087,6

134 087,6

+ 0,9 %

+ 0,9 %

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2025

A. UNE LÉGÈRE AUGMENTATION DES AVANCES SUR LE MONTANT DES IMPOSITIONS LOCALES QUI NE TRADUIT PAS UN DYNAMISME PARTICULIER DES RESSOURCES FISCALES DES COLLECTIVITÉS

1. Le périmètre de l'action 1 en constante évolution du fait de différentes réformes de la fiscalité locale

L'action 1 du programme 833 permet de garantir aux collectivités territoriales le versement, par l'État, des avances sur le montant des impositions directes locales leur revenant. Il s'agit, pour les plus importantes, de :

- la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ;

- la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) ;

- la taxe d'habitation (TH) : depuis 2021, seule la taxe d'habitation sur les résidences secondaires transite par le compte d'avance consécutivement à la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales ;

- la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ;

- la cotisation foncière des entreprises (CFE) ;

- l'imposition forfaitaire des entreprises de réseau (IFER) ;

- la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM).

Par ailleurs, depuis 2021, ces avances incluent également l'abondement de l'État du mécanisme correcteur44(*) ainsi que les fractions de TVA compensatrices des pertes :

- de taxe d'habitation sur les résidences principale pour les EPCI à fiscalité propre et la Ville de Paris découlant de la suppression de cette dernière ;

- de taxe foncière sur les propriétés bâties des établissements industriels découlant de la réforme des impôts de production pour les départements ;

- de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour les régions découlant également de la réforme des impôts de production.

Depuis 2022, ces avances intègrent également la part départementale de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) conformément à la réforme des taxes locales sur l'électricité instituée par l'article 54 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

Depuis 2023, la suppression progressive de la CVAE est compensée aux collectivités territoriales (communes, intercommunalités et départements) à travers l'affectation d'une fraction de TVA prévue aussi à l'action 1 du programme 833.

Depuis 2024, l'action comprend enfin le produit de la taxe sur les éoliennes en mer45(*).

2. Un produit de la fiscalité « locale » qui se tasse en 2025

En PLF 2025, l'action 1 du programme est évaluée à 126,7 milliards d'euros en AE et CP soit une augmentation de 0,8 % par rapport à la LFI 2024, représentant 1,65 milliard d'euros supplémentaires. Ce dynamisme est très modéré au regard de ce qui avait pu être constaté l'an passé (+ 7,6 milliards d'euros entre 2023 et 2024).

Après plusieurs années de hausse résultant de la modification du panier de ressources des collectivités issues des différentes réformes de la fiscalité locale, il se confirme que le dynamisme des impositions locales se tasse en 2025. Ces impositions n'ont d'ailleurs de locales que le nom puisqu'elles correspondent en réalité de plus en plus à des fractions d'impôts nationaux reversées aux collectivités.

En effet, la suppression totale de la taxe d'habitation sur les résidences principales à compter de 2021, la réforme des impôts de production et la suppression de la CVAE ont été essentiellement compensées par l'affectation aux collectivités d'une fraction de TVA et par la mise en place de prélèvements sur recettes (notamment au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de TFPB et de CFE des locaux industriels).

Non seulement le dynamisme de ces différents mécanismes de compensation est moins prononcé en 2025 qu'auparavant mais surtout le dynamisme des fractions de TVA affectée aux collectivités se tarirait en 2025 : d'une part le contexte inflationniste, propices aux rentrées de TVA, s'est résorbé et, d'autre part, la hausse des exportations au détriment de la consommation intérieure s'est traduite par des rentrées de TVA en 2024 moindres qu'escomptées et qui pourraient se poursuivre en 2025. Si l'on ajoute à ces facteurs la volonté gouvernementale d'écrêter, en 2025, une part de TVA destinées aux collectivités, on comprend mieux le rythme très mesuré de progression de l'action 01 du programme 833.

Cette action représente 94,5 % des crédits du programme 833, proportion relativement stable chaque année, même si une hausse des crédits prévisionnels de l'action 03 « Avances aux départements sur les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties » (+ 10,92 % en 2025) modifie légèrement le poids relatif de chacune des actions.

Concrètement, le programme fonctionne via des avances par douzième aux collectivités territoriales concernées.


* 43 Le rythme de remboursement n'a pas évolué depuis le 31 décembre 2023, les collectivités concernées ayant fait le choix d'utiliser l'intégralité du délai qui leur est occtroyé pour procéder au remboursement.

* 44 Mis en place dans le cadre de la suppression de la taxe d'habitation et bénéficiant aux communes dont la perte de recettes est supérieure aux recettes transférées.

* 45 Article 1519 C du code général des impôts.

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