III. LES DÉPENSES TOUJOURS SOUTENUES DE L'ADMINISTRATION CENTRALE DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR À RAISON DU FINANCEMENT D'OPÉRATIONS IMMOBILIÈRES MAJEURES
A. LE LANCEMENT DE LA CONSTRUCTION DU SITE UNIQUE DE LA DGSI ET LA LIVRAISON DE L'OPÉRATION « UNIVERSEINE » EXPLIQUENT LA HAUSSE DES DÉPENSES IMMOBILIÈRES EN 2025
Les dépenses immobilières du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » concernent les dépenses de l'administration centrale ainsi que les dépenses immobilières des secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'intérieur (SGAMI) qui ont été transférées sur le programme au 1er janvier 2020, et celles relatives à l'immobilier des cultes, transférées depuis le programme 232 « Vie politique » au 1er janvier 2022.
Pour 2025, les crédits de paiement de l'action 05 « Affaires immobilières » sont en forte augmentation du fait des engagements financiers à honorer pour deux opérations immobilières majeures. Dans ce contexte, les dépenses d'investissement augmentent de 187 %, passant de 178,9 millions d'euros en 2024 à 513,4 millions d'euros en 2025.
En premier lieu, le présent projet de loi de finances prévoit 139,4 millions d'euros en crédits de paiement en vue d'assurer le paiement du marché global de construction du site unique de la DGSI à Saint-Ouen, engagé au mois de juin 2024, pour des travaux lancés à l'été 2025. Le montant de ce marché public global, qui représente la plus grande part des dépenses du projet, a été notifié pour un montant de 837,2 millions d'euros. Ce montant, inférieur à l'estimation financière initiale49(*), permet de réduire de 71,5 millions d'euros le coût global du projet, désormais estimé à 1 221,5 millions d'euros, dont 88 % est financé par le programme 21650(*).
En second lieu, la hausse des crédits immobiliers vise à assurer le paiement de la livraison fin 2025 du projet « Universeine », acquis en vente à l'état futur d'achèvement (VEFA) en 2021, qui a vocation à accueillir plusieurs services de l'administration centrale du ministère de l'intérieur à Saint-Denis sur l'ancien site du village olympique « Paris 2024 ». Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, 296,4 millions d'euros en crédits de paiement couvriront 93 % du projet « Universeine », dont le montant total est de 317,9 millions d'euros.
En revanche, les dépenses immobilières pour 2025 sont en baisse de 82 % en AE par rapport à 2024. Si cette baisse peut s'expliquer en l'absence de nouveaux projets immobiliers d'ampleur, force est de constater que le niveau des AE pour 2025 est inférieur de près de 23 % par rapport à la programmation51(*), et ce, alors même que de nombreux travaux doivent être menés pour atteindre les objectifs de performance énergétique fixés par le décret tertiaire de 2019, à l'instar des bâtiments de l'administration territoriale de l'État. D'après les réponses au questionnaire budgétaire, les dépenses liées à l'amélioration de la performance énergétique du patrimoine de l'administration centrale sont estimées à 88,2 millions d'euros sur la période 2023-202752(*), conformément au plan pluriannuel d'investissement (PPI) du ministère de l'intérieur.
Par ailleurs, la rapporteure spéciale s'interroge sur la soutenabilité à moyen terme des restes à payer du programme 216, composés majoritairement de dépenses liées à l'investissement immobilier, mais aussi au numérique du ministère de l'intérieur, et dans une moindre mesure ceux du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Ainsi, au 31 décembre 2023, le solde des engagements non couverts par des paiements est estimé à 1 175,6 millions d'euros.
Évolution des restes et charges à payer du programme 216 depuis 2019
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Les restes et charges à payer au titre des opérations immobilières s'élèvent à 764,7 millions d'euros en 2023, et constituent plus de 65 % des restes et charges à payer du programme 216. Rien que pour le site unique de la DGSI, sur le montant total du marché public global de 837,2 millions d'euros notifié, le reste à payer est estimé au 31 décembre 2024 à de 726,8 millions d'euros. La Cour des comptes a ainsi estimé que « le montant des restes à payer présente un risque dès lors qu'il fige une part importante de la programmation », et qu'il a pour effet l'accumulation d'une dette informatique et immobilière importante53(*).
La hausse des dépenses immobilières contraste avec la stabilité les dépenses de personnel, passant de 861 millions d'euros en 2024 à 880 millions d'euros en 2025, soit une hausse + 2,2 % du fait de quelques mesures catégorielles limitées54(*). En revanche, comme pour le programme 354 « Administration territoriale de l'État », aucune création d'emploi n'est prévue pour 2025 contrairement au schéma d'emploi prévu dans le cadre de la LOPMI, de l'ordre de + 75 ETP55(*).
* 49 La réunion interministérielle du 25 avril 2022 avait validé un budget prévisionnel de 1 293 millions d'euros.
* 50 Le programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance » et le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » ont assuré le financement des 12 % restants depuis 2019.
* 51 Voir supra.
* 52 Cette enveloppe couvre l'installation de luminaires LED, de robinets thermostatiques sur les radiateurs, l'amélioration de la performance du chauffage, des travaux d'isolation (combles, murs et fenêtres) et l'installation de panneaux photovoltaïques.
* 53 Note d'exécution budgétaire 2023 de la mission AGTE, Cour des comptes, avril 2024.
* 54 Par exemple, le coût de la mise en oeuvre en 2025 du référentiel interministériel de rémunération des contractuels numériques est de 2,1 millions d'euros, accompagnée de la revalorisation triennale des contrats et de la politique de « CDIsation ».
* 55 Il devait permettre la création de 50 emplois dans le numérique, 10 emplois d'inspecteurs du permis de conduire et 10 emplois hors numérique en vue de réinternaliser les compétences au sein du ministère