III. UN OBJECTIF PRÉSIDENTIEL DE DOUBLEMENT DE LA PRÉSENCE SUR LA VOIE PUBLIQUE QUI NE DOIT PAS S'APPUYER À TITRE PRINCIPAL SUR DES CRÉATIONS D'EFFECTIFS ET DOIT MOBILISER D'AUTRES LEVIERS
A. UN OBJECTIF QUI NE PEUT PAS S'APPUYER À TITRE PRINCIPAL PRINCIPAL SUR LES CRÉATIONS D'EFFECTIFS, DONT L'OPPORTUNITÉ N'EST PAS ÉVIDENTE
En conclusion du Beauvau de la sécurité, le président de la République annonçait vouloir « doubler sous 10 ans la présence des policiers et gendarmes sur la voie publique » 31 ( * ) . Cet objectif est repris dans le cadre du projet de LOPMI, avec une échéance fixée à 2030 .
Le rapporteur spécial estime que si cet objectif est louable, il emporte par nature le danger de mobiliser trop fortement le levier des créations de postes . Or, le risque d'une telle stratégie est que celles-ci se sont souvent traduites par une réduction des marges de manoeuvre en matière de fonctionnement et d'investissement (effet ciseaux), réduisant en réalité l'opérationnalité des forces de police et de gendarmerie 32 ( * ) .
Dans le cadre du précédent quinquennat, le Président de la République s'était engagé à créer 10 000 emplois sur la période 2018/2022. Ce plan a d'ailleurs été respecté , comme le rapporteur spécial l'a indiqué supra , puisqu'entre 2017 et 2022, 8 446 emplois de policiers et 2 083 emplois de gendarmes auront été créés.
Si cet important renforcement des effectifs ne s'est pas effectué au détriment de la part des dépenses de fonctionnement et d'investissement de la police et de la gendarmerie nationale, c'est grâce à un effort budgétaire global important porté par la mission mais également par les crédits provenant du Plan de relance.
À l'occasion du début du présent quinquennat et en marge de la présentation du projet de LOPMI, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé, le 6 septembre 2022, la création de 8 500 postes de policiers et gendarmes supplémentaires d'ici à 2027.
Là encore, l'objectif est notamment d'atteindre l'objectif de doubler la présence des forces de police et de gendarmerie sur la voie publique. Le projet de loi de finances prévoit 33 ( * ) , dès 2023, la création de 2 857 ETP pour les deux forces , dont 1 907 ETPT pour la police nationale et 950 ETPT pour la gendarmerie nationale 34 ( * ) .
Les comparaisons internationales ne permettent pourtant pas de conclure à une sous-dotation de la France en matière d'effectifs des forces de sécurité intérieure. La France se situe en réalité, à l'échelle de ses voisins européens, dans une situation intermédiaire.
Surtout, aujourd'hui, cet effort en termes d'effectifs se fait alors que le plan de relance s'éteint. Ce sont donc les dépenses d'investissement et de fonctionnement de la mission « Sécurités » qui devront augmenter à un rythme au moins équivalent aux dépenses de personnel pour ne pas réduire la qualité des moyens de nos forces de sécurité intérieure.
Si cet objectif est atteignable, il implique d'être vigilant, annuellement, quant à la soutenabilité de l'augmentation des effectifs et à mobiliser parallèlement d'autres leviers pour atteindre le but louable d'un doublement de la présence des forces de police et de gendarmerie sur la voie publique.
* 31 Discours de clôture du Beauvau de la sécurité.