B. EXAMEN DU RAPPORT (16 OCTOBRE 2024)

M. Philippe Mouiller, président. - Notre ordre du jour appelle l'examen du projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) pour l'année 2023.

Ce texte, rejeté hier par l'Assemblée nationale en première lecture, sera examiné en séance, mardi 22 octobre, en fin d'après-midi ou en soirée.

Le calendrier d'examen du Placss a été bouleversé par la dissolution de l'Assemblée nationale. Les députés n'ayant pas achevé l'examen du projet de loi le 9 juin dernier, le texte a dû être de nouveau déposé par le Gouvernement et la procédure a dû repartir de zéro.

Ainsi, au lieu de l'examiner à la fin du printemps ou au début de l'été, selon le calendrier annuel prévu, le Sénat devra procéder à l'examen du Placss juste avant celui du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025.

Avant de laisser la parole à nos rapporteurs, je précise que, si la rapporteure générale est, formellement, rapporteure de droit de ce texte, chaque rapporteur de branche du PLFSS a néanmoins souhaité présenter le bilan d'une mesure issue d'une récente loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) ayant trait à sa branche.

Cette démarche s'inscrit parfaitement dans l'esprit de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (Lolfss) et de la loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss).

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Nous examinons, pour la deuxième fois, un Placss. Comme vous le savez, les Placss sont issus d'une initiative de mon prédécesseur Jean-Marie Vanlerenberghe, reprise par Thomas Mesnier, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, lors de l'adoption de la loi du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale. (Mme la rappporteure générale projette une présentation PowerPoint en complément de son propos.)

Le Placss doit être déposé au printemps, afin de permettre son examen, en principe, en juin ou en juillet. Il s'agit de profiter de l'approbation des comptes pour susciter un « chaînage vertueux » entre le Placss et le PLFSS, en s'interrogeant sur l'efficacité de la dépense. Pour cette raison, le rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss) de la Cour des comptes, jusqu'alors publié à l'automne, l'est désormais lors du dépôt du Placss.

En termes de calendrier, le Placss doit être déposé avant le 1er juin. Aucune date limite n'est fixée pour son examen, mais une assemblée ne peut examiner le PLFSS avant de s'être prononcée sur le Placss. L'examen du Placss suffit ; il n'est pas nécessaire de l'adopter. Ainsi le Parlement a-t-il rejeté le Placss l'année dernière. Pour ce qui concerne le calendrier du Placss 2023, celui-ci est évidemment bouleversé par la dissolution, qui a imposé un second dépôt du projet de loi, en juillet, en raison du principe dit de la « table rase ».

S'agissant des questions de calendrier, j'attire votre attention sur le fait que la date de production des comptes par les caisses d'assurance maladie ne permet pas au comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie de rendre son avis sur l'exécution de l'année en cours avant le 1er juin, comme il est censé le faire.

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les deux sujets sont liés, car la date de production des comptes conditionne celle de certification de ces comptes par la Cour des comptes et, par conséquent, celle de la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS).

Or le rapport à la CCSS et l'avis du comité d'alerte mettent à contribution les mêmes personnes ou services : le secrétaire général de la CCSS, un magistrat de la Cour des comptes qui est, de droit, l'un des trois membres du comité d'alerte et qui est chargé d'organiser les travaux de celui-ci ; et, bien sûr, la direction de la sécurité sociale (DSS).

Pour toutes ces raisons, le comité d'alerte ne peut pas respecter, dans les faits, l'échéance du 1er juin et le Parlement, ou, comme l'année dernière, à tout le moins, l'Assemblée nationale, peut donc ne pas être informé des perspectives d'évolution de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) lors de l'examen du Placss, qui est censé être l'occasion de se projeter vers l'avenir. Dans le Ralfss 2023 puis Ralfss 2024, la Cour des comptes demandait d'anticiper la production des comptes de quinze jours, selon le premier rapport, ou de dix jours, pour le second.

Afin que la discussion du Placss ne se réduise pas à l'approbation des comptes, nous sommes convenus cette année que les rapporteurs de branche présenteraient des contributions sur divers sujets. Toutefois, on peut craindre - c'est un euphémisme - que celles-ci ne suscitent pas un écho similaire à celui qu'elles auraient obtenu si le Placss avait été examiné dans des circonstances normales.

Cette année, examiner le Placss juste avant le PLFSS constitue de facto un retour à la situation d'avant la réforme, où la première partie du PLFSS tenait lieu de Placss. Dans ces conditions, il est difficile de percevoir comment un « chaînage vertueux » entre le Placss et le PLFSS serait possible. Mais nous connaissons un contexte particulier, je l'entends.

J'en viens à l'exécution pour l'année 2023. Le déficit a été réduit à 10,8 milliards d'euros. Au regard des quelque 20 milliards d'euros en 2022, on pourrait se dire que c'est encourageant. Toutefois, le PLFSS pour 2025 ne prévoit pas d'amélioration par rapport à la trajectoire définie par la LFSS 2024, en dépit de l'importance des mesures de redressement qu'il comprend, la nouvelle trajectoire étant même un peu plus dégradée. En effet, le dérapage du déficit pour l'année 2024 par rapport à la LFSS est tel que les mesures de redressement ne parviendraient pas à compenser complètement cette dégradation.

On remarque aussi que, par une curieuse coïncidence ou, peut-être aussi, pour éviter d'afficher une dégradation par rapport à la LFSS 2024, le déficit de 17,2 milliards d'euros prévu pour l'année 2027 est identique à celui qui a été défini par la LFSS 2024 - nous y reviendrons dans les prochaines semaines.

Le projet de rapport comprend un graphique décomposant, pour 2023, l'évolution du solde des Robss et du FSV entre ses différents facteurs. Il repose sur une analyse du solde structurel et de l'effort structurel et s'appuie sur le PIB potentiel tel que l'évalue la Commission européenne. De façon schématique, l'amélioration du solde de quelque 10 milliards d'euros entre 2022 et 2023 est due à trois principaux facteurs (deux dans le sens d'une amélioration, un dans celui d'une dégradation), représentant chacun une dizaine de milliards d'euros et qui montrent l'absence d'effort particulier réalisé par le Gouvernement.

En premier lieu, les dépenses liées au covid ont mécaniquement diminué de 10,6 milliards d'euros.

En deuxième lieu, diverses prestations, en particulier les retraites, ont été revalorisées le 1er juillet 2022, au lieu du 1er janvier 2023. Pour le seul cas des retraites, les dépenses de 2022 ont ainsi été majorées de 5 milliards d'euros, réduisant à due concurrence l'augmentation en 2023.

En troisième lieu, à l'inverse, la croissance spontanée des recettes a été inférieure à celle du PIB, ce qui a majoré le déficit de 13 milliards d'euros. Cette situation résulte d'un double phénomène, qui contribue à expliquer l'erreur de prévision de la fin de l'année 2024, sur laquelle je reviendrai. Tout d'abord, alors que la masse salariale augmente d'habitude selon un taux similaire à celui du PIB, celle-ci a progressé nettement moins rapidement. Ensuite, les cotisations sociales ont crû moins vite que la masse salariale, alors que, en principe, elles augmentent à peu près à la même vitesse. En effet, la forte inflation en 2022 a provoqué une importante revalorisation du Smic. Aussi nombre de salariés ont-ils vu leur rémunération « rattrapée » par le Smic, alors qu'elle était jusqu'alors supérieure à ce dernier. Une forte croissance des allégements dégressifs de cotisations patronales en a résulté.

Pour ce qui concerne, non pas les déterminants de l'évolution du solde, mais la comparaison entre prévision et exécution, le déficit s'élevait à 10,8 milliards d'euros en 2023, soit 3,7 milliards d'euros de plus que la prévision de la LFSS 2023. En effet, si les recettes ont été supérieures de 5,2 milliards d'euros aux prévisions, le dérapage des dépenses a été encore plus important et atteint 8,8 milliards d'euros.

À la fin de l'année 2023, la LFSS 2024 a revu trop à la hausse les prévisions de recettes pour 2023, qui se sont révélées finalement inférieures de plus de 2 milliards d'euros à ces dernières prévisions - j'y reviendrai.

Le dérapage des dépenses provient essentiellement de la branche maladie, en particulier de l'Ondam. Pour ce qui concerne les recettes, le supplément de 5,2 milliards d'euros par rapport à la LFSS 2023 est lié à la forte croissance de la masse salariale pendant les trois premiers trimestres. Vous vous en souvenez, au premier semestre 2024, les prévisions de finances publiques de l'automne 2023 ont fait l'objet d'une polémique, le déficit de l'ensemble des administrations publiques ayant finalement été en 2023 de 5,5 points de PIB, alors qu'à l'automne 2023 le Gouvernement prévoyait un déficit de 4,9 points. Notre collègue Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances, a exercé un contrôle sur pièces et sur place à Bercy en mars dernier, avant de publier un rapport en juin. Le supplément de déficit s'expliquait essentiellement par de moindres recettes, en particulier de TVA et de cotisations sociales.

S'agissant des administrations de sécurité sociale, Jean-François Husson soulignait, dans son rapport, l'optimisme des prévisions de masse salariale. En effet, le Gouvernement a revu à la hausse sa prévision de masse salariale à l'automne 2023, alors que l'Insee revoyait la sienne à la baisse. Par conséquent, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a souligné l'optimisme de la prévision de masse salariale pour l'année 2023 du PLFSS pour 2024.

Le Gouvernement a, par ailleurs, sous-estimé le dynamisme des allégements généraux de cotisations patronales.

J'en viens au respect des obligations organiques.

L'an passé, la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes de la branche famille et de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Cette année, on peut constater un « progrès », puisque la Cour des comptes s'est déclarée seulement dans l'impossibilité de le faire. Ce changement terminologique signifie que, désormais, la Cour ne déclare plus que les comptes sont faux, mais qu'elle n'est pas en mesure d'affirmer qu'ils sont justes. Le principal motif de ce refus, puis de cette impossibilité de certifier, correspond aux erreurs de paiement. En effet, neuf mois après le paiement, les erreurs, qui sont essentiellement à la hausse, représentent 10,9 % du montant des prestations et encore 7,4 % de ce montant vingt-quatre mois après le paiement. Par rapport à 2022, la situation s'améliore dans le cas de l'indicateur à vingt-quatre mois, ce qui contribue à expliquer la moindre sévérité de la Cour, mais elle se dégrade dans le cas de l'indicateur à neuf mois.

La qualité des comptes sociaux se dégrade depuis plusieurs années, avec chaque année depuis 2020 au moins une impossibilité ou un refus de certifier.

L'an passé, l'actualisation des indicateurs des rapports d'évaluation des politiques de sécurité sociale (Repss), relatifs aux objectifs et aux résultats des politiques menées par les différentes branches, était très insuffisante. En effet, ceux-ci n'allaient pas au-delà, en moyenne, de l'année 2020, soit deux ans avant l'exercice 2022. Cette année, la situation n'est toujours pas optimale, mais elle s'améliore : les indicateurs sont valables, en moyenne, jusqu'à l'année 2022, soit une année avant l'exercice concerné. À mon sens, s'il est compréhensible que certains indicateurs ne soient actualisés que de manière périodique, à l'instar des données épidémiologiques, il est légitime de s'interroger sur la signification d'indicateurs datant de 2016 ou 2018.

Par ailleurs, l'indicateur sur les créations de places en établissements d'accueil du jeune enfant (EAJE) ne permet toujours pas de déterminer si l'objectif de 30 000 places supplémentaires de la convention d'objectifs et de gestion (COG) pour la période 2018-2022 a été atteint. On le sait, c'est loin d'être le cas selon la synthèse du Repss « Famille », selon laquelle « environ la moitié de l'objectif de la précédente COG était atteint à fin 2022 ».

Enfin, j'en viens à l'« arlésienne » qu'est l'évaluation de l'efficacité des niches sociales.

Selon la Lolfss, l'annexe sur les niches devrait comprendre chaque année l'évaluation d'un tiers, en nombre, des 120 niches, soit 40 niches. L'année dernière, aucune niche n'était évaluée. Cette année, lors du dépôt du Placss, seules 16 niches l'étaient, soit 13 % d'entre elles. Il s'agit, pour la quasi-totalité d'entre elles, des niches relatives aux compléments de salaire, qui ont fait l'objet d'un chapitre du Ralfss de la Cour des comptes cette année.

Ce constat doit toutefois être relativisé. En effet, le 3 octobre dernier, le rapport de la mission conduite par Antoine Bozio et Étienne Wasmer, intitulé Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, a enfin été publié. Je vous le rappelle, j'avais interrogé à ce sujet le directeur de la DSS, lors de son audition par la commission le 2 octobre dernier. En effet, seul un rapport d'étape, sans propositions, avait été publié en avril et la publication du rapport définitif, prévue en juin, avait été reportée en raison de la dissolution. Après prise en compte des trois niches correspondant aux allègements généraux, les évaluations réalisées en 2024 correspondent à environ 95 % du montant total des niches, pour 16 % du nombre de niches.

Au total, si par rapport au précédent Placss la situation s'améliore dans tous les domaines - qualité des comptes, actualisation des indicateurs, évaluation des niches -, il reste encore une importante marge de progression. Par ailleurs, le Gouvernement précédent lègue une situation des comptes sociaux très dégradée. C'est pourquoi je vous propose de rejeter le Placss, comme l'année dernière par une motion tendant à opposer la question préalable.

Mme Corinne Imbert, pour la branche maladie. - En complément de l'analyse que vient de nous livrer Mme la rapporteure générale sur l'exécution de l'exercice 2023, j'interviendrai au titre de la branche maladie.

Concernant l'Ondam, je souligne à mon tour le montant de 247,8 milliards d'euros atteint en 2023. Je constate que si le dépassement de fin d'exercice est cette année limité, l'Ondam voté en LFSS a été une fois encore, et malgré deux révisions en cours d'année, substantiellement dépassé.

Nous avions refusé de voter l'Ondam 2023, l'estimant ni crédible ni sincère. Force est de constater que nous avions raison : l'Ondam exécuté est supérieur de 3,7 milliards d'euros à l'Ondam initial, principalement du fait du contexte inflationniste. En outre, l'Ondam 2023, qui devait être inférieur à l'Ondam 2022 du fait de la résorption des dépenses de crise, est finalement supérieur. À mon sens, il nous faut disposer de prévisions plus solides et, avec l'appui du comité d'alerte, renforcer les mécanismes de suivi infra-annuel.

J'appelle plus particulièrement votre attention sur trois politiques rattachées à la branche maladie par les dernières LFSS.

Affiché comme une priorité d'action, le « virage de la prévention » devait trouver à s'incarner dans les rendez-vous de prévention. Que dire de cette mesure, près de deux ans après leur création dans la LFSS pour 2023 ? Nous ne disposons que de peu de recul sur sa mise en oeuvre, et pour cause : après une publication tardive des textes d'application réglementaires, le dispositif entre tout juste dans sa phase de généralisation.

Le Sénat avait soutenu le principe de cette mesure tout en alertant sur certains prérequis : tout d'abord, l'importance d'associer les professionnels de santé à sa déclinaison opérationnelle pour garantir leur adhésion au dispositif ; ensuite, la nécessité de penser l'articulation de ces rendez-vous avec un suivi d'aval structuré et de cibler les personnes les plus éloignées du soin. C'est à ces conditions que les rendez-vous de prévention pourront, à leur modeste mesure, contribuer à améliorer les résultats de la France en matière de prévention, que la Cour des comptes qualifiait de médiocres en 2021.

Par ailleurs, le Sénat avait soutenu l'allongement du troisième cycle de médecine générale par la LFSS pour 2023, laquelle reprenait à ce titre une proposition de loi de Bruno Retailleau. Applicable aux étudiants entrant en troisième cycle à compter de la rentrée universitaire 2023, l'ajout d'une quatrième année devait améliorer la formation des étudiants, grâce à la réalisation d'un stage long en ambulatoire et en autonomie supervisée, prioritairement dans les zones sous-denses.

Or, près de deux ans après la promulgation de la loi, cette réforme demeure largement incomplète. La maquette a été tardivement mise à jour, en août 2023, et fait encore l'objet de vifs débats. Les conditions d'appariement entre étudiants et terrains de stage, comme le statut et les modalités de rémunération des docteurs juniors, ne sont toujours pas définies. Il faut souligner le très haut niveau d'incertitude avec lequel les étudiants se trouvent contraints de réaliser un choix de spécialité qui les engagera pour le reste de leur carrière. Les multiples retards subis par la parution des textes deviennent alarmants : c'est pourquoi nous appelons à engager les dernières concertations nécessaires et à conclure au plus vite ces travaux.

Enfin, la LFSS pour 2023 avait prévu la fin de la garantie de financement des établissements de santé au profit d'un nouveau dispositif de sécurisation des ressources, modulé à l'activité. En 2023, une sécurisation de base était ainsi appliquée sur 70 % du financement de 2022 ; 30 % étaient valorisés sur l'activité 2023.

Presque exclusivement sur le champ « médecine, chirurgie, obstétrique », la sécurisation modulée à l'activité représente pour 2023 un coût de l'ordre de 1,4 milliard d'euros par rapport à une valorisation de la seule activité réalisée. Pour un montant substantiel, ce mécanisme d'appui aux ressources n'a pas permis d'assurer aux hôpitaux une situation financière saine. Ainsi, dans un contexte de reprise encore difficile de l'activité, ont été décidés à la fin de l'exercice et de la campagne budgétaire 2023 des dégels tarifaires et de dotations, ainsi qu'une restitution de la sous-exécution tarifaire. Cet ensemble de mesures ne permet pourtant pas d'éviter des montants records de déficits.

Ces observations permettront, je l'espère, de préparer notre grille de lecture du PLFSS pour 2025.

Mme Pascale Gruny, pour la branche vieillesse. - Je me suis intéressée, pour ma part, au non-recours au minimum vieillesse.

Le minimum vieillesse est le plus ancien minimum social : il a été instauré en 1956 afin de garantir un socle de ressources aux personnes âgées de plus de 65 ans percevant de faibles revenus. Initialement, il était composé de huit allocations, mais ces dernières ont été fusionnées à des fins de lisibilité pour former l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) au 1er janvier 2006. Il s'agit d'une allocation différentielle, ce qui signifie que le montant auquel a droit le bénéficiaire est déterminé par la différence entre le plafond de la prestation, aujourd'hui fixé à 1 571 euros, et les revenus de l'assuré.

Alors même que la fusion visait à faciliter les démarches des bénéficiaires potentiels, le taux de non-recours à l'Aspa s'élève à 50 %. Concrètement, cela signifie qu'un assuré éligible sur deux ne perçoit pas l'Aspa, souvent parce qu'il n'en a pas fait la demande.

Cette situation s'explique en partie par la hausse des minima de pensions de retraite que sont le minimum contributif pour les salariés des régimes alignés et la pension majorée de référence pour les non-salariés agricoles.

On peut se féliciter de ces revalorisations, qui, en augmentant le niveau de vie des retraités à taux plein, ont rendu moins nécessaire le recours au minimum vieillesse, en recul depuis les années 1960. Néanmoins, l'Aspa a fait l'objet de plusieurs revalorisations entre 2018 et 2021, lesquelles se sont traduites par une hausse de son montant de 100 euros par mois, ce qui n'est pas négligeable. Le spectre des assurés éligibles s'en est trouvé élargi ; pour autant, le taux de non-recours à l'Aspa est toujours estimé à 50 %.

Comment l'expliquer ? Les analyses statistiques menées par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) sur des données de 2016 ont dressé des portraits types de non-recourants.

La première catégorie est constituée de pensionnés propriétaires, dont les revenus sont proches du seuil d'éligibilité et qui percevraient donc un montant d'Aspa inférieur à 100 euros. Ces personnes n'ont peut-être pas connaissance de la revalorisation du plafond de l'Aspa, ou alors ne souhaitent pas y recourir, car elles savent que les sommes qu'elles toucheront à ce titre pourront être récupérées sur leur succession.

Lors de la réforme des retraites de 2023, le législateur a souhaité faciliter le recours au minimum vieillesse en portant à 105 300 euros le seuil au-delà duquel les actifs successoraux sont saisissables. Toutefois, la crainte que le patrimoine soit saisi et ne puisse dès lors être transmis constitue un frein important au recours à l'Aspa, notamment chez les non-salariés agricoles, comme nous l'a indiqué la Mutualité sociale agricole (MSA). Si le législateur a exclu de l'actif successoral saisissable tous les biens mobiliers et immobiliers servant l'activité agricole, notamment les bâtiments d'exploitation et les vignes, les agriculteurs sont aussi propriétaires d'autres terrains et ont, à ce titre, un patrimoine à transmettre.

La seconde catégorie est constituée de femmes seules, âgées de plus de 85 ans et titulaires d'une pension de réversion. Nous pouvons aisément imaginer qu'elles n'ont pas toujours connaissance de leur droit à l'Aspa et que les démarches administratives requises sont rendues complexes par leur grand âge, sans parler de la fracture numérique. Le taux de non-recours pour les personnes qui bénéficieraient d'une allocation supérieure à 700 euros par mois est de 43 %. Ce taux n'est pas négligeable. Il faut s'efforcer, par tous les moyens, d'aller vers ces bénéficiaires potentiels.

À cet égard, je me dois de saluer les démarches accomplies par les caisses nationales des différents régimes. Ces dernières mettent en oeuvre des campagnes d'information de plus en plus fournies auprès de leurs assurés pour leur faire connaître leurs droits, avant même qu'ils n'y soient éligibles. La MSA appelle ainsi ses pensionnés l'année précédant celle au cours de laquelle ils seraient éligibles à l'Aspa. La Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) procède à des analyses poussées pour identifier, parmi ses pensionnés, ceux qui seraient susceptibles de remplir les conditions d'ouverture du droit à l'Aspa. Les caisses régionales les contactent ensuite et leur proposent de les accompagner dans leurs démarches.

Ces efforts sont salutaires, mais la lutte contre le non-recours au minimum vieillesse doit être intensifiée, car nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un taux de 50 %.

Il faudrait tout d'abord recenser régulièrement le taux de non-recours au minimum vieillesse pour mieux comprendre encore ce phénomène et toujours mieux identifier les personnes qu'il touche. J'y insiste, les données statistiques les plus pertinentes que nous ayons portent sur l'année 2016. Elles commencent donc à dater.

Je ne pense pas en revanche qu'il faille encore augmenter le seuil de récupération sur succession. Le législateur l'a fait récemment : attendons de mesurer les effets de cette mesure.

Enfin, il me semble nécessaire d'intensifier les actions d'information et de démarchage menées par les caisses de retraite. En effet, si nous comprenons que certaines personnes refusent d'elles-mêmes de demander une allocation à laquelle elles ont droit, il n'est pas acceptable que d'autres n'y recourent pas au motif qu'elles n'en ont pas connaissance. C'est pourquoi je fais mienne la préconisation de la Cour des comptes qui incite à renforcer le suivi des campagnes nationales tendant à réduire le non-recours et à en mesurer l'efficacité. Cela étant, j'observe que la prolifération des démarchages téléphoniques en tout genre peut constituer un frein.

Mme Chantal Deseyne, pour la branche autonomie. - L'examen du présent texte m'a conduit à étudier les relations financières entre la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et les départements, lesquelles sont pour le moins complexes.

Comme vous le savez, la CNSA est l'organisme gestionnaire de la branche autonomie, mais le fonctionnement de cette branche est décentralisé et relève en grande partie de l'échelon départemental.

Cette large compétence se traduit par un certain nombre de concours financiers versés par la CNSA aux départements pour garantir une compensation financière. Les plus importants, en termes financiers, compensent notamment les dépenses relatives à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), à la prestation de compensation du handicap (PCH), à la dotation qualité et au tarif plancher des services à domicile. Aujourd'hui, on dénombre une douzaine de concours financiers pour un montant total de 5,5 milliards d'euros. Au fil des réformes, ces concours se sont en effet multipliés et diversifiés, dégradant peu à peu la lisibilité de leur architecture globale.

Au-delà de la multiplication des concours financiers versés par la CNSA aux départements, l'objectif de compensation financière n'est plus rempli de manière satisfaisante.

Tout d'abord, certains concours sont aujourd'hui déconnectés des besoins réels. C'est par exemple le cas du concours APA 2, dont les critères de répartition n'ont pas été actualisés depuis 2016, ou encore des concours MDPH - maisons départementales des personnes handicapées -, qui ne reflètent plus que partiellement l'activité réelle des structures.

Ensuite, la couverture des dépenses des départements est insuffisante. Ces derniers demandent une couverture minimale de 50 % de leurs dépenses relatives à l'APA et à la PCH. Or, en 2022, le taux n'atteignait que 41,5 % pour l'APA et 33,4 % pour la PCH, avec d'importantes disparités entre départements.

Enfin, au cours de mes travaux, j'ai pu constater que les concours financiers récemment créés l'ont été sans garantir la cohérence d'ensemble.

Par exemple, les mécanismes de compensation des mesures financières et salariales introduites par les LFSS 2021 et 2022 n'ont pas été coordonnés avec les concours existants. En résulte, pour la CNSA comme pour les départements, une charge de gestion disproportionnée pour éviter les doubles financements.

La mise en place du tarif plancher pour les services d'aide à domicile constitue un autre exemple. Les départements qui pratiquaient volontairement des tarifs plus élevés n'ont bénéficié d'aucun financement au titre de cette mesure. À l'inverse, ceux dont les efforts étaient moindres ont bénéficié d'une compensation à 100 % des dépenses liées à l'atteinte du tarif plancher. Cette situation pose une vraie question d'équité.

Vous l'avez compris, dans ce contexte, une réforme des concours financiers s'impose. Elle est d'ailleurs défendue tant par les départements que par la CNSA. Un comité des financeurs s'est récemment tenu et, selon les informations qui m'ont été transmises par la CNSA, deux grands scénarios ont été proposés. Ils reposent tous deux sur une fusion des principaux concours.

Dans le premier scénario, la logique des concours historiques serait conservée, avec une répartition selon des critères de population, de dépenses et de péréquation. Ces critères seraient toutefois améliorés pour adapter les concours aux besoins des départements en fonction de leurs dépenses réelles.

Dans le second scénario, les montants des concours versés aujourd'hui seraient « cristallisés » et complétés d'une enveloppe particulière pour couvrir à 50 % la hausse des dépenses d'APA et de PCH. Pour rappel, les départements revendiquent plus généralement une couverture minimale de 50 % de l'ensemble de ces dépenses.

Une modulation sur objectif d'une partie des concours, en fonction d'indicateurs de qualité des services rendus, a également été évoquée.

En tant que rapporteur, je ne peux qu'encourager la CNSA et les départements à poursuivre leurs concertations pour aboutir à une réforme. Cette dernière doit impérativement viser des objectifs de simplification, de lisibilité et de cohérence, tout en répondant aux besoins territoriaux. Il y va du bon fonctionnement de la cinquième branche.

Mme Marie-Pierre Richer, pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. - Pour ma part, j'ai souhaité me pencher plus spécifiquement sur la politique d'indemnisation des victimes de l'amiante, qui n'est pas soumise, comme vous allez le voir, aux règles s'appliquant habituellement à la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).

Cette question a fait l'objet, en 2005, d'un important rapport d'information sénatorial - je tiens tout particulièrement à saluer la mémoire de son auteur, notre ancien collègue Gérard Dériot.

Ce travail souligne qu'« on en savait assez pour gérer le risque amiante en 1965 ». Le recours à ce matériau aux propriétés physiques exceptionnelles - résistance à la chaleur, faible conductivité thermique, résistance mécanique et chimique - et aux usages industriels nombreux n'en a pas moins triplé dans le troisième quart du XXe siècle, et pour cause : il a fallu attendre 1977 pour que l'usage de l'amiante soit réglementé et 1996 pour que son utilisation soit définitivement interdite en France.

Pendant plus de trente ans, des travailleurs de l'amiante, du bâtiment, du textile ou des chantiers navals ont donc été exposés à l'amiante malgré ses effets néfastes avérés. Parmi eux, nombreux sont ceux qui ont développé des pathologies caractéristiques, qu'elles soient bénignes, comme les plaques pleurales, ou malignes, comme le mésothéliome.

C'est dans ce contexte que le législateur a créé, en 1999 et 2001, des fonds instituant un régime de prise en charge dérogatoire pour les victimes de l'amiante.

Le Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata), créé en 1999, finance des mécanismes de préretraite au bénéfice des victimes de maladies professionnelles liées à l'amiante et des travailleurs ayant été exposés à ce matériau. Ces assurés peuvent cesser leur activité entre 50 ans et 60 ans, selon leur durée d'exposition et leur statut, et bénéficient jusqu'à la liquidation de leurs droits d'un revenu de remplacement correspondant à 65 % de leur salaire.

Le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), créé en 2001, a quant à lui vocation à assurer la réparation intégrale de l'ensemble des préjudices subis par les victimes de l'amiante et leurs ayants droit. Les victimes environnementales ou non éligibles par ailleurs à la réparation AT-MP sont également couvertes. La politique d'indemnisation du fonds est plus favorable que la réparation AT-MP : elle présente un caractère intégral et non forfaitaire. De plus, le champ des préjudices indemnisables est considérablement plus étendu puisqu'il ne comprend pas seulement le déficit professionnel, mais aussi le déficit fonctionnel et les préjudices physique, moral, esthétique et d'agrément. Au total, depuis sa création, ce fonds a indemnisé plus de 110 000 victimes, pour un montant total de 7,3 milliards d'euros.

Les travaux que j'ai conduits mettent en lumière les résultats remarquables du fonds : les victimes sont mieux indemnisées et la qualité du service proposé par le Fiva est soulignée tant par les statistiques - le taux de satisfaction atteint 94 % - que par les associations de victimes. Ces structures louent notamment le rôle du fonds dans l'information des victimes et leur accompagnement dans les procédures. Les délais de traitement du Fiva sont, en outre, nettement inférieurs aux durées réglementaires.

Pour autant, le Fiva doit aujourd'hui relever deux défis majeurs.

Premièrement, le non-recours aux prestations concerne 35 % à 40 % des demandeurs potentiels. De l'aveu même des responsables du fonds, c'est la conséquence d'un manque d'information, d'accompagnement ou d'intérêt des demandeurs. Le Fiva a pris les choses en main : la loi lui confère symboliquement, depuis la LFSS 2024, une mission d' « identification » des demandeurs potentiels, à laquelle le fonds entend répondre par une politique d'aller vers. Il souhaite en effet obtenir des pouvoirs publics - notamment des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) - les coordonnées de patients traités pour des pathologies caractéristiques de l'amiante, afin d'entrer en contact avec eux et de leur présenter l'action du fonds. Il reste toutefois en attente d'un texte réglementaire initialement prévu pour l'été dernier et dont on espère la publication prochaine.

Deuxièmement, la situation financière du fonds, naguère confortable, est désormais alarmante à cause d'un effet de ciseaux. Sa subvention a été longtemps fixée à un niveau volontairement insuffisant afin de consommer ses réserves financières, mais le rebond des dépenses lié à la revalorisation des barèmes l'a conduit, en 2023, à déplorer un déficit de 80 millions d'euros. Les dotations prévues pour 2024 et 2025 sont en hausse, mais l'effort est concentré uniquement sur la branche AT-MP, ce qui est regrettable : il conviendrait que l'État, reconnu responsable du scandale de l'amiante et cofinanceur aujourd'hui mineur, intensifie lui aussi son effort financier en faveur du fonds.

M. Olivier Henno, pour la branche famille. - Dans le cadre de l'examen de ce projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale, j'interviendrai brièvement sur la mise en oeuvre de la réforme du congé de paternité inscrite dans la LFSS 2021.

Pour rappel, la LFSS 2021 a allongé à compter du 1er juillet 2021 la durée du congé de paternité et d'accueil de l'enfant de onze à vingt-cinq jours et de dix-huit à trente-deux jours en cas de naissance multiple. Elle a aussi rendu obligatoire le congé de naissance de trois jours immédiatement après la naissance ainsi que les quatre premiers jours du congé de paternité, instaurant ainsi une période de sept jours de congés obligatoires juste après la naissance. Les autres jours de congé de paternité sont pris à la discrétion du bénéficiaire dans les six mois qui suivent la naissance. Cette réforme a connu depuis lors deux ajustements. La LFSS 2022 a étendu le congé de paternité et d'accueil de l'enfant aux collaborateurs des professions libérales. La LFSS 2024 a assoupli, conformément aux recommandations de notre commission, les règles de prise du congé de paternité pour les non-salariés agricoles afin de mieux répondre aux difficultés constatées sur le terrain de remplacement dans les exploitations agricoles.

L'évolution du congé de paternité visait initialement deux objectifs : accroître le taux de recours au congé de paternité, c'est-à-dire la part des pères, parmi ceux éligibles au dispositif, qui ont effectivement recours au dispositif, et améliorer le partage des tâches entre les deux parents et l'entrée dans la parentalité. Concernant le taux de recours, ce dernier n'augmentait effectivement quasiment plus depuis sa montée en charge très rapide à la suite de la création du congé de paternité, passant ainsi de 66 % en 2003 à 71 % en 2021.

Mais après deux années pleines de mise en oeuvre de la réforme, son principal effet semble consister dans le seul allongement de la durée moyenne du congé de paternité, qui est ainsi passée de onze jours en 2020 à vingt-trois jours en 2023.

En effet, si le coût de la réforme s'inscrit dans les prévisions budgétaires initiales, soit environ 400 millions d'euros de prestations supplémentaires pour 2023, cela semble avant tout dû à une faible amélioration du taux de recours ainsi qu'à une diminution du nombre de pères bénéficiaires liée à la baisse la natalité. C'est d'ailleurs la conclusion à laquelle est également arrivée la commission des comptes de la sécurité sociale qui indique, dans son rapport de mai 2024, que « l'allongement du congé de paternité en 2021 n'a pas conduit les pères qui ne recourent pas au congé de paternité à y recourir davantage ». Les pertes de revenus, notamment pour les indépendants et les professions libérales, la précarité du statut professionnel ou encore la crainte d'être mal perçu restent des limites structurelles fortes au recours au congé de paternité.

Par ailleurs, je regrette le peu de données actualisées disponibles concernant les différents régimes ainsi que l'impossibilité de procéder, à ce stade, à une analyse fine par catégorie socioprofessionnelle ou par statut d'emploi de l'évolution du recours au congé de paternité. Ces données sont pourtant essentielles au pilotage d'une telle réforme et à la bonne évaluation de son efficacité. Dès lors, il m'apparaît nécessaire de poursuivre l'évaluation de l'impact de cette réforme sur les comportements au sein des différents régimes avant toute nouvelle adaptation législative et réglementaire.

Enfin, notre commission avait accueilli favorablement la réforme tout en regrettant que cette évolution ne s'inscrive pas dans une réflexion plus large sur l'efficacité et la pertinence des congés parentaux dans leur ensemble. À ce titre, et alors qu'aucune mesure nouvelle relative à la branche famille ne figure dans le PLFSS pour 2025, j'estime nécessaire d'apporter une attention particulière aux politiques mises en place et aux orientations prises par le Gouvernement dans ce domaine.

Mme Annick Petrus. - On constate un écart de 2,1 milliards d'euros entre les prévisions de la LFSS 2024 et le déficit réel en 2023. Le PLFSS vous semble-t-il à la hauteur des enjeux en ce qui concerne les recettes ?

En outre, les branches vieillesse et autonomie sont également déficitaires. Compte tenu du vieillissement de la population, comment répondre au défi à long terme du financement de ces branches tout en assurant une prise en charge suffisante des retraités et des personnes dépendantes ?

M. Alain Milon. - J'ai participé, lundi dernier, à la commission des comptes de la sécurité sociale où n'étaient présents en tout et pour tout que trois parlementaires, dont Bernard Jomier et moi-même. En revanche, toutes les administrations, toutes les branches et tous les syndicats étaient représentés. Le plus étonnant, pour ne pas dire le plus révoltant, tient au fait que chacun a admis de manière très passive le principe d'un déficit croissant dans des proportions abyssales dans les années à venir jusqu'en 2033. Cette passivité est pour le moins inquiétante.

Si l'on regarde de près le PLFSS pour 2025, l'on constate qu'il n'est pas l'oeuvre des politiques, mais de Bercy et du ministère de la santé. Il faudrait y remédier.

J'ai l'intention de rappeler au Gouvernement cette maxime : « qui aime bien, châtie bien. » En effet, je souhaite que l'on réfléchisse sérieusement à l'avenir de la santé en France plutôt que d'aller, par passivité, vers une financiarisation totale de la santé sur le modèle américain. Je souhaite que l'on envisage très rapidement des réformes structurelles plutôt que d'accepter sans mot dire les déficits. J'espère que vous vous révolterez avec moi.

M. Bernard Jomier. - Ce projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale a été déposé au mois de juillet dernier, après un premier texte présenté au mois de mai. Ce calendrier est important, car il n'avait rien d'inéluctable, le dépôt du premier projet de loi au mois de mai étant déjà très tardif. Il aurait fallu le faire au moins un mois plus tôt. Certes, les jeux Olympiques et la dissolution sont venus perturber le calendrier du gouvernement d'alors, mais c'est surtout par choix politique que nous délibérons seulement à la fin du mois d'octobre de ce texte. Encore une fois, un tel retard est contraire à l'esprit de la loi organique.

La Cour des comptes, dans son rapport de mai 2024, dénonce la gestion préoccupante des comptes de la sécurité sociale et note une perte manifeste de contrôle des comptes sociaux. La trajectoire des déficits échappe désormais à toute maîtrise. La cour qualifie de « floues » les perspectives de redressement du Gouvernement et elle estime que celles-ci laissent présager une aggravation de la situation. Le mauvais pilotage des comptes favorise un déficit structurel de la sécurité sociale qui semble s'installer de manière durable.

Lors de l'examen des deux précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale, j'avais déjà attiré votre attention sur la dégradation de la trajectoire des comptes de la sécurité sociale, qui ne porte pas de retour à l'équilibre. Faut-il y voir l'effet d'une gestion à court terme qui part à vau-l'eau ou bien le résultat d'un choix politique délibéré ? L'installation du déficit au cours des années successives penche pour la deuxième option. Je rappelle que la gauche avait ramené les comptes sociaux quasiment à l'équilibre en 2017. Nous pouvons avoir des divergences sur l'analyse des recettes, des dépenses ou des moyens à mettre en oeuvre, mais ce fait est incontestable.

Y a-t-il une volonté du Gouvernement de masquer la dégradation des comptes sociaux ? Alors que les institutions non gouvernementales ont régulièrement estimé que la croissance ne serait que modérée, les gouvernements successifs ont élaboré tous leurs projets budgétaires sur des estimations optimistes qui ont faussé la visibilité des comptes.

Comme l'a rappelé Élisabeth Doineau, l'impossibilité de la Cour des comptes de certifier les comptes de la branche famille est un motif de préoccupation. Je rappelle que le montant des préjudices financiers persistant après les opérations de contrôle interne a été estimé à 5,5 milliards d'euros, essentiellement d'indus. Toutefois, il faut noter que pour les comptes de 2023, un certain nombre d'actions ont été mises en oeuvre par le réseau des caisses d'allocations familiales pour fiabiliser les données déclaratives. En tout état de cause, cette vision court-termiste a des conséquences lourdes sur l'avenir des comptes.

J'ai bien noté que, dans le cadre de la CCSS, la ministre du travail avait expliqué que l'inflexion donnée par le Gouvernement pour favoriser les recettes serait de court terme. Le court-termisme est donc revendiqué. Mais comment pourrons-nous revenir à l'avenir sur des suppressions d'exonération sans creuser le déficit ? Cette revendication du court terme est délétère pour les comptes sociaux.

En matière de recettes, la stratégie de Bruno Le Maire s'est articulée, depuis 2018, autour d'une baisse des prélèvements obligatoires. La part des cotisations sociales dans le financement des comptes sociaux est passée en deux décennies à 48 % en 2023, tandis que celle des impôts et des taxes affectées a augmenté. Les exonérations de cotisations sociales sur certains compléments de salaire non compensées par l'État ont privé le budget de la sécurité sociale de plusieurs milliards d'euros. La Cour des comptes a pointé ce déséquilibre croissant entre les cotisations et la fiscalité, qui entraîne un glissement vers un financement de la sécurité sociale de plus en plus dépendant des impôts. En effet, l'enjeu est celui du choix politique quant à l'évolution de notre modèle social.

Enfin, le transfert de la dette de l'État vers la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) maintient les comptes de la sécurité sociale en déficit. Compte tenu d'une trajectoire sans perspective de redressement dans le PLFSS pour 2025, qui s'inscrit même en dégradation, la Cades ne pourra pas être éteinte en 2033.

Telle est la situation. La rapporteure générale a rappelé les progrès dont témoignent le Repss ainsi que l'évaluation des niches sociales, alors que ces deux sujets avaient justifié, l'an dernier, le dépôt d'une question préalable sur le texte. Toutefois, ces progrès restent insuffisants, car quand bien même elle aurait progressé, une évaluation qui n'aboutit pas à des mesures concrètes reste insatisfaisante.

Nous souscrivons, bien évidemment, à la proposition qui nous a été faite de rejeter ce texte en adoptant la question préalable.

Mme Raymonde Poncet Monge. - Vous avez pointé que les salaires augmentaient moins vite que le PIB. Dans la mesure où celui-ci se définit comme la somme des valeurs ajoutées, cela signifie que le partage de la valeur ajoutée se fait en défaveur des salaires.

Pour ce qui est de la justification du report au 1er juillet 2025 de la revalorisation des retraites, certains soulignent que le salaire moyen par tête progresse moins vite que l'inflation. Cela réveille la vieille opposition, un peu facile, entre les actifs et les retraités.

Vous avez expliqué le déficit par la forte croissance du Smic, destinée à provoquer un effet levier, compte tenu des exonérations que cela génère pour les entreprises. Certains en avaient même fait le point central de leur programme politique.

Les niches sociales doivent être financées par le budget de l'État. Or on observe depuis 2018, comme le souligne la Cour des comptes, une croissance inédite des exonérations non compensées par l'État. La loi du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise a ainsi exclu une partie des rémunérations de l'assiette soumise à cotisations. Entre 2018 et 2022, les exonérations non compensées, c'est-à-dire les pertes de recettes liées à l'absence de cotisation sur certains compléments de rémunération, tels que la prime de partage de la valeur, dont le plafond a été relevé à 6 000 euros, ont ainsi atteint le niveau record de 8,1 milliards d'euros, tandis que le déficit n'a augmenté que de 6 milliards d'euros.

Je souhaiterais d'ailleurs, comme je l'avais déjà demandé à notre président, que nous ayons connaissance de la répartition de ces 8,1 milliards d'euros par branche.

Les exonérations de charges sur les heures supplémentaires, qui n'ont pourtant pas d'efficacité économique, comme l'ont montré plusieurs rapports officiels, ont été rétablies, et cela pénalise la branche vieillesse. Nous devons être vigilants sur ce point, car le budget ne reprend qu'une toute petite partie d'entre elles, pour un montant de 0,7 milliard d'euros sur un total de plus de 8 milliards.

Ce désarmement social, cette politique des caisses vides, résulte bien d'une volonté politique. Le Conseil d'analyse économique et l'Insee ont d'ailleurs montré qu'un tiers des sommes versées au titre du partage de la valeur étaient des substitutions de salaire.

Je considère en outre que l'Ondam est insincère.

M. Philippe Mouiller, président. - Je précise que j'ai relayé votre demande auprès du Gouvernement pour obtenir les éléments que vous demandez.

Mme Florence Lassarade. - Le congé de paternité n'est que partiellement appliqué. Peut-on évaluer son impact sur le bien-être de l'enfant ? C'était le principal intérêt de la mesure à mon sens. La mission d'information sénatoriale sur l'avenir de la santé périnatale et son organisation territoriale a publié son rapport. J'observe que le rôle du père y est très peu évoqué.

M. Daniel Chasseing. - Je suis d'accord avec Alain Milon : on sait qu'il y a des déficits, mais on n'essaie pas vraiment de les résoudre. Il est pourtant important d'équilibrer les comptes de la sécurité sociale, car celle-ci constitue la colonne vertébrale de notre société.

Ma question portera sur la création de la quatrième année en internat de médecine consacrée à la réalisation de stages. Les choses avancent lentement. On nous dit que le nombre d'internes l'an prochain sera plus faible, mais je n'ai pas compris pourquoi. Les stagiaires de quatrième année ne commenceront à exercer qu'en 2026. Un maître de stage pourra-t-il prendre en charge deux stagiaires ? Parfois les médecins sont surchargés et n'ont pas eu le temps de devenir maîtres de stages. Peut-être faut-il adapter les formations aux emplois du temps.

En ce qui concerne l'autonomie, les départements peuvent opter pour la fusion des sections soins et dépendance à titre expérimental. Pour que le dispositif puisse être généralisé, il faudra que l'APA représente la totalité des frais de séjour du pensionnaire avant déduction du ticket modérateur.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Les tableaux de notre rapporteure générale sont très clairs et l'analyse par branche est limpide.

L'assurance maladie et la branche vieillesse connaissent un déficit important. Il est de notre devoir d'alerter sur les soins inutiles et redondants, qui représentent, selon l'OCDE et l'Académie de médecine, 20 % des soins. Or le Gouvernement ne prévoit de récupérer que 900 millions d'euros à ce titre. C'est peu. Il en va de même en matière de lutte contre la fraude, alors que cette dernière s'élève à 13 milliards d'euros selon l'inspection générale des affaires sociales (Igas), voire à 15 milliards d'euros selon la Cour des comptes. On ne fait pas un effort suffisant. Il faudrait mobiliser davantage de contrôleurs. C'est pourquoi il ne saurait être question pour moi d'approuver les comptes. Certes des évolutions ont eu lieu en radiologie et en biologie, mais le problème de fond est la redondance entre les prescriptions du médecin généraliste et du spécialiste, de l'hôpital ou de la clinique : chacun prescrit la même mesure et finalement on fait plusieurs fois le même examen pour un même problème ! Voilà ce qui coûte cher. Il faut assurer l'effectivité de l'obligation du dossier médical partagé (DMP) et y verser automatiquement tous les résultats des examens.

Il faudrait aussi se pencher sur le rôle des mutuelles et de la sécurité sociale. À force de multiplier les financements croisés, on va tuer la sécurité sociale ! Les mutuelles doivent se concentrer sur certains secteurs et sur la prévention.

M. Alain Milon. - Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Les chiffres du Conseil d'orientation des retraites (COR) régime par régime montrent que ce sont surtout les retraites du public qui coûtent cher : elles constituent en fait un salaire différé qui n'est pas financé. Leur montant s'élève à 45 milliards d'euros et l'État s'endette pour les payer. C'est un déficit masqué. La convention « équilibre permanent des régimes » (EPR) du COR prévoit une intervention financière de l'État pour équilibrer les comptes des régimes de la fonction publique. C'est pertinent s'il dispose de l'argent nécessaire, mais en réalité il s'endette pour payer ce salaire différé. Le risque de faillite est donc réel. Pourquoi ne pas demander à la Cour des comptes de faire le point sur ce sujet ?

Nous devons donc repenser notre système de santé et de retraite. Et je n'ai pas parlé de la branche autonomie, qui est encore à l'équilibre, mais pour combien de temps...

Mme Céline Brulin. - Les interventions des uns et des autres préfigurent les débats que nous aurons lors de l'examen du PLFSS. Les orientations politiques exprimées sont très différentes.

Nous souscrivons à la proposition de rejet des comptes qui a été présentée. Les recettes ont été moins dynamiques en 2023, car les exonérations de cotisations non compensées ont progressé deux fois plus vite que les salaires. Cette question mérite d'être approfondie, même si le PLFSS lève certains tabous à cet égard.

Alors que l'on entend souvent un discours culpabilisant sur le fait que nos concitoyens abuseraient de certains droits, nos rapporteurs ont bien montré l'importance du non-recours à certaines prestations, comme à celles du Fiva ou encore au minimum vieillesse. Ils mettent aussi en évidence le niveau insuffisant des compensations à l'égard des départements.

Mme Marie-Do Aeschlimann. - Il était intéressant de montrer que coût de la réforme du congé de paternité s'est révélé conforme aux prévisions, à hauteur de 400 millions d'euros. Le taux de recours des pères progresse faiblement. Sans doute est-ce dû à un effet prix. Le montant de l'allocation de remplacement semble insuffisant pour inciter davantage de pères à recourir à ce dispositif. Alors que 76 % des mères qui ne sont pas en activité recourent au congé de maternité, 13 % des pères dans la même situation demandent un congé paternité. Comment expliquer cette différence de comportement ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Les rapporteurs des différentes branches ont complété avantageusement les informations qui figurent dans le rapport de la Cour des comptes et dans d'autres rapports. Ils ont bien souligné, de manière factuelle, l'importance du non-recours, notamment aux prestations du Fiva. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage au travail de notre ancienne collègue Aline Archimbaud, qui avait beaucoup travaillé sur l'amiante.

Madame Petrus, l'écart de 2,1 milliards d'euros que vous évoquez devrait être bien pire en 2024. Le PLFSS pour 2025 comprend d'importantes mesures relatives aux recettes, sur lesquelles nous reviendront d'ici quelques semaines.

Je partage le coup de sang d'Alain Milon. J'ai siégé à la CCSS, et j'ai pu observer une certaine forme de passivité, comme si l'on pouvait continuer sur cette voie indéfiniment. Or la crédibilité de la France est entamée, car notre deuxième poste de dépenses est le remboursement de la dette. Notre modèle social est menacé et nul ne s'en émeut.

M. Jomier a déploré à juste titre un court-termisme délétère. Le HCFP nous incite chaque année, dans ses avis, à revenir à une trajectoire soutenable. La ministre pourrait s'appuyer sur ces rapports pour faire en sorte de réduire des déficits et de garantir la soutenabilité de nos comptes. Nous devons nous demander quel modèle nous voulons mettre en oeuvre à l'avenir et trouver les réformes adéquates. On n'a jamais dépensé autant pour l'hôpital et pourtant le taux de satisfaction baisse. C'est la preuve que quelque chose ne va pas.

Madame Poncet Monge, nous aurons l'occasion de débattre des allégements de cotisations lors de l'examen du PLFSS. Le rapport Bozio-Wasmer comporte des pistes. La masse salariale n'a pas atteint le niveau prévu, et les revalorisations du Smic ont suscité une forte augmentation des allégements de cotisations patronales. C'est ce qui explique la situation actuelle. La forte croissance des allégements généraux pénalise les caisses de retraite, mais elle a aussi un impact sur les branches famille et maladie.

La fusion entre les sections soins et dépendance n'a pas encore été mise en oeuvre. J'ai l'impression que nombre de départements étaient désireux de se débarrasser de cette charge, ce qui explique la rallonge budgétaire.

Monsieur Vanlerenberghe, en 2023, le déficit de la branche maladie était de plus de 11 milliards d'euros, tandis que celui de la branche vieillesse s'élevait à 2,6 milliards. Toutefois, au cours des années à venir, le déficit de cette dernière s'accentuera. En l'absence de mesure, en 2027 les deux tiers du déficit de la branche vieillesse seraient dus au déficit de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Vous avez donc raison, nous devons repenser nos modèles. L'impact du vieillissement de la population a été sous-estimé. Nous sommes face à un mur en la matière et les conséquences sont nombreuses. N'oublions pas que les allégements de cotisations concernent beaucoup les emplois à bas salaire de l'aide à la personne. Or nous aurons de plus en plus besoin de ces emplois.

Oui, Madame Brulin, nous aurons de grands débats sur les recettes lors de l'examen du PLFSS et je m'en réjouis.

Mme Corinne Imbert, pour la branche assurance maladie. - La quatrième année d'internat en médecine générale a été créée en 2022. Elle ne pourra donc produire des effets sur le terrain qu'à partir du 1er novembre 2026. La réforme concernera les étudiants rentrés en première année en 2023, qui seront en quatrième année en 2026. Tous les textes d'application n'ont toutefois pas encore été publiés. Il serait souhaitable que les étudiants aient de la visibilité sur le dispositif. Cette quatrième année se déroulera en autonomie sous la supervision d'un maître de stage. Nous devons augmenter le nombre de ces derniers. On compte davantage de maîtres de stage universitaires, mais il faut poursuivre l'effort en la matière. De même, des désaccords sur la rémunération des docteurs juniors persistent entre la conférence des doyens de médecine et le collège national des généralistes enseignants, lequel soutient les étudiants. Ces points de blocage devront être levés pour que cette réforme, attendue dans les territoires, aboutisse.

M. Olivier Henno, pour la branche famille. - La question centrale est celle du pilotage de notre système de solidarité. Notre pays est parmi ceux qui dépensent le plus pour leur politique familiale : 2,2 % du PIB en 2021, quand d'autres pays européens n'y consacrent que 1,5 %. Nous dépensons de même 12,5 % de notre PIB pour notre système de santé : ce taux n'est que de 10 % dans la majorité des autres pays européens. De même, nous allouons 14 % de notre PIB aux retraites, quand nos voisins y consacrent moins de 12 %. La question des moyens n'est donc pas première. On ne peut pas parler de « désarmement » lorsque l'on dépense autant. Avant de dépenser plus, il faut commencer par dépenser mieux.

Le texte prévoit peu de mesures relatives à la mesure de la qualité dans la branche famille. La question majeure est celle de la régulation et de l'amélioration de la qualité. Concernant le congé de paternité, la Drees a mis en place une étude longue afin de suivre l'évolution des pratiques et des représentations paternelles au cours des trois premières années de l'enfant.

Madame Aeschlimann, les chiffres que vous citez sont ceux de 2021 et ne prennent donc pas pleinement en compte les effets de la réforme du congé de paternité. On note une amélioration, mais on se heurte au mur des mentalités. Les hommes au chômage sont davantage gênés de recourir au congé de paternité. Il est pourtant essentiel, comme le montre le livre de Victor Castanet, Les Ogres, de réformer nos systèmes de la petite enfance et des modes de garde. Là encore cela pose la question de la qualité, du pilotage et des modes d'organisation.

Mme Chantal Deseyne, pour la branche autonomie. - Le financement de la branche autonomie constitue un véritable défi. Nous sommes confrontés à un mur du vieillissement. Même si les crédits de la branche devraient augmenter de 6 % en 2025, la trajectoire ne nous incite pas à l'optimisme, car elle aboutira vite à un déficit. Nous venons de publier, avec Solanges Nadille et Anne Souyris, un rapport d'information sur la situation des Ehpad. Nous proposons notamment de créer une seconde journée de solidarité, pour financer la branche autonomie, et de fusionner les sections soins et dépendance, afin d'améliorer l'efficience du système. Il s'agit de redorer le blason des Ehpad, après le scandale de l'affaire Orpea qui a suivi la parution du livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet.

EXAMEN DES ARTICLES

Motion

La motion n°  1 est adoptée.

La commission décide de soumettre au Sénat une motion tendant à opposer la question préalable au projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale pour l'année 2023.

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