N° 759
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 juin 2023
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires économiques (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, maintenant provisoirement un dispositif de plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs,
Par Mme Dominique ESTROSI SASSONE,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas, présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault, secrétaires ; MM. Serge Babary, Jean-Pierre Bansard, Mmes Martine Berthet, Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Françoise Férat, Amel Gacquerre, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, M. Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Mme Guylène Pantel, M. Sebastien Pla, Mme Daphné Ract-Madoux, M. Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-Claude Tissot.
Voir les numéros :
Première lecture : 1262, 1287 et T.A. 123
Commission mixte paritaire : 1341 Nouvelle lecture : 1338, 1348 et T.A. 139 |
Première lecture : 667, 681, 682 et T.A. 126 (2022-2023)
Commission mixte paritaire : 723 et 724 (2022-2023)
Nouvelle lecture : 755 et 760 (2022-2023) |
L'ESSENTIEL
Le Sénat est saisi en urgence de la proposition de loi, déposée à l'Assemblée nationale par le député Thomas Cazenave, visant au maintien du plafonnement de la revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs décidé à l'été 2022.
Cette PPL a pour objet de prolonger, jusqu'au premier trimestre 2024, le plafonnement de la hausse de l'indice de référence des loyers d'habitation, l'IRL, et de l'indice des loyers commerciaux, l'ILC, à hauteur de 3,5 % qui avait été décidé respectivement jusqu'au deuxième et premier trimestre de cette année dans la loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.
La commission a décidé de rejeter le texte tant pour des raisons de méthode que de fond, le plafonnement des indices ne pouvant dispenser le Gouvernement d'une vraie politique en faveur du logement et du pouvoir d'achat des Français.
I. LA MÉTHODE : UNE LÉGISLATION À LA SAUVETTE
Concernant la méthode tout d'abord, la commission a fait un quintuple constat d'impréparation, de précipitation, d'absence évaluation, de manque de concertation et de non-accompagnement financier des mesures édictées.
Premièrement, alors que les délais sont connus depuis l'an passé et que l'encadrement de l'ILC est juridiquement déjà échu, puisqu'il s'achevait au premier trimestre 2023, c'est en janvier ou février que le Parlement aurait dû être saisi d'un projet de loi et non début juin dans la précipitation avec des délais anormaux. De fait, cette PPL a été déposée le 23 mai. Elle a été examinée par la commission des affaires économiques de l'Assemblée moins d'une semaine plus tard et le lendemain en séance, le 31 mai dernier. Dans cette course de vitesse législative, la commission a été contrainte de l'examiner moins de sept jours plus tard. La PPL sera examinée dès le 7 juin en séance publique.
Ces délais n'ont pas permis un travail parlementaire approfondi et respectueux des personnes auxquelles le texte va s'appliquer. Il a été impossible d'organiser des auditions et une véritable consultation des différentes parties prenantes. En effet, ces différents acteurs ont été pour la plupart placés devant le fait accompli. À la différence du projet de loi sur la protection du pouvoir d'achat débattu l'été dernier, aucune véritable concertation n'a été organisée pour rechercher un compromis. Ce texte va même contre la parole donnée selon laquelle la « loi pouvoir d'achat » était un dispositif exceptionnel qui ne serait pas reconduit.
« En choisissant de passer par le faux-nez d'une proposition de loi, le Gouvernement se dispense en outre de toute étude d'impact. »
Pourtant, l'an passé, le coût pour les propriétaires du plafonnement de la hausse de l'indice de référence des loyers d'habitation, l'IRL, pendant trois trimestres avait été évalué à 705 millions d'euros. Il pourrait cette fois-ci s'élever à 490 millions d'euros supplémentaires. Concernant l'indice des loyers commerciaux, dont la hausse avait été plafonnée par un amendement de Jean-Baptiste Lemoyne, elle n'avait pas donc pas fait l'objet d'une étude d'impact. Le passage par une proposition de loi privera de nouveau le Parlement de tout chiffrage. Mais, l'été dernier, cela résultait au moins d'une concertation.
Enfin, en passant par une proposition de loi, le Gouvernement se dispense de prendre les indispensables mesures d'accompagnement financier et d'apporter un certain nombre de garanties aux bailleurs comme aux locataires. L'an passé, le projet de loi de protection du pouvoir d'achat accompagnait la mesure de plafonnement des indices d'une hausse des aides personnelles au logement (APL). Tel n'est pas le cas aujourd'hui, puisque dans une proposition de loi ou par amendement, ce serait contraire à l'article 40 de la Constitution qui interdit l'aggravation des charges publiques.