N° 24

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 octobre 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités (procédure accélérée),

Par Mme Isabelle FLORENNES,

Sénatrice

Procédure de législation en commission,

en application de l'article 47 ter du Règlement

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet (2), président ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Mme Nathalie Delattre, vice-présidents ; Mmes Agnès Canayer, Muriel Jourda, M. André Reichardt, Mme Isabelle Florennes, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. Olivier Bitz, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Michel Masset, Mmes Marie Mercier, Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

660 (2023-2024) et 25 (2024-2025)

(2) M. François-Noël Buffet a été nommé membre du Gouvernement le 21 septembre 2024.

La commission a examiné cette proposition de loi selon la procédure de législation en commission,
en application de l'article 47 ter du Règlement.

En conséquence seuls sont recevables en séance, sur cette proposition de loi, les amendements visant à :

- assurer le respect de la Constitution,

- opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d'autres textes en cours d'examen ou avec les textes en vigueur,

- procéder à la correction d'une erreur matérielle.

L'ESSENTIEL

Par sa décision n° 2023-1062 QPC du 28 septembre 2023 (« M. François F. »), le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions du code de procédure pénale qui matérialisent, en matière correctionnelle, le régime communément appelé de « purge des nullités ». La même décision reportait l'effet de l'abrogation de ces dispositions, dont la disparition « sèche » n'apparaissait guère envisageable, au 1er octobre 2024.

C'est dans ce contexte que le président de la commission des lois, les anciens sénateurs François-Noël Buffet et Philippe Bonnecarrère1(*) ont déposé en juin 2024, aux côtés de plusieurs de leurs collègues, une proposition de loi2(*) visant à substituer aux dispositions abrogées des prescriptions tenant compte des exigences liées au droit à un recours juridictionnel effectif.

Examinée dans le cadre de la procédure de législation en commission, cette évolution législative a été approuvée par la commission des lois, qui en a conforté le dispositif à l'initiative de sa rapporteure, Isabelle Florennes.

I. UN RÉGIME DE PURGE DES NULLITÉS BOUSCULÉ PAR LA JURISPRUDENCE CONSTITUTIONNELLE

Élément clé de la procédure pénale française, le régime de purge des nullités a été récemment touché par deux censures constitutionnelles qui doivent conduire à repenser l'équilibre entre deux impératifs essentiels : d'une part, l'efficacité et la rapidité des procédures ; de l'autre, la pleine garantie des droits des parties.

A. LE RÉGIME DE PURGE DES NULLITÉS, ÉLÉMENT CENTRAL DE LA PROCÉDURE PÉNALE FRANÇAISE

Incarnation de l'adage selon lequel « Ennemie jurée de l'arbitraire, la forme est la soeur jumelle de la liberté » (L'esprit du droit romain dans les diverses phases de son développement, Rudof von Jhering, 1877), le régime des nullités est au coeur du code de procédure pénale : ce dernier comportait, au 1er septembre 2024, 135 occurrences du mot « nullité ».

Selon l'article 171 du code de procédure pénale, la nullité se produit « lorsque la méconnaissance d'une formalité substantielle prévue par une disposition du présent code ou toute autre disposition de procédure pénale a porté atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne », en cas d'atteinte aux droits de la défense ou de violation d'une règle d'ordre public (à l'instar de la prescription). Invocable devant toutes les juridictions pénales, elle a - par nature - pour effet l'annulation de l'acte concerné ; en d'autres termes, celui-ci ne peut alors plus être retenu contre la personne mise en cause ou mise en examen au cours de l'enquête ou de l'instruction ni devant la juridiction de jugement. Cette impossibilité touche non seulement l'acte lui-même, mais aussi l'ensemble des éléments de preuve qu'il a permis de recueillir (soit les actes subséquents de l'acte annulé).

Le prononcé d'une nullité a donc des conséquences lourdes sur le devenir d'un dossier pénal, et celles-ci sont d'autant plus dévastatrices que l'annulation intervient tardivement : s'il est en effet possible de régulariser un acte annulé lorsqu'une telle annulation intervient au début d'une enquête ou d'une instruction, cela devient difficile - voire impossible - avec l'approche du procès, ce qui est de nature à faire « tomber » des dossiers entiers, et donc à fragiliser la répression des infractions.

Dans le double objectif d'éviter que l'invocation des nullités ne soit un facteur d'annulations tardives et de limiter les recours dilatoires3(*), le législateur a mis en place des régimes dits « de purge » des nullités, c'est-à-dire des « mécanisme[s] qui rend[ent] irrecevable devant la juridiction de jugement toute exception tirée de la nullité de la procédure antérieure à sa saisine »4(*). Ceux-ci participent de l'expression d'une double loyauté en procédure pénale : loyauté de la preuve, qui ne peut être recueillie que selon les formes et procédures prescrites par la loi à peine d'annulation ; et loyauté de la défense qui ne peut pas se prévaloir de nullités qu'elle avait le loisir de soulever dans des phases antérieures de la procédure.

Cette « purge » est de deux ordres : il peut s'agir soit d'une purge progressive des actes d'instruction, qui doit s'effectuer dans un délai de six mois à compter de la notification desdits actes à la partie lésée (article 173-1 du code pénal), soit d'une purge globale en fin d'instruction, aujourd'hui inscrite aux articles 175 et suivants, 181, 269-1, 305-1 et 385 du code de procédure pénale, selon laquelle le renvoi du dossier par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction couvre l'ensemble des nullités antérieures.

Comme on l'aura compris, qu'elle qu'en soit la nature, la purge ne concerne que les cas dans lesquels le dossier fait l'objet d'une instruction, soit à ce jour environ 1,8 % des dossiers traités par les tribunaux correctionnels : comme l'a rappelé la direction des affaires criminelles et des grâces lors de son audition par la rapporteure, une telle particularité constitue l'une des plus-values fortes de la procédure d'instruction qui, plus contradictoire (donc plus lourde) que l'enquête préliminaire, sécurise la gestion de l'audience en limitant au cours de celle-ci l'invocation des nullités.

B. DES CENSURES QUI APPELLENT À UN MEILLEUR RESPECT DES DROITS DES PARTIES

Deux censures prononcées à la suite de questions prioritaires de constitutionnalité, intervenues en 2021 en matière criminelle et en 2023 en matière correctionnelle (cette seconde censure, dans le dossier « François F. », étant celle qui justifie la présente proposition de loi), sont venues appeler le législateur à un plus grand respect de l'équilibre des droits des parties et de l'égalité des armes.

En effet, par sa décision n° 2021-900 QPC du 23 avril 2021, « Vladimir M. », le Conseil constitutionnel s'était prononcé une première fois sur le mécanisme de purge des nullités en matière criminelle5(*). Le requérant soutenait que les quatrièmes alinéas de l'article 181 du code de procédure pénale (CPP) et de l'article 305-1 du même code, dans leur rédaction issue de la loi n° 85-1407 du 30 décembre 1985, étaient contraires aux droits et libertés garanties par la Constitution, dans la mesure où l'article 181 précité disposait que « lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance de mise en accusation couvre, s'il en existe, les vices de la procédure » : dès lors, aucune exception de nullité tirée des vices de la procédure antérieure à la mise en accusation n'était prévue, si bien que, en cas de défaut d'information, l'intéressé ne pouvait pas contester utilement les irrégularités de la procédure.

Le Conseil constitutionnel avait par conséquent jugé que les dispositions attaquées « méconnaiss[aient] le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense ».

Extraits de la décision n° 2021-900 QPC du 23 avril 2021

« 8. Le mécanisme de purge des nullités prévu par les dispositions contestées rend irrecevable, une fois l'ordonnance de mise en accusation devenue définitive, toute exception de nullité visant les actes de la procédure antérieure à cette ordonnance.

« 9. En vertu de l'article 170 du code de procédure pénale, en toute matière, la chambre de l'instruction peut, au cours de l'information, être saisie aux fins d'annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure par le juge d'instruction, par le procureur de la République, par les parties ou par le témoin assisté. En vertu de son article 175, les parties peuvent également exercer ce recours dans un délai d'un à trois mois après la réception de l'avis de fin d'information qui leur est notifié par le juge d'instruction. Enfin, conformément à l'article 186 du même code, la personne mise en examen peut faire appel, devant la chambre de l'instruction, de l'ordonnance de mise en accusation.

« 10. Ces dispositions garantissent à l'accusé la possibilité de contester utilement les nullités avant qu'intervienne la purge des nullités.

« 11. Toutefois, l'exercice de ces voies de recours suppose que l'accusé ait été régulièrement informé, selon le cas, de sa mise en examen ou de sa qualité de partie à la procédure, de l'avis de fin d'information ou de l'ordonnance de mise en accusation.

« 12. Or, les dispositions contestées ne prévoient aucune exception à la purge des nullités en cas de défaut d'information de l'intéressé ne lui ayant pas permis de contester utilement les irrégularités de procédure et alors même que cette défaillance ne procède pas d'une manoeuvre de sa part ou de sa négligence.

« 13. Dès lors, elles méconnaissent le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense. Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres griefs, elles doivent être déclarées contraires à la Constitution. »

Ces dispositions ont été modifiées par le législateur à l'occasion de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, dont l'article 6 a créé un nouvel article 269-1 au sein du code de procédure pénale et modifié l'article 305-1 du même code afin d'ouvrir aux accusés, dans certains cas, la possibilité de saisir le président de la chambre de l'instruction pour soulever une nullité alors même que le délai normal de « purge » a expiré. Néanmoins, la réécriture issue de ce texte restait d'une ampleur limitée, puisque :

- d'une part, elle se limitait à la matière criminelle ;

- d'autre part, elle demeurait étroitement liée aux circonstances de l'espèce sous-jacente au dossier « Vladimir M. », à savoir un défaut d'information, l'hypothèse retenue par la loi étant celle où « l'accusé n'a pas été régulièrement informé, selon le cas, de sa mise en examen ou de sa qualité de partie à la procédure, de l'avis de fin d'information judiciaire ou de l'ordonnance de mise en accusation », sans que d'autres cas soient envisagés.

C'est dans ce contexte qu'est intervenue une nouvelle censure, prononcée là encore à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité, le 28 septembre 2023. Dans cette décision6(*), le Conseil constitutionnel, appelé cette fois à se prononcer sur le mécanisme de purge des nullités en matière correctionnelle, a censuré - avec effet au 1er octobre 2024 - le premier alinéa de l'article 385 du code de procédure pénale selon lequel « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction ».

Extraits de la décision n° 2023-1062 QPC

« 8. Selon l'article 179 du code de procédure pénale, lorsque le juge d'instruction estime, à la fin de l'information judiciaire, que les faits dont il est saisi constituent un délit, l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel couvre, s'il en existe, les vices de la procédure. Dans ce cas, en application des dispositions contestées de l'article 385 du même code, les parties ne sont plus recevables, en principe, à soulever devant ce tribunal les nullités de la procédure antérieure.

« 9. D'une part, en vertu de l'article 170 du code de procédure pénale, en toute matière, la chambre de l'instruction peut, au cours de l'information, être saisie aux fins d'annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure par le juge d'instruction, par le procureur de la République, par les parties ou par le témoin assisté. Les articles 173-1 et 174 du même code soumettent à certaines conditions de recevabilité la possibilité de contester de tels actes ou pièces, sauf dans le cas où les parties n'auraient pu connaître le moyen de nullité. Son article 175 prévoit également que des requêtes en nullité peuvent être présentées, dans un certain délai, à compter de l'envoi de l'avis de fin d'information.

« 10. D'autre part, par dérogation au mécanisme de la purge des nullités prévu par les dispositions contestées, lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par le même article 175 aient été respectées, les parties demeurent recevables à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure.

« 11. Ces dispositions garantissent ainsi que le prévenu a été en mesure de soulever utilement les moyens de nullité dont il a pu avoir connaissance avant la clôture de l'instruction.

« 12. Toutefois, ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition ne prévoient d'exception à la purge des nullités dans le cas où le prévenu n'aurait pu avoir connaissance de l'irrégularité éventuelle d'un acte ou d'un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l'instruction.

« 13. Dès lors, les dispositions contestées méconnaissent le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense. Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres griefs, elles doivent donc être déclarées contraires à la Constitution. »

L'abrogation immédiate de ces dispositions étant de nature à « entraîn[er] des conséquences manifestement excessives », le Conseil constitutionnel en a reporté l'effet au 1er octobre 2024 et a jugé que, dans l'intervalle, il appartiendrait aux juridictions du fond de se prononcer « lorsque la purge des nullités a été ou est opposée à un moyen de nullité qui n'a pu être connu avant la clôture de l'instruction ». Cependant, depuis le 1er octobre dernier, ce régime transitoire n'est plus applicable, si bien qu'aucune « purge » ne peut être effectuée devant les tribunaux correctionnels. Il est donc urgent de modifier la loi, sous peine de maintenir une dangereuse instabilité dans le traitement des dossiers correctionnels : comme l'ont rappelé à la rapporteure les personnes entendues en audition, si les dossiers faisant l'objet d'une instruction sont marginaux sur le plan quantitatif, ils concernent cependant les affaires les plus lourdes ou les plus complexes, l'instruction étant notamment utilisée en matière de trafic de stupéfiants ou pour des cas de fraudes particulièrement sophistiquées.

II. UNE PROPOSITION DE LOI PERTINENTE ET ÉQUILIBRÉE

La censure prononcée par le Conseil constitutionnel impose au législateur de réécrire, sans tarder, les dispositions régissant la purge des nullités. La proposition de loi de François-Noël Buffet et Philippe Bonnecarrère présente, à cet égard, un double avantage.

Tout d'abord, elle apporte une réponse directe et équilibrée aux arguments mis en avant par le Conseil constitutionnel dans ses deux décisions de 2021 et de 2023, en retenant l'hypothèse dans laquelle les parties n'auraient pas été en capacité de connaître une nullité avant l'expiration du délai de purge, ce qui permet tout à la fois de respecter les termes de la Constitution et de préserver l'intérêt d'un mécanisme essentiel au bon fonctionnement des juridictions pénales.

Ensuite, évitant l'écueil commis par le législateur en 2021, elle retient une rédaction large et touche tous les types de juridictions (tribunal de police, tribunal correctionnel, cour criminelle départementale et cour d'assises) qui écarte le risque d'une censure ultérieure fondée sur des motifs analogues. L'ensemble des personnes sollicitées par la rapporteure lors des auditions ou par le biais de contributions écrites se sont d'ailleurs réjouies que le texte déposé au Sénat se soit fixé l'ambition non seulement de répondre à la censure prononcée en 2023, mais aussi de mettre l'ensemble de la procédure de purge des nullités en conformité à la Constitution - ce qui apparaît d'autant plus opportun dans un contexte où la Cour de cassation a, le 27 septembre dernier, transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 181 du code de procédure pénale (donc sur la purge des nullités en matière criminelle) qui devrait, selon toute vraisemblance, subir le même sort que l'article 385 en l'absence d'intervention rapide du législateur.

Dans ce contexte, la commission des lois n'a pas modifié l'économie générale de la proposition de loi. À l'initiative de la rapporteure, elle a adopté, outre un amendement strictement légistique à l'article 2 (COM-3), deux amendements permettant :

- d'aller au bout de la logique de mise en conformité de la loi avec la Constitution en mettant à jour le deuxième alinéa de l'article 385 du code de procédure pénale pour y intégrer la rédaction issue de la décision constitutionnelle de 2021 (amendement COM-2) ;

- de simplifier le nouveau mécanisme de « purge » en rendant les juridictions du fond, plutôt que les chambres de l'instruction ou leurs présidents, compétentes pour connaître des nullités qui n'ont pas pu être invoquées faute d'avoir été connues avant l'expiration des délais prévus à l'article 175, en ce qui concerne l'établissement de l'ordonnance de règlement, ou avant la clôture de l'instruction en matière criminelle (amendement COM-1).

*

* *

Réunie le 9 octobre 2024, la commission a adopté la proposition de loi visant à sécuriser le régime de purge de nullités selon la procédure de législation en commission prévue par l'article 47 ter du Règlement.

En conséquence seuls seront recevables en séance les amendements visant à :

- assurer le respect de la Constitution ;

- opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d'autres textes en cours d'examen ou avec les textes en vigueur ;

- procéder à la correction d'une erreur matérielle.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
Modification du régime de purge des nullités

L'article 1er tire les conséquences de la censure résultant de la décision du Conseil constitutionnel n° 2023-1062-QPC du 28 septembre 2023 en rénovant le mécanisme de « purge des nullités » en matière contraventionnelle, correctionnelle et criminelle.

Constatant que le dispositif proposé par les auteurs constituait une réponse pertinente et équilibrée à une telle censure, la commission des lois a adopté l'article 1er en rationalisant le dispositif proposé et en confortant la compétence des juridictions du fond pour connaître des nullités que les parties ne pouvaient pas connaître avant la clôture de l'instruction.

1. Une rénovation équilibrée et pertinente du régime de « purge » des nullités

a) La censure intervenue en septembre 2023

Par sa décision n° 2023-1062 - QPC du 28 septembre 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le mécanisme de purge des nullités en matière correctionnelle.

Était en cause le premier alinéa de l'article 385 du code de procédure pénale, aux termes duquel « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction ». Plus largement, étaient contestées les dispositions qui permettent aux parties, en cas d'instruction, de soulever des nullités en matière correctionnelle jusqu'au renvoi de l'affaire devant la juridiction de jugement (l'ordonnance de renvoi ayant alors pour fonction, en matière correctionnelle comme en matière criminelle, de « purger » le dossier de ses nullités éventuelles), selon un processus qui fonctionne en deux temps :

- au cours de l'instruction, les parties disposent d'un délai de six mois pour invoquer une nullité à compter du moment où elles ont communication d'un acte qui leur paraît entaché d'un vice de procédure ;

- à la fin de l'instruction, le renvoi devant la juridiction de jugement a pour effet de couvrir toutes les nullités antérieures, empêchant les parties de s'en prévaloir devant le tribunal compétent au fond.

Le régime de purge des nullités en matières correctionnelle et criminelle

Une [...] nullité peut être soulevée, sous certaines conditions, tant au cours de la phase d'instruction que de la phase de jugement.

• Lorsqu'une information judiciaire est ouverte, l'article 170 du CPP dispose que la chambre de l'instruction peut, au cours de l'information, être saisie, en toute matière, aux fins d'annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure. Peuvent être contestés sur ce fondement, d'une part, les actes accomplis par le juge d'instruction ou ses délégués afin d'approfondir les investigations et déterminer s'il existe des charges suffisantes pour renvoyer l'affaire dont il est saisi devant une juridiction de jugement (interrogatoires, auditions, confrontations, transports, perquisitions, réquisitions, interceptions de correspondances, etc.) et, d'autre part, les actes d'enquête et de poursuite réalisés préalablement à la saisine du juge d'instruction.

L'article 173 du CPP précise les conditions dans lesquelles la chambre de l'instruction peut être saisie par le juge d'instruction, le procureur de la République, la personne mise en examen, la partie civile ou le témoin assisté, lorsqu'ils estiment qu'une nullité a été commise.

Les nullités ne peuvent toutefois pas être soulevées à tout moment de la phase d'instruction. Selon l'article 174 du CPP, lorsque la chambre de l'instruction est saisie d'une requête en nullité, tous les moyens pris de nullité de la procédure doivent lui être proposés. À défaut, les parties ne sont plus recevables à en faire état ultérieurement, sauf dans l'hypothèse où elles n'auraient pas pu les connaître.

[...] Cette forclusion ne fait toutefois pas obstacle à l'annulation d'actes et de pièces de la procédure par la chambre de l'instruction elle-même qui dispose, sur le fondement de l'article 206 du CPP, de la possibilité de soulever d'office toute exception de nullité affectant une procédure dont elle est saisie.

• En l'absence d'instruction préparatoire, qui n'est pas obligatoire en matière contraventionnelle ou correctionnelle, la juridiction de jugement peut être saisie directement d'une exception de nullité portant sur les actes effectués lors de l'enquête ou sur la citation directe. Elle doit alors être présentée, sous peine d'irrecevabilité, in limine litis, c'est-à-dire avant toute défense au fond. [...]

La purge des nullités par l'ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement

[...] La purge des nullités en matière correctionnelle

• En matière correctionnelle, le mécanisme de purge des nullités intervenant à la fin de l'information judiciaire a été institué par la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale. Alors que seuls le procureur de la République et le juge d'instruction disposaient jusqu'alors de la possibilité de saisir la chambre d'accusation d'une requête en nullité, cette loi a également ouvert cette possibilité aux parties. En contrepartie, le législateur les a privées du droit de se prévaloir, lors de l'audience de jugement devant le tribunal, de la nullité d'actes antérieurs à l'ordonnance de renvoi ou de la nullité de cette ordonnance, les parties ayant eu la possibilité de présenter des requêtes à cette fin pendant toute l'instruction préparatoire.

Ce mécanisme résulte de la combinaison du dernier alinéa de l'article 179 du CPP et du premier alinéa de l'article 385 du même code. En application des premières dispositions, « Lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance [de renvoi devant le tribunal correctionnel] couvre, s'il en existe, les vices de la procédure ». Aux termes des secondes, « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction ». L'ordonnance de renvoi étant ainsi réputée avoir purgé tous les vices de la procédure, une exception en nullité portant sur cette dernière est désormais irrecevable devant le tribunal correctionnel.

• L'article 385 du CPP apporte, toutefois, deux tempéraments à ce mécanisme :

- son deuxième alinéa prévoit qu'en cas de défaut de notification de l'ordonnance ou de l'arrêt de renvoi ou d'absence de certaines mentions, le tribunal correctionnel est tenu de renvoyer la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction afin qu'elle soit régularisée ;

- son troisième alinéa dispose, quant à lui, qu'en cas de méconnaissance de l'article 175 du CPP, selon lequel le juge d'instruction doit notifier aux avocats des parties ou aux parties elles-mêmes l'avis de fin d'information et leur accorder un délai pour exercer certains droits, dont notamment celui de former une requête en nullité devant la chambre de l'instruction, « les parties demeurent recevables, par dérogation aux dispositions du premier alinéa, à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure ».

Ces tempéraments sont justifiés par le fait que le défaut de notification de l'avis de fin d'information, de l'ordonnance ou de l'arrêt de renvoi, ainsi que l'absence de certaines mentions relatives notamment aux faits incriminés, peuvent faire obstacle à l'exercice effectif du droit reconnu aux parties de former des requêtes en annulation au stade de l'instruction. Le législateur a ainsi prévu, selon la nature de l'irrégularité, qu'il soit procédé au renvoi de la procédure devant la juridiction d'instruction ou, afin d'éviter la réouverture de l'information, que les parties puissent directement soulever l'irrecevabilité en cause devant le tribunal correctionnel afin qu'il en connaisse.

[...] La purge des nullités en matière criminelle

• En matière criminelle, le mécanisme de purge des nullités est prévu par le quatrième alinéa de l'article 181 du CPP, en vertu duquel « lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance de mise en accusation couvre, s'il en existe, les vices de la procédure », et par l'article 305-1 du même code. [...] un nouvel article 269-1, introduit au sein du CPP [par la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire], dispose désormais que, « Lorsque l'accusé n'a pas été régulièrement informé, selon le cas, de sa mise en examen ou de sa qualité de partie à la procédure, de l'avis de fin d'information judiciaire ou de l'ordonnance de mise en accusation et que cette défaillance ne procède pas d'une manoeuvre de sa part ou de sa négligence, il peut saisir le président de la chambre de l'instruction alors même que l'ordonnance de mise en accusation est devenue définitive et au plus tard trois mois avant la date de sa comparution devant la cour d'assises, d'une requête contestant les éventuelles irrégularités de la procédure d'information ».

Source : Conseil constitutionnel, commentaire
de la décision n° 2023-1062 précitée.

Le requérant soutenait que ces dispositions étaient contraires à la Constitution au motif que certains moyens de nullité « avaient été, selon lui, révélés postérieurement à l'audience du tribunal correctionnel »7(*) ; il avait ainsi soulevé une question prioritaire de constitutionnalité mettant en avant une possible contrariété de ce régime avec « le principe des droits de la défense et le droit à un recours effectif garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 »8(*).

Par le passé, le Conseil constitutionnel a expressément admis la conformité à la Constitution du principe d'une purge des nullités : dans sa décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, il a en effet jugé qu'un tel mécanisme ne méconnaissait en lui-même aucun principe ou aucune règle de valeur constitutionnelle dès lors que, en pratique, les modalités d'exercice des recours en nullité (possibilité de former une requête en annulation au cours de l'information ; information du mis en examen, dès le début de l'instruction, de son droit d'en contester les actes) garantissaient le respect des droits de la défense9(*).

Cela étant, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le principe du caractère contradictoire de la procédure « implique notamment qu'aucune sanction ayant le caractère d'une punition ne puisse être infligée à une personne sans que celle-ci ait été mise à même de présenter ses observations sur les faits qui lui sont reprochés »10(*) ; ce même principe fait partie d'un « bloc » de « droits processuels qui découlent de la garantie des droits » et qui ont une valeur constitutionnelle11(*). Le Conseil avait, d'ailleurs, déjà fait référence à cette position en 2021, à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur un sujet analogue, c'est-à-dire sur le régime de purge des nullités en matière criminelle12(*) : il avait alors relevé que « l'exercice de[s] voies de recours [en matière de nullités] suppose que l'accusé ait été régulièrement informé, selon le cas, de sa mise en examen ou de sa qualité de partie à la procédure, de l'avis de fin d'information ou de l'ordonnance de mise en accusation » et qu'une telle condition ne pouvait être considérée comme atteinte dès lors que les dispositions contestées « ne [prévoyaient] aucune exception à la purge des nullités en cas de défaut d'information de l'intéressé ne lui ayant pas permis de contester utilement les irrégularités de procédure » et ce, même en l'absence de manoeuvre ou de négligence de l'accusé. Il avait, par conséquent, censuré le régime de purge des nullités en matière criminelle et poussé le législateur à intervenir pour en équilibrer la portée13(*).

Il était logique que le Conseil reprenne ce raisonnement dans sa décision n° 2023-1062 QPC et qu'il juge que les dispositions contestées « méconnaissent le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense » (paragraphe 13) puisque « ni [ces] dispositions [...] ni aucune autre disposition ne prévoient d'exception à la purge des nullités dans le cas où le prévenu n'aurait pu avoir connaissance de l'irrégularité éventuelle d'un acte ou d'un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l'instruction » (paragraphe 12). Il a, par conséquent, prononcé l'abrogation des mots « sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction » au premier alinéa de l'article 385 du code de procédure pénale - ce qui a pour effet pratique de conduire à la suppression pure et simple du régime de purge des nullités : la version consolidée du texte ainsi modifié reconnaît, sans aucune exception, la compétence du tribunal correctionnel pour se prononcer sur l'ensemble des nullités de procédure qui lui seraient soumises.

Constatant qu'une abrogation immédiate aurait des conséquences manifestement excessives - au vu, en particulier, de l'intérêt du mécanisme de purge des nullités dans le fonctionnement quotidien des juridictions et de ses apports à une bonne administration de la justice -, le Conseil constitutionnel a reporté les effets de cette modification au 1er octobre 2024 et a chargé, dans l'intervalle, les juridictions du fond de se prononcer au cas par cas sur les nullités qui seraient invoquées par les requérants et qui n'auraient pas pu être connues à la clôture de l'instruction. L'abrogation est donc effective depuis quelques jours, ce qui est de nature à créer de lourdes difficultés pour les tribunaux correctionnels, les dossiers traités par le biais de l'instruction étant généralement les plus complexes, les plus graves et les plus techniques14(*) - donc ceux dans lesquels des nullités sont les plus susceptibles d'être invoquées et d'emporter des effets dévastateurs sur la conduite des poursuites.

b) La solution envisagée par les auteurs de la proposition de loi

La suppression pure et simple du régime de purge des nullités prévu par l'article 385 du code de procédure pénale n'apparaissant guère envisageable15(*), l'article 1er de la proposition de loi déposée par François-Noël Buffet et Philippe Bonnecarrère en juin 2024 prévoit :

- d'exclure du mécanisme de purge des nullités les vices de procédure que les parties ne pouvaient pas connaître avant la clôture de l'instruction, ce qui répond directement à la censure prononcée par le Conseil constitutionnel ;

- d'appliquer ce principe non seulement à la matière correctionnelle (donc aux articles 179 et 385 du code de procédure pénale), mais aussi dans les domaines contraventionnel (article 178 du code) et criminel (articles 181, 269-1 et 305-1).

Plus en détail, le mécanisme ainsi instauré serait le suivant :

- le tribunal de police serait compétent pour traiter des nullités qui n'ont pas pu être connues avant la clôture de l'instruction (ce cas d'espèce, largement théorique, reste cependant possible dans l'hypothèse où l'instruction révèle que l'infraction supposée être un délit au début des investigations tombe finalement sous une qualification contraventionnelle) ;

- le tribunal correctionnel serait compétent pour connaître des mêmes nullités, sauf dans l'hypothèse où celles-ci affecteraient les actes préalables à l'ordonnance de règlement : dans ce cas, les nullités qui se manifesteraient après l'expiration des délais prévus à l'article 175 du code de procédure pénale seraient soumises, selon la procédure de droit commun, à la chambre de l'instruction ;

- une solution identique s'appliquerait pour les cours d'assises ou les cours criminelles départementales, avec là encore un tempérament - voire un doublon - puisque l'accusé pourrait parallèlement saisir le président de la chambre de l'instruction d'une nullité qu'il considère ne pas avoir pu connaître pendant l'instruction, selon la procédure prévue depuis 2021 par l'article 269-1 et qui concerne à ce jour la seule hypothèse dans laquelle le même accusé n'a pas été informé de sa qualité de partie à la procédure ou des étapes qui marquent l'aboutissement de l'instruction.

Ce régime serait applicable aux juridictions pour mineurs, le code pénal de la justice des mineurs étant aligné en la matière sur le droit commun.

S'agissant de sa mise en oeuvre dans le temps, ce régime serait applicable dès l'adoption définitive du texte, en vertu du principe général fixé à l'article 112-2 du code pénal qui rend immédiatement opposables aux infractions (même commises avant leur entrée en vigueur) les lois fixant « les formes de la procédure ».

2. La position de la commission 

À l'instar des personnes et entités sollicitées par le biais d'auditions ou de contributions écrites, la rapporteure se félicite que le texte déposé au Sénat ne se borne pas à apporter une réponse ponctuelle et limitée à une censure constitutionnelle, mais qu'il ait un objet plus large de mise en conformité de l'ensemble des régimes de purge des nullités avec la Constitution. De même que l'intégralité des acteurs du monde judiciaire, elle insiste par ailleurs sur l'urgence qui s'attache à l'adoption d'une loi pour combler le vide créé par l'abrogation intervenue, pour l'article 385, depuis le 1er octobre dernier : en effet, depuis cette date, plus aucun régime de purge n'est applicable devant les tribunaux correctionnels, ce qui est de nature à déstabiliser et à perturber lourdement l'activité de ces juridictions, déjà surchargées en plusieurs points de notre territoire.

Sous l'impulsion de la rapporteure, la commission a souhaité à la fois aller au bout de la logique qui a animé les auteurs en assurant la conformité à la Constitution d'autres dispositions incluses dans le régime de purge des nullités, et simplifier le dispositif pour éviter tout « effet pervers » sur les chambres de l'instruction.

C'est ainsi qu'elle a adopté deux amendements visant à :

faire évoluer le second alinéa de l'article 385 du code de procédure pénale, relatif à la purge des nullités en matière correctionnelle : si celui-ci est conforme à la Constitution par l'effet conjugué de ses dispositions expresses et de la jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour de cassation, il présente cependant une rédaction qui, d'une part, n'est pas homogène avec celle qui a été adoptée par le législateur en 2021 en matière criminelle et qui, d'autre part, ne comporte pas explicitement une mention selon laquelle l'ignorance de la personne mise en cause ne peut lui profiter qu'en l'absence de manoeuvre ou de négligence de sa part (amendement COM-2) ;

rationaliser les modalités futures d'examen des nullités que les parties ne pouvaient pas connaître avant la clôture de l'instruction en rendant les juridictions du fond seules compétentes pour les examiner. Au vu des délais stricts dans lesquels sont insérées les décisions des chambres de l'instruction et de leurs présidents, de l'importance de leurs prérogatives et de l'état de saturation de certaines d'entre elles dans plusieurs juridictions, il n'apparaît en effet ni opportun, ni cohérent de leur confier une nouvelle tâche qui, libellée en des termes larges, peut donner lieu à un contentieux de masse, est un facteur de rivalité des compétences (et donc de complexité procédurale) et, comme l'a relevé le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation Nicolas Bonnal lors de son audition16(*), semble pouvoir être utilisée à des fins strictement dilatoires. Il est ainsi préférable de concentrer l'examen des nullités visées par la proposition de loi dans les mains du juge du fond (amendement COM-1), ce qui permettra de répondre de manière pleine et entière aux demandes du Conseil constitutionnel (dont la jurisprudence n'impose par une telle multiplicité des recours) sans générer des effets de bord défavorables pour les justiciables comme pour les juridictions.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 2
Application outre-mer

L'article 2 rend le nouveau régime de purge des nullités applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Après l'avoir modifié pour procéder à une actualisation légistique, la commission a adopté cet article.

Conformément à l'article 74 de la Constitution, la Polynésie française, les îles Wallis-et-Futuna, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises sont régies par le principe de spécialité législative : la loi n'y est applicable que si le législateur le prévoit par une mention expresse, obligeant en matière pénale à une actualisation régulière de l'article 804 du code de procédure pénale.

Afin de garantir la pérennité et la régularité du mécanisme de purge des nullités dans les outre-mer, l'article 2 vise à rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis et Futuna les dispositions issues de l'article 1er de la proposition de loi. La commission n'y a apporté, à l'initiative de la rapporteure, qu'une correction légistique (amendement COM-3) visant à tenir compte de l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi pénale postérieurement au dépôt de la proposition de loi (à savoir la loi n° 2024-582 du 24 juin 2024 améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels, qui doit être visée en lieu et place de la loi du 10 mai 2024 visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires).

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

__________

MERCREDI 9 OCTOBRE 2024

M. Christophe-André Frassa, président. - Nous examinons aujourd'hui, selon la procédure de législation en commission définie aux articles 47 ter et suivants de notre Règlement, rapport de notre collègue Isabelle Florennes sur la proposition de loi visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités.

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui répond à un enjeu à la fois complexe sur le plan technique et essentiel sur le plan opérationnel, puisqu'elle traite du mécanisme de purge des nullités. Sur ce sujet relativement aride, je tenterai d'être à la fois claire et concise.

Tout d'abord, qu'est-ce que la purge des nullités ? Vous le savez, les nullités en matière pénale ont - légitimement - des conséquences lourdes : un acte affecté d'un vice grave de procédure peut être déclaré nul et cette nullité interdit de faire référence, dans toute la suite des investigations et du jugement, non seulement à cet acte lui-même, mais aussi à l'ensemble des actes dits subséquents.

Une déclaration de nullité a donc des conséquences substantielles sur la vie des dossiers, et elle emporte des effets d'autant plus dévastateurs qu'elle intervient tardivement dans la procédure : on perçoit bien qu'une nullité mise au jour aux premiers stades d'une enquête peut être régularisée, à l'inverse d'un vice de forme qui ne serait repéré que quelques jours avant la tenue d'un procès...

C'est pourquoi, pour ménager un équilibre entre la loyauté de la preuve d'une part et la bonne administration de la justice de l'autre, le législateur a mis en place, dès les années 1990, des mécanismes visant à purger les nullités. L'un de ces mécanismes permet de considérer que toute nullité antérieure à la clôture d'une instruction est couverte par l'ordonnance de renvoi devant une juridiction de jugement : en d'autres termes, passée cette échéance, la nullité ne peut plus être invoquée par les parties. Ce mécanisme ne concerne que les dossiers traités sous la forme de l'instruction, à l'inverse de ceux qui font l'objet d'une enquête préliminaire : cela représente, certes, une minorité d'affaires - environ 2 % selon le ministère de la justice -, mais couvre les dossiers les plus complexes, les plus graves ou les plus techniques ; c'est dire que le sujet est d'une importance capitale pour nos juridictions.

J'en arrive à la proposition de loi qui nous occupe aujourd'hui.

Déposé par Philippe Bonnecarrère et François-Noël Buffet en juin 2024, le texte trouve son origine dans une censure prononcée par le Conseil constitutionnel le 28 septembre 2023 à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur la purge des nullités en matière correctionnelle. En pratique, le requérant avait découvert ce qu'il estimait être une cause de nullité après la clôture de l'instruction, alors même que le vice supposé s'était produit pendant l'instruction elle-même : ainsi, la purge était intervenue sans qu'il ait eu l'occasion de faire valoir ses arguments. Le Conseil constitutionnel a estimé qu'une telle situation « [méconnaissait] le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense » dans la mesure où le droit ne prévoyait pas « d'exception à la purge des nullités dans le cas où le prévenu n'aurait pu avoir connaissance de l'irrégularité éventuelle d'un acte ou d'un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l'instruction ».

C'est ainsi que le Conseil a censuré une partie de l'article 385 du code de procédure pénale, en reportant l'effet de cette abrogation au 1er octobre 2024.

Je rappelle que la position du juge constitutionnel, loin d'être surprenante, était en pleine cohérence avec sa jurisprudence : il avait en effet censuré en 2021 le régime de purge des nullités en matière criminelle pour un motif analogue. Il s'agissait, à l'époque, du cas d'un accusé qui n'avait pas été mis en mesure de contester utilement sa mise en accusation avant que celle-ci ne soit devenue définitive pour la simple et bonne raison qu'il n'en avait pas eu connaissance. Le législateur était intervenu en créant, par la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, un nouvel article 269-1 au sein du code de procédure pénale, afin de rendre notre droit conforme avec la Constitution.

Au-delà de ces développements théoriques, mes chers collègues, vous l'aurez compris : faute pour le législateur d'avoir pu modifier la loi en temps utile, il n'y a plus, depuis quelques jours, de purge des nullités devant les tribunaux correctionnels.

Plus encore, ce sont toutes les procédures de purge des nullités qui sont désormais menacées, comme en témoigne la QPC récemment transmise par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel et qui vise à transposer à la matière criminelle ce que le Conseil a énoncé en 2023 pour le domaine correctionnel...

Il nous appartient d'agir sans tarder, comme le permet la proposition de loi déposée par nos anciens collègues.

Comme son titre l'indique, ce texte s'attache à sécuriser le mécanisme de purge des nullités dans l'ensemble de notre droit. De même que toutes les personnes ou entités que j'ai entendues en audition ou dont j'ai recueilli les contributions écrites, je me réjouis que la proposition de loi permette de traiter le sujet dans son ensemble et de gérer toutes les conséquences de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, sans attendre de nouvelles censures.

Plus en détail, la proposition de loi prévoit d'exclure du mécanisme de purge des nullités tous les vices de procédure que les parties ne pouvaient pas connaître avant la clôture de l'instruction, ce qui répond directement à la décision du Conseil constitutionnel. Elle prévoit d'appliquer ce principe non seulement à la matière correctionnelle (articles 179 et 385 du code de procédure pénale), mais aussi dans les domaines contraventionnel (article 178) et criminel (articles 181, 269-1 et 305-1).

En pratique, le mécanisme instauré serait le suivant.

Au niveau contraventionnel, le tribunal de police serait compétent pour traiter des nullités qui n'ont pas pu être connues avant la clôture de l'instruction.

Le tribunal correctionnel serait compétent pour connaître des mêmes nullités, sauf dans l'hypothèse où celles-ci affecteraient les actes préalables à l'ordonnance de règlement : dans ce cas, les nullités qui se manifesteraient après l'expiration des délais prévus à l'article 175 du code de procédure pénale seraient soumises, selon la procédure de droit commun, à la chambre de l'instruction.

Une solution identique s'appliquerait pour les cours d'assises ou les cours criminelles départementales avec, là encore, un tempérament puisque l'accusé pourrait parallèlement saisir le président de la chambre de l'instruction d'une nullité qu'il considère ne pas avoir pu connaître pendant l'instruction, selon la procédure prévue depuis 2021 à l'article 269-1 du code.

Globalement, le texte constitue une réponse pertinente et équilibrée à la censure prononcée par le Conseil constitutionnel : je vous proposerai donc d'en respecter l'économie générale. Pour autant, mes travaux ont montré qu'il était nécessaire de corriger quelques difficultés techniques.

La première est purement légistique et concerne l'article 2, avec une actualisation de référence pour rendre le texte applicable dans les collectivités ultramarines régies par le principe de spécialité législative.

La deuxième concerne la prise en compte, en matière correctionnelle, de l'adaptation législative survenue en 2021 pour le domaine criminel : je vous proposerai d'adopter une rédaction rappelant que l'ignorance de la personne mise en cause ne peut lui profiter qu'en l'absence de manoeuvre ou de négligence de sa part.

Enfin, la troisième procède de la nécessité de rationaliser le dispositif en évitant tout doublon dans les procédures de purge et en écartant le risque d'un engorgement des chambres de l'instruction. Pour ce faire, je vous propose d'utiliser deux leviers.

Pour les tribunaux correctionnels, tout d'abord, il me semble préférable de supprimer la compétence que les auteurs souhaitaient confier aux chambres de l'instruction pour les ordonnances de règlement : une prérogative analogue peut sans difficulté être exercée par les tribunaux correctionnels eux-mêmes, ce qui simplifie la future procédure tout en assurant le plein respect de la jurisprudence constitutionnelle.

En matière criminelle, ensuite, les auditions ont révélé que le texte risquait de créer un doublon entre la compétence des cours d'assises, ou des cours criminelles départementales, et celle des présidents des chambres de l'instruction. Pour les mêmes raisons, je vous proposerai de nous en tenir à la compétence du juge du fond pour connaître de l'ensemble des nullités que l'accusé ne pouvait pas connaître avant la clôture de l'instruction.

En conclusion, je me félicite que le Sénat prenne ses responsabilités en adoptant une proposition de loi urgente et nécessaire et en employant, pour ce faire, la formule rapide que constitue la législation en commission. J'en appelle au Gouvernement pour faciliter l'adoption rapide du texte par l'Assemblée nationale : nos juridictions ont besoin que, sur un tel sujet, le Parlement agisse dans le consensus et dans la célérité.

M. Didier Migaud, garde des sceaux, ministre de la justice. - Comme l'a rappelé Madame la rapporteure, la proposition de loi dont l'examen nous réunit aujourd'hui fait suite à la décision du Conseil constitutionnel du 28 septembre 2023 qui a censuré une partie de l'article 385 du code de procédure pénale.

Dans sa décision, le Conseil constitutionnel a jugé que le mécanisme de purge des nullités devant le tribunal correctionnel n'était conforme ni au droit à un recours juridictionnel effectif, ni aux droits de la défense. Le mécanisme de purge des nullités encadre en effet le droit pour les parties de soulever des nullités au cours de l'information judiciaire, puis devant le tribunal correctionnel. En application de ce principe, aucune nullité ne peut être soulevée à l'audience dès lors que le tribunal a été saisi à l'issue d'une information judiciaire.

Il s'agit ainsi de la contrepartie logique de la possibilité donnée aux parties de soulever des nullités au cours de l'information judiciaire devant le tribunal. Les parties ne sont plus recevables à soulever des nullités puisqu'elles ont la faculté de le faire tout au long de la procédure d'instruction.

Or le Conseil constitutionnel a censuré l'article 385 du code de procédure pénale au motif qu'il ne permettait pas à une partie de soulever une nullité devant le tribunal alors même qu'elle n'avait eu connaissance de celle-ci que postérieurement à la clôture de l'information. Les effets de l'abrogation ont été reportés au 1er octobre 2024. Depuis cette date, le mécanisme de purge des nullités devant le tribunal correctionnel n'est plus applicable. Il apparaît donc indispensable de rétablir le mécanisme de purge des nullités. C'est précisément l'objet de la proposition de loi que vous examinez.

En effet, ce mécanisme est essentiel. Il permet de sécuriser les procédures en cours et de limiter les recours dilatoires afin d'éviter une remise en cause tardive de la procédure alors même que les parties disposent du droit de saisir la chambre de l'instruction tout au long de la procédure et que la chambre de l'instruction peut également relever d'office tout moyen de nullité à l'occasion de l'examen de la régularité de la procédure.

Ce dispositif est d'autant plus nécessaire que, lorsqu'un acte procédural est annulé, tous les actes subséquents le sont également : cela peut parfois conduire à l'annulation de pans entiers de dossiers de procédures longues et complexes. En cela, la purge des nullités contribue à la bonne administration de la justice. Elle constitue par ailleurs l'une des spécificités de la procédure d'information judiciaire en étant le corollaire d'un cadre procédural qui accorde une place renforcée au principe du contradictoire, et elle sécurise davantage les procédures d'instruction que les enquêtes préliminaires ou de flagrance pour lesquelles le contrôle des nullités ne s'exerce qu'au stade de l'audience de jugement.

Ainsi, cette proposition de loi rétablit le mécanisme de purge des nullités devant le tribunal correctionnel tout en ajoutant l'exception résultant de la décision du Conseil constitutionnel, c'est-à-dire en permettant qu'une nullité puisse toujours être soulevée si la partie n'a pu en avoir connaissance avant la clôture de l'instruction. Par cohérence, le texte prévoit cette possibilité devant l'ensemble des juridictions répressives, et non pas seulement devant le tribunal correctionnel.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est favorable à l'adoption de cette proposition de loi et aux amendements que vous présentez, Madame la rapporteure. Nous allons oeuvrer pour que la proposition de loi soit rapidement adoptée par l'Assemblée nationale, comme vous l'appelez de vos voeux.

M. Christophe Chaillou. - Monsieur le garde des sceaux, vous avez évoqué les raisons qui nous conduisent à agir dans l'urgence : il est indispensable aujourd'hui de répondre à cette situation dans des délais contraints.

Il convient également de souligner le retard avec lequel le Gouvernement a souhaité se saisir de ce dossier. Comme vous l'avez très bien dit, Madame la rapporteure, il est urgent d'agir aujourd'hui pour rétablir le mécanisme de purge des nullités ; il y va de la sécurité juridique comme de la rapidité d'un certain nombre de procédures. Ce texte permettra ainsi de régulariser certaines situations sans porter atteinte aux droits fondamentaux des justiciables.

C'est la raison pour laquelle, nonobstant l'origine de ce processus, et en particulier de la question prioritaire de constitutionnalité, laquelle était susceptible de poser problème à certains d'entre nous, nous sommes favorables à cette proposition de loi, ainsi qu'aux amendements déposés par Madame la rapporteure.

Madame la rapporteure, vous avez évoqué la nécessité du consensus et de la célérité ; j'ajouterai, pour ma part, celle de la responsabilité.

EXAMEN DES ARTICLES SELON LA PROCÉDURE DE LÉGISLATION EN COMMISSION

M. Christophe-André Frassa, président. - Nous entamons l'examen des articles. Conformément au vade-mecum sur l'application des irrecevabilités en application de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, il nous revient à présent d'arrêter le périmètre indicatif du projet de loi.

Conformément à ce que nous suggère l'intitulé du texte, je vous propose de considérer que ledit périmètre comprend les dispositions visant à garantir la conformité du mécanisme de purge des nullités en matière pénale aux normes de valeur supérieure.

Il en est ainsi décidé.

Article 1er

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - L'amendement  COM-1 vise à consacrer la compétence des juridictions du fond pour connaître des nullités que les parties ne pouvaient pas connaître avant la clôture de l'instruction.

M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Avis favorable.

L'amendement COM-1 est adopté.

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - L'amendement  COM-2 tend à harmoniser la rédaction de l'article 385 avec celle qui avait été adoptée en 2021 s'agissant du même mécanisme en matière criminelle à l'article 269-1 du code de procédure pénale.

M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Avis favorable.

L'amendement COM-2 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

L'amendement d'actualisation légistique  COM-3, ayant fait l'objet d'un avis favorable du Gouvernement, est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Les sorts des amendements examinés par la commission sont retracés dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort

Article 1er

Mme FLORENNES,

rapporteure

1

Compétence des juridictions du fond pour traiter les nullités que les parties ne pouvaient pas connaître avant la clôture de l'instruction

Adopté

Mme FLORENNES,

rapporteure

2

Précision rédactionnelle et actualisation légistique

Adopté

Article 2

Mme FLORENNES,

rapporteure

3

Actualisation légistique

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 17(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie18(*). Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte19(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial20(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mardi 9 octobre 2024, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 660 (2023-2024) visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités

Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions qui visent à garantir la conformité du mécanisme de « purge » des nullités en matière pénale aux normes de valeur supérieure.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

DIRECTION GÉNÉRALE DES AFFAIRES CRIMINELLES ET DES GRÂCES

M. Julien Morino-Ros, sous-directeur de la négociation et de la législation pénales

Mme Eve Mathien, cheffe du bureau de la législation pénale générale

COUR DE CASSATION

M. Nicolas Bonnal, président de la chambre criminelle

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- Conférence nationale des présidents de tribunaux judiciaires (CNPTJ)

- Association française des magistrats instructeurs (AFMI)

- Conférence nationale des premiers présidents de cour d'appel (CNPPCA)

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl23-660.html


* 1 Philippe Bonnecarrère a été élu député lors des élections législatives de juillet 2024 ; François-Noël Buffet a été nommé ministre chargé des outre-mer le 21 septembre 2024.

* 2  Proposition de loi n° 660 (2023-2024) visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités.

* 3 Comme le rappelle le Conseil constitutionnel dans le commentaire de ses deux décisions de 2021 et de 2023, la mise en place d'une « purge » a souvent été présentée comme la contrepartie à la possibilité donnée aux parties d'invoquer directement des nullités.

* 4 Conseil constitutionnel, commentaire de la décision n° 2021-900 QPC du 23 avril 2021, « M. Vladimir M. ».

* 5  Décision n° 2021-900 QPC du 23 avril 2021

* 6  Décision n° 2023-1062 QPC du 28 septembre 2023

* 7  Commentaire de la décision n° 2023-1062 QPC précitée.

* 8 Idem.

* 9  Décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, « Loi modifiant la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme du code de procédure pénale ».

* 10 Décision n° 2020-864 QPC du 13 novembre 2020, « Société Route destination voyages ».

* 11 Commentaire précité.

* 12 Décision n° 2021-900 QPC du 23 avril 2021, « Vladimir M. ».

* 13 Cette censure, prononcée avec effet différé, avait pu être comblée par l'article 6 de la loi n° 2021-1729 pour la confiance dans l'institution judiciaire du 22 décembre 2021, qui avait créé un nouvel article 269-1 au sein du code de procédure pénale et modifié l'article 305-1 du même code afin de permettre aux accusés, dans certains cas, de saisir le président de la chambre de l'instruction pour soulever une nullité alors même que le délai normal de « purge » a expiré. Cette rédaction avait toutefois une ampleur limitée, puisqu'elle collait étroitement aux termes mêmes de la censure prononcée par le Conseil constitutionnel et qu'elle ne concernait que les juridictions criminelles.

* 14 L'association française des magistrats instructeurs rappelait à cet égard dans sa contribution écrite que l'invocation des nullités était particulièrement fréquente en matière économique et financière, donc dans des dossiers d'une significative complexité.

* 15 Comme l'a relevé la Conférence nationale des présidents de tribunaux judiciaires dans sa contribution écrite, l'absence de tout régime de purge « fait courir le risque pour les juridictions judiciaires [...] d'une multiplication des demandes de nullités formulées par les avocats devant les tribunaux correctionnels dans les procédures issues des informations judiciaires » et, si cette situation devait perdurer, « il est incontestable que les débats à l'audience s'en trouveraient considérablement allongés ».

* 16 Cette analyse est partagée par l'association française des magistrats instructeurs, qui a fait dans sa contribution écrite des observations similaires.

* 17 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 18 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 19 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 20 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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