EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 50

Évolution de la prime de transition énergétique

Le présent article prévoit, d'une part, de supprimer la condition de ressources pour bénéficier de MaPrimeRénov', et, d'autre part, des mesures pour lutter contre la fraude à la rénovation énergétique, dont le renforcement de l'encadrement du mandataire MaPrimeRénov'.

MaPrimeRénov' est déjà ouverte à tous les ménages sans condition de ressources depuis 2021. Pour les ménages les plus aisés, elle est aujourd'hui limitée aux forfaits pour la rénovation globale et aux bonus « sortie de passoire énergétique » et « bâtiment basse consommation ». La suppression de cette condition n'aura donc pas de réelle incidence sur le fonctionnement de la prime de transition énergétique.

L'article ouvre également la possibilité de conditionner l'exercice de l'activité de mandataire à une déclaration préalable de l'ANAH, et il prévoit l'application des sanctions prononcées contre les personnes morales à leurs dirigeants. L'essentiel des mesures de renforcement de l'encadrement des mandataires et de la lutte contre la fraude seront néanmoins prises au niveau réglementaire.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : MAPRIMERÉNOV' PEUT FAIRE L'OBJET DE SANCTIONS ADMINISTRATIVES POUR FRAUDE À LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE

A. MAPRIMERÉNOV' EST DÉJÀ OUVERTE AUX MÉNAGES SANS CONDITIONS DE RESSOURCES DEPUIS 2021

L'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a créé la prime de transition énergétique, dénommée « MaPrimeRénov' », en remplacement du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) et des aides « Habiter mieux agilité » de l'Agence nationale de l'Habitat (ANAH).

En 2020, cette prime était ciblée sur les ménages les plus modestes. Pour cette raison, l'article 15 de la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 dispose que MaPrimeRénov' est accordée « sous conditions de ressources ».

Toutefois, dans le sillage du plan de relance, l'article 241 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a ouvert la prime de transition énergétique à tous les propriétaires. Pour les ménages les plus aisés cependant, la prime de transition énergétique n'est applicable que pour les rénovations globales et les travaux d'isolations. Selon cet article, l'ouverture à tous les ménages sans condition de ressources devait prendre fin au 31 décembre 2022.

L'article 21 de la loi n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022, issu d'un amendement à l'initiative de la députée Véronique Louwagie, a cependant étendu l'ouverture de MaPrimeRénov' sans conditions de ressources à l'année 2023.

La prime de transition énergétique finance les travaux de rénovation thermique à hauteur de leurs coûts, dans la limite de quatre plafonds, qui dépendent des revenus des ménages. Ces quatre plafonds se déclinent en quatre « couleurs » (bleu, jaune, violet, rose).

Catégories de revenus utilisées dans le cadre
du programme « MaPrimeRénov' » en 2023

Composition du foyer

Ménages
aux revenus très modestes (bleu)

Ménages
aux revenus modestes (jaune)

Ménages
aux revenus intermédiaires (violet)

Ménages aux revenus supérieurs (rose)

Une personne

16 229

22 461

20 805

27 343

29 148

38 184

> 29 148

> 38 184

Deux personnes

23 734

32 967

30 427

40 130

42 848

56 130

> 42 848

> 56 130

Trois personnes

28 545

39 591

36 591

48 197

51 592

67 585

> 51 592

> 67 585

Quatre personnes

33 346

46 226

42 748

56 277

60 336

79 041

> 60 336

> 79 041

Cinq personnes

38 169

52 886

48 930

64 380

69 081

90 469

> 69 081

> 90 469

Personne supplémentaire

+ 4 813

+ 6 650

+ 6 165

+ 8 097

+ 8 744

+ 11 555

> + 8 744 

> + 11 555

Note : les nombres en italiques sont les catégories de revenus applicables en Île-de-France. Les catégories de revenus présentées sont également applicables pour les forfaits ainsi que pour MaPrimeRénov' Sérénité.

Source : Commission des finances, d'après la Commission d'enquête sur l'efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique, et d'après le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

B. LE MANDATAIRE MAPRIMERÉNOV'

Le troisième alinéa du II de l'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 prévoit que l'ANAH peut habiliter des mandataires proposant aux bénéficiaires de la prime de transition énergétique un « accès simplifié à celle-ci ».

Un mandataire MaPrimeRénov' est un tiers, désigné par quelqu'un qui demande la prime, qui doit l'aider dans ses démarches en ligne (mandat administratif), voire pour bénéficier de la subvention à sa place (mandat financier). Le mandataire MaPrimeRénov' ne doit pas être confondu avec « Mon Accompagnateur Rénov' », dont les missions sont l'assistance à la prospection et à la sélection des professionnels, et l'évaluation de la qualité des travaux menés.

Les mandataires MaPrimeRénov' peuvent être des personnes physiques ou morales, publiques ou privées. Pour être habilité mandataire par l'ANAH, il est nécessaire de déposer un dossier à l'agence. L'article 4 du décret n° 2021-344 du 29 mars 202169(*) énonce les conditions requises pour bénéficier de l'habitation. Il est notamment nécessaire :

- d'apporter une information et un accompagnement sécurisés au demandeur par le biais d'un traitement sécurisé des données conformément à la réglementation relative à la protection des données ;

- d'assurer une chaîne commerciale, contractuelle et assurantielle respectueuse des droits du consommateur, qui exclut notamment tout démarchage abusif ;

- d'apporter une information sur l'ensemble des engagements, et porter à la connaissance du demandeur la réglementation relative à la prime.

Au titre du cinquième alinéa du II de l'article 15 de la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, les mandataires sont passibles de sanctions en cas de manquement aux règles au même titre que les bénéficiaires de la prime.

C. LES SANCTIONS POUR NON-RESPECT DES RÈGLES DE LA PRIME DE TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Le cinquième alinéa du II de l'article 15 de la loi de finances pour 2020 prévoit que le montant des sanctions prononcées par l'ANAH en cas de non-respect des règles de la prime de transition énergétique ne peut excéder :

- pour les personnes morales, dix fois le montant de la prime accordée par dossier, dans la limite de 4 % du chiffre d'affaires hors taxes du dernier exercice clos, portée à 6 % en cas de manquements réitérés ;

- pour les personnes physiques, 50 % du montant de la prime pour les personnes physiques.

L'ANAH peut également, pour une durée maximale de cinq ans, refuser toute nouvelle demande de prime émanant d'un bénéficiaire ou d'un mandataire ayant contrevenu aux règles applicables. Les personnes ou les organismes concernés ont la possibilité de présenter leurs observations préalablement au prononcé des sanctions.

Selon l'article 8 du décret n° 2020-26 du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique, les sanctions prévues au II de l'article 15 de la loi du 28 décembre 2019 susvisée sont fixées en fonction de la gravité des faits, de la situation du bénéficiaire ou de son mandataire et de l'éventuelle réitération d'agissements sanctionnés dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

Le directeur général de l'ANAH doit saisir pour avis une commission70(*), qui se prononce sur l'opportunité et le contenu de la sanction envisagée, dans les cas suivants :

- les faits constituent un manquement ou une irrégularité grave, répété ou présentant un caractère nouveau commis par un ou plusieurs mandataires ;

- les faits constituent une fraude commise par tout mandataire ou bénéficiaire de la prime ;

- le bénéficiaire ou son mandataire mis en cause a demandé à être auditionnée.

Les sanctions présentées sont des sanctions administratives, et les scénarios de contravention aux règles de MaPrimeRénov' vont au-delà du cas de la fraude à la rénovation énergétique stricto sensu.

Par ailleurs, les actes qui contreviennent aux règles de MaPrimeRénov', comme les fraudes justement, peuvent également constituer des infractions et faire l'objet de sanctions pénales. Par exemple, les pratiques commerciales trompeuses en matière de rénovation énergétique sont passibles de deux ans de prison et d'une amende de 300 000 euros au titre de l'article L. 132-2 du code de la consommation.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA SUPPRESION DE LA CONDITION DE RESSOURCES POUR BÉNÉFICIER DE MAPRIMERÉNOV' ET UN RENFORCEMENT DE L'ENCADREMENT DES MANDATAIRES MAPRIMERÉNOV'

Le a) du 1° du présent article supprime la condition de ressources pour bénéficier de MaPrimeRénov'.

Le b) du 1° supprime la disposition selon laquelle les caractéristiques et conditions d'octroi de la prime de transition énergétique ne peuvent être moins favorables pour le bénéficiaire que celles régissant le crédit d'impôt transition énergétique (CITE).

Le 2° complète la disposition selon laquelle des garanties, notamment financières, de compétence, de probité et de moyens appropriés peuvent être exigées pour les mandataires MaPrimeRénov'.

Il précise que l'activité de mandataire peut également être conditionnée aux engagements suivants :

- de restitution des primes indûment perçues pour le compte du mandant ;

- de déclarations préalables auprès de l'ANAH, ou relatifs aux conditions d'exercice de l'activité.

Il est prévu que ces engagements et garanties soient précisés par décret.

Le a) du 3° apporte une modification à la détermination du montant de la sanction pour une personne morale. Il est toujours prévu que le montant des sanctions ne peut excéder dix fois le montant de la prime accordé par dossier, dans la limite de 4 % du dernier chiffre d'affaires. Toutefois :

- en droit existant, la référence est 4 % du chiffre d'affaires hors taxes du dernier exercice clos, tandis qu'en droit proposé, il s'agit de 4 % du dernier chiffre d'affaires hors taxes connu à la date des faits ;

- en droit proposé, il est précisé que si la valeur du chiffre d'affaire n'est pas déterminable, le montant de dix fois le montant de la prime accordée par dossier s'applique.

Le b) du 3° prévoit que pour le mandataire personne morale, la sanction peut s'appliquer aux président et dirigeants en exercice au moment où le manquement a été réalisé. La durée de cette sanction ne peut pas excéder le terme du mandat de la personne de la personne morale en question.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION 

Cet article n'a pas été modifié par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER L'ARTICLE SANS MODIFICATION

Une refonte de la prime de transition énergétique est prévue pour l'année prochaine. MaPrimeRénov' sera désormais décomposée en deux volets : un parcours « performance », qui se focalise sur les rénovations globales, et un parcours « efficacité », qui finance des travaux individuels.

Cette réforme sera cependant mise en place pour l'essentiel au niveau réglementaire. Le présent article effectue en réalité des modifications à la marge concernant l'éligibilité à la prime et le statut des mandataires MaPrimeRénov'.

A. LA SUPPRESSION DE LA CONDITION DE RESSOURCES N'AURA PAS D'INCIDENCE SUR LE FONCTIONNEMENT DE MAPRIMERÉNOV'

La suppression de la condition de ressources pour bénéficier de MaPrimeRénov' est une mesure symbolique. Cette condition n'a été en réalité effective qu'en 2021. Entre 2021 et 2023, la prime de transition énergétique a été ouverte aux ménages les plus aisés.

L'enjeu n'est en réalité pas tant de savoir si les ménages aisés (catégorie « rose » selon la classification de l'ANAH) peuvent bénéficier ou non de MaPrimeRénov' dans l'absolu, mais de déterminer quels sont pour eux les types de travaux finançables par la prime, et quel niveau de financement celle-ci peut prendre en charge. Ces critères relèvent du domaine réglementaire.

En 2023, les ménages des catégories de revenus supérieurs sont exclus pour les travaux individuels, comme par exemple l'installation d'une pompe à chaleur, d'un appareil de chauffage au bois, ou du changement des fenêtres. Jusqu'au 1er avril 2023, les ménages aisés pouvaient encore bénéficier de la prime pour des mesures d'isolation.

Plafonds de MaPrimeRénov' selon les revenus d'un ménage
pour l'installation d'une chaudière à granulés

Une personne

Deux personnes

Plafond de l'aide

Jusqu'à 15 262 euros

Jusqu'à 22 320 euros

10 000 euros

Jusqu'à 19 565 euros

Jusqu'à 28 614 euros

8 000 euros

Jusqu'à 29 148 euros

Jusqu'à 42 411 euros

4 000 euros

Au-dessus de 29 148 euros

Au-dessus de 42 411 euros

-

Source : commission des finances

Ces ménages ne peuvent plus bénéficier que du forfait de rénovation globale, d'un montant de 5 000 euros, et des bonus « sortie de passoire énergétique » et « bâtiment basse consommation », tous les deux de 500 euros.

Aides aux travaux de rénovation globale

Catégorie de revenus

Montant de l'aide

Forfait rénovation globale de MaPrimeRénov'

Supérieures

5 000 euros

Intermédiaires

10 000 euros

MaPrimeRénov' Sérénité

Modestes

Travaux pris en charge
à hauteur de 35 % dans la limite de 12 250 euros

Très modestes

Travaux pris en charge
à hauteur de 55 % dans la limite de 17 500 euros

Source : commission des finances

Les financements de MaPrimeRénov' pour les ménages aisés représentent de ce fait une part minoritaire du coût de la prime. D'après le Gouvernement, il est évalué que les subventions accordées aux ménages aisés représenteraient 19 millions d'euros en autorisations d'engagement, sur les 2 milliards d'euros consacrés à MaPrimeRénov' sur le programme 174.

Il est prévu que ces barèmes soient modifiés avec la refonte de MaPrimeRénov' programmée en 2024. En tout état de cause, la suppression de la condition de ressource n'aura pas d'incidence sur le fonctionnement actuel de la prime de rénovation énergétique.

B. LA MONTÉE EN PUISSANCE DE MAPRIMERÉNOV' SERA IMPOSSIBLE SANS UNE VÉRITABLE POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE

1. Le régime de l'encadrement des mandataires MaPrimeRénov' sera surtout déterminé par décret

La disposition selon laquelle le mandataire s'engage à reverser le montant des primes indûment perçues pour le compte du mandant est la reprise des conditions énoncées au décret du 29 mars 2021 relatif à l'habilitation de mandataires dans le cadre de la prime de transition énergétique. La différence est que cette exigence est désormais applicable aux mandataires qui n'auraient pas été habilités par l'ANAH.

Le contenu réel des engagements du mandataire sera établi par décret. D'après l'évaluation préalable de l'article, les mesures envisagées sont : « l'engagement de ne pas créer le compte personnel du ménage, l'engagement de restituer les primes indument perçues, l'engagement de produire des bilans sociaux attestant des chiffres d'affaires (les éventuelles sanctions prises par l'Anah reposent sur cette information), l'engagement de réaliser les travaux conformément aux règles de l'art et plans de contrôle ».

Il a été rapporté dans la presse que le Gouvernement aurait annoncé, le 3 novembre dernier, que le présent article rendrait obligatoire la déclaration préalable auprès de l'ANAH pour exercer les activités de mandataire. La même information se trouve sur le site officiel « economie.gouv.fr », dans une page datée du 6 novembre : « Le PLF 2024 (article 50) prévoit ainsi d'exiger [...] une déclaration préalable auprès de l'ANAH. »71(*)

Or, l'article 50 n'en fait en réalité qu'une possibilité, et l'évaluation préalable ne mentionne pas non plus le caractère obligatoire de cette mesure. Si le Gouvernement a déjà prévu de conditionner l'activité de mandataire à MaPrimeRénov' à une déclaration préalable auprès de l'ANAH, il est impératif qu'il énonce clairement que cette disposition sera prise par décret, plutôt que de laisser penser qu'elle est déjà inscrite dans le projet de loi de finances.

La disposition selon laquelle les sanctions peuvent porter non seulement sur les personnes morales, mais également sur leurs dirigeants en exercice, doit permettre d'éviter que les mêmes dirigeants reproduisent un schéma frauduleux similaire avec une entreprise différente.

La sanction consistant dans le refus par l'ANAH, pour une durée de cinq ans, de toute nouvelle demande de prime émanant d'une personne morale sanctionnée était en effet largement ineffective, puisqu'il suffisait pour les auteurs de fraude de recréer une nouvelle structure. Attacher la sanction non plus seulement aux personnes morales mais également aux dirigeants est censé permettre de limiter ce phénomène.

2. Il est impératif que le Gouvernement accélère sur la lutte contre la fraude à la rénovation énergétique

Les mesures prévues par l'article doivent donner une latitude plus grande à l'ANAH pour lutter contre la fraude, mais elles ne suffiront pas. En effet, le phénomène de la fraude à la rénovation énergétique est massif.

Comme indiqué dans la présentation de la mission dans le présent rapport, la DGCCRF a réalisé une étude à partir de 36 000 inspections réalisées en 2021 et en 2022, au cours de laquelle il a été constaté un taux de non-conformité de 25 %. Le taux de conformité était quant à lui de 50 %, et un quart des dossiers ne pouvait pas être vérifié.

Les formes que peuvent prendre la fraude à la rénovation énergétique sont diverses. Par exemple, la fiche d'opération standardisée « Rénovation globale d'une maison individuelle » (CEEBAR-TH- 164), qui est utilisée dans le cadre des certificats d'économie d'énergie (CEE), fait l'objet de fraudes à trois niveaux :

- certains devis sont antidatés, sachant que l'État avait rendu possible jusqu'au 31 mars dernier le dépôt de devis antérieurs à décembre 2021 ;

- l'état énergétique du logement est dégradé au moment de l'évaluation de sa performance thermique ;

- la pompe à chaleur est présentée comme installée en basse température, avec un fonctionnement à 35 degrés, alors qu'en réalité, elle fonctionnera à des niveaux supérieurs, typiquement 60 degrés, ce qui est largement au-dessus du seuil de fonctionnement optimal des pompes à chaleur.

Le 3 novembre 2023, le Gouvernement a annoncé des mesures pour lutter contre la fraude à la rénovation énergétique :

- les effectifs de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) seront augmentés de 24 emplois pour la lutte contre la fraude à la rénovation énergétique ;

- l'ANAH pourra avoir accès au fichier des comptes bancaires en 2024 ;

- le taux de contrôle sur place pour MaPrimeRénov' et les CEE sera augmenté de respectivement 10 % et 12,5 % des dossiers, contre 7 % à 8 % à l'heure actuelle.

Il est également prévu que le versement des aides publiques puisse être suspendu en cas de suspicion de fraude organisée. Il est regrettable que davantage de précisions ne soient pas données quant à cette dernière mesure, alors qu'elle est structurante dans la lutte contre la fraude, et il est très étonnant qu'elle ne soit pas déjà mise en place.

D'une manière générale, les mesures annoncées représentent un minimum dans la lutte contre la rénovation énergétique, et il n'est pas certain qu'elles soient suffisantes pour répondre à l'enjeu de la fraude pour les années à venir. Les crédits de MaPrimeRénov'72(*) vont en effet connaître une forte augmentation en 2024, ce qui aiguisera d'autant plus l'appétit des entreprises frauduleuses.

Malgré cela, la lutte contre la fraude à la rénovation énergétique apparaît avoir des années de retard, alors même que celle-ci avait fait l'objet d'une forte médiatisation au temps des offres de « rénovation à 1 euro ».

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 50 bis (nouveau)

Extension de MaPrimeRénov' à Saint-Pierre-et-Miquelon

Le présent article prévoit de rendre éligible les habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon à au dispositif MaPrimeRénov', II de l'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modifications.

I. LE DROIT EXISTANT : LES HABITANTS DES COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER DE L'ARTICLE 74 DE LA CONSTITUTION NE SONT PAS ÉLIGIBLES À MAPRIMERÉNOV'

Le II de l'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 prévoit l'existence d'une prime de transition énergétique, appelée MaPrimeRénov', destinée à financer des travaux et dépenses en faveur de la rénovation énergétique des logements. Des informations générales sur le fonctionnement, le coût et l'éligibilité à MaPrimeRénov' sont données à la section B du II de la troisième partie du présent rapport.

MaPrimeRénov' est accessible dans les régions et départements d'outre-mer. Il faut cependant souligner que le forfait « rénovation globale » et les bonus « sortie de passoire énergétique » et « bâtiment basse consommation » (BCC) ne sont pas accordés en outre-mer, car le diagnostic de performance énergétique (DPE) n'y est pas applicable. En contrepartie, des forfaits spécifiques existent dans ces collectivités pour l'isolation solaire.

Les habitants des collectivités d'outre-mer mentionnées à l'article 74 de la Constitution et de Nouvelle-Calédonie ne sont en revanche pas éligibles à MaPrimeRénov'.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : L'EXTENSION DE MAPRIMERÉNOV' À SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON

Le présent article est issu d'un amendement n° II- 3321 déposé par le Gouvernement et repris dans le texte comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution.

Il prévoit de rendre éligible les habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon à MaPrimeRénov' dans des conditions qui seront précisées par décret.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE EXTENSION LOGIQUE

Saint-Pierre-et-Miquelon est la seule collectivité française située en Amérique du nord. L'archipel comptait 5 925 habitants au 1er janvier 2020.

Le climat de Saint-Pierre-et-Miquelon est de type froid et humide (zone climatique H1). La température moyenne est négative plusieurs mois de l'année, et elle dépasse rarement les 20°C. En cela, l'archipel fait figure d'exception parmi les collectivités d'outre-mer.

Climat de Saint-Pierre-et-Miquelon

(en degrés)

Source : commission des financées, d'après des données du National Centers for Environmental Information (NOAA)

Lors des auditions de la commission d'enquête du Sénat sur l'efficacité des politiques des politiques publiques en matière de rénovation énergétique, Sabrina Mathiot, directrice de l'Union sociale d'organismes HLM outre-mer, a indiqué que : « Fin 2022, l'État a dépensé un million d'euros pour aider les ménages de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cet argent a servi à payer l'augmentation du fioul, alors qu'il aurait pu servir à accompagner le parc prévu. » L'extension de MaPrimeRénov' à cette collectivité permettrait ainsi de générer des économies à moyen terme.

De plus, Saint-Pierre-et-Miquelon est déjà éligible au dispositif des certificats d'économie d'énergie (CEE).

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 50 ter (nouveau)

Extension de MaPrimeRénov' à Saint-Pierre-et-Miquelon

Le présent article résulte de la reprise par le Gouvernement, dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, d'un amendement déposé par le député Stéphane Lenormand et plusieurs de ses collègues. Il poursuit le même objectif que l'article 50 bis mais dans une rédaction moins aboutie. S'agissant du fond du dispositif, il est donc renvoyé au commentaire de l'article 50 bis.

Sur la forme, on ne peut que s'étonner que le Gouvernement n'ait pas choisi le dispositif de l'amendement qui lui paraissait le plus abouti dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité. Il en résulte que le texte transmis au Sénat contient des dispositions qui sont juridiquement concurrentes et par la même inapplicables. Le souhait d'afficher le plus grand nombre et le plus large spectre politique d'amendements retenus a dû motiver ce mauvais choix, qui s'est fait au détriment de clarté du texte et des débats.

Le rapporteur spécial a déposé un amendement n°  II-28 (FINC.3) visant à supprimer le présent article.

Décision de la commission : la commission des finances propose de supprimer cet article.

ARTICLE 51

Prolongation complémentaire du congé d'accompagnement spécifique
des salariés dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon

Le présent article prévoit une possibilité de prorogation du congé d'accompagnement spécifique des salariés confrontés à la fermeture des centrales à charbon.

La commission des finances propose d'adopter l'article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : DANS LE CADRE DE LA FERMETURE ANNONCÉE DES DERNIÈRES CENTRALES À CHARBON DES MESURES D'ACCOMPAGNEMENT DES SALARIÉS CONCERNÉS ONT ÉTÉ MISES EN oeUVRE

A. LA FERMETURE DES DERNIÈRES CENTRALES À CHARBON FRANÇAISES ÉTAIT PROGRAMMÉE POUR 2022

En décembre 2017, le Président de la République s'était engagé à fermer les quatre dernières centrales à charbon françaises d'ici à la fin de son mandat en 2022. Réaffirmé en 2018, cet engagement avait été inscrit dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) pour 2019-2023 puis confirmé par la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, dite « loi énergie climat ».

Les dispositions de l'article 12 de cette loi limitaient les émissions de CO2 des installations de production d'électricité à base de combustibles fossiles à partir du 1er janvier 2022. De ces dispositions devait en pratique résulter la fermeture des quatre dernières centrales à charbon situées sur le territoire national, sur les communes du Havre et de Cordemais pour les centrales exploitées par EDF, de Gardanne et de Saint-Avold, pour les centrales exploitées par GazelEnergie.

Les quatre centrales à charbon françaises qui étaient encore en fonctionnement en 2020 et leurs dates prévisionnelles de mise à l'arrêt
suite à l'adoption de la loi climat énergie de novembre 2019

Source : ministère de la transition écologique

En 2020, les quatre dernières centrales à charbon en activité en France fournissaient moins de 1,2 % de la production nationale d'électricité pour 10 millions de tonnes de CO2 de générées annuellement, soit plus du quart des émissions de gaz à effet de serre du secteur électrique. D'après Réseau de transport d'électricité (RTE), le charbon est l'une des énergies parmi les plus émettrices de carbone au monde. Elle produirait en moyenne 0,986 tonne d'équivalent CO2 (e CO2) par mégawatt (MW) contre 0,429 tonne d'e CO2 pour le gaz et 0,494 d'e CO2 pour les bioénergies.

Des démarches d'accompagnement des territoires concernés ont été prises suite à des concertations entre l'État, les collectivités locales et les autres acteurs impliqués, avec l'appui d'un délégué interministériel. Elles ont pris la forme de pactes territoriaux destinés à stimuler le tissu économique de ces territoires.

Les centrales du Havre et de Gardanne ont été mises à l'arrêt dès 2021 avant celle de Saint-Avold en mars 2022. Cependant, les tensions sur l'approvisionnement électrique anticipées pour l'hiver 2022-2023 et la crise des prix de l'énergie a conduit le Gouvernement à décider de rouvrir la centrale de Saint-Avold (voir infra) et de maintenir en fonctionnement la centrale de Cordemais.

B. L'ORDONNANCE DU 29 JUILLET 2020 A INSTAURÉ DES DISPOSITIFS D'ACCOMPAGNEMENT DES SALARIÉS EXPOSÉS À LA FERMETURE DES CENTRALES, AU PREMIER RANG DESQUELS, UN CONGÉ D'ACCOMPAGNEMENT SPÉCIFIQUE

Prise en application de la loi énergie et climat du 8 novembre 2019 précitée, l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 202073(*) a prévu différentes mesures destinées à accompagner les salariés exposés à la fermeture des dernières centrales à charbon française, c'est-à-dire ceux des quatre dernières centrales encore en activité à cette date mais aussi les personnels portuaires directement touchés par l'arrêt de cette activité et les salariés des entreprises sous-traitantes74(*). Cette ordonnance a été ratifiée par l'article 44 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Le titre Ier de l'ordonnance prévoit les dispositions applicables aux seuls salariés des entreprises exploitant les centrales à charbon. Les titres II et III concernent quant à eux respectivement les personnels portuaires et les salariés des entreprises sous-traitantes de celles exploitant les centrales à charbon.

1. Un congé d'accompagnement spécifique pour le maintien dans l'emploi des salariés des centrales à charbon

Le chapitre III du titre Ier de l'ordonnance instaure un congé d'accompagnement spécifique pour le maintien dans l'emploi des salariés des centrales à charbon. Conformément à l'article 6 de l'ordonnance, ce congé d'accompagnement spécifique concerne les salariés qui n'ont pas retrouvé d'emploi à l'expiration du congé de reclassement de droit commun prévu par le code du travail75(*). En application des dispositions de l'article 7, la durée maximale de ce congé spécifique est égale à douze mois mais peut être allongée à dix-huit mois :

- lorsque la durée séparant le début du congé de reclassement et l'âge d'ouverture du droit à pension de retraite du salarié est inférieure ou égale à cinq ans ;

- lorsque, au début du congé de reclassement, le salarié a atteint l'âge d'ouverture du droit à pension de retraite sans remplir les conditions d'une liquidation au taux plein.

L'article 8 dispose que le salarié bénéficiaire du congé d'accompagnement spécifique s'engage à suivre les actions de formation et de validation des acquis de l'expérience définies conjointement avec son employeur.

L'article 9 prévoit quant à lui que dans le cadre de son congé de reclassement spécifique, le salarié bénéficie d'une allocation mensuelle, versée par l'employeur et prise en charge par l'État, égale à un pourcentage de sa rémunération mensuelle brute moyenne perçue au cours des douze derniers mois précédant le congé de reclassement. Ce pourcentage est égal à :

- 70 % au titre des six premiers mois du congé ;

- 65 % à compter du septième mois.

L'article 10 précise notamment que ce congé spécifique peut comporter des périodes de travail durant lesquelles le congé et le versement de l'allocation sont suspendus.

L'article 12 prévoit que l'employeur met fin au congé d'accompagnement spécifique dans les cinq configurations suivantes :

- à la demande du bénéficiaire ;

- lorsque le salarié remplit les conditions pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein ;

- lorsque le bénéficiaire retrouve un emploi ;

- en cas de manquement du bénéficiaire, sans motif légitime, à l'engagement de suivre des actions de formation et de validation des acquis de l'expérience ;

- lorsque le bénéficiaire refuse à deux reprises un emploi similaire à son précédent emploi, dans le même bassin d'emploi, assorti d'une qualification et d'une rémunération au moins équivalentes.

2. Une indemnité versée en cas de retour anticipé à l'emploi

Le chapitre V du titre Ier de l'ordonnance prévoit le versement d'une indemnité en cas de retour anticipé à l'emploi des salariés des centrales à charbon.

L'article 18 de l'ordonnance prévoit ainsi que lorsqu'un salarié d'une centrale à charbon bénéficiaire du congé de reclassement de droit commun ou du congé d'accompagnement spécifique trouve un emploi avant la fin de l'un ou l'autre de ces deux congés, l'employeur lui verse une indemnité, prise en charge par l'État, correspondant à un pourcentage du montant maximal des allocations de congé d'accompagnement spécifique auxquelles il aurait pu prétendre jusqu'au terme de ce congé.

Ce pourcentage est égal à :

- 80 % lorsque la reprise d'emploi intervient dans les six mois suivant le début du congé de reclassement ;

- 70 % lorsqu'elle intervient entre le septième et le douzième mois ;

- 60 % lorsqu'elle intervient entre le treizième et le dix-huitième mois ;

- 50 % lorsqu'elle intervient au-delà du dix-huitième mois.

3. Des mesures financées par des crédits budgétaires suivis sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables »

Les crédits budgétaires consacrés par l'État aux mesures d'accompagnement social de la fermeture des centrales à charbon sont inscrits sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Plus précisément, ils sont suivis sur l'action 01 « Politique de l'énergie » de ce programme.

D'après le projet annuel de performances du programme 174 annexé au PLF pour 2024, 8,1 millions d'euros de crédits de paiement devraient être consacrés à l'ensemble de ces dispositifs au cours de l'exercice budgétaire 2024.

Évolution des dépenses de l'État (en crédits de paiement) consacrées aux mesures d'accompagnement social de la fermeture des centrales à charbon

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les annexes budgétaires aux lois de finances

En pratique, ces dépenses consistent à rembourser ex post les employeurs par l'intermédiaire des préfectures de régions concernées qui sont délégataires des crédits du programme 174.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE PROLONGATION POUVANT ALLER JUSQU'À 28 MOIS DU CONGÉ D'ACCOMPAGNEMENT SPÉCIFIQUE POUR LE MAINTIEN DANS L'EMPLOI DES SALARIÉS DES CENTRALES À CHARBON

Le I du présent article propose de compléter l'article 7 de l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 portant diverses mesures d'accompagnement des salariés dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon afin de prévoir que le congé d'accompagnement spécifique prévu par le chapitre III de l'ordonnance puisse être prorogé lorsqu'avant son terme, le salarié n'a pas retrouvé d'emploi. La durée de cette période complémentaire ne pourrait excéder vingt-huit mois.

Il est précisé que cette période complémentaire ne pourra donner lieu au bénéfice de l'indemnité versée en cas de retour anticipé à l'emploi définie à l'article 18 de la même ordonnance (voir supra).

Le II précise que les dispositions du présent article, c'est-à-dire la période complémentaire instaurée par son I, sont applicables aux congés d'accompagnement spécifique dont la date de début est antérieure à l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2024 ainsi qu'aux salariés dont le congé d'accompagnement spécifique a pris fin avant cette entrée en vigueur et dont le contrat de travail serait toujours suspendu à cette date.

Cette dernière disposition concerne notamment les salariés des sites de Saint-Avold et de Gardanne entrés dans le dispositif en août 2021 et dont les congés ont pris fin en août dernier.

III. LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Cet article n'a pas été modifié dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : DES DISPOSITIONS QUI DOIVENT PERMETTRE DE POURSUIVRE L'ACCOMPAGNEMENT DES SALARIÉS EXPOSÉS À LA FERMETURE DES CENTRALES À CHARBON

A. L'ACTIVITÉ DES DEUX DERNIÈRES CENTRALES À CHARBON FRANÇAISES POURRAIT ÊTRE PROLONGÉE JUSQU'EN 2027

En juin 2022, en raison des craintes quant à l'approvisionnement électrique pour l'hiver à venir, le Gouvernement a annoncé vouloir remettre en route la centrale à charbon de Saint-Avold fermée au mois de mars de la même année et ne pas stopper l'activité de la centrale de Cordemais. La loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat a ainsi rendu possible de procéder à la réembauche en contrat à durée déterminée (CDD) par le gestionnaire du site de Saint-Avold, GazelEnergie, des salariés qui avaient perdu leur emploi dans le cadre de l'arrêt d'activité de la centrale quelques mois plus tôt. Le site de Saint-Avold a ensuite pu reprendre son activité de production d'électricité à compter de la fin du mois de novembre 2022.

Un décret du 23 août 2023 portant modification temporaire du plafond des émissions de gaz à effet de serre des installations de production d'électricité émettant plus de 0,55 tCO2/MWh doit permettre aux deux dernières centrales à charbon française (Cordemais et Saint-Avold) de poursuivre leur activité jusqu'en 2024. Le décret relève en effet ce plafond à 1,8 kilotonne de CO2/MW de puissance électrique installée entre le 1er avril 2023 et le 31 décembre 2024. Cette évolution permettra aux deux centrales concernées de fonctionner pendant 500 heures supplémentaires sur cette période par rapport au plafond de 1 300 heures initialement autorisé jusqu'à fin 2024, soit 1 800 heures correspondant à 75 jours de production en continu. Durant l'hiver 2022-2023, les centrales à charbon avaient obtenu l'autorisation de fonctionner pendant 2 500 heures, soit 104 jours. En 2022, les deux dernières centrales à charbon française ont représenté 0,6 % du mix électrique national. Parallèlement, ce même décret prévoit que les centrales à charbon verront le montant des compensations dues au titre de leurs émissions de CO2 progresser de 40 euros à 50 euros/tCO2.

À la fin du mois de septembre dernier, le Président de la République a annoncé que la France ne sortira finalement de la production électrique via le charbon que d'ici 2027. À cet horizon, il s'est engagé à ce que les centrales de Cordemais et de Saint-Avold soient converties à la biomasse.

B. LA PROLONGATION DU CONGÉ SPÉCIFIQUE EST NÉCESSAIRE POUR POURSUIVRE L'ACCOMPAGNEMENT VERS LE RETOUR À L'EMPLOI DE SALARIÉS TOUJOURS SANS SOLUTION

L'évaluation préalable du présent article signale que certains anciens salariés de centrales à charbon demeurent toujours sans solution au terme de leurs droits ouverts au titre du dispositif d'accompagnement social prévu par l'ordonnance de juillet 2020. Sont concernés des salariés de GazelEnergie qui opéraient sur les sites de Saint-Avold et de Gardanne.

La prolongation du congé spécifique prévu par le présent article permettrait de poursuivre l'accompagnement vers le retour à l'emploi de ces salariés. Toujours d'après l'évaluation préalable de l'article, le coût par salarié de cette prolongation se situera entre 10 000 euros et 416 000 euros.

De 2023 à 2028, le coût cumulé de cette prolongation pourrait ainsi se chiffrer à 5,5 millions d'euros dont 1,2 million d'euros au titre de l'année 2024.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter l'article sans modification.

ARTICLE 52

Prolongation temporaire du bouclier tarifaire sur l'électricité et modification des conditions d'établissement
des tarifs réglementés de vente de l'électricité

Le présent article prévoit principalement :

- la reconduction du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité ;

- un dispositif d'amortisseur pour certaines entités non éligibles au bouclier ;

- un ajustement du calcul des tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRVe) et la reconduction de certains dispositifs dérogatoires en matière d'évaluation des compensations de charges de service public de l'énergie par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) ;

- une révision de la répartition du complément de prix relatif à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

Le rapporteur constate avec regret que le Gouvernement n'a pas tiré les leçons de l'examen du dernier projet de loi de finances et n'a pas souhaité prendre en compte les demandes légitimes des parlementaires de disposer des informations nécessaires à l'examen de dispositions législatives dont les enjeux tant financiers qu'économiques ou sociaux sont majeurs. À ce titre, l'amortisseur annoncé pour 2024 demeure un « objet non identifié ».

Par ailleurs en cherchant à réviser la répartition du complément de prix Arenh dans la précipitation par un amendement déposé à l'Assemblée nationale sans aucune concertation avec les fournisseurs ni aval de la CRE, le Gouvernement semble jouer à « l'apprenti sorcier ». Les réactions en chaîne de cette mesure prise sur des bases extrêmement fragiles pourraient conduire à alimenter une dynamique inflationniste des prix de l'électricité. Dans la mesure où de telles conséquences apparaissent comme particulièrement inappropriées dans le contexte actuel, le rapporteur propose un amendement n°  II-29 (FINC.4) visant à supprimer la révision de la répartition du complément de prix Arenh.

La commission des finances propose d'adopter l'article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : DES « BOUCLIERS TARIFAIRES » POUR LE GAZ ET L'ÉLECTRICITÉ ONT ÉTÉ MIS EN PLACE DEPUIS LA FIN DE L'ANNÉE 2021 POUR RÉPONDRE À UNE CRISE DES PRIX INÉDITE

A. LE BOUCLIER TARIFAIRE INDIVIDUEL SUR LES PRIX DU GAZ A PRIS FIN EN JUIN 2023

En raison d'une hausse fulgurante des prix, en octobre 2021 et jusqu'à la fin de l'année 2022, le Gouvernement a décidé de geler par voie réglementaire les tarifs réglementés de vente de gaz (TRVg).

L'article 181 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a concrétisé cet engagement dans la loi, en prévoyant un mécanisme de compensation pour les fournisseurs.

Initialement prévu jusqu'au 30 juin 2022, le bouclier tarifaire sur les prix du gaz a été prolongé une première fois par arrêté jusqu'au 31 décembre 2022. Alors que le bouclier était dans sa première mouture réservé aux clients disposant d'une offre au TRVg, l'article 37 de la première loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a étendu le dispositif à l'ensemble des clients qui disposent d'un contrat en offre de marché.

L'article 181 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prorogé une nouvelle fois le dispositif jusqu'au 30 juin 2023 en limitant cette fois-ci la hausse des TRVg à 15 % TTC par rapport au prix d'octobre 2021.

En parallèle de ce bouclier tarifaire « individuel », un dispositif destiné aux ménages vivant dans des logements chauffés collectivement au gaz a été instauré par voie règlementaire à compter du mois d'avril 2022 puis prorogé à plusieurs reprises jusqu'à la fin de l'année 2023.

Du fait de la baisse des prix du gaz observée depuis la fin de l'année 2022 et alors que l'article 181 de la loi de finances initiale (LFI) pour 2023 prévoyait la possibilité de prolonger l'application du bouclier tarifaire sur les prix du gaz jusqu'à la fin de l'année 2023, après la fin de la commercialisation des TRVg le 30 juin 2023, le Gouvernement a décidé de mettre un terme à ce dispositif dès le mois de juillet 2023.

B. EN 2022 PUIS EN 2023 ONT ÉTÉ MIS EN PLACE DES BOUCLIERS TARIFAIRES SUR LES PRIX DE L'ÉLECTRICITÉ

1. Depuis la fin de l'année 2021, une crise des prix de l'électricité sans équivalent historique

Dans le sillage de la hausse des prix du gaz, en raison du système de formation des prix de l'électricité sur le marché européen (voir encadré infra), les prix de gros de l'électricité se sont envolés à partir de l'automne 2021 pour atteindre des sommets historiques jamais observés auparavant.

Pourquoi la hausse des prix de l'électricité est-elle corrélée à celle du gaz ? La formation des prix de l'électricité sur le marché européen selon la règle de « l'ordre de mérite »

Dans le cadre du marché européen de l'énergie, et selon le principe dit de « l'ordre de mérite » ou de la « vente au coût marginal », la formation du prix de gros de l'électricité est déterminée par le prix de production de la dernière centrale nécessaire pour satisfaire la demande. C'est la centrale dite « marginale ».

En règle générale, en europe, en cas de pic de consommation, il s'agit souvent d'une centrale à gaz. Cette modalité de fixation des prix de gros de l'électricité explique la dépendance des prix de l'électricité à l'évolution des cours du gaz.

Le prix de l'électricité sur les marchés « spot » à court terme est extrêmement dépendant de l'évolution du prix des intrants qui alimentent les centrales électriques marginales et donc particulièrement des cours du gaz.

Source : commission des finances du Sénat

Alors qu'avant la crise, la moyenne de prix s'établissait autour de 50 euros par mégawattheure (MWh) et que le précédent record historique était de 93 euros/MWh lors de la crise financière de 2008, les prix du marché à terme de douze mois (CAL Y+ 1) ont connu une première poussée fulgurante au cours de l'hiver 2021-2022 pour dépasser les 400 euros/MWh au mois de janvier 2022.

Évolution des prix de marché à terme (un an, deux ans et trois ans) de l'électricité (juin 2021 - juin 2022)

(en euros/MWh)

Source : site internet du courtier Opéra énergie

Cependant, cette première crise n'était rien à côté de la flambée observée en août 2022, mois au cours duquel les prix de gros à douze mois ont tutoyé les 1 200 euros/MWh.

Évolution des prix de marché à terme (un an, deux ans et trois ans) de l'électricité (juin 2022 - juin 2023)

(en euros/MWh)

Source : site internet du courtier Opéra énergie

2. Les tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe) ne sont pas épargnés par l'augmentation des prix sur les marchés de gros

Les dispositions de l'article L. 337-7 du code de l'énergie réservent aujourd'hui l'éligibilité des tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe) aux ménages76(*) et aux petits « consommateurs finals non domestiques », notamment des TPE ou de petites communes77(*), à condition que la puissance d'électricité souscrite des sites concernés soit inférieure ou égale à 36 kilovoltampères (kVA).

Article L. 337-7 du code de l'énergie

I.- Les tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés à l'article L. 337-1 bénéficient, à leur demande, pour leurs sites souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères :

1° Aux consommateurs finals domestiques, y compris les propriétaires uniques et les syndicats de copropriétaires d'un immeuble unique à usage d'habitation ;

2° Aux consommateurs finals non domestiques qui emploient moins de dix personnes et dont le chiffre d'affaires, les recettes ou le total de bilan annuels n'excèdent pas 2 millions d'euros.

II.- Pour la souscription d'un nouveau contrat aux tarifs réglementés, les clients non domestiques attestent préalablement qu'ils remplissent les critères d'éligibilité mentionnés au 2° du I et portent la responsabilité du respect de ces critères d'éligibilité pour leur contrat d'alimentation.

III.- Les clients finals non domestiques qui disposent d'un contrat aux tarifs réglementés de vente d'électricité sont tenus de le résilier dès lors qu'ils ne respectent plus les critères mentionnés au 2° du I et portent la responsabilité du respect de ces critères d'éligibilité pour leur contrat d'alimentation.

Source : code de l'énergie

Les TPE dont les niveaux de consommation électrique sont importants ne sont donc pas éligibles aux TRVe78(*). Au 31 mars 2023, d'après l'observatoire des marchés de détail de l'électricité et du gaz naturel pour le premier trimestre 2023 publié par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en juillet 2023, 21,4 millions de ménages en France bénéficient d'une offre au TRVe ainsi que 1,7 million de sites non résidentiels.

Les TRVe sont des tarifs « intégrés » dont l'objet est de couvrir aussi bien les coûts de production que les coûts de commercialisation et d'acheminement. En application du code de l'énergie, la CRE transmet au moins une fois par an au Gouvernement des propositions motivées de TRVe. Conformément aux dispositions de l'article L. 337-6 du code de l'énergie, le calcul de ces TRVe est réalisé selon le principe dit de « l'empilement des coûts » qui doit garantir que ce tarif puisse être reproductible et « contestable » par les fournisseurs alternatifs. Dans ce cadre normatif, le niveau des TRVe résulte de l'addition :

- du coût d'approvisionnement de la part relevant des droits théoriques au dispositif de l'accès régulé à énergie nucléaire historique (Arenh)79(*) ;

- du coût d'approvisionnement du complément de fourniture après achat des volumes d'Arenh (dit « complément de marché ») et relevant des achats de produits à terme sur les marchés de gros de l'électricité, qui explique la dépendance des TRVe aux évolutions des prix de gros sur le marché européen ;

- du coût d'approvisionnement en capacité80(*) ;

- du coût d'acheminement par les réseaux de transport et de distribution d'électricité ;

- du coût de commercialisation81(*) ;

- et enfin de la rémunération de l'activité de fourniture d'électricité.

Description de la détermination des TRVe par la CRE
selon la méthodologie de l'empilement des coûts

Source : rapport de la Cour des comptes sur l'organisation des marchés de l'électricité, juillet 2022

Article L. 337-6 du code de l'énergie

Les tarifs réglementés de vente d'électricité sont établis par addition du prix d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, du coût du complément d'approvisionnement au prix de marché, de la garantie de capacité, des coûts d'acheminement de l'électricité et des coûts de commercialisation ainsi que d'une rémunération normale de l'activité de fourniture tenant compte, le cas échéant, de l'atteinte du plafond mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 336-282(*).

Sous réserve que le produit total des tarifs réglementés de vente d'électricité couvre globalement l'ensemble des coûts mentionnés précédemment, la structure et le niveau de ces tarifs hors taxes peuvent être fixés de façon à inciter les consommateurs à réduire leur consommation pendant les périodes où la consommation d'ensemble est la plus élevée.

Source : code de l'énergie

Le complément de marché calculé par la CRE correspond à la moyenne des prix de marché à terme pour une année donnée lissée sur 24 mois. Ce système permet d'atténuer l'exposition des TRVe à l'évolution des prix de gros de l'électricité.

Dans le calcul réalisé par la CRE pour 202383(*) le complément de marché représente 33 % de la part d'approvisionnement, soit 17 % du total des TRVe non gelés84(*) HT. Pour mesurer l'exposition globale des TRVe aux prix de gros, il est nécessaire de prendre en compte le coût du complément d'approvisionnement en énergie et en garanties de capacité consécutif à l'écrêtement de l'Arenh. En effet, puisque les demandes d'Arenh sont structurellement supérieures au plafond de 100 térawattheures (TWh), le volume initialement pris en compte dans la construction des TRVe, qui correspond aux droits théoriques, est écrêté et une part d'approvisionnement de marché complémentaire doit être ajoutée dans la détermination du niveau des TRVe85(*). Au total, les TRVe se trouvent désormais exposés aux prix de marché à hauteur d'environ 50 % de la part approvisionnement. Dans un rapport de juillet 2022 sur l'organisation des marchés de l'électricité, la Cour des comptes souligne l'exposition de plus en plus forte des TRVe aux prix de marché.

Évolution de la part « fourniture d'énergie » (ARENH et marché) des TRVe
entre 2016 et 2022

(en euros / MWh)

Source : rapport de la Cour des comptes sur l'organisation des marchés de l'électricité, juillet 2022

Cette évolution explique en partie l'augmentation régulière des TRVe TTC depuis 2014.

Évolution des différentes composantes des TRVe toutes taxes comprises (TTC) destinés aux ménages entre 2013 et 2022

(en euros / MWh)

Source : rapport de la Cour des comptes sur l'organisation des marchés de l'électricité, juillet 2022

En 2023, les propositions de TRVe non gelés de la CRE86(*) ont révélé de nouvelles hausses de près de 80 % par rapport aux TRVe non gelés proposés en 202287(*) qui avaient déjà augmenté de 45 % par rapport à 2021.

3. Les boucliers tarifaires sur les prix de l'électricité mis en oeuvre en 2022 puis en 2023

En 2022 puis en 2023, un dispositif dit de « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité a également été instauré pour limiter les effets de la hausse des prix de marché sur les factures des petits consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe). Ce dispositif a permis de contenir les hausses moyennes des factures d'électricité des consommateurs éligibles aux TRVe à 4 %88(*) en 2022 puis, en 2023, à 15 % en février auxquels se sont ajoutés 10 % supplémentaires au mois d'août.

Le bouclier tarifaire pour l'année 2022 a été prévu par les dispositions de l'article 181 de la LFI pour 2022 tandis que le bouclier tarifaire pour l'année 2023 l'a été par l'article 181 de la LFI pour 2023.

Ce dispositif a consisté en un gel de l'augmentation des TRVe. Ce gel a été instauré par voie réglementaire, sous forme d'arrêtés qui se sont opposés89(*), en vertu des dispositions prévues en LFI pour 2022 puis pour 2023, à l'évolution des TRVe proposée chaque année en janvier par la CRE selon les modalités de calcul prévues par le code de l'énergie. La différence entre le niveau des TRVe non gelés par la CRE et le niveau des TRVe gelés par arrêté est compensée aux fournisseurs par l'État au titre des charges de service public de l'énergie (CSPE).

Cette compensation est également versée aux fournisseurs au titre de leurs consommateurs éligibles aux TRVe qui ne disposent pas de contrats au TRVe, ce qui rend ces derniers également éligibles au dispositif de bouclier tarifaire90(*). De plus, le dispositif dit de « foisonnement » prévu par la loi a permis à un fournisseur d'optimiser les compensations qu'il perçoit afin d'en faire davantage bénéficier ses clients qui disposent des contrats de fournitures les plus onéreux91(*).

En 2022, le dispositif de bouclier tarifaire a été en grande partie financé par EDF à travers un relèvement à hauteur de 20 térawattheures (TWh) du volume d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH). Cette mesure, qui s'est répercutée sur l'ensemble des contrats de fourniture d'électricité, a d'ailleurs bénéficié à l'ensemble des consommateurs, particuliers comme professionnels, très au-delà du périmètre des personnes et entités éligibles au bouclier à proprement parler.

En 2022 comme en 2023, le gel des TRVe a également été en partie financé par la minoration des taux d'accise sur l'électricité (l'ancienne TICFE) à leur niveau minimum autorisé par le droit de l'Union européenne. Cette disposition profite également à l'ensemble des consommateurs d'électricité.

Comme pour les prix du gaz mais avec retard, un dispositif spécifique appliqué ex post dédié à l'habitat collectif a été mis en oeuvre à compter de la fin de l'année 202292(*) et jusqu'à la fin de l'année 2023.

C. LES « AMORTISSEURS » SUR LES PRIX DE L'ÉLECTRICITÉ

L'article 181 de la LFI 2023 a également créé un mécanisme baptisé « amortisseur » sur les prix de l'électricité destiné à soutenir les entités privées comme publiques non éligibles aux TRVe et, par voie de conséquence, au bouclier tarifaire. Cet article prévoit qu'en 2023 les entités éligibles à ce dispositif bénéficient d'une baisse du prix de leur fourniture d'électricité égale à un montant en euros/MWh correspondant à la différence entre le prix de l'électricité de leur contrat et un « prix d'exercice » (un prix de référence) dans la limite d'un « plafond » exprimé lui aussi en euros/MWh. Cette réduction s'applique sur une certaine « quotité » de consommation d'électricité du client final.

En application de l'article 181 de la LFI pour 2023, le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 202293(*) a précisé les trois paramètres qui doivent déterminer le calcul de l'amortisseur, à savoir la quotité de consommation d'électricité concernée, fixée à 50 %, le prix d'exercice de référence, fixé à 180 euros/MWh et, enfin, le plafond d'aide, fixé à 320 euros/MWh.

L'application de l'amortisseur électricité revient ainsi à réduire la facture des clients éligibles, pour la moitié des volumes consommés, de l'écart entre le prix de l'électricité de leur contrat et le prix d'exercice de 180 €/MWh, cette réduction étant plafonnée à 320 €/MWh. L'aide annuelle maximale94(*) découlant de ces paramètres est ainsi de 160 €/MWh.

Le même décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022 a défini les consommateurs finals éligibles au dispositif d'amortisseur (voir encadré ci-après).

Les consommateurs finals éligibles à l'amortisseur

Sont éligibles au mécanisme d'amortisseur, les consommateurs finals autres que ceux éligibles au dispositif de bouclier tarifaire électricité appartenant à l'une des catégories suivantes :

1° Les PME95(*) ;

2° Les personnes morales de droit public qui emploient moins de 250 personnes et dont les recettes annuelles n'excèdent pas 50 millions d'euros ;

3° Les personnes morales de droit public ou privé96(*) dont les recettes annuelles provenant de financements publics, de taxes affectées, de dons ou de cotisations, sont supérieures à cinquante pour cent des recettes totales ;

4° Les collectivités territoriales et leurs groupements.

Source : décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022 pris en application des VIII et IX de l'article 181 de la loi no 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023

En raison notamment des difficultés rencontrées par les boulangers et les autres TPE dont le cycle productif nécessite une puissance élevée et ainsi non éligibles aux TRVe, le Gouvernement a mis en oeuvre par voie réglementaire un dispositif spécifique destiné à celles de ces TPE qui ont renouvelé leur contrat de fourniture d'électricité en 2022. Ce dispositif, qualifié de « sur-amortisseur » dans la mesure où il fonctionne selon les mêmes modalités que l'amortisseur mais avec des paramètres calibrés différemment, a permis de garantir à ces TPE, en 2023, un prix de leur électricité de 230 euros/MWh.

Les modalités d'application du dispositif de « sur-amortisseur »

Les modalités précises de cette aide ont été définies dans un décret du 3 février 202397(*) modifiant le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022. Le décret précise notamment que les entreprises éligibles au sur-amortisseur sont celles :

- qui emploient moins de dix personnes et dont le chiffre d'affaires, les recettes ou le total de bilan annuels n'excèdent pas 2 millions d'euros, pour leurs sites souscrivant une puissance supérieure à 36 kilovoltampères (TPE et assimilées) ;

- ayant signé ou renouvelé un contrat de fourniture d'électricité au titre de 2023 entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2022 ;

- dont le prix de la part variable de l'électricité hors taxes, hors acheminement, moyen en euros par MWh résultant de leur contrat pour l'année 2023 excède 280 euros/MWh en moyenne annuelle.

Calqué sur le fonctionnement de l'amortisseur, le mécanisme TPE retient les paramètres suivants : une quotité de consommation d'électricité éligible fixée à 100 %, un prix de référence de 230 euros/MWh et un plafond de 1 500 euros/MWh.

Source : commission des finances du Sénat

D. LE COMPLÉMENT DE PRIX ARENH

Afin notamment d'éviter les effets d'aubaine liés au dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh), il existe un mécanisme rétroactif pour réattribuer des volumes qui auraient été alloués en excès à des fournisseurs dans le cas où le développement de leur portefeuille de client sur l'année considérée ne s'est pas déroulé conformément à leurs prévisions initiales. Ce mécanisme prend la forme d'un complément de prix évalué ex post par la CRE sur la base des consommations constatées remontées par les gestionnaires de réseau.

Ce complément de prix, aussi appelé « complément de prix 1 » (CP1), est prévu au premier alinéa du II de l'article L. 336-5 du code de l'énergie. Cet alinéa prévoit ainsi que dans le cas où les droits d'Arenh alloués à un fournisseur s'avèrent supérieurs aux droits correspondants aux consommateurs fournis par ce fournisseur, la CRE lui notifie le complément de prix à acquitter au titre des volumes excédentaires.

Définition du « complément de prix 1 »

Le « complément de prix 1 » (CP1) a pour objectif de neutraliser financièrement la situation d'un fournisseur ayant demandé plus d'Arenh que ce que la consommation constatée sur son portefeuille de clients ne lui en donne le droit. Le montant de ce reversement correspond aux éventuels gains réalisés par le fournisseur en revendant sa quantité excédentaire98(*) sur le marché de gros et consiste à restituer la valeur financière des quantités d'Arenh livrées en excès.

Source : délibération n° 2020-285 de la Commission de régulation de l'énergie du 2 décembre 2020 portant décision relative aux modalités de calcul et de répartition du complément de prix ARENH en cas d'atteinte du plafond

En application des dispositions du troisième alinéa du II du même article, lorsque le volume plafond d'Arenh a été atteint pour une année donnée, ce complément de prix est alors réparti entre Électricité de France (EDF) et les autres fournisseurs selon des modalités de calcul précisées par un décret pris en Conseil d'État99(*). Les règles de répartition prévue à ce troisième alinéa sont précisées par l'article R. 336-35-2 du code de l'énergie.

Article R. 336-35-2 du code de l'énergie

Dans le cas où le calcul de la somme totale des quantités de produit maximales pour les petits et grands consommateurs pour une période de livraison débutant lors de l'année considérée a été supérieur au plafond, la Commission de régulation de l'énergie calcule une répartition du montant global correspondant aux versements du terme « CP1 » entre les fournisseurs et Électricité de France en application du troisième alinéa du II de l'article L. 336-5.

À cette fin, la Commission de régulation de l'énergie évalue pour chaque fournisseur la perte causée, le cas échéant, par l'incidence du caractère excédentaire de la demande des autres fournisseurs sur les quantités cédées au fournisseur considéré du fait de l'application de la méthode de répartition du plafond prévue à l'article R. 336-18. L'évaluation de cette perte tient compte des hypothèses de valorisation sur le marché des quantités excédentaires et de la garantie de capacité attachée déterminant le terme « CP1 » des différents fournisseurs, prévues à l'article R. 336-35, et son montant est actualisé suivant les mêmes hypothèses que les versements du terme « CP1 ». La part du montant global correspondant aux versements du terme « CP1 » attribuée au fournisseur dans la répartition déterminée par la Commission de régulation de l'énergie au titre du premier alinéa ne peut dépasser le montant de cette perte, évalué et actualisé conformément au présent alinéa.

La Commission de régulation de l'énergie évalue le montant nécessaire à la compensation d'Électricité de France induit, le cas échéant, par le caractère excédentaire de la demande globale des fournisseurs par rapport à la somme des quantités de produit théoriques pour toutes les sous-catégories de consommateurs calculées conformément à la méthode mentionnée à l'article R. 336-14 sur la base des consommations constatées par le gestionnaire du réseau public de transport. Lorsque la somme des quantités de produit théoriques pour les petits et grands consommateurs, calculées conformément à la méthode mentionnée à l'article R. 336-14 sur la base des consommations constatées par le gestionnaire du réseau public de transport, est égale ou supérieure au plafond, ce montant est nul.

Source : code de l'énergie

Ce mécanisme de répartition incite les producteurs à calibrer leurs demandes de volumes d'Arenh au plus juste. En effet, ceux qui ont été les moins vertueux en demandant des volumes excessifs doivent reverser des montants importants au titre du dispositif et ne s'en voient réattribuer que des montants faibles ou nuls. Inversement, les plus vertueux peuvent bénéficier d'un solde net positif de complément de prix après répartition, en réparation du préjudice résultant des demandes excessives formulées par les autres fournisseurs.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA PROROGATION D'UN « BOUCLIER TARIFAIRE » INDIVIDUEL SUR LES PRIX DE L'ÉLECTRICITÉ

A. LE DISPOSITIF DE BOUCLIER TARIFAIRE 2024 SUR LES TARIFS DE L'ÉLECTRICITÉ

1. Les prochaines évolutions des TRVe et des tarifs de cession aux entreprises locales de distribution (ELD) pourront être contenues par un arrêté ministériel

Quasiment identique au dispositif prévu pour 2023 par le A du VIII de l'article 181 de la LFI pour 2023, le A du I du présent article prévoit qu'en 2024, par dérogation aux règles habituelles du code de l'énergie, les ministres chargés de l'économie et de l'énergie pourront fixer par arrêté le niveau de TRVe, pour 95 % de la consommation des clients, dans le cas où les évolutions de ces tarifs proposées par la CRE se traduiraient par une augmentation. À la différence cependant des dispositions législatives prévues par les LFI pour 2022 et 2023, il n'est fait mention d'aucun plafond d'augmentation (4 % en 2022 et 15 % en 2023) qui pourrait déclencher la possibilité donnée au Gouvernement de fixer les TRVe pour 2024 par arrêté.

D'après les informations communiquées par l'administration au rapporteur spécial, le Gouvernement pourrait contenir à 5 % l'évolution à la hausse des TRVe en 2024. Le ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique s'est par ailleurs engagé publiquement à ce que ces tarifs n'augmentent pas de plus de 10 %.

À l'identique de ce qui était prévu par les LFI pour 2022 et 2023, ce même A prévoit que, dans les mêmes conditions que celles prévues pour les TRVe, les ministres chargés de l'économie et de l'énergie pourront fixer par arrêté un niveau de tarifs de cession aux entreprises locales de distribution (ELD) inférieur aux propositions formulées par la CRE.

Les tarifs de cession d'électricité aux entreprises locales de distribution (ELD)

En application de l'article L. 337-10 du code de l'énergie, les entreprises locales de distribution (ELD) peuvent s'approvisionner auprès d'EDF au tarif de cession pour la fourniture de leurs clients aux tarifs réglementés de vente et, dans le cas où les ELD desservent moins de 100 000 clients, pour l'approvisionnement des pertes d'électricité des réseaux qu'elles exploitent. En application de ce même article, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a pour mission de proposer les tarifs de cession aux ministres chargés de l'énergie et de l'économie.

Il est prévu que les tarifs de cession fassent l'objet d'un examen au moins une fois par an et que les propositions de tarifs réglementés de vente de l'électricité faites par la Commission de régulation de l'énergie en application de l'article L. 337-4 du code de l'énergie soient accompagnées d'une proposition de tarifs de cession.

Source : commission des finances du Sénat

2. Comme en 2022 et en 2023, les pertes de recettes des fournisseurs dues au mécanisme de bouclier tarifaire pour 2024 constituent des charges de service public de l'énergie compensées par l'État

Sur le modèle des dispositions du B du VIII de l'article 181 de la LFI pour 2023, le B du I du présent article établit la liste des pertes de recettes des fournisseurs d'électricité liées au dispositif de bouclier tarifaire pour l'année 2024 qui constituent des charges de service public de l'énergie (CSPE) au sens de l'article L. 121-6 du code de l'énergie ouvrant droit à des compensations de l'État financées au moyen des crédits budgétaires de l'action 17 du programme 345 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Les pertes de recettes intégrées au dispositif de CSPE seraient ainsi :

celles de l'entreprise Électricité de France (EDF) au titre, d'une part, de ses offres aux TRVe et, d'autre part, de ses ventes au tarif de cession aux ELD ;

celles des ELD au titre de leurs offres au TRVe à la condition que l'approvisionnement de ces offres ne provienne pas ou ne provienne que partiellement d'électricité acquise auprès d'EDF au tarif de cession ;

- et enfin, celles des autres fournisseurs d'électricité pour leurs offres de marché destinées aux consommateurs finals domestiques définis au 1° de l'article L. 337-7 du code de l'énergie.

En vertu de cette dernière disposition, la compensation des autres fournisseurs se serait ainsi trouvée circonscrite aux seuls consommateurs domestiques. Aussi, contrairement aux dispositifs mis en oeuvre en 2022 et en 2023, le bouclier tarifaire pour l'année 2024 tel qu'il était prévu dans la version initiale du présent article ne concernait-il pas les TPE et autres petites communes éligibles au TRVe mais disposant d'offres de marchés. Ces consommateurs non résidentiels ont été intégrés au dispositif proposé dans un deuxième temps à travers un amendement du Gouvernement retenu en première lecture dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité à l'Assemblée nationale (voir infra).

Le dernier alinéa du B du I du présent article prévoit par ailleurs que « les frais de gestion supportés par les fournisseurs d'électricité pour la mise en oeuvre du dispositif » soient compensés par l'État « dans la limite de 0,2 euros par mégawattheure » livré aux consommateurs éligibles au bouclier.

3. Les compensations à verser aux fournisseurs correspondent à la différence entre les TRVe qui auraient été appliqués en l'absence de bouclier et les TRVe qui seront effectivement pratiqués en 2024

a) Les compensations dues à EDF

À l'identique de la disposition prévue en LFI pour 2023, le C du I du présent article définit les deux types de pertes de recettes supportées par l'entreprise EDF.

S'agissant du mode de calcul des pertes de recettes d'EDF au titre de ses ventes d'électricité aux ELD au tarif de cession, le premier alinéa du C précise ainsi que celles-ci correspondent à la différence de revenus entre d'un côté les tarifs de cessions qui auraient été appliqués en vertu des propositions de la CRE et de l'autre les tarifs fixés par le Gouvernement à un niveau inférieur en vertu des dispositions prévues au A du I du présent article (voir supra).

Concernant le calcul des pertes de recettes d'EDF au titre de ses offres aux TRVe, la logique est identique. Elles correspondent à la différence de revenus due à l'application de TRVe fixés par arrêté à un niveau inférieur à celui qui aurait été en vigueur au regard de la proposition de la CRE en l'absence du dispositif prévu au A du I du présent article (voir supra).

b) Les compensations dues aux ELD et aux autres fournisseurs

Le premier alinéa du D du présent article, définit quant à lui, à l'instar de la disposition prévue en LFI pour 2023, le mode de calcul des pertes de recettes des ELD relatives à leurs offres aux TRVe dont l'approvisionnement n'est pas ou n'est que partiellement réalisé au tarif de cession. Ces pertes de recettes sont calculées par l'application d'un montant unitaire en euros par mégawattheure pour les volumes d'électricité livrés dans le cadre des offres concernées.

Le deuxième alinéa du même D prévoit, sur un modèle identique, le mode de calcul des pertes de recettes supportées par les autres fournisseurs d'électricité pour leurs offres de marché aux consommateurs finals domestiques. La différence avec le système en vigueur cette année tel qu'il a été encadré par l'article 181 de la LFI pour 2023 était, dans la version initiale du présent article, que ces pertes de recettes ouvrant droit à compensation ne concernaient que les consommateurs domestiques définis au 1° du I de l'article L337-7 du code de l'énergie et non les petits consommateurs non domestiques (TPE, petites communes, etc.) éligibles aux TRVe sur le fondement du 2° du I du même article L337-7. Ces derniers ont été intégrés au dispositif par un amendement du Gouvernement intégré en première lecture à l'Assemblée nationale dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité (voir infra).

Le troisième alinéa du D du présent article fixe aux compensations des pertes définies dans les deux alinéas précédents (les pertes des ELD et les pertes des autres fournisseurs hors EDF) les mêmes limites que celles qui avaient été prévues par la LFI pour 2023, à savoir que le montant total de compensation ne saurait excéder :

- premièrement l'écart entre d'une part la somme des produits des consommations livrées par le prix qui aurait été facturé aux consommateurs concernés en l'absence de compensation et d'autre part, le produit de ces mêmes consommations par le prix des TRVe réellement appliqué en 2024, le cas échéant fixé par arrêté ministériel en vertu des dispositions du A du I du présent article ;

- deuxièmement la couverture des coûts d'approvisionnement pour l'activité de fourniture de ces fournisseurs.

Le quatrième alinéa du D précise, sur le même principe qu'en 2023, les modalités de détermination des montants unitaires prévus au premier alinéa du même D et qui doivent servir à calculer les pertes de recettes des fournisseurs.

Ils correspondent à « la différence, en euros par mégawattheure, entre le prix moyen hors taxes résultant de l'application des tarifs réglementés de vente d'électricité qui auraient été appliqués » en l'absence de bouclier tarifaire, c'est-à-dire selon les modalités habituelles de leur fixation par la CRE, « et le prix moyen hors taxes résultant de l'application des tarifs réglementés de vente d'électricité effectivement appliqués en application » des dispositions prévues au A. du I, c'est-à-dire les TRVe potentiellement fixés par arrêté ministériel à un niveau inférieur aux propositions formulées par la CRE.

Dans les mêmes termes que le F du VIII de l'article 181 de la LFI pour 2023, le E du I du présent article fixe une limite au montant de compensation susceptible d'être répercutée sur la facture d'un client individuel en offre de marché. La réduction de prix sur la facture permise par la répercussion de la compensation ne saurait aboutir à un prix effectif inférieur au TRVe appliqué en 2024.

Le IV du présent article précise par ailleurs que les fournisseurs d'électricité devront mentionner « sur les factures, sur une ligne séparée, le montant de la réduction de facture dont bénéficie le consommateur au titre du dispositif ».

4. Les étapes de mise en oeuvre du dispositif et les contrôles effectués par la CRE

Comme le prévoyait déjà la LFI pour 2023, le F du I du présent article 52 confie à la CRE, au titre de ses missions de surveillance du marché de détail100(*), la responsabilité de s'assurer de la bonne application des dispositions du bouclier tarifaire telles qu'elles sont prévues par le I du présent article. Ce même F prévoit que « les montants de la compensation indûment versés aux fournisseurs sont déduits des charges imputables aux missions de service public compensées au fournisseur concerné, majorés de 20 % en cas de manquement délibéré » contre 10 % dans le dispositif qui a été appliqué en 2023.

Dans sa version initiale, modifiée par un amendement du Gouvernement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, le II du présent article prévoyait de conserver les étapes de mise en oeuvre du dispositif telles qu'elles avaient été déterminées en 2023. Ainsi, après que les fournisseurs lui auraient adressé une déclaration simplifiée de leurs pertes de recettes prévisionnelles avant le 19 janvier 2024 et sur la base de ce premier recensement, la CRE aurait eu à réaliser une première évaluation du montant de ces pertes au plus tard le 15 février 2024.

Cette évaluation devait ensuite donner lieu au versement d'un acompte au plus tard le 15 mars 2024 pour la période comprise entre le 1er février 2024 (date d'entrée en vigueur du bouclier 2024) et le 31 mars 2024, le solde devait ensuite être intégré aux échéanciers mensuels des compensations de CSPE à compter du mois d'avril.

Avant le 15 mars 2024, les fournisseurs auraient eu à adresser à la CRE une nouvelle déclaration de leurs pertes de recettes prévisionnelles certifiée par leur commissaire aux comptes ou par leur comptable public. Sur la base de cette deuxième déclaration, la CRE aurait alors eu à ajuster son évaluation des pertes au plus tard le 15 mai 2024. Il devait ensuite résulter de cette réévaluation une mise à jour des échéanciers mensuels de compensations de CSPE.

B. LA RECONDUCTION DE LA MESURE VISANT À PERMETTRE À LA CRE DE RÉÉVALUER LES COMPENSATIONS DE CSPE TOUT AU LONG DE L'ANNÉE 2024 AVEC EFFET IMMÉDIAT

Le III de la version initiale du présent article proposait de reconduire une disposition prévue par le XII de l'article 181 de la LFI pour 2023. Dans un contexte toujours caractérisé par l'amplitude des fluctuations des prix de l'énergie, et par dérogation aux règles habituelles du code de l'énergie qui prévoient une réévaluation annuelle en juillet des compensations de CSPE qui ne traduit ses effets qu'à compter des échéanciers de l'année suivante, la CRE pourrait ainsi « tout au long de l'année 2024, délibérer pour ajuster les montants des charges de service public de l'énergie pour l'année 2024, pour tenir compte notamment de l'évolution des prix de marché ».

À titre d'exemple, cette dérogation a trouvé à s'appliquer cette année lorsque la délibération de la CRE du 13 juillet 2023101(*), qui a notamment réévalué les compensations de CSPE pour 2023, a conduit à ajuster les échéanciers individuels des fournisseurs et des producteurs dès le mois suivant.

Dans le cadre des modifications apportées par l'amendement du Gouvernement intégré au texte sur lequel il a engagé sa responsabilité (voir infra), ces dispositions figurent désormais au IV bis de l'article.

C. PRÉCISER DANS LA LOI LA TEMPORALITÉ DE L'EXIGENCE DE COUVERTURE DES COÛTS DE L'ACTIVITÉ DE FOURNITURE D'ÉLECTRICITÉ PAR LES TRVE

Le V du présent article complète le premier alinéa de l'article L337-6 du code de l'énergie qui encadre les modalités de détermination des TRVe par la CRE (voir supra) selon le principe dit de « l'empilement des coûts » pour préciser que les TRVe sont fixés de telle sorte que leur produit total permette de couvrir, « pour l'année considérée et les deux années qui précèdent, l'ensemble des coûts de l'activité de fourniture de l'électricité à ce titre ».

Il est par ailleurs précisé que le produit total doit intégrer, le cas échéant, les montants versés en compensation de TRVe fixés à un niveau plus faible que celui qui résulterait de l'application des dispositions de droit commun prévues par le code de l'énergie.

D. UNE MODIFICATION DE LA DISPOSITION QUI PRÉVOIT LA COMPENSATION DES FRAIS DE GESTION DES FOURNISSEURS DANS LE CADRE DE LA MISE EN oeUVRE DE L'AMORTISSEUR SUR LES PRIX DE L'ÉLECTRICITÉ

Le VI du présent article propose de réécrire le H du IX de l'article 181 de la LFI pour 2023 qui prévoit la compensation par l'État des frais de gestion supportés par les fournisseurs au titre du dispositif d'amortisseur sur les prix de l'électricité en vigueur en 2023.

Cette réécriture apporterait deux modifications à la rédaction initiale :

- la nouvelle rédaction parle de « frais de gestion réellement supportés par les fournisseurs » et non plus seulement de « frais de gestion supportés par les fournisseurs » ;

- alors que la rédaction initiale prévoyait que ces frais soient compensés « à hauteur de 1 % » des pertes de recettes induites par l'amortisseur « dans la limite de 0,2 euros par mégawattheure », la nouvelle rédaction propose qu'ils soient compensés « dans la limite de 1 % » des pertes « et de 0,2 euros par mégawattheure ».

La référence de 1 % des pertes de recettes ne serait ainsi plus qu'un plafond de compensation et non plus le montant « à hauteur » duquel les frais de gestion seraient compensés par l'État.

III. LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Les dispositions du présent article ont été très substantiellement modifiées par un amendement du Gouvernement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Outre certaines modifications qui relèvent de précisions (au A et au C du I) ou d'un renforcement du contrôle de la CRE sur la compensation des frais de gestion supportés par les fournisseurs au titre des dispositifs de soutien (en insérant un dernier alinéa au B du I et par le dernier alinéa du H du nouveau III bis), cet amendement prévoit quatre évolutions majeures du dispositif :

l'intégration dans le périmètre du bouclier tarifaire 2024 des consommateurs non résidentiels (TPE et petites communes essentiellement) ;

l'instauration du cadre législatif d'un dispositif d'amortisseur sur les prix de l'électricité pour des entités qui ne seront pas bénéficiaires du bouclier ;

la révision du calendrier dans lequel les fournisseurs seront compensés des charges de service public de l'énergie qu'ils doivent assumer au titre des dispositifs de soutien ;

la révision des règles de répartition entre fournisseurs du complément de prix d'Arenh.

A. L'INTÉGRATION DES TPE ET DES PETITES COMMUNES AU DISPOSITIF DE BOUCLIER TARIFAIRE 2024

Comme évoqué supra et contrairement au dispositif en vigueur en 2023, le bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité prévu dans la version initiale du présent article 52 ne concernait pas les consommateurs finals non résidentiels éligibles aux TRVe, c'est-à-dire essentiellement des TPE et des petites communes disposant d'un compteur électrique d'une puissance inférieure ou égale à 36 kVA.

En complétant le présent article par différentes dispositions102(*) identiques à celles qui étaient prévues dans le cadre du bouclier 2023103(*), l'amendement du Gouvernement permet d'inclure les consommateurs non résidentiels éligibles aux TRVe104(*) dans le dispositif de bouclier tarifaire pour 2024.

B. LE CADRE LÉGISLATIF D'UN NOUVEL AMORTISSEUR SUR LES PRIX DE L'ÉLECTRICITÉ

En insérant dans la version initiale de l'article 52 un nouveau III bis, l'amendement du Gouvernement propose de fixer le cadre législatif de la reconduction d'un nouveau mécanisme d'amortisseur sur les prix de l'électricité, une fois encore quasi exclusivement défini par voie règlementaire. Le cadre proposé est identique à celui, prévu à l'article 181 de la LFI pour 2023, qui prévaut pour l'amortisseur en vigueur en 2023.

Le premier alinéa du A de ce nouveau III bis prévoit ainsi que les fournisseurs réduisent le prix de leurs fournitures d'électricité en 2024 pour leurs clients qui ne sont pas éligibles au dispositif de bouclier tarifaire. Ce même A précise que le bénéfice annuel cumulé de cet amortisseur ne peut être supérieur à une limite fixée par décret.

Comme pour le dispositif en vigueur en 2023, le second alinéa du A prévoit que le périmètre des entités éligibles au dispositif d'amortisseur est défini par décret.

Dans les mêmes conditions que celles qui ont été mise en oeuvre en 2023, le B du même III bis encadre les conditions dans lesquelles le bénéficiaire atteste auprès de son fournisseur qu'il remplit les critères d'éligibilité au dispositif. Ces conditions doivent elles aussi être définies par décret. Ce même B prévoit aussi les modalités de contrôle, de restitution des montants indûment versés et de majoration en cas de manquement délibéré des redevables.

Le C du III bis détermine le cadre législatif général de la détermination du montant de l'amortisseur. Cet encadrement est similaire à celui qui était prévu par l'article 181 de la LFI pour 2023.

Le premier alinéa de ce C précise ainsi que chaque mois et pour chaque client bénéficiaire, les prix de fourniture d'électricité sont réduits par application d'un montant unitaire en euros par mégawattheure (MWh) à une quotité des volumes d'électricité livrés.

Le deuxième alinéa de ce même C définit ce montant unitaire comme étant la différence entre le prix moyen de la part variable de l'électricité, hors taxe et hors acheminement105(*), en euros par MWh, du contrat de fourniture et un prix d'exercice.

Le troisième alinéa du C précise que la quotité de volumes livrés sur laquelle doit s'appliquer la réduction de prix résultant du dispositif est limitée à une part de la consommation de référence du client.

Le dernier alinéa de ce C indique que l'ensemble des paramètres qui déterminent le calibrage du dispositif sont fixés par décret. Il s'agit du prix d'exercice, de la quotité de volumes livrés, de la consommation de référence et de la part de celle-ci dans la limite de laquelle le mécanisme de soutien s'applique.

À l'instar des dispositions prévues en 2023 :

- le D du III bis prévoit que l'amortisseur ne s'applique pas dans les périodes de forte tension sur le système électrique dans les situations de menace grave et imminente sur la sécurité d'approvisionnement en électricité ;

- le E de ce même III bis prévoit que les gestionnaires de réseau transmettent aux responsables d'équilibre, qui eux-mêmes les transmettent aux fournisseurs, les données de consommation historiques de leurs clients.

Le F du III bis prévoit, toujours dans les mêmes conditions que les dispositions en vigueur en 2023, que les pertes de recettes supportées par les fournisseurs au titre de l'amortisseur constituent des charges de service public de l'énergie qui leur sont compensées par l'État.

À l'identique de ce qui était prévu en LFI pour 2023, le G du même III bis prévoit que la CRE dispose de prérogatives de contrôle et de surveillance du dispositif.

Les règles de compensation des frais de gestion réellement supportés par les fournisseurs au titre de la mise en oeuvre du dispositif d'amortisseur, (H du III bis), sont les mêmes que celles prévues au B du I pour le bouclier tarifaire (voir supra).

C. LA RÉVISION DU CALENDRIER DANS LEQUEL LES FOURNISSEURS SERONT COMPENSÉS DES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE QU'ILS DOIVENT ASSURER AU TITRE DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN

1. La révision du calendrier de compensation des charges de service public de l'énergie résultant du bouclier tarifaire

L'amendement que le Gouvernement a intégré au texte sur lequel il a engagé sa responsabilité a conduit à profondément réviser le calendrier dans lequel :

- premièrement les fournisseurs déclarent leurs pertes prévisionnelles liées au dispositif auprès de la CRE ;

- deuxièmement la CRE évalue ces pertes dans le cadre de délibérations ;

- et troisièmement les compensations sont effectivement versées aux fournisseurs.

L'amendement du Gouvernement a ainsi supprimé les dispositions qui figuraient dans la version initiale de l'article et qui visaient à reconduire les modalités exceptionnelles mises en oeuvre dans le cadre des dispositifs de soutien mis en place en 2023 (voir supra l'analyse du II de la version initiale de l'article).

Pour rappel, pour les compensations de charges résultant du dispositif de bouclier, le II de la version initiale de l'article prévoyait la succession d'étapes suivantes :

- déclaration simplifiée par les fournisseurs de leurs pertes prévisionnelles avant le 19 janvier 2024 ;

- évaluation par la CRE de ces pertes au plus tard le 15 février 2024 ;

- versement d'un acompte à l'ensemble des fournisseurs au titre de ces pertes au plus tard le 15 mars 2024 pour la période comprise entre le 1er février 2024 (date d'entrée en vigueur du bouclier 2024) et le 31 mars 2024 ;

- intégration du solde dans les échéanciers mensuels des compensations de CSPE à compter du mois d'avril ;

- nouvelle déclaration de pertes prévisionnelles des fournisseurs à la CRE avant le 15 mars 2024 ;

- ajustement de l'évaluation de ces pertes par la CRE au plus tard le 15 mai 2024 pour mise à jour des échéanciers.

La nouvelle rédaction du II ne prévoit plus qu'une déclaration par les fournisseurs de leurs pertes prévisionnelles au titre du bouclier avant le 30 avril 2024. Ces pertes seraient ensuite évaluées par la CRE dans sa délibération annuelle habituelle de juillet 2024 pour être intégrées dans les échéanciers des fournisseurs à compter du mois suivant.

2. Le calendrier de compensation des charges de service public de l'énergie résultant de l'amortisseur

Le nouveau III ter prévoit quant à lui le calendrier de déclaration, d'évaluation et de compensation des charges résultant du dispositif d'amortisseur.

Le premier alinéa du III ter prévoit ainsi que les petits fournisseurs de moins de 100 000 clients adressent à la CRE une déclaration simplifiée de leurs pertes prévisionnelles avant le 28 février 2024 et que l'autorité de régulation délibère pour évaluer ces pertes au plus tard le 31 mars 2024.

Le deuxième alinéa du même III ter prévoit que, pour la période comprise entre le 1er janvier 2024 et le 30 avril 2024, la compensation des pertes ainsi évaluées s'effectue sous la forme d'un acompte versé au plus tard le 30 avril 2024, le solde étant réparti par acompte mensuels à compter du mois de mai 2024.

Pour les fournisseurs d'électricité de plus de 100 000 clients, le calendrier de la déclaration, de l'évaluation et de la compensation des charges résultant de l'amortisseur est le même que celui prévu pour le bouclier au II du présent article (voir supra).

D. UNE RÉVISION DES RÈGLES DE RÉPARTITION ENTRE FOURNISSEURS DU COMPLÉMENT DE PRIX ARENH

L'amendement du Gouvernement a introduit un IV ter qui prévoit de réviser les règles de répartition entre les fournisseurs du complément de prix Arenh dit « CP1 ». Pour cela, le IV ter propose de modifier l'article L. 336-5 du code de l'énergie pour prévoir que ce complément de prix ne soit plus réparti entre les fournisseurs comme aujourd'hui mais entièrement reversé à Électricité de France (EDF) et déduit de la compensation de ses CSPE, c'est-à-dire, in fine, capté par l'État.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : AU DÉTRIMENT DU DÉBAT PARLEMENTAIRE, LE GOUVERNEMENT CONTINUE DE MASQUER SES INTENTIONS

A. LES PRIX DE L'ÉLECTRICITÉ SE MAINTIENNENT À UN NIVEAU ÉLEVÉ

Si les prix de l'électricité sur les marchés de gros ont nettement diminué depuis leur pic de la fin de l'été 2022, ils restent néanmoins nettement plus élevés que leur niveau moyen d'avant crise qui oscillait autour de 50 euros/MWh.

Évolution des prix de l'électricité à terme entre les mois d'octobre 2022 et 2023

Source : site internet du courtier Opéra énergie

Depuis le début de l'année 2023 les prix de gros de l'électricité en France pour une livraison en 2024 se sont ainsi élevés en moyenne à 177 euros/MWh même s'ils sont en baisse depuis le mois de juillet et qu'ils se sont repliés sous les 130 euros/MWh en octobre.

Évolution des prix de l'électricité pour les contrats à terme d'un an
entre les mois de janvier et d'octobre 2023

Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

Au printemps et à l'été 2023, à l'instar du phénomène observé en 2022 lors du pic historique des prix de l'électricité, les prix de gros en France ont affiché des niveaux très supérieurs à ceux qui pouvaient être observés chez nos principaux partenaires européens. Cet écart s'est depuis largement résorbé et, comme l'illustre le graphique ci-après, les prix en France ont rejoint à la fin de l'été la moyenne observée chez nos voisins.

Comparaison de l'évolution des prix de l'électricité en europe pour les contrats
à terme d'un an entre les mois de février et d'octobre 2023

Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

Le rapport annuel de l'Agence de coopération des régulateurs de l'énergie (ACER) et du Conseil des régulateurs européens de l'énergie (CEER) du mois de septembre dernier illustre le fait qu'en europe, en 2023, le prix moyen de l'électricité payé par les consommateurs finals demeure significativement plus élevé que son niveau d'avant crise.

Évolution des prix de l'électricité pour le consommateur final en moyenne

Source : rapport annuel de l'ACER et CEER de septembre 2023

La Présidente de la CRE a annoncé en septembre dernier qu'en l'état actuel des prévisions d'évolution des prix de gros de l'électricité, les TRVe qu'elle doit proposer en février 2024 pourraient augmenter de 10 % à 20 % par rapport aux TRVe plafonnés par le mécanisme du bouclier tarifaire en 2023.

B. UN BOUCLIER TARIFAIRE DONT LE COÛT POUR LES FINANCES PUBLIQUES EST ESTIMÉ À 1,9 MILLIARD D'EUROS AU TITRE DE 2024

En se fondant sur les dernières hypothèses d'évolution des prix sur le marché de gros de l'électricité et en retenant un plafonnement de l'augmentation des TRVe à 5 % en 2024, le Gouvernement a évalué à 1,9 milliard d'euros le coût prévisionnel pour les finances publiques du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité qu'il entend mettre en oeuvre l'année prochaine à travers notamment les dispositions prévues par le présent article. Principalement en raison de la baisse des prix de l'électricité, ce montant serait ainsi très inférieur au coût du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité en 2023 qui avait atteint 22 milliards d'euros.

Coût pour les finances publiques des mesures de soutien aux consommateurs finals d'électricité et de gaz mises en oeuvre dans le cadre de la crise des prix de l'énergie (2021-2024)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Au coût du bouclier tarifaire en tant que tel pourrait être ajouté celui qui résulterait de la minoration des tarifs de l'accise sur l'électricité (l'ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité ou « TICFE ») à leur niveau minimum autorisé par le droit de l'Union européenne que le Gouvernement propose de reconduire en 2024 à travers les dispositions prévues à l'article 11 du présent PLF. La baisse de recettes publiques provoquée par une telle minoration atteindrait 9,5 milliards d'euros au titre de 2024.

Alors que cette mesure indiscriminée qui profite principalement aux ménages les plus aisés et les plus consommateurs d'énergie n'apparait plus soutenable dans les conditions qui sont celles de nos comptes publics et qu'elle va à l'encontre des déclarations annonçant la fin du « quoi qu'il en coûte », la commission des finances a adopté un amendement qui propose d'annuler cette minoration pour les particuliers. Cette annulation se traduira par un gain d'environ 4,6 milliards d'euros pour les finances publiques. En contrepartie, le rapporteur propose un amendement visant à abonder la mission écologie des crédits nécessaires pour financer un dispositif d'aide beaucoup moins dispendieux, renforcé et ciblé sur les ménages modestes et les classes moyennes (voir infra dans la présentation budgétaire).

Compte-tenu de la persistance de prix élevés de l'électricité et en complément de l'aide exceptionnelle ciblée et progressive que propose le rapporteur en substitution de la minoration fiscale indiscriminée que souhaite proroger le Gouvernement, il semble utile de laisser à l'État la possibilité, en cas de hausse substantielle des TRVe en février prochain, de plafonner leur augmentation à un niveau raisonnable.

B. L'AMORTISSEUR POUR 2024 : UN « OBJET NON IDENTIFIÉ »

À l'instar du mécanisme d'amortisseur sur les prix de l'électricité mis en oeuvre en 2023, l'ensemble des paramètres du dispositif annoncé pour 2024 ainsi que son périmètre sont renvoyés à des textes d'application règlementaires. À ce jour aucune information précise n'a été fournie par le Gouvernement sur le dispositif qu'il entend mettre en oeuvre en 2024. Sans que plus aucun prétexte d'urgence ou d'évolution brusque et inattendue des prix de l'électricité ne puisse être invoquée cette fois ci, le Gouvernement réitère ses mauvaises manières à l'égard de la représentation nationale en demandant au Parlement de se prononcer « à l'aveugle » sur un mécanisme budgétaire de plusieurs centaines de millions d'euros et dont dépend l'avenir de certaines de nos entreprises.

En effet, la nécessité de reconduire un dispositif de cette nature pour les entités ayant signé des contrats de fournitures pluriannuels lors de l'acmé des prix de l'électricité était connue depuis au moins le début de l'année 2023. Le rapporteur avait notamment dressé ce constat dans son rapport d'information de juin 2023 intitulé « usine à gaz des aides énergie »106(*). Elle soulignait ainsi que « selon la maturité de leur contrat et le moment où elles l'ont signé, certaines entreprises resteront fortement affectées en 2024 et en 2025 ». Le pic de la crise des prix de l'électricité, au sortir de l'été 2022, était en effet survenu au pire moment, au coeur d'une période au cours de laquelle un grand nombre de contrats de fournitures des professionnels devait être renouvelé.

Si du fait des niveaux de prix incroyablement élevés ainsi que du manque de liquidité du marché les fournisseurs ont décidé de réduire la maturité de leurs offres, certains contrats pluriannuels de deux voire même trois ans ont été signés par des clients à des prix extrêmement élevés. En l'absence de mesures de soutien en 2024 et en 2025, les entités concernées, exposées à des prix de l'électricité extrêmement élevés, verraient leur équilibre financier sérieusement menacé.

Dans ce même rapport, le rapporteur spécial avait déjà mis en exergue « les pratiques gouvernementales qui ont affaibli les prérogatives de la représentation nationale », tout particulièrement à l'occasion de l'examen des mesures de soutien introduites dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2023. Elle notait que « le manque d'anticipation et la précipitation de l'exécutif dans la conception des différents dispositifs de soutien ont porté un préjudice certain à la qualité des débats parlementaires ». Elle soulignait que les conditions dans lesquelles la représentation nationale avait eu à délibérer des mesures fiscales et budgétaires proposées par l'exécutif dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2023 avaient été particulièrement insatisfaisantes, « manifestant une véritable forme de mépris du Gouvernement pour le Parlement ».

Dans ce même rapport elle ajoutait qu'il n'était pas raisonnablement envisageable que le Gouvernement récidive dans le cadre du PLF pour 2024 : « fort du retour d'expérience emmagasiné après deux ans de crise des prix de l'énergie et alors que, les problématiques à venir sur l'année 2024 semblent aujourd'hui bien cernées, le Gouvernement n'aura plus aucune excuse pour ne pas intégrer, dès le dépôt du PLF pour 2024 et accompagnées d'évaluations préalables sérieuses, l'ensemble des mesures de soutien proposées pour l'année à venir. Il est absolument impensable que les conditions d'examen du PLF 2023 se reproduisent à l'automne prochain ».

Force est de constater que le Gouvernent n'a pas tiré les leçons de l'examen du dernier projet de loi de finances et n'a pas souhaité prendre en compte les demandes légitimes des parlementaires de disposer des informations nécessaires à l'examen de dispositions législatives dont les enjeux tant financiers qu'économiques ou sociaux sont majeurs.

À ce stade 770 millions d'euros ont été inscrits dans le projet annuel de performances du programme 345 « Service public de l'énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » pour un dispositif d'amortisseur qui reste encore largement un objet non identifié.

C. EN PROPOSANT UNE RÉVISION DE LA RÉPARTITION DU COMPLÉMENT DE PRIX ARENH CONTRE L'AVIS DE LA CRE ET SANS CONCERTATION AVEC LES FOURNISSEURS, LE GOUVERNEMENT JOUE À « L'APPRENTI SORCIER »

Dans un objectif de pur rendement budgétaire et sur la base d'une analyse fragile, le Gouvernement entend réviser un dispositif sensible sans, semble-t-il, en mesurer pleinement les conséquences. En 2022 du fait de la crise des prix et de l'instabilité du marché de l'énergie, le montant du complément de prix Arenh a atteint un niveau inédit de 1,6 milliard d'euros107(*). Cependant, en 2021, ce complément de prix ne s'était établi qu'à 162 millions d'euros108(*). Sur la base du montant constaté en 2022 non représentatif selon la CRE des fondamentaux structurels de ce mécanisme, le Gouvernement entend capter cette ressource potentielle.

Alors que ses conséquences sur les finances publiques sont particulièrement incertaines puisque la CRE elle-même, pourtant l'acteur le plus impliqué dans ce dispositif, n'est pas en mesure de donner des estimations sur le montant prévisionnel du complément de prix dans les années à venir, cette décision est susceptible de déstabiliser le marché de l'électricité dès le prochain guichet Arenh. En effet, le fait d'exclure les fournisseurs de la répartition ex post des volumes excédentaires d'Arenh attribués, conduira à réduire leur incitation à formuler des demandes d'Arenh au plus juste. Ils auront au contraire tout intérêt à majorer leurs demandes.

Réaction en chaîne inflationniste qui pourrait résulter de la révision de la répartition du complément de prix

Source : commission des finances du Sénat

Cet effet de bord indésirable pourra induire une réaction en chaîne particulièrement contreproductive aux conséquences inflationnistes sur les prix auxquels les consommateurs devront payer leur électricité. L'augmentation des demandes d'Arenh par les producteurs entraînera une hausse de l'écrêtement d'Arenh duquel résultera mécaniquement un accroissement du « complément de marché » dans la structure des TRVe (voir supra) ce qui se traduira donc, in fine, par une inflation de ces derniers et de l'ensemble des prix de l'électricité pour les consommateurs.

Enfin, cette révision proposée dans la précipitation au détour d'un amendement de première lecture du PLF, sans l'approbation de la CRE, n'a fait l'objet d'aucune concertation des fournisseurs. Sans mesurer les conséquences potentielles d'une telle mesure, le Gouvernement, désespérément à la recherche de nouvelles recettes, semble jouer à « l'apprenti sorcier ».

Pour éviter qu'un tel cercle vicieux ne se déclenche au détriment des consommateurs d'électricité, le rapporteur propose un amendement n°  II-29 (FINC.4) visant à supprimer le IV ter du présent article 52 qui prévoit cette révision de la répartition du complément de prix Arenh.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter l'article ainsi modifié.

ARTICLE 52 bis (nouveau)

Sécurisation juridique du dispositif de leasing social

Le présent article prévoit de sécuriser juridiquement le dispositif de leasing social en le mentionnant dans la Loi.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LES AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES DOIVENT ÊTRE COMPLÉTÉES EN 2024 PAR UN NOUVEAU DISPOSITIF DE LEASING SOCIAL À 100 EUROS PAR MOIS

A. LES AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES

L'article L. 251-1 du code de l'énergie constitue le support législatif aux aides à l'acquisition de véhicules propres que sont le bonus écologique et la prime à la conversion. Précisément, il dispose que « sont instituées des aides à l'acquisition de véhicules propres, y compris des cycles, des cycles à pédalage assisté et des remorques électriques pour cycles, le cas échéant sous réserve de la mise au rebut des véhicules polluants, à la transformation de véhicules à motorisation thermique en motorisation électrique ou à l'installation d'équipements techniques de nature à améliorer la sécurité ».

Sur le fondement de cette base législative, des normes réglementaires définissent précisément le cadre de ces dispositifs. Ces normes sont compilées aux articles D. 251-1 à D. 251-13 du code de l'énergie.

1. Le bonus écologique

Le bonus écologique constitue une aide financière attribuée à tout acquéreur ou locataire titulaire d'un contrat de location d'une durée supérieure ou égale à deux ans d'un véhicule fonctionnant exclusivement à l'électricité, l'hydrogène ou une combinaison des deux, ayant une masse inférieure à 2,4 tonnes et dont le coût d'acquisition est inférieur à 47 000 euros.

Le montant de l'aide est fixé à 27 % du coût d'acquisition toutes taxes comprises, augmenté le cas échéant du coût de la batterie si celle-ci est prise en location. Le bonus est plafonné à 5 000 euros pour les particuliers et 3 000 euros pour les personnes morales. Les particuliers dont le revenu fiscal de référence par part est inférieur ou égal à 14 089 euros peuvent bénéficier d'une majoration de 2 000 euros de leur bonus, soit un plafond de 7 000 euros.

Barème 2023 du bonus écologique

Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

2. La prime à la conversion

La prime à la conversion est une aide, sous conditions, à l'achat ou à la location d'un véhicule peu polluant lorsqu'il s'accompagne de la mise au rebut d'un ancien véhicule diesel ou essence. Cette prime peut se cumuler avec le « bonus écologique ».

Le périmètre des véhicules dont l'acquisition peut être accompagnée par la prime à la conversion inclut les voitures particulières, les camionnettes, les véhicules à moteur à 2 ou 3 roues et les quadricycles à moteur.

Le montant maximum est de 6 000 euros pour l'achat d'un véhicule particulier électrique ou hybride rechargeable neuf ou d'occasion, lorsque le revenu fiscal de référence du foyer est inférieur à 6 358 euros. Pour une camionnette, le montant maximum est de 10 000 euros.

Pour accompagner les personnes habitants ou les entreprises situées dans le périmètre d'une zone à faibles émissions mobilité (ZFE m), la prime à la conversion est majorée au minimum de 1 000 euros et jusqu'à 3 000 euros si une aide similaire d'au moins 2 000 euros est attribuée par une collectivité territoriale située dans le même périmètre.

Barème 2023 de la prime à la conversion

Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

3. Le prêt à taux zéro

À l'initiative du rapporteur spécial, l'article 107 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, a prévu l'expérimentation d'un prêt à taux zéro pour l'acquisition d'un véhicule électrique ou hybride dans le ressort des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m).

Cette expérimentation a démarré à compter du 1er janvier 2023 pour une durée de deux ans. Le décret n° 2022 615 du 22 avril 2022 encadre le dispositif. En 2025, à l'issue de l'expérimentation, un rapport d'évaluation sera établi par le ministre chargé de l'économie et le ministre chargé des transports.

B. ANNONCÉ À L'AUTOMNE 2022, LE LEASING SOCIAL POURRAIT VOIR LE JOUR EN 2024

À l'automne 2022, le Président de la République avait fait la promesse d'instaurer un dispositif dit de « leasing social », c'est-à-dire un mécanisme de soutien à la location longue durée de véhicules électriques pour les foyers modestes. L'objectif affiché du dispositif est de diminuer le coût d'usage d'un véhicule pour les ménages sous condition de ressources, avec un loyer n'excédant pas 100 euros par mois pour la location d'un véhicule électrique.

Des discussions interministérielles avec les professionnels du secteur sont toujours en cours afin de concrétiser ce dispositif de soutien à la location longue durée (avec ou sans option d'achat) de voitures peu polluantes.

Le Gouvernement a annoncé qu'une plateforme de pré-enregistrement devrait être mise en ligne d'ici à la fin de l'année par l'Agence de services et de paiement (ASP) afin de permettre le lancement des premières commandes pour une livraison des véhicules et un versement des premières aides au début de l'année 2024.

En 2024, 50 millions d'euros des crédits destinés aux aides à l'acquisition de véhicules propres pourraient être consacrés à ce dispositif.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : SÉCURISER JURIDIQUEMENT LE LEASING SOCIAL EN LE MENTIONNANT DANS LA LOI. 

Les dispositions du présent article sont issues d'un amendement du Gouvernement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Il prévoit de modifier la rédaction de l'article L. 251-1 du code de l'énergie pour préciser que sont instituées des « aides à l'achat ou à la location pour une durée supérieure ou égale à deux ans de véhicules propres ». Pour rappel, la rédaction actuelle ne couvre que les aides à l'acquisition de véhicules propres, c'est-à-dire le bonus écologique et la prime à la conversion.

Cette modification a pour objet de sécuriser juridiquement le nouveau dispositif de leasing social en le mentionnant dans la Loi.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN DISPOSITIF QUI VA CONNAÎTRE UNE ENTRÉE EN MATIÈRE POUSSIVE MAIS QUI MÉRITE DE VOIR LE JOUR

La concrétisation du dispositif de leasing social annoncé à l'automne 2022 par le Président de la République n'est pas chose facile pour l'administration et les constructeurs, notamment en raison du phénomène d'inflation.

La disponibilité des véhicules électriques qui pourraient être éligibles au dispositif ajoute aux difficultés. Deux modèles étaient à l'origine principalement ciblés pour ce mécanisme : la Citroën ë-C3 qui doit être disponible en début d'année 2024 ainsi que la future R5 électrique de Renault dont la production a pris du retard et qui n'est attendue que dans le courant de l'année prochaine109(*).

Face à ce constat, le démarrage du dispositif s'annonce d'ores et déjà très poussif et limité en 2024. Certains proposent d'ailleurs de l'étendre aux véhicules hybrides pour qu'il prenne plus d'ampleur.

Devant les difficultés à lancer pleinement la mesure en 2024, le Gouvernement pourrait la restreindre par un critère géographique pour cibler les ménages qui n'ont pas d'autres choix que de se déplacer en voiture. Il anticiperait 10 000 à 20 000 bénéficiaires en 2024.

Dans une étude publiée au mois d'octobre dernier consacrée aux aides publiques à l'investissement dans la rénovation performante des logements et la mobilité électrique110(*), l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) soulignait que les aides actuelles « ne permettent pas de lever la barrière à l'investissement dans un véhicule électrique pour les classes moyennes et les ménages modestes » en raison d'un reste à charge encore beaucoup trop élevé. D'après l'étude les évolutions du bonus écologique envisagées par le Gouvernement en 2024, notamment sa revalorisation de 1 000 euros pour les 50 % de ménages les plus modestes « ne devraient pas changer la donne ». En revanche, I4CE attend beaucoup plus du nouveau dispositif de leasing social qui, selon l'étude, « pourrait apporter une solution aux ménages modestes et à une partie des classes moyennes ».

Par ailleurs, le coût cumulé du leasing lors des deux premières années de détention (2 400 euros) est fortement décorrélé de la dépréciation de la valeur du véhicule sur la même période. La durée de détention minimum de deux ans indiquée dans l'exposé des motifs de l'amendement déposé par le Gouvernement créant cet article 52 bis pourrait être un frein au développement d'offres par les constructeurs. Les offres actuellement disponibles reposent sur des durées de détention plus longue assorties d'un premier loyer représentant plusieurs mois (pour ne pas dire années).

Aussi, quand bien même ce dispositif aura sans doute les plus grandes difficultés à devenir pleinement opérationnel et efficace en 2024, le potentiel qu'il recèle mérite qu'il puisse voir le jour.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 52 ter (nouveau)

Extension des financements du Fonds Barnier à des mesures prises
par les agences de la zone des cinquante pas géométriques

Le présent article prévoit d'étendre le champ des financements du Fonds Barnier à des mesures prises par les agences de la zone des cinquante pas géométriques111(*).

Ces agences ont pour mission de conduire le processus de régularisation des occupations sans titre des terrains ressortissant aux espaces urbains et aux secteurs occupés par une urbanisation diffuse dans les littoraux en outre-mer.

L'article 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 prévoit déjà que le Fonds Barnier peut financer les frais de démolition des logements informels situés sur une zone à risque naturel, ainsi que les aides financières pour les personnes qui perdent leur logement. L'extension des financements du Fonds Barnier à des mesures prises par les agences de la zone des cinquante pas géométriques dans ce cadre est cohérente avec les objectifs de cette loi.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LE FONDS BARNIER EN OUTRE-MER ET LES AGENCES DE LA ZONE DES CINQUANTES PAS GÉOMÉTRIQUES PRENNENT EN COMPTE LES SPÉCIFICITÉS DE L'HABITAT INFORMEL EN OUTRE-MER

A. EN OUTRE-MER, LE FONDS BARNIER FINANCE DES MESURES RELATIVES À L'HABITAT INFORMEL DANS DES ZONES EXPOSÉES À UN RISQUE NATUREL

1. Le Fonds Barnier finance des mesures de prévention des risques ainsi que les indemnités d'expropriation pour risques naturels

L'article L. 561-3 du code de l'environnement prévoit l'existence du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), communément appelé le « Fonds Barnier ». Les détails sur le financement et les modalités d'action de ce Fonds sont donnés à la section A du II de la deuxième partie du présent rapport. On peut néanmoins rappeler les éléments suivants.

Le Fonds Barnier permet de financer l'acquisition de biens à l'amiable ou par expropriation lorsque les biens en question sont exposés à un risque, dans les conditions prévue à l'article L. 561-1 du code de l'environnement.

L'expropriation de biens par l'État pour risques naturels

L'article L. 561-1 du code de l'environnement prévoit que l'État peut déclarer d'utilité publique l'expropriation par lui-même, ou par les communes et leurs groupements, des biens exposés aux risques de mouvement de terrain, d'affaissement de terrain dus à une cavité souterraine, d'avalanches, de crues torrentielles ou à montée rapide, et de submersion marine.

Les conditions pour que cette procédure puisse être utilisée sont les suivantes :

- les risques doivent être prévisibles ;

- ils doivent menacer gravement des vies humaines ;

- les moyens de sauvegarde et de protection des populations doivent être plus coûteux que les indemnités d'expropriation.

Le Conseil constitutionnel avait déclaré conforme à la Constitution la procédure prévue à l'article L. 561-1 du code de l'environnement dans sa décision n° 2018-698 QPC du 6 avril 2018.

Source : commission des finances

Le Fonds Barnier peut également financer les dépenses liées à la limitation de l'accès et à la remise en état des terrains accueillant les biens exposés, le cas échéant en s'appuyant sur un établissement public foncier.

En outre, le Fonds Barnier peut financer des mesures de réduction de la vulnérabilité prises par les collectivités territoriales sur les territoires dotés d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN). De même, le Fonds intervient pour financer des mesures de prévention menées par les petites entreprises et les particuliers sur leurs habitations.

Le Fonds Barnier finance enfin quelques mesures au bénéfice de l'État, comme les travaux de mise en conformité des digues domaniales de protection contre les crues et les subventions marines.

Jusqu'en 2021, le Fonds Barnier était financé par un prélèvement obligatoire de 12 % en forme de « surprime » sur la prime payée par les assurés au titre de la garantie contre les catastrophes naturelles. À partir de cette année, le Fonds a été intégré au budget de l'État, au programme 181 « Prévention des risques » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». La loi de finances initiale pour 2023 a ouvert 200 millions d'euros de crédits de paiement pour le Fonds.

2. Depuis la loi du 23 juin 2011, le Fonds Barnier finance des mesures relatives à l'habitat informel en outre-mer dans des zones exposées à un risque naturel

Des dispositions spécifiques aux départements et régions d'outre-mer ont été introduites par la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'outre-mer.

L'article 6 de cette loi dispose que l'autorité administrative ayant ordonné la démolition de locaux à usage d'habitation édifiés sans droit ni titre dans une zone exposée à un risque naturel prévisible menaçant gravement des vies humaines peut verser une aide financière visant à compenser la perte de domicile aux conditions suivantes :

- les occupants sont à l'origine de l'édification de ces locaux et sont de bonne foi ;

- ces locaux constituent leur résidence principale ;

- les occupants justifient d'une occupation paisible et continue depuis plus de dix ans ;

- ils n'ont pas fait l'objet d'une ordonnance d'expulsion au cours de cette période.

Le même article prévoit que l'aide financière et les frais de démolition sont imputés sur le Fonds Barnier. Le barème de l'aide financière est fixé par arrêté des ministres chargés du logement, de l'outre-mer et du budget. Le propriétaire foncier est ensuite tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher l'occupation future des terrains désormais libérés. S'il est défaillant, des mesures peuvent être prises par le représentant de l'État dans le département aux frais du propriétaire.

Le cinquième alinéa du I de l'article L. 561-3 renvoie ainsi aux dispositions de l'article 6 de la loi précitée.

B. LES AGENCES DE LA ZONE DES CINQUANTE PAS GÉOMÉTRIQUES ONT POUR MISSION LA RÉGULARISATION DES OCCUPATIONS SANS TITRE DES TERRAINS SUR LES LITTORAUX EN OUTRE-MER

Les agences « pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques » ont été créées par l'article 4 de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer.

La zone des cinquante pas géométriques désigne une bande de terre de 81,2 mètres le long du littoral de la Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique. Au titre de l'article L. 5111-2 du code général de la propriété des personnes publiques, cette zone a le statut de réserve domaniale. Elle a été rattachée à la couronne de France au XVIIème siècle.

La zone des cinquante pas géométriques se substitue dans les territoires concernés à la bande des 100 mètres qui fait référence dans la loi littorale du 3 janvier 1986112(*). Leur délimitation ne dépend pas du trait de l'évolution du trait de côte.

Les agences de la zone des cinquante pas géométriques « constituent un instrument de coopération entre l'État et les communes ». Leurs missions sont définies à l'article 5 du 30 décembre 1996 :

elles ont pour mission prioritaire de conduire le processus de régularisation des occupations sans titre des terrains ressortissant aux espaces urbains et aux secteurs occupés par une urbanisation diffuse ;

- les agents commissionnés et assermentés des agences peuvent constater les atteintes à l'intégrité et à la conservation du domaine public, ou de nature à compromettre son usage dans la zone des cinquante pas géométriques ;

- les agences peuvent réaliser, pour leur compte ou celui de collectivités territoriales, des opérations d'aménagement, ainsi que les acquisitions foncières et immobilières nécessaires à ces opérations.

Il existe aujourd'hui deux agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques : une en Guadeloupe, et l'autre en Martinique.

Les agences sont financées par des subventions publiques, le produit de cession des parcelles, des emprunts, et enfin une part de la taxe spéciale d'équipement prévue aux articles 1609 C et 1609 D du code général des impôts. Au titre du I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, cette part est plafonnée à 997 000 euros pour l'agence de la zone des cinquante pas géométriques en Guadeloupe, et de 975 000 euros pour celle en Martinique.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : L'EXTENSION DU FONDS BARNIER À DES MESURES PRISES PAR LES AGENCES DE LA ZONE DES CINQUANTE PAS GÉOMÉTRIQUES

Le présent article est issu d'un amendement déposé par le Gouvernement, ainsi que d'un amendement identique déposé par le député Max Mathiasin et plusieurs de ses collègues.

Le 1° de l'article modifie l'article L. 561-1 du code de l'environnement pour indiquer que les indemnités des expropriations prononcées par les agences des cinquante pas géométriques sont financées par le Fonds Barnier.

Le a) du 2° dispose que le Fonds Barnier peut contribuer au financement des dépenses afférentes à la libération et à la remise en état des terrains évoqués à l'article 6 de la du 23 juin 2011 relatif à l'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les régions et départements d'outre-mer.

Cette même disposition prévoit que l'aide financière dont bénéficie la personne qui perd son domicile peut être versée par l'agence des cinquante pas géométriques. Le cas échéant, les conditions de versement de cette aide font l'objet d'une convention entre l'agence et la personne bénéficiaire, sous réserve de la signature préalable d'une convention-cadre entre l'État, l'autorité administrative ayant ordonné la démolition de l'ensemble des installations et l'agence.

Enfin, le b) du 2° prévoit que le Fonds Barnier peut contribuer au financement des études et des actions de prévention des risques naturels majeurs dont les agences de la zone dite des cinquante pas géométriques assurent la maîtrise d'ouvrage.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE EXTENSION COHÉRENTE DU FINANCEMENT DU FONDS BARNIER EN OUTRE-MER AUX AGENCES DE LA ZONE DES CINQUANTE PAS GÉOMÉTRIQUES

La zone dite des cinquante pas géométriques fait l'objet d'une forte emprise urbaine en outre-mer pour des raisons historiques : les terres intérieures étant occupées par des plantations, les travailleurs se sont installés sur les terres disponibles des montagnes ou du littoral. Cette situation a conduit à la construction de nombreux logements informels.

Extrait d'un rapport de 2004 sur la zone des cinquante pas géométriques

Face à un processus contre lequel elle n'a pas pu ou voulu lutter, l'Administration, dès le début du XIXe siècle, a délivré des autorisations d'installation, en principe révocables, au départ fondées sur de seules motivations économiques. Ces installations sont devenues au fil du temps définitives et ont concerné de plus en plus de particuliers.

La zone a été très vite identifiée dans beaucoup de consciences comme un territoire qui, n'appartenant en propre à personne (sauf au roi ou à la République) constituait un bien collectif ouvert. Aux autorisations de l'Administration se sont ajoutées des permissions, écrites ou même verbales, octroyées par des autorités non habilitées, sans compter celles consenties à des proches par les occupants eux-mêmes.

C'est pourquoi, le statut de la propriété dans ces îles, qu'il soit public ou privé, s'est trouvé très intimement lié au droit des personnes et à l'évolution des mentalités.

Source : rapport sur les cinquante pas géométriques en Guadeloupe et en Martinique, Inspection générale de l'administration et Conseil général des ponts et chaussées, Gérard Bougrier, Catherine Bersani, 9 mars 2004

La création des agences de la zone des cinquante pas géométriques par la loi du 30 décembre 1996 a donc eu vocation à accompagner la régularisation des logements situés dans ces espaces, tout en prenant en compte leur spécificité.

La loi du 23 juin 2011, qui permet le financement par le Fonds Barnier des frais de démolition et des aides financières la démolition de locaux à usage d'habitation édifiés sans droit ni titre dans une zone exposée à un risque naturel, vise également à rendre possible une compensation financière malgré le caractère informel de ces logements.

Il est donc cohérent d'étendre le Fonds Barnier aux mesures prises par les agences de la zone des cinquante pas géométriques dans ce cadre.

Même si son caractère spécifique la rend vraisemblablement peu coûteuse, il est regrettable qu'il n'y ait aucun chiffrage du coût de cette mesure.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 52 quater (nouveau)

Prolongation de l'expérimentation « Mieux reconstruire après inondation »

Le présent article prévoit de prolonger l'expérimentation « Mieux reconstruire après inondation » (MIRAPI) de deux ans. L'expérimentation consiste à apporter une aide aux sinistrés d'une inondation pour la reconstruction « résiliente » de leur logement.

Elle est financée par le fonds Barnier, et elle n'est applicable que pour les communes désignées par arrêté parmi celles faisant l'objet, depuis moins d'un an, d'un arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à la suite d'inondations. Jusqu'à présent, l'expérimentation a été étendue à 46 communes dans les départements des Landes et des Alpes Maritimes.

Le rapporteur spécial soutient le principe de la mesure, qui vise à réduire la vulnérabilité des logements qui sont, de facto, exposés au risque d'inondation, tout en facilitant la reconstruction des logements. La mesure n'a jusqu'à présent été déployée que dans deux départements, ce qui justifie une prolongation.

Toutefois, il est regrettable qu'aucune évaluation du coût et de l'efficacité de MIRAPI n'ait été présentée avant d'envisager sa prolongation.

La commission des finances propose de ne pas revenir sur la durée de l'expérimentation tout de demandant que le rapport attendu pour en mars 2024 soit bien transmis au Parlement dans les délais.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE EXPÉRIMENTATION FINANCÉES PAR LE FONDS BARNIER MISE EN PLACE À LA SUITE DE LA TEMPÊTE ALEX

Le A du III de l'article 224 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 prévoit la mise en place d'un dispositif expérimental, dénommé « mieux reconstruire après inondation » (MIRAPI), financé par le fonds de prévention des risques naturels majeurs (fonds Barnier).

L'expérimentation consiste à apporter une aide aux sinistrés d'une inondation pour la reconstruction de leur logement de manière plus « résiliente ». Elle doit notamment permettre de tester différentes hypothèses, comme des méthodes de simplification des procédures d'instruction et une évolution des critères du fonds Barnier.

Le fonds Barnier

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), mieux connu sous le nom de « fonds Barnier » est prévu à l'article L. 561-3 du code de l'environnement, et depuis sa budgétisation opérée en 2021, ses crédits sont inscrits sur le programme 181 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Il permet de financer des mesures de réduction de la vulnérabilité prises par les collectivités territoriales sur les territoires dotés d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN). De même, le fonds intervient pour financer des mesures de prévention menées par les petites entreprises et les particuliers sur leurs habitations. Le fonds Barnier permet également de financer l'acquisition de biens à l'amiable ou par expropriation lorsque les biens en question sont exposés à un risque.

Des développements plus complets sur le fonds Barnier se trouvent à la section A du II de la deuxième partie du présent rapport.

Source : commission des finances

MIRAPI concerne les communes désignées par arrêté du ministre chargé de la prévention des risques naturels parmi celles faisant l'objet, depuis moins d'un an, d'un arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à la suite d'inondations. L'expérimentation, au bénéfice de biens à usage d'habitation couverts par un contrat d'assurance, est limitée à trois ans à compter de la désignation d'au moins une commune. Les premières communes ayant été désignées par un arrêté du 27 septembre 2021113(*), l'expérimentation est doit se terminer le 27 septembre 2024.

Le B du III de l'article 224 prévoit que le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation établissant des propositions de prorogation ou d'arrêt du dispositif six mois avant la fin de l'expérimentation.

L'annonce de la mise en oeuvre de cette expérimentation a eu lieu à la suite des inondations dans les Alpes-Maritimes de l'automne 2020. Les premières communes où l'expérimentation MIRAPI a été déployée se situent donc dans ce département.

Par la suite, l'expérimentation a été étendue à des communes du département des Landes par deux arrêtés, l'un du 21 décembre 2021114(*) et l'autre du 28 avril 2022115(*). Le département avait en effet connu de fortes inondations en 2020 et en 2021.

Jusqu'à présent, MIRAPI a été appliquée pour 46 communes, pour l'essentiel de petite taille.

Déroulement de l'expérimentation MIRAPI

Après les épisodes d'inondations successifs, l'État a mis en place, à titre expérimental, un dispositif d'accompagnement des particuliers visant à améliorer la résilience de leur habitation aux inondations : le dispositif « Mieux reconstruire après inondation » dénommé MIRAPI. Le département des Landes fait partie des territoires retenus pour cette expérimentation.

Le dispositif MIRAPI se décompose en deux phases. La première phase obligatoire de réalisation d'un diagnostic de vulnérabilité est suivie d'une phase d'accompagnement à la réalisation des travaux préconisés dans le diagnostic.

Le diagnostic de vulnérabilité est réalisé par un technicien spécialisé qui évalue point par point les composantes du bien, et en détermine le niveau de vulnérabilité en cas d'inondation. En complément, cette expertise permet de cibler et de chiffrer avec précision les travaux et les aménagements réalisables pour améliorer la résilience de ce bien.

Afin de bénéficier d'un diagnostic de vulnérabilité réalisé par un diagnostiqueur, d'un accompagnement technique et administratif dédié et ainsi devenir éligible à une subvention à hauteur de 80 % du montant des travaux à réaliser, l'inscription au dispositif est indispensable.

Source : site de l'institution ADOUR, établissement public territorial de bassin (Hautes-Pyrénées, Gers, Landes, Pyrénées-Atlantiques)

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : LA PROLONGATION DE DEUX ANS DE L'EXPÉRIMENTATION

Le présent article est issu d'un amendement déposé par le Gouvernement ainsi que d'un amendement identique déposé par le député Éric Ciotti.

Le 1° prévoit d'allonger la durée de l'expérimentation de trois à cinq ans. Elle se terminerait donc le 27 septembre 2026.

Le 2° précise que les modalités de l'expérimentation sont fixées par arrêté du ministre chargé de la prévention des risques naturels.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LA PROLONGATION EST JUSTIFIÉE, MAIS CELA NE DISPENSE PAS D'ÉVALUER MIRAPI

L'objectif de cette expérimentation est d'aider les sinistrés à reconstruire leur habitation de façon plus résiliente après une inondation, afin d'éviter de nouveaux dommages, en complément de la reconstruction « à l'identique » financée par les assureurs. Le fonds « Barnier » interviendrait pour financer l'aspect « résilient » de la construction, sans néanmoins que cette qualification juridique ne fasse l'objet d'une définition précise.

Le rapporteur spécial soutient le principe de la mesure, qui vise à réduire la vulnérabilité des logements qui sont, de facto, exposés au risque d'inondation, tout en facilitant la reconstruction des logements. La mesure n'a jusqu'à présent été déployée que pour des communes des Alpes-Maritimes et des Landes, ce qui justifie une prolongation.

Il convient cependant de rester prudent quant à l'intégration des dépenses de réparation « résiliente » dans le champ d'action du fonds « Barnier », dans la mesure où cela pourrait, à terme, alourdir les dépenses qu'il prend en charge, compte tenu de la récurrence des catastrophes naturelles dans un contexte de dérèglement climatique.

Or, les indications sur le coût de MIRAPI sont fragmentaires, même s'il apparaît limité. La seule indication présente dans les documents budgétaires est une mention du projet annuel de performances pour 2022, selon laquelle MIRAPI coûterait 200 000 euros au fonds Barnier pour cette année. Dans les projets annuels de performances suivants, le coût de MIRAPI n'est pas détaillé.

À ce titre, il est regrettable que le rapport prévu au B du III de l'article 224 de la loi de finances pour 2021 n'ait pas été transmis au Parlement. Certes, la date limite de six mois avant la fin de l'expérimentation, en l'occurrence le 27 mars 2024, n'est pas encore atteinte. Néanmoins, ce rapport a vocation à établir « des propositions de prorogation ou d'arrêt du dispositif », et devait donc permettre au Parlement de se prononcer sur l'expérimentation. Or, au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2025, il sera trop tard car l'expérimentation sera déjà terminée.

Le rapport aurait donc dû être rendu en avance par rapport au délai prévu par la loi. À cet égard, le rapporteur spécial avait considéré, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, que la date prévue pour réaliser un bilan du dispositif était trop lointaine, d'autant qu'aucune évaluation préalable n'avait été jointe à l'article 224. Le rapporteur spécial avait ainsi déposé un amendement n°  II-30 (FINC.5) visant à ce que le Gouvernement présente un premier bilan de MIRAPI au bout d'un an. Il n'a malheureusement pas été retenu dans le texte final, alors que ce bilan aurait été très utile pour se prononcer aujourd'hui sur la suite de l'expérimentation.

Néanmoins, au regard de l'utilité potentielle du dispositif, et de son coût a priori limité, il est pertinent d'étendre la durée de l'expérimentation. On notera cependant que cette décision est en contradiction avec l'idée de l'article 7 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) adoptée définitivement vendredi 15 novembre par les députés après que le Gouvernement ait engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution. En effet, ce dernier dispose que « Les dépenses fiscales ne peuvent être prorogées [qu'à] la condition d'avoir fait l'objet d'une évaluation, présentée par le Gouvernement au Parlement, des principales caractéristiques des bénéficiaires des mesures, qui précise l'efficacité et le coût de celles-ci. » Cette logique devrait être appliquée aux expérimentations. La LPFP n'a même pas encore fait l'objet d'une promulgation que le Gouvernement contrevient à son esprit.

De manière à laisser une certaine visibilité aux communes bénéficiaires, dans un contexte de forte vulnérabilité du territoire national, il est proposé de ne pas revenir sur la prolongation de l'expérimentation tout en rappelant qu'un bilan est attendu pour le 27 mars 2024. Le rapporteur spécial propose donc un amendement pour garantir qu'un bilan soit transmis la date initialement prévue, c'est-à-dire le 24 mars 2024.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 52 quinquies (nouveau)

Autorisation du retrait de la résiliation des contrats de soutien
des installations productrices d'électricité à partir de biomasse

Le présent article prévoit de permettre à l'installation de production électrique à base de biomasse de Gardanne de demander le retrait de la résiliation de son contrat de soutien public et d'assortir celui-ci de nouvelles méthodes d'indexation destinées à mieux couvrir les phénomènes de fluctuation des coûts d'approvisionnement en matière première de la centrale.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIFS DE SOUTIEN À LA PRODUCTION D'ÉNERGIE RENOUVELABLE ASSURENT DES RÉMUNÉRATIONS GARANTIES AUX PRODUCTEURS

Afin d'encourager la production d'énergies renouvelables (EnR), l'État a mis en place des dispositifs de soutien public qui peuvent être attribués selon deux modalités : le guichet ouvert ou la mise en concurrence via des appels d'offres. Ces dispositifs de soutien à la rémunération des producteurs d'énergie peuvent eux-mêmes prendre deux formes : l'obligation d'achat ou le complément de rémunération. Ces dispositifs doivent permettre de garantir au producteur, sur le long terme, une rémunération supérieure à la valeur de marché de l'énergie produite.

Créé en 2000 par la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, le dispositif d'obligation d'achat, prévu aux articles L. 314-1 à L. 314-13 du code de l'énergie, impose aux fournisseurs historiques116(*) de conclure des contrats d'achat de l'électricité produite à partir d'énergie renouvelable par les installations éligibles à l'obligation d'achat ou lauréates d'un appel d'offres. Ces contrats d'achats sont tenus de respecter des conditions tarifaires et techniques imposées par la voie réglementaire. Généralement signés sur des durées de 20 ans, ils prévoient un tarif d'achat117(*) garanti pour le producteur.

Le dispositif de complément de rémunération a quant à lui été instauré par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dite « LTECV ». Il est aujourd'hui encadré par les articles L314-18 à L314-27 du code de l'énergie. Les producteurs qui ont conclu des contrats de complément de rémunération vendent leur énergie directement sur les marchés. Une prime vient compenser l'écart entre les revenus tirés de cette vente et un niveau de rémunération de référence, fixé selon le type d'installations par la puissance publique dans le cadre d'un arrêté tarifaire ou par le producteur dans le cadre d'une procédure de mise en concurrence par le biais d'appel d'offres.

Cette prime, variable, constatée ex-post, compense donc la différence entre la rémunération de référence et un revenu de marché de référence. Selon la Commission de régulation de l'énergie (CRE), « ce dispositif vise à exposer les producteurs aux signaux des prix de marché de court terme, tout en leur garantissant une rémunération raisonnable ». Cette rémunération des actifs du producteur doit lui permettre de couvrir les coûts de son installation et de lui garantir un niveau de rentabilité raisonnable.

EDF, en assurant les missions de service public d'achat de l'énergie, est le seul opérateur à pouvoir conclure en France ce type de contrats avec les producteurs d'EnR. Ainsi cette société, via son service EDF obligation d'achat, verse-t-elle les primes dues aux producteurs.

Pour les dispositifs d'obligation d'achat et de complément de rémunération, EDF et les entreprises locales de distribution (ELD) font l'objet de compensations de l'État dans le cadre du mécanisme des charges de service public de l'énergie (CSPE) dont les crédits budgétaires dédiés sont suivis sur le programme 345 « Service public de l'énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

B. LA CENTRALE THERMIQUE DE PROVENCE A ÉTÉ LAURÉATE DE L'APPEL D'OFFRES LANCÉ EN 2010 POUR LA PRODUCTION D'ÉLECTRICITÉ À PARTIR DE BIOMASSE

1. L'appel d'offre lancé en 2010 pour un contrat d'achat de production d'électricité à partir de biomasse

Le soutien au début de la décennie 2010 à la filière de production d'électricité à partir de biomasse visait à permettre l'atteinte des objectifs de production d'électricité à partir de cette ressource prévus par le rapport de la programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité pour la période 2009-2020, c'est-à-dire, par rapport à 2006, une augmentation équivalente à 520 mégawatts (MW) en 2012 et à 2 300 MW en 2020.

Ce soutien aux installations devait s'articuler autour de deux dispositifs :

- des tarifs d'achat de l'électricité garantis pour les installations d'une capacité inférieure à 12 MW ;

- au-dessus de 12 MW, des appels d'offres récurrents lancés chaque année.

Lancé en 2010, l'appel d'offres n° 2010/S 143-220129 portant sur des installations de production d'électricité à partir de biomasse visait à mettre en oeuvre ce second dispositif.

2. La centrale thermique de Provence lauréate de l'appel d'offre de 2010 a résilié son contrat en novembre 2022

À la fin de l'année 2022, la France comptait 62 centrales de production d'électricité à partir de biomasse pour une puissance de 800 MW. La principale d'entre elles est la centrale thermique de Provence, située à Gardanne118(*). Elle produit son électricité au moyen de la vapeur d'eau dégagée par la combustion de bois. Sa puissance de production atteint 150 MW. Elle est exploitée par la société GazelEnergie.

Cartographie des sites de production d'électricité à partir de biomasse solide
en 2022

Source : baromètre de l'Observ'ER 2022

À la fin de l'année 2022, dans un contexte de crise des prix de l'énergie et alors que les coûts d'approvisionnement des centrales produisant à base de biomasse avaient fortement augmenté, la centrale thermique de Provence a résilié le contrat d'obligation d'achat dont elle était titulaire en tant que lauréate de l'appel d'offres n° 2010/S 143-220129 précité.

D'après l'exposé de l'amendement duquel est issu le présent article, dans ce contexte économique bouleversé, ce contrat ne permettait plus à l'exploitant d'amortir ses investissements ni de couvrir la hausse du prix de ses intrants dans la mesure où l'augmentation du coût de ces derniers n'était pas prise en compte dans la formule d'indexation du tarif d'achat de l'électricité produite par la centrale.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : PERMETTRE À LA CENTRALE DE PRODUCTION ÉLECTRIQUE DE GARDANNE DE REVENIR SUR LA RÉSILIATION DE SON CONTRAT DE SOUTIEN ET ASSORTIR CE DERNIER D'UNE NOUVELLE MÉTHODE D'INDEXATION 

Les dispositions du présent article sont issues d'un amendement du Gouvernement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Il vise à permettre à certaines centrales de production électrique à partir de biomasse de pouvoir solliciter le retrait de la résiliation du contrat de soutien public qu'elles auraient réalisé au cours du second semestre 2022. En pratique, cette disposition vise uniquement la centrale thermique de Provence localisée à Gardanne.

A. LA POSSIBILITÉ POUR LES CENTRALES DE PRODUCTION D'ÉLECTRICITÉ À BASE DE BIOMASSE DE DEMANDER UN RETRAIT DE LA RÉSILIATION DE LEUR CONTRAT DE SOUTIEN

Le premier alinéa du I du présent article prévoit ainsi que les producteurs d'électricité lauréats de l'appel d'offres n° 2010/S 143-220129 qui ont résilié leur contrat de soutien au cours du second semestre 2022 « en raison de la forte hausse de leurs coûts d'approvisionnement » qui n'était pas couverte par le tarif d'achat d'électricité prévu par ce contrat, ont la possibilité, « sur demande motivée auprès du ministre chargé de l'énergie, [de]solliciter le retrait de cette résiliation ».

Ce même alinéa précise que cette demande motivée doit être formulée au premier semestre 2024 et que l'accord de retrait de la résiliation peut, le cas échéant être « assorti de prescriptions sur la durée et les périodes de fonctionnement de l'installation ».

Le second alinéa du I dispose quant à lui que les éventuelles recettes excédentaires (par rapport au tarif d'achat qui était prévu dans son contrat de soutien) qu'aurait perçues l'installation durant la période de résiliation (après déduction des sommes versées au titre de la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité119(*)) soient reversées à l'État.

B. DE NOUVELLES MODALITÉS D'INDEXATION DU TARIF D'ACHAT SUR LES COÛTS D'APPROVISIONNEMENT EN BIOMASSE

Le premier alinéa du II prévoit que, pour « faire face aux variations des coûts d'approvisionnement en matière premières, les titulaires des contrats des projets lauréats de l'appel d'offres n° 2010/S 143-220129 d'une puissance supérieure à 30 MW » pourront désormais demander à pouvoir bénéficier de nouvelles modalités d'indexation de leur tarif d'achat. Après que le producteur a remis à la Commission de régulation de l'énergie (CRE) ainsi qu'au ministère chargé de l'énergie tous les justificatifs nécessaires, cette nouvelle indexation devrait être établie par un décret pris après avis de la CRE.

Enfin, le second alinéa du II prévoit des dispositions de contrôle de la CRE spécifiques et renforcées. Celle-ci devra ainsi réaliser un audit tous les deux ans des installations bénéficiant de ces nouvelles méthodes d'indexation pour « constater son taux de rémunération effectif ».

Le même alinéa prévoit que les règles d'indexation seront, le cas échéant, amenées à être révisées par décret pour garantir que des conditions d'achat de l'électricité produite par la centrale ne résultent pas une rémunération totale des capitaux immobilisés qui « excède une rémunération raisonnable des capitaux, compte tenu des risques inhérents à son exploitation ».

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES

La production d'électricité à partir de biomasse connaît des difficultés particulières pour s'établir et se développer en France, notamment en raison des difficultés d'approvisionnement en bois. Les problématiques rencontrées par la centrale de Provence en sont l'une des illustrations. Cependant, la production d'électricité à base de biomasse a l'avantage d'être à la fois pilotable et moins émissive que les installations fonctionnant au charbon. L'exposé de l'amendement du Gouvernement précise ainsi que les émissions des centrales fonctionnant à partir de biomasse se situaient entre 15 et 60 kg d'équivalent CO2 par mégawattheure (MWh) contre 100 kg pour les installations produisant de l'électricité à base de charbon.

Par ailleurs, la centrale de Provence a toujours bénéficié d'un regard particulier de la part des pouvoirs publics. L'installation biomasse est, en effet, venue contrebalancer la fermeture en 2012 d'une centrale fonctionnant au charbon. Pour autant, la vie de centrale est chaotique. Du fait notamment de grèves, la centrale n'a fonctionné que 1 400 heures depuis le début de l'année, soit l'équivalent de deux mois. Très récemment, la cour administrative de Marseille dans une décision publiée le 10 novembre 2023, conformément à une décision du  Conseil d'État de mars 2023, a ordonné à GazelEnergie d'étudier les effets indirects de son activité, notamment sur les  forêts. À l'appui de cette nouvelle étude d'impact réalisée sous douze mois, puis d'une enquête publique complémentaire, la cour administrative se prononcera sur l'autorisation d'exploiter.

Seuls les enjeux sociaux, liés aux 91 emplois de la centrale, peuvent justifier une telle disposition législative, applicable à une unique installation et visant à modifier de façon rétrospective des clauses contractuelles.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 52 sexies (nouveau)

Déplafonnement des contrats de complément de rémunération
des producteurs d'énergie renouvelable

Le présent article prévoit le déplafonnement intégral et sans condition des contrats de complément de rémunération des installations de production d'énergie renouvelable.

Cet article fait suite à la déclaration d'inconstitutionnalité, pour incompétence négative du législateur, de l'article 38 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 par la décision du Conseil constitutionnel n° 2023-1065 QPC du 26 octobre 2023. Cet article prévoyait un déplafonnement partiel de ces mêmes contrats.

Pour répondre à cette déclaration d'inconstitutionnalité, le Gouvernement a choisi de proposer un déplafonnement intégral et sans condition des contrats de complément de rémunération.

La commission des finances propose d'adopter l'article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : L'ARTICLE 38 DE LA PREMIÈRE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2022 A ÉTÉ DÉCLARÉ CONTRAIRE À LA CONSTITUTION PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL

A. LES CONTRATS DE COMPLÉMENT DE RÉMUNÉRATION

Afin d'encourager la production d'énergies renouvelables (EnR), l'État a mis en place des dispositifs de soutien public qui peuvent être attribués selon deux modalités : le guichet ouvert ou la mise en concurrence via des appels d'offres. Ces dispositifs de soutien à la rémunération des producteurs d'énergie peuvent eux-mêmes prendre deux formes : l'obligation d'achat ou le complément de rémunération. Ces dispositifs doivent permettre de garantir au producteur, sur le long terme, une rémunération supérieure à la valeur de marché de l'énergie produite.

Le dispositif de complément de rémunération a été instauré par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dite « LTECV ». Il est aujourd'hui encadré par les articles L314-18 à L314-27 du code de l'énergie. Les producteurs qui ont conclu des contrats de complément de rémunération vendent leur énergie directement sur les marchés. Une prime vient compenser l'écart entre les revenus tirés de cette vente et un niveau de rémunération de référence, fixé selon le type d'installations par la puissance publique dans le cadre d'un arrêté tarifaire ou par le producteur dans le cadre d'une procédure de mise en concurrence par le biais d'appel d'offres.

Cette prime, variable, constatée ex post, compense donc la différence entre la rémunération de référence et un revenu de marché de référence. Selon la Commission de régulation de l'énergie (CRE), « ce dispositif vise à exposer les producteurs aux signaux des prix de marché de court terme, tout en leur garantissant une rémunération raisonnable ». Cette rémunération des actifs du producteur doit lui permettre de couvrir les coûts de son installation et de lui garantir un niveau de rentabilité raisonnable.

EDF, en assurant les missions de service public d'achat de l'énergie, est le seul opérateur à pouvoir conclure ce type de contrats avec les producteurs d'EnR. C'est ainsi cette société, via son service EDF obligation d'achat, qui verse les primes dues aux producteurs. EDF fait ensuite l'objet de compensations de l'État dans le cadre du mécanisme des charges de service public de l'énergie (CSPE) dont les crédits budgétaires dédiés sont suivis sur le programme 345 « Service public de l'énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

B. LE DÉPLAFONNEMENT PARTIEL DES CONTRATS DE COMPLÉMENT DE RÉMUNÉRATION PRÉVU PAR L'ARTICLE 38 DE LA PREMIÈRE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2022

1. La flambée de prix de l'électricité qui s'est exacerbée en 2022 a très fortement accru les revenus des producteurs d'électricité d'origine renouvelable qui se sont retrouvés à devoir reverser des primes négatives à l'État

L'article R314-49 du code de l'énergie prévoit que, dans le cas où le prix de marché est supérieur au tarif de référence déterminé par le contrat, le producteur devient redevable à l'État, via la société EDF, des sommes correspondant à ce qui est alors devenu une prime négative. Le premier alinéa de l'article est ainsi rédigé :

« Dans les cas où la prime à l'énergie mensuelle mentionnée à l'article R314-34 est négative, le producteur est redevable de cette somme. Ce montant est versé par le producteur à Électricité de France sous forme d'avoir accompagné du règlement correspondant. Il est déduit des charges de service public de l'électricité constatées pour Électricité de France pour l'exercice considéré ».

Avant qu'il ne soit modifié par le décret n° 2021-1691 du 17 décembre 2021120(*), cet article prévoyait un plafonnement des sommes que pouvaient être amené à reverser le producteur aux montants qu'il avait déjà perçu depuis le début du contrat121(*).

Dans le contexte de la flambée des prix de l'électricité sur le marché de gros qui s'est déclenchée à la fin de l'année 2021 la situation « habituelle » dans laquelle les producteurs titulaires de contrats de rémunération bénéficiaient d'un soutien public s'est trouvée profondément bouleversée et ces derniers se sont trouvés à devoir verser à EDF, et donc à l'État via le système de la compensation des CSPE, des sommes au titres de primes devenues négatives.

2. Certains contrats de complément de rémunération disposent de mécanismes de plafonnement qui limitent les primes négatives que les producteurs doivent reverser à l'État lorsque les rémunérations qu'ils perçoivent dépassent leur rémunération de référence

Au-delà du plafonnement qui était prévu par l'article R314-49 du code de l'énergie avant sa modification en décembre dernier, certains cahiers des charges d'appels d'offres122(*) consacrés à des dispositifs de complément de rémunération prévoyaient des dispositifs similaires.

Alors que le niveau des cours sur le marché de gros de l'électricité qui avait été atteint en 2022 n'aurait pas pu être raisonnablement envisagé dans les hypothèses étudiées lors du calcul des plans d'affaire des projets concernés, il aurait résulté du maintien de tels plafonnements des taux de rentabilité situés à des niveaux très supérieure à une rémunération raisonnable des capitaux immobilisés par les producteurs.

L'évaluation préalable de l'article 38 du premier projet de loi de finances rectificative pour 2022 recensait environ 3 200 contrats concernés pour un enjeu financier très significatif d'environ 2,4 milliards d'euros au titre de l'année 2022.

Dans sa délibération n° 2022-202 du 13 juillet 2022 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2023, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) évaluait les enjeux financiers du plafonnement des contrats de complément de rémunération à 2,4 milliards d'euros au titre de l'année 2022 et à 2 milliards d'euros au titre de l'année 2023.

Face à cette situation, et alors que le plafond avait déjà été atteint par de nombreux contrats, le ministère chargé de l'énergie avait, dès le printemps 2022 donné pour consigne à EDF Obligation d'achat (EDF OA) de ne pas appliquer ces dispositifs et donc, de déplafonner les contrats concernés entre avril et décembre 2022.

3. L'article 38 de la première loi de finances rectificative pour 2022 a introduit dans la loi un système de déplafonnement partiel de l'ensemble des contrats de complément de rémunération

Pour capter une part des revenus excédentaires des producteurs résultant de la flambée des prix de l'énergie et pouvant être considérés comme des effets d'aubaine non prévisibles, l'article 38 de la loi n° 202 1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a instauré un dispositif pérenne, avec application rétroactive à compter du 1er janvier 2022, de déplafonnement partiel des contrats de complément de rémunération.

Le dispositif de plafonnement partiel reposait sur la détermination de la trajectoire pluriannuelle d'un « prix seuil » pivot. Cette trajectoire devait être représentative d'un scénario réaliste d'évolution des prix de gros sur le marché de l'électricité au moment où les contrats plafonnés ont été conclus (entre 2016 et 2019). Cette trajectoire du prix seuil devait être établie par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'énergie et du budget pris après l'avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Cet arrêté a été publié le 28 décembre 2022.

Le mécanisme prévoyait ainsi que les contrats dont les tarifs de référence utilisés pour calculer la prime de complément de rémunération se situaient, pour un mois donné, à un niveau supérieur au « prix seuil » étaient alors entièrement déplafonnés. Aussi, si la prime pour un mois donné s'avérait négative, le producteur titulaire d'un tel contrat était alors tenu de verser l'intégralité des montants dus au titre de cette prime.

Pour les contrats dont les tarifs de référence étaient, pour un mois donné, inférieurs au « prix seuil », deux situations pouvaient se présenter.

Dans le cas où le prix de marché de référence de l'électricité prévu par le contrat pour déterminer le niveau de la prime était inférieur ou égal au « prix seuil », alors les mécanismes de plafonnement continuaient de s'appliquer.

En revanche, dans le cas où le prix de marché de référence était supérieur au « prix seuil », alors les mécanismes de plafonnement des contrats continuaient de s'appliquer dans la limite de ce prix seuil. Le producteur était tenu de reverser les sommes correspondantes au volume d'électricité qu'il avait injecté sur les réseaux publics d'électricité durant le mois multiplié par la différence entre le prix de marché de référence et le « prix seuil ». Ce système se traduisait donc par un déplafonnement partiel des contrats de complément de rémunération lorsque les prix de gros de l'électricité dépassaient le « prix seuil ».

Dans sa délibération de juillet dernier sur l'évaluation des compensations de charges de service public de l'énergie pour 2024, la CRE considérait que la mesure de déplafonnement des contrats de rémunération de l'article 38 de la loi de finances rectificative pour 2022 « représente une part considérable »123(*), de l'ordre de 30 à 50 % des recettes exceptionnelles qui doivent être perçues par l'État entre 2022 et 2024, soit entre 3 et 4,5 milliards d'euros. Toutefois, dans cette même délibération, la CRE s'inquiétait des capacités d'EDF obligation d'achat (EDF OA) à recouvrer de façon rétroactive les 1,7 milliard d'euros dus au titre de l'année 2022. Le 28 juin 2023, seuls 55 % de la somme totale avaient été effectivement recouvrés.

C. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A DÉCLARÉ CONTRAIRE À LA CONSTITUTION L'ARTICLE 38 DE LA PREMIÈRE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2022

Dans sa décision n° 2023-1065 QPC du 26 octobre 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la constitution l'article 38 de la première loi de finances rectificative pour 2022. Cette déclaration était fondée sur le motif d'incompétence négative du législateur. Le Conseil a en effet considéré qu'en renvoyant à un arrêté ministériel la fixation du prix seuil et « en s'abstenant de définir lui-même les critères de détermination de ce prix, le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence dans des conditions affectant le droit au maintien des conventions légalement conclues ».

Cependant, dans la même décision, le Conseil constitutionnel a considéré que si les dispositions de l'article 38 « portent atteinte au droit au maintien des conventions légalement conclues », il résultait de l'objectif d'intérêt général poursuivi que cette atteinte n'était pas « disproportionnée » et, par voie de conséquence, qu'elles n'étaient pas contraires à la Constitution.

Considérants 12 à 15 de la décision du Conseil constitutionnel n° 2023-1065 QPC du 26 octobre 2023

12. En modifiant en cours d'exécution les modalités contractuelles déterminant le montant des reversements dus par les producteurs lorsque la prime à l'énergie mensuelle est négative, les dispositions contestées portent atteinte au droit au maintien des conventions légalement conclues.

13. En premier lieu, il résulte des travaux préparatoires de la loi du 17 août 2015 mentionnée ci-dessus que le législateur, en instituant un dispositif de complément de rémunération, a entendu soutenir la production d'électricité à partir d'énergie renouvelable en assurant aux producteurs une rémunération raisonnable des capitaux investis. Or la très forte augmentation des prix de l'électricité sur le marché à partir de septembre 2021, qui était imprévisible lors de la conclusion de ces contrats, a eu pour conséquence une augmentation considérable du profit généré par les installations de production d'électricité. En adoptant les dispositions contestées, dans un contexte de forte hausse des prix de l'électricité, le législateur a ainsi entendu corriger les effets d'aubaine dont ont bénéficié les producteurs qui ont reçu un soutien public, afin d'atténuer l'effet préjudiciable de cette hausse pour le consommateur final. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d'intérêt général.

14. En second lieu, si la modification des modalités de calcul des reversements dus par les producteurs d'électricité bénéficiant d'un complément de rémunération affecte un élément essentiel de leurs contrats, il résulte de l'article L. 314-20 du code de l'énergie que leur est garantie, quelle que soit l'évolution des prix du marché, une rémunération raisonnable des capitaux immobilisés tenant compte des risques inhérents à leur exploitation jusqu'à l'échéance de leur contrat.

15. Ainsi, les dispositions contestées, en ce qu'elles reviennent sur le plafonnement auquel les producteurs pouvaient prétendre en vertu des contrats en cours, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au maintien des conventions légalement conclues.

Source : décision du Conseil constitutionnel n° 2023-1065 QPC du 26 octobre 2023

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION 

Les dispositions du présent article sont issues d'un amendement du Gouvernement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

L'article prévoit de déplafonner intégralement et sans condition l'ensemble des contrats de complément de rémunération.

Son premier alinéa précise que ses dispositions s'appliquent aux contrats de rémunération « qui prévoient une limite supérieure aux sommes dont le producteur est redevable lorsque la prime à l'énergie mensuelle est négative », c'est-à-dire à ceux qui disposent de clauses de plafonnement des reversements à l'État en cas de rémunérations perçues supérieures à leur tarif de référence.

Le second alinéa de l'article précise que, de façon rétroactive, à compter du 1er janvier 2022, les clauses de plafonnement des contrats de complément de rémunération sont abrogées.

Pour ce faire, cet alinéa entend ainsi modifier tous les contrats de complément de rémunération en cours concernés de la façon suivante : « lorsque, pour un mois donné, la prime à l'énergie mensuelle est négative, le producteur est redevable de l'intégralité de la somme correspondante pour l'énergie produite ».

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE MESURE VISANT À ÉVITER LES EFFETS D'AUBAINE QUI SEMBLE POUVOIR ÊTRE CONFORME À LA DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Si la production d'électricité d'origine renouvelable doit demeurer une priorité des pouvoirs publics et faire l'objet de mesures de soutien, il ne peut être objectivement contesté que la hausse considérable des prix de l'électricité observée au cours de l'année 2022 ne pouvait pas être raisonnablement anticipée par les producteurs et qu'elle relève d'un pur effet d'aubaine. Les mécanismes de plafonnement prévus par les cahiers des charges de certains contrats de complément de rémunération se traduiraient par des pertes de recettes significatives pour l'État en contrepartie de rémunérations excessives pour des installations dont les coûts de production n'ont pas augmenté aussi fortement que les prix de l'électricité sur les marchés de gros.

Dans sa délibération du 17 juillet 2022 précitée, la CRE avait mis en exergue les effets d'aubaine générés par les mécanismes de plafonnement des contrats de complément de rémunération et recommandé à l'État de les supprimer. Elle estimait ainsi que « les sommes perçues par les producteurs au-delà des niveaux de tarif de référence constituent des rentes indues, s'éloignant du principe d'une rémunération raisonnable sur la durée des contrats de complément de rémunération ».

Dans sa décision précitée du 26 octobre 2023, le Conseil constitutionnel a considéré que les mesures de déplafonnement partiel des contrats de complément de rémunération qui étaient prévues par l'article 38 de la première loi de finances rectificative pour 2022 portaient une atteinte au droit au maintien des conventions légalement conclues qui n'était pas disproportionnée :

- d'une part car elle était justifiée par un motif d'intérêt général suffisant, à savoir, dans un contexte de très forte augmentation des prix de l'électricité, afin d'en atténuer l'effet préjudiciable sur les consommateurs, la correction d'effets d'aubaine manifestes dont ont bénéficié des producteurs qui avaient auparavant reçu un soutien public ;

- d'autre part car, quand bien même le déplafonnement qui était prévu à l'article 38 affectait un élément essentiel des contrats, l'article L. 314 20 du code de l'énergie qui définit les conditions du complément de rémunération garantit aux producteurs une rémunération raisonnable de leurs capitaux immobilisés.

En réponse à la déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 38 de la première loi de finances rectificative pour 2022, le Gouvernement répond par une simplification qui va de pair avec un durcissement de la mesure. S'il ressort clairement de sa décision que le Conseil constitutionnel ne considère pas comme inconstitutionnel le mécanisme de déplafonnement partiel qui était prévu par l'article 38, il ne semble néanmoins pas tout à fait exclu que celui-ci adopte une position différente sur le déplafonnement total et inconditionnel que prévoit le présent article 52 sexies.

Le bon usage des deniers publics ainsi que la légitimité à ne pas laisser se constituer des rémunérations excessives dues à des effets d'aubaine caractérisés au profit d'installations qui ont longtemps pu bénéficier d'un soutien de la collectivité suppose néanmoins de ne pas laisser perdurer les clauses de plafonnement prévues dans les cahiers des charges de certains contrats de complément de rémunération.

On peut cependant s'étonner du choix du Gouvernement de déplafonner intégralement et sans condition les contrats de compléments de rémunération. En effet, l'article 8 bis du présent PLF relatif à la prorogation de la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité prévoit en 2024 un prélèvement limité à 50 % des revenus excédant le seuil de taxation (contre 90 % en 2022 et 2023) « aux fins de limiter les impacts sur les incitations à l'investissement » selon les termes de l'exposé des motifs du sous-amendements I-5388 du député Mathieu Lefèvre intégré dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter l'article sans modification.


* 69 Décret n° 2021-344 du 29 mars 2021 relatif à l'habilitation de mandataires dans le cadre de la prime de transition énergétique.

* 70 Composée du directeur général de de l'ANAH, d'un représentant du ministre chargé du logement, d'un représentant du ministre chargé de l'économie, d'un représentant du ministre chargé du budget et d'un représentant du ministre chargé de l'énergie.

* 71https://www.economie.gouv.fr/nouveaux-moyens-lutter-contre-fraude-renovation-energetique-2024

* 72 En comptant à la fois les crédits inscrits sur le programme 174 et ceux inscrits sur le programme 135.

* 73 Ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 portant diverses mesures d'accompagnement des salariés dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon.

* 74 Les conditions d'application de cette ordonnance ont été précisées dans le décret n° 2021-297 du 18 mars 2021 relatif aux conditions d'application de l'ordonnance no 2020-921 du 29 juillet 2020 portant diverses mesures d'accompagnement des salariés dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon.

* 75 Article L. 1233-71.

* 76 Ou « consommateurs finals domestiques ».

* 77 Qui emploient moins de dix personnes et dont le chiffre d'affaires, les recettes ou le total de bilan annuels ne dépassent pas 2 millions d'euros.

* 78 Une majorité des boulangers, des bouchers, des fleuristes et des petits restaurateurs se retrouvent par exemple dans cette situation.

* 79 Fixé à un montant, censé refléter les coûts de production du parc nucléaire, de 42 euros par mégawattheure aujourd'hui, très nettement inférieur aux prix du marché de l'électricité.

* 80 Établi à partir des références de prix issues des enchères du mécanisme d'obligation de capacité.

* 81 Les coûts de commercialisation retenus par la CRE sont ceux d'EDF.

* 82 C'est-à-dire le plafond du volume global d'Arenh pouvant être cédé par EDF au titre d'une année.

* 83 Délibération n° 2023-17 de la CRE du 19 janvier 2023 portant proposition des tarifs réglementés de vente d'électricité.

* 84 C'est-à-dire avant application du bouclier tarifaire.

* 85 Pour calculer cette part, la CRE prend en compte une moyenne des prix à terme des deux derniers mois de l'année qui précède l'année de livraison.

* 86 Délibération n° 2023-17 de la CRE du 19 janvier 2023 portant proposition des tarifs réglementés de vente d'électricité.

* 87 Délibération n° 2022-08 de la CRE du 18 janvier 2022 portant proposition des tarifs réglementés de vente d'électricité.

* 88 Comme le rapporteur l'a souligné dans son analyse des crédits du projet de loi de finances (PLF) pour 2023, la moyenne de 4% cachait alors de fortes disparités. Les consommateurs ayant un contrat heures pleines / heures creuses ont connu une hausse supérieure pouvant atteindre 11%. Le design des tarifs avait été revu en 2023 pour corriger cette absurdité.

* 89 Une série de cinq arrêtés du 30 janvier 2023 pour le bouclier tarifaire 2023 qui sont venus s'opposer aux TRVe calculés par la CRE dans sa délibération n° 2023-17 du 19 janvier 2023.

* 90 Avec comme limite que le niveau de tarif effectivement du par ces clients ne pouvant pas être ramené à un niveau inférieur aux TRVe gelés.

* 91 En effet, pour certains clients, qui disposent des contrats les plus compétitifs, le niveau de la compensation s'avère supérieur au montant nécessaire pour réduire leur facture au niveau des TRVe gelés. Dans cette hypothèse, le fournisseur est autorisé à utiliser ce « surplus » de compensation pour réduire davantage la facture d'autres clients qui disposent de contrats plus onéreux, leur permettant ainsi de se rapprocher au maximum du prix des TRVe gelés. Ce dispositif s'applique tout particulièrement pour les petits consommateurs professionnels dont les prix des contrats sont plus dispersés que ceux des particuliers.

* 92 Avec un effet rétroactif sur le deuxième semestre de l'année 2022.

* 93 Décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022 pris en application des VIII et IX de l'article 181 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 94 Puisqu'elle ne porte que sur 50% de la consommation du client.

* 95 « Les personnes morales de droit privé qui emploient moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros. Ces critères sont appréciés au sens de l'annexe I du règlement n° 651/2014 du 17 juin 2014 susvisé ».

* 96 Notamment les associations.

* 97 Décret n° 2023-62 du 3 février 2023 relatif à l'aide en faveur des TPE éligibles au bouclier et à l'amortisseur ayant signé un contrat en 2022 et modifiant les décrets n° 2022-1764 du 30 décembre 2022 relatif à l'aide en faveur de l'habitat collectif résidentiel face à l'augmentation du prix de l'électricité au second semestre 2022, n° 2022-1763 du 30 décembre 2022 relatif à l'aide en faveur de l'habitat collectif résidentiel face à l'augmentation du prix de l'électricité pour 2023 et n° 2022-1762 du 30 décembre 2022 relatif à l'aide en faveur de l'habitat collectif résidentiel face à l'augmentation du prix du gaz naturel en 2023.

* 98 Égale à la partie positive de la différence entre la quantité cédée et la quantité théorique constatée ex-post.

* 99 Les modalités de calcul et de répartition du complément de rémunération se trouvent ainsi déterminées à la section 5 du chapitre VI du titre III du livre III de la partie réglementaire du code de l'énergie, soit aux articles R. 336-28 à R. 336-38.

* 100 Prévues à l'article L131-2 du code de l'énergie.

* 101 Délibération n° 2023-200 de la Commission de régulation de l'énergie du 13 juillet 2023 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2024 et à la réévaluation des charges de service public de l'énergie pour 2023.

* 102 Il s'agit d'une part de modifications visant le 3° du B ainsi que les deuxième et cinquième alinéas du D du I et, d'autre part de l'ajout d'un D bis à ce même I.

* 103 Et qui figuraient à ce titre à l'article 181 de la LFI pour 2023.

* 104 Les consommateurs définis au 2° du I de l'article L. 337-7 du code de l'énergie.

* 105 C'est-à-dire hors tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE).

* 106 Rapport d'information n° 779 (2022-2023) fat au nom de la commission des finances sur le contrôle budgétaire sur les dispositifs de soutien aux consommateurs d'énergie par Mme Christine Lavarde, juin 2023.

* 107 Délibération n° 2023-176 de la CRE du 29 juin2023 portant décision sur le calcul du complément de prix Arenh sur l'année 2022.

* 108 Délibération n° 2022-187 de la CRE du 30 juin 2022 portant décision sur le calcul du complément de prix Arenh sur l'année 2021.

* 109 A l'occasion du capital market day d'Ampere du 15 novembre 2023, le constructeur a précisé le calendrier de production de sa gamme : la Renault 5 sera dévoilée au premier trimestre 2024, la Renault 4 sera lancée en 2025, la mise en production de la Legend, dont le prix de vente sera inférieur à 20 000 euros, n'a pas été précisée.

* 110 La transition est-elle accessible à tous les ménages ? I4CE, octobre 2023.

* 111 La réserve domaniale dite des cinquante pas géométriques est une extension terrestre du domaine public maritime (DPM) instaurée dans les départements et régions d'outre-mer (DROM) : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion.

* 112 Loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral.

* 113 Arrêté du 27 septembre 2021 portant désignation des communes dans lesquelles s'applique le dispositif expérimental « Mieux reconstruire après inondation ».

* 114 Arrêté du 21 décembre 2021 portant désignation des communes dans lesquelles s'applique le dispositif expérimental « Mieux reconstruire après inondation ».

* 115 Arrêté du 28 avril 2022 portant désignation des communes dans lesquelles s'applique le dispositif expérimental « Mieux reconstruire après inondation ».

* 116 Électricité de France (EDF) et les entreprises locales de distribution (ELD).

* 117 Déterminé par des arrêtés dits « tarifaires ».

* 118 Via son unité 4 également appelée « Provence 4 biomasse ».

* 119 Instaurée pour 2022 et 2023 par l'article 54 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 120 Décret n° 2021-1691 du 17 décembre 2021 relatif à l'obligation de transmission d'une attestation de conformité aux prescriptions mentionnées à l'article R. 311-43 du code de l'énergie et portant modification de la partie réglementaire du code de l'énergie relative à la production d'électricité et à la vente de biogaz.

* 121 La formulation précisait ainsi « dans la limite des montants totaux perçus depuis le début du contrat au titre du complément de rémunération ».

* 122 Principalement des appels d'offres lancés entre 2016 et 2019.

* 123 Délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023.

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