EXAMEN DE L'ARTICLE
ARTICLE
1
Rétablissement de la réserve parlementaire
Le présent article prévoit de rétablir la réserve parlementaire en faveur des communes rurales et des associations.
La « réserve parlementaire » décrivait une pratique consistant, pour le Gouvernement, à proposer l'ouverture de crédits en loi de finances afin de soutenir financièrement des projets d'intérêt local portés par des collectivités territoriales ou des associations qui lui étaient soumis par les députés et les sénateurs. Il y a été mis fin, contre l'avis du Sénat, avec la loi organique du 15 septembre 2017 relative à la confiance dans la vie politique.
La réserve parlementaire présentait pourtant une forte utilité sociale pour financer les petits projets communaux ou associatifs aujourd'hui « hors des radars » des dispositifs de droit commun.
Le rapporteur souscrit donc pleinement à l'objectif de la rétablir, tout en lui conférant un cadre juridique robuste, clair et transparent.
L'amendement COM-2 du rapporteur, adopté par la commission, poursuit trois objectifs : élargir le dispositif à l'ensemble du bloc communal, renforcer les règles encadrant l'attribution des subventions versées dans ce cadre, et garantir la sécurité juridique du dispositif. L'amendement COM-3 du rapporteur en tire les conséquences dans l'intitulé de la proposition de loi organique.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
I. LE DROIT EXISTANT : LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE, UNE PRATIQUE INSTITUTIONNELLE À LAQUELLE IL A ÉTÉ MIS FIN PAR INTERVENTION DU LÉGISLATEUR ORGANIQUE
A. LA PRATIQUE DE LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE PERMETTAIT AUX PARLEMENTAIRES DE PROPOSER AU GOUVERNEMENT DE SOUTENIR DES PROJETS D'INTÉRÊT LOCAL
La « réserve parlementaire », également appelée « dotation d'action parlementaire » au Sénat, décrivait une pratique consistant, pour le Gouvernement, à proposer l'ouverture de crédits en loi de finances afin de soutenir financièrement des projets d'intérêt local portés par des collectivités territoriales ou des associations qui lui étaient soumis par les députés et les sénateurs.
Aucun texte ne venait codifier cette pratique dont l'origine semble remonter aux années 1970, et qui, formellement, relevait de la seule décision du Gouvernement.
Les dossiers étaient instruits par les services du ministère de l'intérieur, en liaison avec les parlementaires du territoire. Les commissions des finances des deux assemblées centralisaient les propositions, et les soumettaient au Gouvernement dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances. Les crédits afférents, initialement inscrits sur la mission « Crédits non répartis », étaient redistribués, par amendement gouvernemental en nouvelle lecture, entre les programmes budgétaires pertinents, selon l'objet des subventions.
La gestion du dispositif était ensuite assurée par le ministère de l'intérieur, et les subventions étaient versées dans les conditions de droit commun. S'agissant par exemple des collectivités territoriales, elles étaient ainsi régies par le décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999 relatif aux subventions de l'État pour des projets d'investissement.
La première traduction juridique de la pratique de la réserve parlementaire est intervenue avec la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, modifiant l'article 54 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) de façon à prévoir la publication annuelle de la liste des subventions octroyées à la demande des parlementaires.
Cette liste doit préciser :
- l'ensemble des subventions pour travaux divers d'intérêt local versées à partir de programmes relevant du ministère de l'intérieur ;
- l'ensemble des subventions versées à des associations ;
- pour chaque subvention, le nom du bénéficiaire, le montant versé, la nature du projet financé, le programme concerné et le nom du membre du Parlement, du groupe politique ou de la présidence de l'assemblée qui a proposé la subvention.
Ces listes étaient publiées en « open data » sur les sites internet des deux assemblées1(*).
Dans la décennie précédant sa suppression à compter de 2018, le montant global des crédits ouverts chaque année en lois de finances au titre de la réserve parlementaire s'établissait à environ 150 millions d'euros par an.
En 2016, les subventions attribuées au titre de la réserve parlementaire des deux assemblées représentaient un montant cumulé de 134 millions d'euros (81 millions d'euros pour l'Assemblée nationale et 53 millions d'euros pour le Sénat), pour 23 888 dossiers, soit une subvention moyenne de 5 624 euros.
À l'Assemblée nationale, depuis une décision du Bureau de 2013, il a été prévu que les députés puissent proposer l'attribution de 130 000 euros en moyenne, avec une possibilité de modulation de la répartition entre chaque député relevant du groupe politique. Les secrétaires du Bureau pouvaient proposer l'attribution de 140 000 euros. Les vice-présidents, les questeurs, les présidents de groupe et les présidents de commission pouvaient proposer l'attribution de 260 000 euros. Le Président de l'Assemblée nationale disposait de 520 000 euros.
Au Sénat, depuis une décision de 2015, le Président et les vice-présidents pouvaient proposer des subventions dans le cadre d'une « dotation institutionnelle » de 3 millions d'euros. Les sénateurs pouvaient proposer l'attribution de 153 000 euros en moyenne, avec une possibilité de modulation de la répartition entre chaque sénateur relevant de chaque groupe politique2(*).
B. LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE A ÉTÉ SUPPRIMÉE À COMPTER DE 2018, MALGRÉ L'OPPOSITION DU SÉNAT
L'article 14 de la loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique a expressément prévu qu'il soit « mis fin à la pratique dite de la réserve parlementaire, consistant en l'ouverture de crédits en loi de finances par l'adoption d'amendements du Gouvernement reprenant des propositions de membres du Parlement en vue du financement d'opérations déterminées ». Par coordination, ce même article abroge, à compter du 1er janvier 2024, la disposition de l'article 54 précité de la LOLF relative aux exigences de transparence applicables aux subventions versées dans ce cadre.
Lors de l'examen du projet de loi, le Sénat avait entendu donner un cadre juridique à la réserve parlementaire plutôt que de la supprimer.
Ainsi, sur une initiative conjointe de Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois, et d'Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis de la commission des finances, il a adopté en première lecture un dispositif alternatif de soutien aux projets d'investissement des communes et de leurs groupements sur proposition des parlementaires, dont les règles de fonctionnement seraient inscrites dans la LOLF (voir encadré).
Le désaccord entre les chambres sur ce point a constitué la raison essentielle de l'échec de la commission mixte paritaire, l'Assemblée nationale ayant maintenu sa position de suppression « sèche » de la réserve parlementaire.
La suppression de la réserve parlementaire étant intervenue en loi organique, seule une autre loi organique peut la rétablir.
Article 9 du projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique adopté par le Sénat en première lecture
I. - Le chapitre II du titre II de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances est ainsi modifié :
1° Le I de l'article 7 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du troisième alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;
b) Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° Une dotation de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements. » ;
2° Au premier alinéa de l'article 11, après le mot : « imprévisibles », sont insérés les mots : « et sur la dotation de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements » ;
3° Après le même article 11, il est inséré un article 11-1 ainsi rédigé :
« Art. 11-1. - I. - Chaque année, le bureau de chaque assemblée adresse au Gouvernement la liste des projets que les députés et les sénateurs proposent pour soutenir l'investissement des communes et de leurs groupements pour l'exercice suivant.
« Ces projets répondent aux critères cumulatifs suivants :
« 1° Ils correspondent à la réalisation de projets d'investissement matériel ou immatériel des communes, de leurs groupements ainsi que de leurs établissements publics ;
« 2° Ils ne présentent pas un caractère permanent ;
« 3° Ils permettent la mise en oeuvre d'une politique d'intérêt général ;
« 4° Les fonds qu'il est envisagé de verser n'excèdent pas la moitié du montant total du projet concerné et le plafond de 20 000 € ;
« 5° Un même projet ne peut être proposé par plusieurs députés ou sénateurs ;
« 6° Leur délai prévisionnel d'exécution est égal ou inférieur à sept ans.
« Cette liste précise, pour chaque projet proposé, le nom de l'éventuel bénéficiaire, le montant proposé, la nature du projet à financer et le nom du membre du Parlement à l'origine de cette proposition. Chaque assemblée la publie dans un format ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé.
« II. - Avant le 31 mai de chaque année, le Gouvernement publie la liste des projets ayant bénéficié, au cours du précédent exercice, de la dotation prévue au I. Elle est publiée dans les conditions prévues au dernier alinéa du même I.
« III. - Le présent article est applicable aux projets que les députés et les sénateurs proposent pour répondre aux besoins d'investissement des établissements français d'enseignement à l'étranger et des organismes publics et privés qui concourent aux actions de soutien et d'accompagnement aux Français établis hors de France en matière scolaire, de bienfaisance et de solidarité, et en matière de développement culturel, ainsi que de développement économique de la France. »
II. - Le 9° de l'article 54 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances est abrogé.
III. - Le présent article entre en vigueur à compter du 1 er septembre 2017.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN RÉTABLISSEMENT DE LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE EN FAVEUR DES COMMUNES RURALES ET DES ASSOCIATIONS
Le 1° du I de l'article unique de la présente proposition de loi organique insère un article 34 bis nouveau au sein de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), qui prévoit que la loi de finances alloue des crédits à l'Assemblée nationale et au Sénat pour le subventionnement :
- des projets d'investissements des communes de moins de 3 500 habitants, et des communes nouvelles de moins de 10 000 habitants si elles comprennent plus de deux communes déléguées ;
- des dépenses des associations, à la condition qu'elles aient souscrit un contrat d'engagement républicain, prévu à l'article 10-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations à l'administration.
Le contrat d'engagement républicain
Le contrat d'engagement républicain (CER) a
été introduit par l'article 12 de la
loi n°
2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la
République.
Depuis cette loi, en application de l'article 10-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leur relation à l'administration, toute association ou fondation qui sollicite l'octroi d'une subvention auprès d'une autorité administrative ou d'un organisme chargé de la gestion d'un service public industriel et commercial doit souscrire à un tel contrat prévoit que les associations doivent respecter les principes de liberté, d'égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, les symboles de la République, ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République, et s'abstenir de toute action portant atteinte à l'ordre public.
Dans la pratique, les associations souscrivent au CER en cochant une case dans le formulaire de demande de subvention (Cerfa n° 12156*06). Le CER permet à l'administration de refuser une subvention si l'objet de l'association est en contradiction avec les principes énoncés plus haut, et de retirer la subvention et faire une demande de remboursement lorsqu'il a été établi que l'association a des activités contraires à ces dispositions.
Source : commission des finances
La même disposition précise que les subventions sont attribuées par les deux chambres sur proposition de leurs membres respectifs, dans les conditions fixées par le règlement de chaque assemblée.
Enfin, elle prévoit que les bénéficiaires doivent rendre public l'usage de la subvention versée dans des conditions définies par voie réglementaire.
Le 2° du I complète le 9° de l'article 54 de la LOLF, afin que la répartition des crédits entre les membres du Parlement, groupes politiques et présidences des deux assemblées soit incluse dans la liste des subventions versées sur proposition du Parlement, qui est annexée au projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année.
Le II abroge l'article 14 de la loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, qui met fin à la pratique de la réserve parlementaire.
Cette mesure a pour conséquence :
- d'abroger la disposition selon laquelle « il est mis fin à la pratique dite de la réserve parlementaire, consistant en l'ouverture de crédits en loi de finances par l'adoption d'amendements du Gouvernement reprenant des propositions de membres du Parlement en vue du financement d'opérations déterminées » ;
- de supprimer la disposition qui prévoit d'abroger le 9° de l'article 54 de la LOLF à compter du 1er janvier 2024.
Le III est un gage financier ayant vocation à compenser ses éventuelles conséquences financières.
III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE MÉRITE D'ÊTRE RÉTABLIE, TOUT EN ÉTANT MIEUX ENCADRÉE
A. ALORS QU'ILS DEVAIENT PRENDRE LE RELAI DE LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE, LA DETR ET LE FDVA N'ONT PAS DONNÉ PLEINE SATISFACTION...
1. Les parlementaires ne sont associés qu'à la marge à la procédure d'octroi de la dotation d'équipement des territoires ruraux
Lors de la suppression de la réserve parlementaire, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) était présentée par le Gouvernement comme le principal outil pour « prendre le relai » de la réserve parlementaire en termes de subventionnement des projets d'investissement des communes.
L'augmentation notable de l'enveloppe prévue au titre de cette dotation doit à cet égard être soulignée : les crédits inscrits en loi de finances initiale sont ainsi passés de 815 millions d'euros en 2016 à 1 046 millions d'euros depuis 2018.
La dotation d'équipement des territoires ruraux
Créée par l'article 179 de la loi de finances initiale pour 20113(*), et régie par les articles L. 2334-32 à L. 2334-39 du code général des collectivités territoriales, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) vise à subventionner les dépenses d'investissement des communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) situés essentiellement en milieu rural au titre de projets dans le domaine économique, social, environnemental, sportif et touristique ou favorisant le développement ou le maintien des services publics en milieu rural.
Sont éligibles à la DETR les communes :
- dont la population n'excède pas 2 000 habitants dans les départements de métropole et 3 500 habitants dans les départements d'outre-mer ;
- dont la population est supérieure à 2 000 habitants dans les départements de métropole (3 500 habitants dans les départements d'outre-mer) et n'excède pas 20 000 habitants dans les départements de métropole (35 000 habitants dans les départements d'outre-mer) et dont le potentiel financier par habitant est inférieur à 1,3 fois le potentiel financier par habitant moyen de l'ensemble des communes des départements de métropole et d'outre-mer dont la population est supérieure à 2 000 habitants et n'excède pas 20 000 habitants.
La population à prendre en compte est la population utilisée pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement, définie à l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales.
Sont également éligibles à cette dotation, les EPCI à fiscalité propre :
- dont la population n'excède pas 75 000 habitants en métropole et 150 000 dans les départements d'outre-mer ;
- qui présentent un territoire d'un seul tenant et sans enclave ;
- dont les communes membres ont des populations inférieures à 20 000 habitants en métropole et 85 000 habitants en outre-mer.
Dans le cas des EPCI, la population à prendre en compte est la population INSEE telle que définie à l'article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales.
Enfin, sont éligibles, à titre dérogatoire, les EPCI éligibles en 2010 à la dotation globale d'équipement (DGE) des communes ou à la dotation de développement rural (DDR), les syndicats mixtes de moins de 60 000 habitants composés d'EPCI et de communes, les syndicats de communes de moins de 60 000 habitants et les communes nouvelles dont au moins une ancienne commune était éligible à la DETR ou dont la formation s'est faite par regroupement de toutes les communes d'un même EPCI.
Source : commission des finances du Sénat
Si la gouvernance de la DETR se caractérise par l'institution, auprès du préfet de département, d'une commission d'élus accueillant, depuis 2017, des parlementaires, l'association de ces derniers à la procédure doit être relativisée4(*).
En effet, cette commission se borne à fixer chaque année les catégories d'opérations prioritaires et, dans des limites fixées par décret en Conseil d'État, les taux minimaux et maximaux de subventions applicables à chacune d'entre elles et à formuler des avis pour des projets dont la subvention proposée par le préfet au titre de la DETR porte sur un montant supérieur à 100 000 euros. Le préfet reste cependant seul décisionnaire de l'attribution.
En outre, seule une partie des parlementaires a la possibilité d'y siéger. En effet, lorsque le département compte cinq parlementaires ou plus, seuls deux députés et deux sénateurs désignés par leur chambre respective en sont membres.
2. Le deuxième volet du Fonds pour le développement de la vie associative n'offre pas la même souplesse que la réserve parlementaire
Le deuxième volet du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA 2)5(*) a été mis en place pour compenser la perte de financements pour les associations consécutive à la suppression de la réserve parlementaire. Le FDVA 2 fonctionne par appels à projets, et il comprend lui-même deux axes : l'un consacré aux dépenses de fonctionnement des associations et l'autre aux projets d'innovation.
Les crédits inscrits à l'origine sur le FDVA 2, c'est-à-dire 25 millions d'euros, étaient très insuffisants pour que le dispositif soit une « compensation » à la hauteur de la réserve parlementaire.
Cependant, en 2021, un dispositif de fléchage des avoirs des comptes inactifs acquis par l'État a été introduit à l'article 272 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, qui a conduit à un rehaussement des financements du FDVA 2 d'environ 15 millions d'euros par an6(*). Dans l'article 67 du projet de loi de finances pour 2024, il est prévu que la quote-part du mécanisme de fléchage soit rehaussée, ce qui devrait conduire à une augmentation comprise entre 17 millions et 20 millions d'euros pour le FDVA.
Évolution du financement du FDVA entre 2018 et 2024
(en millions d'euros)
Note : les chiffres pour 2023 et 2024 sont prévisionnels. Pour 2024, il est retenu par hypothèse l'estimation la plus haute pour le mécanisme de fléchage des avoirs inactifs, soit 40 millions d'euros, au regard des sommes exécutées les années précédentes. En 2020 et en 2021, le FDVA 2 a bénéficié de 5 millions d'euros de crédits ouverts en loi de finances rectificative.
Source : commission des finances
En 2023, les dernières estimations donnent 16 883 associations subventionnées pour 43,4 millions d'euros, dont 25,1 millions d'euros pour le fonctionnement global de 11 374 associations, et 18,2 millions d'euros pour 6 153 projets au titre de l'axe innovation. 82 % des associations soutenues ont au plus deux salariés.
Toutefois, même si ses financements ont augmenté, le FDVA 2 n'a jamais acquis la souplesse et la simplicité qui caractérisaient la réserve parlementaire.
La Cour des comptes, dans son rapport sur le deuxième volet du Fonds pour le développement de la vie associative de septembre 2021, faisait ainsi le constat d'un « décalage entre la complexité du dispositif et son public prioritaire »7(*), c'est-à-dire les petites associations. Plus précisément, la Cour dénonçait la multiplication et l'instabilité des critères, qui « fragilisent la bonne compréhension du dispositif ». Le manque de lisibilité concerne en particulier le deuxième axe de financement du FDVA 2, l'innovation, dont les exigences théoriques sont disproportionnées par rapport aux projets effectivement financés.
Les critères de financement du FDVA 2
Les critères de financement au titre du « financement global de l'activité d'une association » ou de la « mise en oeuvre de nouveaux projets ou activités » sont détaillés à l'annexe 2 de l'instruction DJEPVA/SD1B/2018/075 du 15 mai 2018.
Concernant le financement au titre du « fonctionnement global », les critères principaux sont :
- concourir au dynamisme de la vie locale et à la consolidation de la vie associative locale ;
- la capacité à mobiliser et rassembler une participation citoyenne significative par rapport au territoire.
Concernant le financement au titre de la « mise en oeuvre de nouveaux projets ou activités », les critères sont plus nombreux. Les critères du volet « fonctionnement global » sont repris, et sont notamment ajoutés :
- un projet associatif ou inter-associatif qui concourt à développer une offre d'appui et d'accompagnement aux petites associations locales et à leurs bénévoles ;
- un projet associatif ou inter-associatif innovant
et structurant à impact prospectif
apportant, pour le territoire, une
innovation sociale, environnementale ou sociétale en
réponse
à des besoins non couverts.
Source : commission des finances
Le rôle des parlementaires dans la gestion du FDVA 2 est également limité. Sur un modèle proche de celui de la DETR, les parlementaires peuvent participer à des collèges départementaux du Fonds pour le développement de la vie associative, depuis la loi du 1er juillet 2021 visant à améliorer la trésorerie des associations.
Dans les départements qui comprennent plus de cinq élus, participent au collège deux députés et deux sénateurs ainsi qu'un suppléant. Dans les autres départements, l'ensemble des élus participent au collège. Le reste du collège est composé de trois représentants des maires, d'un représentant du conseil départemental et de quatre personnalités qualifiées désignées par le préfet de département.
Cependant ce collège n'a qu'un rôle consultatif. Il émet en début de campagne du FDVA un avis sur les priorités du fonds à l'échelle régionale qui ont été déterminées par le préfet de région, qui dispose de l'ensemble des pouvoirs d'initiative et décisionnels8(*). Par la suite, le préfet de département publie une note d'orientation départementale, qui doit tenir compte de cet avis.
Le rôle concret des députés et sénateurs dans le financement de la vie associative est donc diminué avec le FDVA 2 par rapport à ce qu'il était à l'époque de la réserve parlementaire, pour un système qui est moins lisible pour les petites associations.
B. ... CE QUI PLAIDE POUR UN RÉTABLISSEMENT DE LA RÉSERVE PARLEMENTAIRE
1. La réserve parlementaire possède une véritable utilité sociale, et permet de financer des projets aujourd'hui « hors des radars » des subventions de droit commun
L'une des raisons données en faveur de la suppression de la réserve parlementaire en 2017 était sa supposée « inefficacité » dans l'emploi des crédits budgétaires. Dans un référé de 2014, la Cour des comptes estimait ainsi que le caractère incitatif des subventions était « souvent difficile à démontrer »9(*) et qu'elles présentaient un risque de saupoudrage.
Cependant, la Cour des comptes n'a jamais considéré que ces subventions étaient inutiles, mais seulement que leur performance n'était pas mesurée, et que le ratio entre le montant des aides et les coûts de gestion était élevé10(*). Or, ces deux constats découlent de la vocation même de la réserve parlementaire, qui est de financer des petits projets.
En effet, des subventions de faibles montants auront nécessairement des coûts de gestion plus élevés que des subventions de plusieurs millions d'euros, ce qui ne signifie pas que leur utilité sociale, ramenée à l'euro dépensé, soit plus faible. Les bénéfices de la réserve parlementaire ne sauraient être appréciés avec les mêmes critères que ceux utilisés pour des politiques publiques menées à l'échelle nationale.
Dans son avis sur le projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique mettant fin à la réserve parlementaire, le Conseil d'État ne s'y était pas trompé, soulignant que « le Gouvernement devra cependant veiller à ne pas priver (...) un certain nombre d'organismes publics ou privés de ressources indispensables pour assurer les missions de service public qui leur sont confiées »11(*).
Les subventions de la réserve parlementaire n'avaient pas vocation à initier des projets par elles-mêmes, mais à apporter un complément, souvent pour accélérer les projets en question ou pour débloquer des situations face à des imprévus. Cette finalité se traduit dans les montants des subventions : 65 % des dossiers de « dotations d'action parlementaire » du Sénat en 2016 étaient compris entre 2 000 et 10 000 euros. 19,7 % étaient inférieurs à 2 000 euros, et seuls 0,6 % des dossiers dépassaient les 50 000 euros.
Le ciblage de la DETR diffère ainsi sensiblement de celui de l'ancienne réserve parlementaire : en 2022, les subventions de 20 000 euros ou moins ne représentaient en cumulé qu'à peine 10 % de l'enveloppe globale. Le montant moyen de subvention s'élevait à 45 503,48 euros, soit un niveau bien plus élevé que celui de l'ancienne réserve parlementaire, comme le montre le tableau ci-dessous.
Synthèse des subventions attribuées
au titre de la réserve parlementaire
en 2015 et en 2016
Assemblée nationale |
Sénat |
|||
2015 |
2016 |
2015 |
2016 |
|
Nombre de dossiers |
15 169 |
16 546 |
6 950 |
7 342 |
Dont subventions aux collectivités territoriales |
4 476 |
4 854 |
6 950 |
7 342 |
Dont autres |
10 693 |
11 692 |
1 383 |
1 489 |
Montant total (en euros) |
81 145 449 |
81 053 646 |
52 183 066 |
53 312 552 |
Subvention moyenne |
5 459,43 |
4 898,69 |
7 508,35 |
7 261,31 |
Subvention médiane |
3 000 |
3 000 |
5 000 |
5 000 |
Subvention la plus élevée |
360 000 |
250 000 |
257 000 |
250 000 |
Subvention la plus basse |
276 |
300 |
214 |
245 |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les sites internet de l'Assemblée nationale et du Sénat
Surtout, la doctrine d'octroi de la DETR, à l'instar des autres dotations d'investissement de l'État aux collectivités territoriales, s'inscrit dans un cadre de plus en plus strict, fixé par l'administration centrale.
Les rapporteurs spéciaux de la commission des finances pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dans le cadre d'un contrôle budgétaire dédié à cette question, ont en effet souligné le caractère de plus en plus prescriptif des instructions annuelles adressées aux préfets, faisant courir le risque d'un fléchage des crédits vers les projets s'inscrivant dans une démarche contractuelle (contrat de plan État-régions, contrat de relance et de transition écologique) ou partenariale (« petites villes de demain », « action coeur de ville »...) impulsée par l'État. Ils relevaient ainsi « le risque d'une forme de “captation” croissante des dotations d'investissement par ce type de démarches », qui serait « d'autant plus préoccupante que, pour légitimes que soient ces initiatives, celles-ci ne sauraient couvrir l'ensemble des défis qui se posent aux territoires, que les élus de terrain restent les mieux à même de diagnostiquer »12(*).
S'agissant du financement des associations, la réserve parlementaire permettrait également d'assurer un financement à des projets qui se situent hors des « priorités d'intervention départementales » qui sont retenues pour l'attribution des subventions aux projets locaux par les services préfectoraux. Ces lignes directrices peuvent être utiles pour dresser le tableau des besoins d'un département, mais elles ne permettent pas de tenir suffisamment compte des différences de situations au niveau infra-départemental.
Les plus petits projets portés par les collectivités territoriales et les associations se trouvent ainsi bien souvent aujourd'hui « hors des radars » des dispositifs de droit commun. Ils peuvent pourtant avoir un très fort impact pour la vie quotidienne des habitants.
Les parlementaires, forts de leur mandat national doublé d'un ancrage local, occupent une position particulièrement stratégique pour faire remonter ces initiatives d'intérêt général, et soumettre en conséquence au Gouvernement des propositions d'allocation des crédits.
Le rétablissement de la réserve parlementaire n'est donc pas un « retour en arrière », mais est au contraire une solution pour les difficultés de financements des communes et des associations. À cet égard, la disparition de la réserve parlementaire en 2017, et les faiblesses des dispositifs qui lui ont succédé, ont rendu encore plus évident son intérêt, ce qui explique que plusieurs initiatives parlementaires ont vu le jour depuis pour la réintroduire.
2. L'utilité de la réserve parlementaire explique que de nombreuses initiatives ont vu le jour pour plaider en faveur de son rétablissement, dans la lignée desquelles s'inscrit la présente proposition de loi organique
Le 23 février 2021, le député Christophe Naegelen dépose à la présidence de l'Assemblée nationale une proposition de loi organique visant à permettre aux parlementaires de soutenir financièrement la vie associative locale et les projets communaux.
En parallèle, le sénateur Jean-Marc Boyer a déposé le 26 juillet 2022 une proposition de loi visant à instituer une dotation d'action parlementaire au sein de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Cette proposition de loi ne vise pas à rétablir un dispositif sui generis, mais à modifier une partie des règles de la DETR pour recréer une forme de réserve parlementaire.
Le 1er février 2023, les députés Dino Cinieri et André Villiers ont déposé une proposition de loi organique à la rédaction proche de celle de Christophe Naegelen, qui vise à rétablir la pratique de la réserve parlementaire au profit des petites communes et des associations.
Le 25 juillet 2023, une pétition en ligne a été lancée par le « Collectif pour la réserve parlementaire », qui a été initié par les députés André Villiers, Dino Cinieri et Frédéric Descrozaille dans le but de rétablir cette pratique. Cette pétition a abouti le 27 septembre à un appel public de près de 150 députés en faveur de la réserve parlementaire. Le jour suivant, une proposition de loi organique en ce sens a été déposée au Sénat par la sénatrice Laurence Muller-Bronn et le sénateur Alain Houpert.
Le 13 octobre 2023, la proposition de loi organique sur laquelle porte le présent rapport est enregistrée à la présidence du Sénat. Elle est suivie fin octobre 2023 par un appel de 300 parlementaires, députés et sénateurs cette fois, pour le rétablissement de la réserve parlementaire.
Toutes ces initiatives ont en commun, outre de montrer le souhait des élus de terrain de voir le retour de la réserve parlementaire, de ne pas ignorer les critiques qui étaient formulées à l'encontre de la pratique avant 2017, et de proposer en conséquence un encadrement plus strict du dispositif.
La proposition de loi organique examinée par la commission des finances s'inscrit parfaitement dans cette lignée. Les associations doivent au préalable signer un contrat d'engagement républicain, ce qui est aujourd'hui une condition de droit commun pour les subventions publiques. Le texte prévoit également plusieurs garanties en termes de transparence.
C. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION : ÉLARGIR LE DISPOSITIF À L'ENSEMBLE DU BLOC COMMUNAL, RENFORCER LES RÈGLES ENCADRANT L'ATTRIBUTION DES SUBVENTIONS ET GARANTIR LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DE L'INITIATIVE
1. Un élargissement du dispositif à l'ensemble du bloc communal
Le critère d'éligibilité posé par la proposition de loi organique pour des communes témoigne d'un souci bienvenu de ciblage des subventions de la réserve parlementaire.
Cependant, les seuils retenus, de 3 500 habitants pour les communes, et de 10 000 habitants pour les communes nouvelles si elles comprennent plus de deux communes déléguées, est apparu trop restrictif.
En effet, certains départements très urbains, en Île-de-France notamment, ainsi que des départements ultra-marins, ne comprennent que peu voire pas de communes de moins de 3 500 habitants. L'usage de la réserve parlementaire pour les élus de ces territoires serait donc de facto limité aux associations.
Le tableau suivant présente la part des communes de moins de 3 500 habitants dans certains des départements concernés.
Nombre et part des communes de moins de 3 500
habitants
dans un échantillon de départements urbains et
ultramarins
Nombre de communes |
Nombre de communes de moins de 3 500 habitants |
Part des communes de moins de 3 500 habitants |
|
Essonne |
194 |
110 |
57% |
Hauts-de-Seine |
36 |
1 |
3 % |
Seine-Saint-Denis |
40 |
0 |
0 % |
Val-de-Marne |
47 |
1 |
2 % |
Bouches-du-Rhône |
119 |
34 |
29 % |
Guadeloupe |
32 |
6 |
19 % |
Mayotte |
17 |
0 |
0 % |
La Réunion |
24 |
0 |
0 % |
Source : commission des finances
Rehausser le seuil d'éligibilité était une solution envisageable, mais qui présentait également plusieurs limites.
Premièrement, même si le seuil était par exemple relevé à 18 000 habitants, des départements comme les Hauts-de-Seine et la Seine-Saint-Denis, auraient toujours peu de communes éligibles aux subventions de la réserve parlementaire (respectivement 4 et 9 communes).
Ensuite, qu'importe la limite retenue, il en aurait résulté des effets de seuils. Dès lors que ne sont plus ciblées uniquement les communes rurales, maintenir une distinction selon le nombre d'habitants perd de son sens.
Enfin, le risque est qu'il y ait une distorsion entre le traitement des communes et celui des associations, pour lesquelles le seul critère d'éligibilité posé se limite au respect d'une condition déjà intégrée au droit commun des subventions publiques.
Pour toutes ces raisons, la commission propose d'étendre par l'amendement COM-2 du rapporteur le dispositif à l'ensemble des communes, ainsi qu'à leurs groupements et à leurs établissements publics. Cette extension doit permettre à la réserve parlementaire de s'adapter à tous les territoires.
Cette évolution est sans incidence sur le montant global de l'enveloppe, qui resterait en tout état de cause décidé par le Gouvernement. Les parlementaires seraient libres de lui proposer, en responsabilité, de soutenir un projet présentant un intérêt local et général quelle que soit la taille de la commune qui le porte.
L'amendement COM-3 du rapporteur tire les conséquences de cette modification du champ du dispositif dans l'intitulé de la proposition de loi organique.
2. Des nouveaux critères sont proposés pour rendre la réserve parlementaire irréprochable au regard des « bonnes pratiques » en matière d'octroi de subventions
La suppression du seuil d'éligibilité, et l'extension aux EPCI, ne signifie pas que le rapporteur souhaite revenir sur l'idée que la réserve parlementaire devrait financer des projets de petite taille.
Au contraire, dans la lignée des précédents travaux de la commission des finances, et dans le souci partagé avec les auteurs d'encadrer le dispositif de façon rigoureuse et transparente, la commission propose, toujours dans son amendement de rédaction globale de l'article COM-2, de fixer des critères quant aux projets que les parlementaires pourraient proposer de soutenir.
Les nouveaux critères proposés sont les suivants :
- les projets ne doivent pas présenter un caractère permanent, et leur délai prévisionnel d'exécution doit être inférieur ou égal à sept ans. Ces conditions doivent permettre de s'assurer que les bénéficiaires ne deviennent pas dépendants des subventions de la réserve parlementaire ;
- les projets doivent viser la mise en oeuvre d'une politique d'intérêt général ;
- le même projet ne pourra pas être présenté par plusieurs députés ou sénateurs. Il s'agit de favoriser la diversité des projets financés ;
- le montant de la subvention ne devrait pas excéder la moitié du montant du coût du projet. Cette exigence de bonne gestion, qui permet de s'assurer de la solidité du projet, était déjà requise dans le cadre de l'ancienne réserve parlementaire ;
- le montant maximal de la subvention ne pourrait en outre excéder 20 000 euros. Cette condition est de nature à satisfaire l'objectif des auteurs de cibler le dispositif sur les petits projets. Elle s'appliquerait de façon uniforme aux communes et associations.
La présente proposition de loi organique énonce également que les associations ne peuvent recevoir une subvention qu'à la condition de signer un contrat d'engagement républicain, ce qui est un prérequis pour toute association désirant bénéficier d'une subvention publique au titre de l'article 10-1 de la loi n°2000-231 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations13(*).
Ce critère n'apparaît plus explicitement dans la rédaction proposée pour des raisons juridiques liées au respect de la hiérarchie des normes, une loi organique ne devant pas citer une loi particulière, mais toutes les associations qui bénéficieraient d'une subvention au titre de la réserve parlementaire auraient tout de même l'obligation de signer un contrat d'engagement républicain, conformément à la volonté de l'auteur de la proposition de loi organique.
3. La conformité de la réserve parlementaire à l'article 40 de la Constitution et à la séparation des pouvoirs doit être garantie
a) L'ancienne réserve parlementaire n'a jamais été déclarée contraire à la Constitution
Ni le Conseil constitutionnel, ni le Conseil d'État ne se sont jamais formellement prononcés sur la constitutionnalité de la réserve parlementaire dans sa totalité. L'une des raisons était qu'il s'agissait d'une « pratique », qui n'avait une existence juridique qu'indirecte, à travers les obligations de transparence inscrites dans la loi organique relative aux lois de finances de 2021.
La réserve parlementaire soulève en effet des questions de conformité à la fois au titre :
- de l'article 40 de la Constitution, selon lequel « Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique » ;
- du principe de séparation des pouvoirs, consacré à l'article 16 de la Déclarations des droits de l'homme et du citoyen, duquel résulte la prérogative du Gouvernement pour déterminer et conduire la politique de la Nation, selon les termes de l'article 20 de la Constitution.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2017-753 DC du 8 septembre 2017 relative à la loi organique pour la confiance dans la vie politique, a défini de cette manière la réserve parlementaire : « La pratique dite de la « réserve parlementaire », dont la procédure n'est prévue par aucun texte, repose sur un engagement du Gouvernement envers les parlementaires d'exécuter le budget, s'agissant de certaines opérations déterminées, conformément aux demandes formulées par eux se traduisant par l'adoption d'amendements gouvernementaux au projet de loi de finances. »14(*)
La « pratique » de la réserve parlementaire se caractérise donc par deux éléments. Le premier se situe au niveau de l'élaboration de la loi, et le second au niveau de l'exécution des crédits :
- la réserve se traduit par des amendements du Gouvernement en lois de finances, rédigés conformément aux volontés des parlementaires. Dans la pratique, les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat proposaient en nouvelle lecture du projet de loi de finances des ouvertures des crédits sur l'ensemble des programmes budgétaires concernés par les subventions, qui étaient ensuite repris par le Gouvernement sous forme d'amendements ;
- elle repose sur un engagement du Gouvernement envers les parlementaires d'exécuter le budget conformément à ces amendements.
La possible contrariété de la réserve parlementaire avec l'article 40 de la Constitution se situait seulement au premier de ces deux niveaux, celui de l'élaboration de la loi. Cependant, comme le rappelle bien le Conseil constitutionnel, il ne s'agissait que d'amendements du Gouvernement, qui ne sont pas soumis aux règles de recevabilité financière. Celui-ci restait libre de refuser les propositions des parlementaires.
Dans sa décision n° 2013-675 DC du 9 octobre 2013 relative à la loi organique relative à la transparence de la vie publique, le Conseil constitutionnel avait ainsi jugé que les dispositions précitées obligeant à publier la liste des subventions de la réserve parlementaires n'avaient pas pour effet de permettre qu'il soit dérogé aux règles de recevabilité financière des initiatives parlementaires prévues par à l'article 40 de la Constitution, en rappelant expressément qu'il s'agit d'amendements du Gouvernement15(*).
La question de la compatibilité avec le principe de séparation des pouvoirs est plus délicate. Dans sa décision du 8 septembre 2017, le Conseil constitutionnel affirme que cette pratique revient pour le Gouvernement à « lier sa compétence en matière d'exécution budgétaire » et que, par conséquent, la loi organique pour la confiance dans la vie politique vise « à assurer le respect de la séparation des pouvoirs et des prérogatives que le Gouvernement tient de l'article 20 de la Constitution pour l'exécution du budget de l'État. »16(*)
Même s'il n'est pas dit explicitement dans cette décision que la réserve parlementaire est contraire à la Constitution, le risque qu'elle porte atteinte à la séparation des pouvoirs est mis en évidence. Les enjeux se situent au niveau de l'exécution des crédits : une disposition législative prévoyant de réintroduire la réserve parlementaire de sorte que, au-delà de l'autorisation parlementaire portant sur l'ouverture des crédits en loi de finances, le Gouvernement resterait lié d'une quelconque façon dans la mise en oeuvre des subventions, risquerait fortement d'être entachée d'inconstitutionnalité. L'engagement de mettre en oeuvre les propositions soumises par les parlementaires ne peut résulter que d'une convention politique.
Ce ne serait pas différent du cas où le Gouvernement accepte une proposition venant d'un membre du Parlement et qui lui serait soumise formellement ou informellement dans le contexte des débats budgétaires. À ce titre, le Conseil constitutionnel avait d'ailleurs émis une réserve d'interprétation quant à la constitutionnalité de la disposition mettant fin à la réserve parlementaire, considérant que celle-ci « ne [saurait] (...) sans porter atteinte à l'article 44 de la Constitution, être interprétées comme limitant le droit d'amendement du Gouvernement en matière financière ».
b) L'ordonnancement des crédits par l'Assemblée nationale et le Sénat serait contraire au principe de séparation des pouvoirs
Une solution envisageable à première vue serait que l'Assemblée nationale et le Sénat instruisent eux-mêmes les dossiers et ordonnancent les crédits. Les deux chambres disposent déjà de crédits à leur disposition, regroupés dans le cadre de la mission « Pouvoirs publics », et de la sorte, le Gouvernement ne serait plus lié au Parlement dans la mise en oeuvre des subventions. Il s'agit d'ailleurs d'une interprétation possible de la présente proposition de loi organique. Toutefois, ce procédé présente des limites importantes, à la fois au niveau constitutionnel et pratique.
Une initiative parlementaire qui porterait cette position serait vraisemblablement déclarée irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution, puisqu'elle serait équivalente à la création d'une nouvelle politique publique de soutien aux projets des associations et des communes, ce qui est constitutif d'une charge publique.
Cependant, même si le Gouvernement devait par exemple être à l'initiative d'une telle mesure dans la loi, elle serait tout de même contraire dans sa mise en oeuvre au principe de séparation des pouvoirs. En effet, au titre de l'article 20 de la Constitution, le pouvoir exécutif est censé disposer d'un « monopole » sur la mise en oeuvre des politiques publiques de l'État.
Cette compétence du pouvoir exécutif comprend des exceptions, dont le principe d'autonomie des assemblées, qui est reconnu par le Conseil constitutionnel. Toutefois, ce principe d'autonomie, qui trouve une traduction budgétaire dans le cadre de la mission « Pouvoirs publics », est lui-même circonscrit. Or, l'octroi de subventions publiques pour les collectivités territoriales et les associations relèvent déjà de politiques de l'État, inscrites notamment dans les missions « Relations avec les collectivités territoriales » et « Sport, jeunesse et vie associative ». Si les deux assemblées pouvaient directement procéder de même, alors elles empiéteraient probablement sur le domaine du pouvoir exécutif.
Enfin, au niveau pratique, l'instruction des dossiers et l'ordonnancement représenteraient manifestement une charge lourde pour l'Assemblée nationale et le Sénat.
c) La rédaction proposée permet de rendre la réserve parlementaire compatible avec l'article 40 de la Constitution et la séparation des pouvoirs
Au regard de toutes ces considérations, afin de sécuriser juridiquement la proposition de loi organique, l'amendement COM-2 du rapporteur propose ainsi de réaffirmer que le Gouvernement est bien ordonnateur des crédits, et d'indiquer qu'il s'agit de « propositions » des parlementaires, et non pas d'injonctions au pouvoir exécutif.
La rédaction proposée se veut donc proche de la pratique parlementaire avant sa suppression en 2017.
Elle propose en conséquence de modifier l'imputation du dispositif au sein de la LOLF. Les crédits de la réserve parlementaire ainsi rétablie seraient regroupés dans une dotation pour projets d'intérêt local qui constituerait un nouveau cas de dérogation au principe de spécialité budgétaire, ayant vocation à relever de la mission « Crédits non répartis ». Le dispositif n'imposant pas au Gouvernement d'inscrire des crédits au titre de cette dotation, il ne pourrait plus être considéré que la proposition de loi organique créée une nouvelle politique publique obligatoire relevant du domaine des lois de finances. Cette modification est de nature à assurer la conformité du dispositif à l'article 40 de la Constitution.
Le risque de contrariété au principe de séparation des pouvoirs, mis en avant par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 8 septembre 2017, est également levé par cet amendement par le fait qu'il a précisément vocation à inscrire la réserve parlementaire dans le droit, tout en ne contraignant pas l'exécution des crédits.
Un risque serait donc que le pouvoir exécutif agisse en opposition aux souhaits des parlementaires, mais celui-ci, compte tenu des principes constitutionnels applicables, ne peut pas être entièrement levé par les voies juridiques. L'ancienne réserve parlementaire reposait en effet sur une convention : le Gouvernement exécutait les crédits conformément à la volonté des parlementaires, même si rien ne l'y obligeait juridiquement. Elle ne fonctionnait donc que par le biais d'un accord tacite entre les pouvoirs législatif et exécutif.
Le rétablissement de la réserve parlementaire prévu par ce texte doit permettre de faire revivre cette convention. Elle serait la base d'un nouveau « gentlemen's agreement » entre le Parlement et le Gouvernement, au bénéfice de l'intérêt général.
Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 5 décembre 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Vincent Capo-Canellas sur la proposition de loi organique n° 33 (2023-2024) visant à rétablir la réserve parlementaire en faveur des communes rurales et des associations.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. - Il nous revient ce matin d'examiner la proposition de loi organique de notre collègue Hervé Maurey visant à rétablir la réserve parlementaire en faveur des communes rurales et des associations. Son passage en séance publique aura lieu la semaine prochaine, le jeudi 14 décembre.
Déposée en vue de l'ordre du jour réservé au groupe Union centriste, cette proposition de loi est examinée dans les conditions du gentleman's agreement, qui suppose que les modifications qui pourraient intervenir en commission soient soumises à l'accord de l'auteur. L'amendement que je vous proposerai sur ce texte est donc le fruit d'un travail commun mené avec notre collègue Hervé Maurey, que je tiens d'ailleurs à remercier pour la qualité de nos échanges.
Cette proposition de loi de loi organique s'inscrit dans la suite d'un mouvement réunissant des parlementaires des deux chambres, et de tous les groupes politiques, pour rétablir la réserve parlementaire, aussi appelée « dotation d'action parlementaire » au Sénat. Je pense notamment à l'appel de 300 parlementaires lancé fin octobre.
D'autres initiatives doivent être soulignées : dès 2021, certaines voyaient déjà le jour. Notre collègue Jean-Marc Boyer avait ainsi déposé une proposition de loi visant à instituer une dotation d'action parlementaire au sein de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Nos collègues Laurence Muller-Bronn et Alain Houpert ont également enregistré à la Présidence du Sénat une proposition de loi organique qui avait fait l'objet d'un dépôt en amont à l'Assemblée nationale.
Toutes ces initiatives montrent l'attachement des députés et des sénateurs à cette pratique, qui offrait une véritable souplesse dans le financement des projets des communes et des associations, et qui permettait l'attribution de subventions au plus près des préoccupations des territoires.
Vous vous souvenez sans doute du contexte de la suppression de la réserve parlementaire. Celle-ci a été décidée à la suite de l'examen de la loi organique du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, pour des raisons tenant aux soupçons de clientélisme qui entouraient cette pratique, ainsi qu'à sa prétendue inefficacité.
Pourtant, il faut rappeler que les subventions versées étaient attribuées selon les modalités de droit commun définies par décret en Conseil d'État, et qu'elles étaient en plus soumises à des exigences de transparence supérieures à celles qui s'appliquaient aux dotations classiques. Chaque année était publiée en ligne la liste de l'intégralité des subventions versées, avec l'obligation de mentionner les montants, le nom des bénéficiaires et le parlementaire à l'origine de la proposition.
Quant aux accusations « d'inefficacité » et de « saupoudrage », elles ont fait le lit de nombreuses contre-vérités. En 2015, 65 % des demandes de subventions proposées par les sénateurs étaient d'un montant compris entre 2 000 euros et 10 000 euros, pour une moyenne de 5 624 euros. Ce montant me semble tout à fait raisonnable : il permet de soutenir de véritables projets, tout en se focalisant sur les petites communes et les associations. Aussi 23 888 dossiers ont-ils bénéficié de la réserve parlementaire en 2016.
Au demeurant, les dispositifs qui ont succédé à la réserve parlementaire n'ont pas fait leurs preuves et, à tout le moins, n'ont pas montré une efficacité supérieure.
Certes, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) prévoit d'associer les parlementaires dans la limite de deux députés et deux sénateurs par département, mais leur rôle se limite à la participation dans le cadre d'une commission consultative placée auprès du préfet de département, qui reste seul décisionnaire, avec évidemment les priorités nationales du Gouvernement comme boussole.
Le ciblage de la DETR est également très différent de celui de la réserve : en 2022, les subventions de 20 000 euros ou moins ne représentaient en cumulé qu'à peine 10 % de l'enveloppe de la DETR. Il manque aujourd'hui, dans le paysage des dotations d'investissement, me semble-t-il, des outils de financements à destination des petits projets communaux.
Concernant les associations, les résultats du deuxième volet du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA 2) paraissent décevants. Tout comme pour la DETR, le rôle des députés et des sénateurs se limite à la participation à une commission consultative, et le préfet de région reste le véritable décideur.
De plus, le fonctionnement du FDVA 2 reste difficilement lisible pour les petites associations. Il a été observé une baisse de l'ordre d'un tiers du nombre de demandes de financement entre 2018 et 2020, qui s'explique par le découragement des associations face à la lourdeur des démarches à accomplir. Le nombre de demandes de financement a par la suite peu augmenté, malgré la hausse des financements du fonds.
Face à ce constat, le rétablissement de la réserve parlementaire se présente non pas comme un « retour en arrière », mais comme une solution.
Je ne dis pas que la réserve parlementaire était parfaite. Les différences de montant entre les parlementaires pouvaient être sujettes à caution, et il est toujours possible de renforcer les garanties de transparence et de qualité des projets subventionnés.
C'est pour cette raison que, en 2017, le Sénat avait entendu donner un cadre juridique à la réserve parlementaire plutôt que de la supprimer. Ainsi, sur une initiative conjointe de nos collègues Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois, et d'Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis de la commission des finances, le Sénat avait adopté en première lecture un dispositif alternatif de soutien aux projets d'investissement des communes et de leurs groupements, sur proposition des parlementaires, dont les règles de fonctionnement étaient inscrites dans la loi organique relative aux lois de finances (Lolf).
Je pense que nous avons tous le souhait de doter la réserve parlementaire - si elle est reconduite - d'une base juridique fiable. Je tiens à souligner à ce sujet les apports importants de la proposition de loi organique de notre collègue Hervé Maurey.
L'article unique du texte met l'accent sur les obligations de transparence. Il prévoit la publication annuelle de la liste des subventions versées, précisant, pour chaque subvention, le nom du bénéficiaire, le montant versé, la nature du projet financé, le programme concerné et le nom du membre du Parlement, ainsi que le nom du groupe politique ou de la présidence de l'assemblée qui l'a proposé. Il réaffirme également l'obligation, pour les bénéficiaires, de rendre public l'usage de la subvention.
Ensuite, il propose un ciblage sur les communes de moins de 3 500 habitants et les communes nouvelles de moins de 10 000 habitants dès lors qu'elles comprennent plus de deux communes déléguées, l'objectif étant de concentrer les subventions sur les petits projets.
Enfin, le texte intègre les associations dans les bénéficiaires possibles, qui étaient oubliées dans l'amendement adopté en 2017 par le Sénat. Je soutiens cette proposition, qui permet de retrouver le champ de l'ancienne réserve parlementaire.
L'amendement que je propose vise uniquement à conforter la présente proposition de loi organique dans son objectif de rétablissement de la réserve parlementaire.
Il vise premièrement à élargir le bénéfice du dispositif à l'ensemble du bloc communal. Le critère du nombre d'habitants était intéressant dans un souci de ciblage, mais il avait pour effet de laisser de côté certains départements, qui pouvaient comporter une zone urbaine et une zone rurale, ou être exclusivement urbains. Cette évolution est sans incidence sur le montant global de l'enveloppe, et les parlementaires seraient ainsi libres de proposer, en responsabilité, de soutenir un projet, quelle que soit la taille de la commune qui le porte.
L'amendement prévoit ensuite de nouveaux critères, comme la mise en oeuvre d'une politique d'intérêt général, ou la réalisation du projet dans un délai de sept ans maximum. Il est également précisé que le montant de la subvention ne devrait pas excéder la moitié du montant du coût du projet.
Enfin, il vise à sécuriser juridiquement la proposition de loi organique, afin de garantir le respect de certains principes constitutionnels. Le rétablissement de crédits gérés uniquement par les parlementaires pour financer des projets pourrait en effet se heurter à la fois à l'article 40 de la Constitution et au principe de séparation des pouvoirs.
Contrairement à ce que l'on croit parfois, la réserve parlementaire, avant sa suppression en 2017, n'était aucunement une obligation qu'imposaient les sénateurs et les députés au pouvoir exécutif. Il s'agissait en réalité de propositions que le Gouvernement avait la possibilité de ne pas suivre. Si, dans la pratique, il respectait la volonté des représentants, c'était en vertu d'une convention républicaine qui reconnaissait aux parlementaires une connaissance fine de leurs territoires.
À l'heure actuelle, ce genre de conventions manque cruellement dans notre vie institutionnelle et politique. Dire cela ne traduit nullement une volonté de réhabiliter certaines pratiques d'un autre temps que nos concitoyens rejettent à raison. Il s'agit simplement de créer les conditions d'une collaboration efficace et transparente entre les pouvoirs, au service de l'intérêt général.
La proposition de loi organique de notre collègue Hervé Maurey n'a donc pas seulement pour effet de raffermir le lien entre les parlementaires et les territoires, elle vise aussi à réintroduire une forme de gentleman's agreement entre le Gouvernement et le Parlement.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Merci d'avoir trouvé les voies et moyens permettant à cette proposition de loi de trouver sa place dans le débat, tout en apportant d'utiles corrections, notamment l'extension du dispositif à l'ensemble du bloc communal.
Si cette proposition de loi organique venait à prospérer, il conviendrait, me semble-t-il, de mettre en place une gestion simplifiée et transparente de la réserve.
La majorité présidentielle ne semble toutefois guère avoir d'appétence pour un tel dispositif.
Par ailleurs, connaît-on la proportion de projets n'ayant pas donné lieu à un financement parce qu'ils ont été abandonnés ? Dans le cas de la DETR, des taux de chutes significatifs peuvent être observés dans certains départements.
M. Didier Rambaud. - J'avoue nourrir quelques hésitations quant au retour de cette réserve parlementaire. J'appartiens à la génération de parlementaires arrivés après 2017 et je n'ai donc pas expérimenté moi-même ce dispositif.
Les parlementaires expriment peut-être, au travers de cette proposition de loi, un problème existentiel : lorsque des équipements sont inaugurés sur le terrain, les remerciements vont à l'État, à la région, au département, voire à l'intercommunalité, tandis que les parlementaires peuvent se sentir mis à l'écart. Certains maires font même pire, n'invitant que celles et ceux qui ont participé au financement à couper le ruban. Ce type de comportement m'a amené à réagir à plusieurs reprises auprès du préfet et du sous-préfet en rappelant que l'État verse des subventions car les parlementaires votent le budget : n'ayons aucun complexe en la matière.
Néanmoins, j'estime qu'il faudrait restreindre encore davantage les critères si cette réserve parlementaire devait être recréée. Certes, la proposition de loi fixe une limite de 3 500 habitants, mais je me demande s'il ne faudrait pas abaisser ce seuil. Selon moi, une subvention est utile lorsqu'elle joue un effet de levier : j'ai assisté trop souvent, quand j'étais conseiller général, à des inaugurations d'écoles dont le coût se chiffrait à plusieurs millions d'euros, avec une subvention de l'État et du conseil général à hauteur de 500 000 euros ou de 1 million d'euros. On remerciait aussi, à cette occasion, le parlementaire qui avait octroyé 15 000 euros à 20 000 euros, alors même que cette contribution était assez insignifiante.
La réserve parlementaire devrait donc, si elle venait à être remise en place, favoriser l'aboutissement de projets de taille modeste, dans des petites communes.
S'agissant des associations, nous prenons le risque d'ouvrir une boîte de Pandore en créant un système très inéquitable. Lorsque j'étais maire, j'ai été confronté au cas d'un club de basketball qui voulait accéder à la nationale 3 et qui avait sollicité à cet effet les parlementaires. Ces derniers avaient refusé, expliquant ne soutenir que les projets des communes, mais l'association sportive s'était retrouvée en concurrence avec d'autres clubs du département qui avaient, eux, pu bénéficier de subventions, ce qui l'avait amenée à critiquer l'injustice de la situation. Réintégrer les associations au dispositif me paraît donc risqué, car cela ouvre la porte à des pratiques très clientélistes.
M. Claude Nougein. - Je suis bien plus enthousiaste que mon collègue à l'égard de ce retour de la réserve parlementaire, que j'ai expérimentée entre 2014 et 2017. Les 280 maires de mon département plébiscitent son retour.
Si le Gouvernement n'est pas du tout favorable à cette proposition de loi, il va falloir insister. Je rappelle, tout d'abord, que je partage l'objectif de ne pas augmenter la dépense publique : l'essentiel du financement pourrait être assuré via la DETR.
S'agissant de cette même dotation, rappelons ensuite que les parlementaires n'interviennent qu'au sujet de projets impliquant une subvention supérieure à 100 000 euros - soit une dizaine de cas dans mon département chaque année - et ne se prononcent pas sur les projets concernant les petites communes.
J'ajoute, sur le plan de la prise de décision, qu'un sous-préfet qui prend son premier poste dans un département rural ne provient généralement pas du corps préfectoral. Ne connaissant la première année personne dans le département et préparant déjà son départ l'année suivante, il a tendance à confier à un agent de ses services l'instruction des dossiers de DETR, sans connaître la réalité des projets. Comment peut-on prétendre que ce type de profils est plus compétent qu'un parlementaire, qui serait, lui, plus enclin au clientélisme ? Quand le Président de la République - la remarque vaut aussi pour ses prédécesseurs - se déplace dans une grande ville telle que Marseille pour y distribuer 1 milliard d'euros en un week-end, ne peut-on le présenter comme du clientélisme ? Tous l'acceptent, considérant peut-être que c'est nécessaire.
Je souligne, en outre, que les projets qu'il était possible de soutenir via la réserve parlementaire ne sont souvent pas éligibles à la DETR, une éligibilité qui dépend d'ailleurs de la souplesse dont font preuve ou non les préfets. Un préfet strict n'accordera ainsi pas de crédits au titre de la DETR dans des dossiers de voirie communale, alors qu'il s'agit des projets les plus coûteux, ce qui peut engendrer du mécontentement. Des abus ont pu exister, c'est vrai, mais il ne s'agit pas d'une démarche clientéliste, ni même de la recherche d'honneurs le jour de l'inauguration des équipements.
M. Marc Laménie. - Je connais la réserve parlementaire depuis 1984, un mécanisme qui assurait une certaine équité entre les parlementaires. Même si je partageais les objectifs poursuivis par la loi pour la confiance dans la vie politique, j'avais pu exprimer mon désaccord concernant la suppression de ce dispositif, et je remercie le rapporteur et les collègues qui portent cette proposition de loi bienvenue. Avant 2017, le mécanisme était pourtant bien encadré, avec notamment un contrôle opéré par les services préfectoraux.
J'aurais une question pour le rapporteur : les petits syndicats intercommunaux seraient-ils éligibles au nouveau dispositif ?
M. Olivier Paccaud. - J'ai cosigné cette proposition de loi portée par Hervé Maurey, un texte qui est, monsieur Rambaud, une proposition de bon sens réclamée depuis 2017 par les élus locaux. Dans mon département, les députés qui avaient voté sa suppression s'en sont très vite mordus les doigts, car cette petite goutte d'huile permettait de boucler les budgets.
Les associations concernées étaient d'ailleurs non pas des clubs sportifs de haut niveau, mais plutôt des associations modestes, souvent des comités des fêtes. La réserve parlementaire a été supprimée par un Président hors-sol qui avait stigmatisé les parlementaires et leurs prébendes, ce qui a conduit, comme l'a justement observé Claude Nougein, à lui substituer une réserve préfectorale aux mains de personnes qui ne connaissent pas le département, mais disposant de tous les pouvoirs, à la différence d'élus qui connaissent les territoires et ne cherchent pas à favoriser telle ou telle structure.
Pour en revenir au texte, il me paraît bienvenu de supprimer la limite des 3 500 habitants, mais il faut, plus largement, garantir la souplesse du dispositif. Or l'une des phrases de votre amendement me pose problème : que signifie la phrase « chaque année, les commissions des finances de chaque assemblée adressent au Gouvernement la liste des projets d'intérêt local que les députés et les sénateurs lui proposent de soutenir par des subventions pour l'exercice suivant » ? Que chaque parlementaire dresse, en début d'année, la liste des dossiers dans son département ?
Un tel mode de fonctionnement n'aurait aucun intérêt, à moins peut-être d'adopter un sous-amendement prévoyant éventuellement des listes trimestrielles. Tout lister en début d'année rendrait en effet le dispositif trop rigide, alors que nous devrions pouvoir aider les communes qui en ont besoin au fil de l'eau.
Enfin, j'appuie la demande de Marc Laménie : les petits syndicats et les intercommunalités doivent pouvoir être soutenus lorsque la chaudière de l'école intercommunale doit être remplacée, par exemple.
M. Rémi Féraud. - La réserve parlementaire est un sujet passionnel, du moins pour nous. N'ayant pas eu l'expérience de la réserve parlementaire comme sénateur, mais en tant que maire d'arrondissement, je crois que tous les élus locaux ont été déçus par sa suppression, car elle permettait de soutenir des projets associatifs ou des petits investissements.
Emmanuel Macron avait promis cette suppression en 2017 dans le cadre d'une promesse plus large de rénovation de la vie politique, et le retour de ce débat traduit une déception par rapport aux promesses d'un « nouveau monde » : les Français sont-ils plus heureux depuis la fin de la réserve parlementaire ?
Ce texte vise à répondre à trois enjeux, sans que la réserve parlementaire soit en mesure d'y suffire. Le premier a trait aux grandes difficultés financières des collectivités locales ; le deuxième concerne les baisses de subventions versées aux associations ; le troisième renvoie à un contrat démocratique très détérioré entre les élus - notamment les parlementaires - et les électeurs. Si le rétablissement de la réserve parlementaire ne peut pas être une réponse à la hauteur de ces défis, le débat a le mérite de mettre en lumière un manque.
Élu d'un département ne comptant aucune commune de moins de 3 500 habitants, je remercie par ailleurs le rapporteur d'avoir rétabli l'égalité en ne privant pas les communes de certains départements de la réserve parlementaire.
Il subsiste cependant un angle mort, à savoir celui des Français de l'étranger. Nos collègues qui représentent ces derniers se plaignent du système de soutien au tissu associatif des Français à l'étranger (Stafe) - équivalent du FDVA sur le territoire national -, alors que la réserve parlementaire dont ils disposaient par le passé servait à financer des projets autour des alliances françaises.
Enfin, le montant de 20 000 euros est-il suffisant ? Figurait-il dans la proposition de loi originelle ou a-t-il été déterminé dans le cadre de vos travaux ?
M. Éric Bocquet. - J'ai connu la réserve parlementaire et je m'étais opposé à sa suppression, qui s'inscrivait dans un mouvement dans l'air du temps visant à moraliser la vie politique tout en véhiculant une fausse image des parlementaires, supposés, dans l'esprit populaire, avoir toujours un carnet de chèques ou une liasse de billets en poche. Les communes le vivaient pourtant très différemment, car la réserve parlementaire était transparente et efficace, permettant de finaliser rapidement des projets en venant compléter la subvention communale.
Pour autant, je suis réservé par rapport à cette proposition de rétablissement de la réserve : du temps a passé et la proposition risque de prêter le flanc à de nouvelles critiques qui ne manqueront pas d'accuser les parlementaires de rétablir leurs privilèges grâce au pouvoir législatif dont ils disposent. Je suis donc, à titre personnel, très réservé, mon groupe n'ayant pas encore eu l'occasion de débattre de ce sujet.
M. Jean-François Rapin. - La suppression de cette réserve parlementaire est intervenue dans un climat antiparlementaire plus large englobant la suppression du cumul des mandats, et découle effectivement d'une promesse présidentielle.
Pour en revenir à une approche plus financière, 19 parlementaires du Pas-de-Calais attribuaient, quand la réserve parlementaire existait, 2,280 millions d'euros ; avec le FDVA, 471 616 euros ont été distribués en 2022, puis 566 000 euros en 2023 : alors que ce fonds était censé se substituer à la réserve, nous avons en fait été victimes d'un véritable tour de passe-passe.
Ce constat me conduit à considérer d'un oeil favorable le rétablissement de la réserve parlementaire - même si des améliorations pourraient en effet être apportées pour les élus représentant les Français de l'étranger -, car elle permet de soutenir des petits projets, qui sortent du champ des outils de financements publics de l'État. En tant que président des maires du Pas-de-Calais, j'ai pu mesurer son utilité pour les territoires, avant de l'utiliser moi-même pendant deux ans.
Cette réserve permettait d'appuyer des projets situés en dehors du champ des subventions et du soutien public. J'ai ainsi été fier de financer un tableau numérique dans une école par exemple, alors que l'éducation nationale ne s'en préoccupait pas à l'époque : des élèves m'en ont remercié, alors qu'ils ne votent pas. Le soupçon de clientélisme n'était d'ailleurs pas justifié, tant les demandes de subventions dépassaient nos capacités financières ; d'où la nécessité de faire des choix. Je ne me suis jamais demandé de quel bord politique était le maire avant de verser une subvention, seul comptait l'intérêt du projet. En pratique, j'avais décidé de circonscrire mon soutien à des projets liés à la sécurisation des écoles et à quelques associations.
Désormais, le FDVA, ouvert à toutes les associations, donne lieu à une concurrence féroce entre des centaines de projets, le préfet choisissant par conséquent de plafonner les aides à 3 000 euros. À l'inverse, les parlementaires, tout en étant contrôlés, peuvent choisir de cibler le sport ou la culture. Parlons du vécu, car il permet d'aborder de véritables enjeux financiers.
Mme Ghislaine Senée. - Nous avons tous profité de la réserve parlementaire lorsque nous étions maires, appréciant sa souplesse d'utilisation, avec un montant permettant de concrétiser des projets.
Pour autant, mon groupe sera défavorable à la proposition de loi dans la mesure où elle risque de susciter l'hostilité de l'opinion publique. La décision du Président de la République de supprimer la réserve a en effet acté dans l'opinion l'existence d'une forme de clientélisme, et je ne vois pas comment nous pourrions défendre son rétablissement, même si le mécanisme répond à un réel besoin, exprimé à la fois par les petites collectivités et par les associations.
Il me semblerait préférable de réfléchir à un autre dispositif permettant de travailler sur des projets locaux d'intérêt général. Je pense que nous serons sévèrement jugés si nous donnons l'impression de vouloir nous redonner le pouvoir de distribuer des enveloppes.
Mme Isabelle Briquet. - Olivier Paccaud rappelait que certains avaient approuvé la suppression de la réserve parlementaire et s'en étaient mordu les doigts : j'espère pour ma part que nous n'aurons pas nous en mordre les doigts si elle était rétablie. Cette réserve parlementaire était-elle appréciée ? Oui. Était-elle décriée ? Oui, tout autant. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, j'ai bien peur que la qualification de cette nouvelle réserve ne soit identique à ce que nous avons connu précédemment.
Certes, l'attente sur le terrain est réelle, mais je crains que nous ne suscitions de trop grandes attentes par rapport à ce qui pourra être effectivement accompli avec la réserve. Par ailleurs, les travers clientélistes passés pourraient se reproduire. Le retour de la réserve fait peser un risque démocratique et pourrait encourager des populismes silencieux : peut-être vaudrait-il mieux renforcer d'autres dispositifs d'aide aux communes.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. - La réserve parlementaire suscite un vif débat politique. Sur ce plan, nous constatons tous l'existence d'une lacune dans les dispositifs existants pour financer les plus petits projets, la DETR ne parvenant pas à répondre pas de manière satisfaisante à cet objectif. D'où, d'ailleurs, l'intention des commissions des finances et des lois, dans le dispositif qu'elles avaient proposé en 2017 dans le cadre de l'examen du projet de loi organique pour la confiance dans la vie publique, de limiter le montant de la subvention à 20 000 euros, seuil qui a été repris dans mon amendement afin de souligner l'intérêt d'apporter une nouvelle solution possible de financement à des petits projets qui ne sont pas forcément pris en charge par l'État.
J'ignore si ce texte pourra prospérer. Avec l'accord d'Hervé Maurey, je me suis efforcé de bâtir une version qui puisse ressortir de la commission avec une base juridiquement robuste. J'en profite pour répondre à M. Paccaud qu'il existe bien un enjeu de séparation des pouvoirs, mais la rédaction issue de mon amendement permet de lever cet obstacle.
En termes de méthode, je rappelle que, de façon originale une loi organique a, en 2017, mis fin à une pratique, celle de la réserve parlementaire. Celle-ci ne reposait sur aucune base juridique, en dehors d'une accroche contenue dans la Lolf relative aux exigences de transparence applicable aux projets soutenus. Nous sommes donc tenus de recourir à une loi organique pour rétablir la réserve parlementaire. Cela étant, il ne sera pas possible de répondre, au niveau de la loi organique, à toutes les exigences de gestion pratique du dispositif que nous pourrions vouloir poser. Il vous est proposé de confier à la commission des finances le soin de suivre la mise en oeuvre du dispositif : pourrons-nous faire mieux qu'une liste annuelle adressée au Gouvernement, ensuite reprise dans le projet de loi de finances ? Il s'agit là de modalités qui pourront être précisées ultérieurement.
Assurons-nous d'abord de la solidité juridique du texte, d'où notre choix de coller au maximum à la version de 2017, commune aux commissions des lois et des finances. Celle-ci n'a pas été mise en cause sur le plan technique : un débat a eu lieu, à l'époque, à l'Assemblée nationale, le texte n'ayant pas été retenu pour des raisons politiques, mais le Sénat avait alors fait oeuvre utile en tentant de conférer une solidité juridique au mécanisme.
Je ne dispose pas de la réponse posée par le rapporteur général, s'agissant du taux de projets abandonnés dans le cadre de la DETR.
Je partage, en outre, l'idée selon laquelle la souplesse doit être de mise s'agissant des communes éligibles, tout en encadrant les subventions pouvant être versées, c'est le sens de l'amendement que je propose.
Concernant le seuil de 20 000 euros, il me paraît déjà suffisamment restrictif, la cible étant bien les petits projets. Ce montant peut paraître limité dans des grandes villes, mais des critères sont nécessaires et nous devons démontrer que la réserve intervient en complément de la DETR.
Monsieur Rambaud, je comprends votre hésitation, mais je rappelle que les parlementaires sont aussi parfois perçus par les élus locaux comme étant parfois éloignés des préoccupations concrètes d'investissements de terrain.
Quant aux syndicats intercommunaux évoqués par M. Laménie, je confirme qu'ils seront bien intégrés au dispositif issu de l'amendement que je vous propose.
J'insiste, monsieur Paccaud, sur l'impossibilité de contraindre juridiquement dans la loi le Gouvernement de financer des projets précis. Le principe de séparation des pouvoirs veut qu'il dispose du monopole pour l'exécution des crédits, dans la limite fixée par nos votes. Dans la pratique, les crédits consacrés à la réserve parlementaire seraient intégrés aux programmes budgétaires pertinents par amendement gouvernemental au projet de loi de finances, sur la base de la liste que nous lui auront adressée.
J'entends les remarques de M. Féraud concernant la crise démocratique que nous traversons, qui font écho aux critiques du dispositif évoquées par Mme Briquet : agir est un risque, mais ne pas agir en est un aussi.
Nous devons effectivement nous pencher sur la problématique des Français de l'étranger : en 2017, une disposition avait été adoptée par le Sénat, mais ne figurait pas dans l'amendement commun des deux commissions, peut-être pourrions-nous la reprendre d'ici à la séance.
Je comprends vos réserves, monsieur Bocquet, car nous sommes confrontés à un dilemme. Une fois encore, assurons-nous de la solidité juridique du texte, et le débat politique permettra ensuite de trancher.
Monsieur Rapin, vous avez eu raison de rappeler des chiffres qui démontrent le manque d'efficacité des systèmes qui se sont substitués à la réserve.
Madame Briquet, je souligne que cette nouvelle version de la réserve serait un instrument bien différent de celui qui a existé, l'objectif étant de conserver de la souplesse et de se redonner un instrument d'action en direction des collectivités, mais dans un cadre plus strict que par le passé.
M. Claude Raynal, président. - Avant d'examiner le texte, il revient à la commission d'adopter le périmètre indicatif de la proposition de loi au titre de l'article 45 de la Constitution. Il vous est proposé qu'il comporte toutes dispositions relatives à l'institution, au niveau de la loi organique, d'un dispositif consistant en l'ouverture de crédits en loi de finances, sur une initiative du Gouvernement reprenant des propositions de membres du Parlement, en vue du financement d'opérations déterminées.
Il en est ainsi décidé.
EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE
Article unique
L'amendement COM-2 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-1 devient sans objet.
L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi organique est ainsi rédigé.
Intitulé de la proposition de loi organique
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. - L'amendement COM-3 vise à tirer les conséquences de l'élargissement du bénéfice du dispositif à l'ensemble du bloc communal et à modifier l'intitulé de la proposition de loi organique. Son titre deviendrait donc « proposition de loi organique visant à rétablir la réserve parlementaire en faveur des communes et des associations ».
M. Olivier Paccaud. - Qu'en est-il de ma proposition de prévoir des listes trimestrielles ?
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. - Je ne souhaite pas dépasser le champ de mes compétences dans ce dossier : nous en sommes au stade de la loi organique, il ne nous revient pas de fixer ici la façon avec laquelle la commission des finances mettra en oeuvre le dispositif.
M. Claude Raynal, président. - Ces modalités devront être définies en liaison avec le ministère de l'intérieur. Par le passé, les délais étaient fixés de façon précise, bien qu'appliqués dans les faits avec une certaine souplesse, et l'administration pouvait assurer les contrôles nécessaires. Nous pouvons donc procéder ainsi dans un premier temps.
L'amendement COM-3 est adopté.
L'intitulé de la proposition de loi organique est ainsi modifié.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
* 1 Lien vers la base de données publiée par l'Assemblée nationale ; lien vers la base de donnée publiée par le Sénat.
* 2 Source : étude d'impact du projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique, déposé au Sénat le 14 juin 2017.
* 3 Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.
* 4 Article 148 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 5 Le premier volet du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA 1) est un dispositif plus ancien, créé par le décret n° 2011-2121 du 30 décembre 2011, et qui a vocation à financer la formation des bénévoles. Hors mécanisme de fléchage des avoirs inactifs, le FDVA 1 est doté tous les ans de 8,1 millions d'euros, et il n'a pas vocation à remplacer la réserve parlementaire, contrairement au FDVA 2.
* 6 Le mécanisme de fléchage des avoirs inactifs acquis par l'État, lorsque sa quote-part est de 20 %, conduit à une augmentation d'environ 20 millions d'euros par an des financements de l'ensemble du FDVA. Les crédits fléchés vers le FDVA 1 ne peuvent pas dépasser 25 %.
* 7 Rapport réalisé à la suite d'une demande de la commission des finances du Sénat dans le cadre du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances.
* 8 « Le Fonds pour le développement de la vie associative. Volet fonctionnement et innovation. », Cour des comptes, septembre 2021, page 22.
* 9 Référé de la Cour des comptes relatif aux subventions pour travaux divers d'intérêt local, 27 novembre 2014, page 6.
* 10 Référé de la Cour des comptes relatif aux subventions pour travaux divers d'intérêt local, 27 novembre 2014, page 7.
* 11 Conseil d'État, Assemblée, Avis n° 393323 sur un projet de loi organique relatif à la confiance dans l'action publique, 12 juin 2017.
* 12 « Entre contraintes budgétaires et priorités de l'État : quel rôle des dotations d'investissement pour les collectivités territoriales ? » Rapport d'information n° 806 (2021-2022) fait par MM. Charles Guené et Claude Raynal au nom de la commission des finances du Sénat, déposé le 20 juillet 2022.
* 13 Cette disposition a été introduite par l'article 12 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.
* 14 Considérant n° 48.
* 15 Par ailleurs, ces amendements auraient pu être recevables même s'ils s'agissaient d'amendements parlementaires, à la condition qu'ils soient correctement gagés. La levée ou non du gage est ensuite à l'initiative du Gouvernement.
* 16 Considérant n° 49.