C. LE PLAN CHLORDÉCONE IV

L'action 08 « volet territorialisé du plan national d'action Chlordécone » finance, de manière transversale, les dispositifs destinés à tirer les conséquences de la pollution en Martinique et en Guadeloupe par la chlordécone, pesticide utilisé de 1972 à 1993 pour lutter contre le charançon du bananier, alors même que son utilisation avait rapidement été interdite dans plusieurs pays dont les États-Unis, en raison de ses effets cancérigènes.

Ce pesticide, par l'ampleur de ses effets et sa persistance dans le temps, entraîne des conséquences terribles sur le plan sanitaire, environnemental, agricole, économique et social. Il contient une molécule toxique, très persistante dans les sols, susceptible de contaminer certaines denrées végétales ou animales ainsi que les milieux aquatiques.

La lutte contre cette pollution a fait l'objet d'un ensemble d'actions coordonnées, regroupées sous l'appellation « plan Chlordécone » dont l'action finance une partie du 4e volet sur la période 2021-2027.

Ce « plan Chlordécone IV (2021-2027) » est issu d'un processus de co-construction qui a associé les services de l'État, les collectivités territoriales, des associations et organisations professionnelles et a débouché sur une consultation publique. Il comporte six stratégies (communication, recherche, formation et éducation, santé, environnement et alimentation, santé et travail, et enfin stratégie socio-économique) dont cinq sont mises en oeuvre dans le cadre du PITE.

Sur la base des consultations publiques menées, et toujours dans le cadre des six stratégies précitées, sont régulièrement identifiés de nouveaux volets de mesures à développer. Ont ainsi été identifiés en 2023 quatre type de mesures qu'il conviendra de mettre en oeuvre :

• le financement d'une aide aux éleveurs de bovins pour sécuriser leur production à partir d'outils à leur disposition, comme des prises de sang prédictives du temps de décontamination avant abattage ;

• la prise en charge, de façon exceptionnelle et dérogatoire, du surcoût du traitement de l'eau potable des usines de production dont la ressource est impactée par la chlordécone ;

• la simplification de l'aide aux pêcheurs en opérant des déductions automatiques des contributions CGS-CRDS ;

• le doublement des financements sur la recherche et l'innovation à horizon 2030 pour la santé des femmes, la dépollution des sols et l'expérimentation en grandeur nature des découvertes des chercheurs.

Ces actions sont poursuivies pour 2024 à hauteur d'un peu plus de 4,2 millions d'euros, en AE comme en CP.

Ce plan a été envisagé de manière à tirer les conséquences de l'évaluation du précédent plan qui a fait apparaître plusieurs lacunes.

Les conclusions de la mission d'évaluation
du plan chlordécone III (2014-2020)

Cette mission a été confiée à l'inspection générale des affaires sociales, au conseil général de l'environnement et du développement durable, au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et à l'inspection générale de l'administration, de l'éducation nationale et de la recherche, qui a rendu son rapport en février 2020. Le bilan du plan III dressé par la mission est assez sévère.

Celle-ci conclut à d'importantes lacunes dans l'organisation du pilotage du plan, jugée « peu efficace » du fait de l'absence d'implication directe des trois ministères de l'agriculture et du développement durable et de la recherche, à la direction générale de la santé (DGS) et à la direction générale des outre-mer (DGOM).

En outre, le financement des 30 millions d'euros du plan pour les premières années (2014-2017) reposait sur une articulation avec des crédits européens. Mais, selon la mission, les collectivités territoriales gestionnaires des fonds structurels européens ne se sont pas senties engagées par un plan auquel elles n'avaient pas été associées.

La mission fait également le constat d'un état d'avancement très inégal des actions. Selon elle, « des actions aussi essentielles que la surveillance médicale des professionnels et anciens professionnels de la banane et la cartographie des sols n'ont pas ou ont été insuffisamment réalisées ».

Autre critique, le volet recherche du plan présente un bilan mitigé au regard des objectifs du plan : « en continuité des deux plans précédents avec des actions et des projets largement autonomes, sans réelles hiérarchie ni cohérence avec les autres actions du plan, sa conception apparaît déficiente ». La mission pointe en particulier une absence de clarté sur la gouvernance du plan, entraînant un manque d'efficacité du pilotage.

La mission recommande en conclusion de revoir en profondeur le pilotage du plan IV afin de créer une synergie entre toutes les parties prenantes. Le Gouvernement semble avoir entendu cette recommandation et met en avant la « co-construction » du plan IV avec l'ensemble des acteurs.

Source : Commission des finances du Sénat à partir des programmes annuels de performances

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