C. L'INFORMATION DU PARLEMENT EST INSINCÈRE, NOTAMMENT CONCERNANT LES CRÉDITS CONSACRÉS À LA FORMATION DES ENSEIGNANTS

L'information dont dispose la représentation parlementaire sur la ventilation des crédits par action au sein des programmes de la mission « Enseignement scolaire » est insincère. Au vu des montants des dépenses de chaque action, le Parlement n'est ainsi pas en mesure de suivre, au stade de la LFI, la répartition de dépenses s'élevant à 9,5 milliards d'euros en CP, soit près de 15 % des crédits de la mission hors contribution au « CAS Pensions ».

Ainsi, au niveau du programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré », la sous-consommation des crédits s'élève à seulement 214 millions d'euros. Toutefois, ce constat cache une disparité importante entre les actions composant le programme : ainsi les crédits de l'action 2 « Enseignement élémentaire » sont sur-exécutés à hauteur de 566 millions d'euros, alors que les crédits consacrés à la formation des enseignants sont sous-consommés à hauteur de 585 millions d'euros.

Ventilation par action de la sous-exécution
du programme 140 - Enseignement scolaire public du premier degré

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

De même, au niveau du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré », la sous-consommation des crédits s'élève à seulement 118 millions d'euros. Néanmoins, les crédits liés à l'action 2 « Enseignement général et technologique en lycée » ont été sur-exécutés de 1 755 millions d'euros et ceux liés à l'action 11 « remplacement » de 319 millions d'euros. À l'inverse, les crédits de l'action 5 « Enseignement post-baccalauréat en lycée » ont été sous-exécutés de 1,05 milliards d'euros et ceux liés à l'action 10 « formation des personnels enseignants et d'orientation », à hauteur de 454 millions d'euros.

Ventilation par action de la sous-exécution
du programme 141 - Enseignement scolaire public du second degré

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Sur ces deux programmes, les crédits ont manifestement été reportés entre actions pour financer les revalorisations salariales importantes des personnels, notamment enseignants (action 2 du programme 140 et action 2  du programme 141).

En particulier, la sous-consommation des dépenses liées à la formation des enseignants (action 4 du programme 140 et action 10 du programme 141) s'élève à 1,04 milliard d'euros. Cette sous-consommation des crédits consacrés à la formation des personnels s'est particulièrement accentuée en 2023, en augmentant de 70 %. Il s'agit toutefois d'une tendance existante depuis 2018.

Un tel niveau de sous-consommation des dépenses interroge d'une part sur la sincérité de la programmation budgétaire, et d'autre part sur la nécessité de telles dépenses.

Évolution du montant des crédits sous-exécutés consacrés
à la formation des personnels entre 2017 et 2023

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Comme le relève par ailleurs la Cour des comptes, les documents budgétaires ne permettent pas de distinguer entre les crédits destinés à la formation initiale des enseignants de ceux destinés à la formation continue, réduisant ainsi les capacités de suivi des moyens réellement engagés au regard des actions programmées lors de l'élaboration de la loi de finances. Dans le contexte de la réforme de la formation initiale des enseignants annoncée en avril 2024 par le Président de la République, l'absence d'une telle distinction est particulièrement préjudiciable.

De telles disparités de consommation des crédits entre les actions d'un même programme se reproduisent année après année. Elles doivent impérativement être corrigées au stade de la loi de finances pour permettre à la représentation nationale de voter sur des prévisions conformes à la réalité de l'exécution des dépenses.

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