B. UNE RELATIVE STABILISATION DE LA PART DES DÉPENSES DE PERSONNEL DANS L'ENSEMBLE DES DÉPENSES EN 2023, QUI NE DOIT PAS REMETTRE EN CAUSE LA TENDANCE BAISSIÈRE À MOYEN TERME
En dépit de la hausse concomitante des dépenses d'investissement et de fonctionnement, le dynamisme plus fort des dépenses de personnel en 2023 entraine une hausse de la part de ces dernières dépenses dans l'ensemble des dépenses des deux programmes en AE l'année prochaine. En effet, si les dépenses hors titre 2 (dépenses de personnel) augmentent de 2,06 % en AE (+ 78,3 millions d'euros) pour les deux programmes, les dépenses de titre 2 augmentent de 5,8 %.
La tendance est néanmoins inverse pour les CP , pour lesquels la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes baisse légèrement en 2023.
À l'échelle des deux forces, les dépenses de personnel représenteront en AE 83,2 % de l'ensemble, contre 82,7 % en 2022, pour s'établir à un niveau qui demeure inférieur d'un peu moins de 3 points à celui de 2020.
À l'inverse, en crédits de paiement, le taux baisse de 86,6 % à 86,1 %, pour s'établir à un niveau qui est désormais inférieur de 2,6 points à celui de 2020.
Part des dépenses de personnel dans l'ensemble
des dépenses de la police et de la gendarmerie nationales en AE
(à gauche) et en CP (à droite)
(hors crédits de la
mission « Plan de relance »)
(en %)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
En 2023 , l'évolution de la part des dépenses de personnel est inverse entre les deux forces. Pour la police nationale , leur part dans l'ensemble des dépenses est en baisse tant en AE (pour s'établir à 85,3 % en 2023 contre 86,0 % en 2022) qu'en CP (87,6% en 2023 contre 88,8% en 2022). Pour la gendarmerie nationale , elle est en hausse tant en AE (80,6%, contre 78,6% en 2022, soit une hausse significative de deux points ) qu'en CP (84,3 %, contre 83,9 % en 2022).
Le rapporteur spécial regrette que l'évolution de la tendance ne soit pas clairement à la baisse cette année pour les deux forces. Il souligne l'évolution peu satisfaisante s'agissant de la gendarmerie nationale pour 2023.
Il constate néanmoins que la dynamique de la baisse du ratio des dépenses de personnel par rapport à l'ensemble des dépenses amorcée en 2020 (en incluant les crédits du plan de relance) devrait se poursuivre à l'horizon 2025 , en AE et en CP, selon le projet annuel de performance de la mission.
Part des dépenses de personnel dans l'ensemble
des dépenses de la police et de la gendarmerie nationales en AE (en
haut) et en CP (en bas)
(hors crédits de la mission « Plan
de relance »)
(en %)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
À l'horizon 2025, le ratio devrait s'établir à 81,6 % en AE et 85,4 % en CP selon le projet annuel de performance de la présente mission, soit respectivement 5,4 points et 3,3 points de moins qu'en 2021 . Une telle évolution est non seulement souhaitable mais elle est indispensable à l'efficacité des forces de sécurité intérieure.
Le rapporteur spécial rappelle que les données qui lui ont transmises par la direction de la coopération internationale du ministère de l'intérieur montrent que la France conserve en 2022 une part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses supérieure ou proche de celle constatée en Espagne, en Allemagne et au Royaume-Uni , même si ces données doivent être interprétées avec prudence en raison des différences de périmètres.
Ainsi, la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses s'élève à :
- 75,7 % pour les ministères de l'intérieur des différents Länder allemands ;
- entre 75 et 80 % au Royaume-Uni ;
- 85 % pour la police et la garde nationale espagnole.
Comparaisons internationales avec l'Allemagne, le
Royaume-Uni et l'Espagne
en matière de structure des forces de
sécurité intérieure
En Espagne , le ministre de l'Intérieur considère que la sécurité constitue un service public essentiel. Les budgets, pour 2019, du corps national de police et de la garde civile étaient respectivement de 3 195 millions d'euros et de 3 016 millions d'euros. En termes de structures de dépenses, pour l'ensemble du ministère, le personnel représente 79,34 % du budget (et environ 85 % pour la police et la garde civile qui sont des unités à très fort effectif). Les biens et services nécessaires au fonctionnement habituel du ministère constituent le deuxième poste de dépense (17,8 %). Les investissements ne représentent que 3,6 % du budget total (soit 301 millions d'euros).
L' Allemagne est une république fédérale dont les 16 États fédérés sont indépendants en matière de sécurité intérieure. Ainsi, les 16 ministères de l'Intérieur, décident, chacun en ce qui les concerne, des dépenses de recrutement, d'équipement... Leur budget respectif n'étant pas abondé par le budget fédéral, ils disposent d'une autonomie totale en la matière. Pour l'année 2020, les dépenses de personnels s'y élèvent à 75,7% du total des budgets des ministères de l'Intérieur.
Au Royaume-Uni (Angleterre, Pays de Galles, Écosse, Irlande du Nord), les forces de police regroupent 262 288 personnels, tous grades et statuts confondus, dont une grande majorité (236 800) est en service au sein des forces de police territoriales. Après une déflation des effectifs au début des années 2010, consécutive à la crise économique de 2008, une remise à niveau a été décidée en 2019, visant à recruter 20 000 policiers supplémentaires, dont 9 814 ont d'ores et déjà été recrutés.
Le budget annoncé du Home Office au titre de l'exercice mars 2021-mars 2022 s'élevait, pour traiter des champs d'action identiques au ministère de l'Intérieur français, à 16,4 milliards de livres sterling pour l'Angleterre et le Pays de Galles (4,4 milliards de livres sterling supplémentaires correspondent à la contribution des collectivités locales, soit environ 5 milliards d'euros). S'y ajoute, pour l'Écosse, un budget de 1,3 milliard de livres sterling ainsi qu'un budget de 1,125 milliard de livres sterling pour l'Irlande du Nord.
Ces budgets, pour un total de 23,225 milliards de livres sterling, ne concernent que les forces territoriales et ne prennent pas en compte les questions de renseignement, de lutte contre le terrorisme, de sûreté nucléaire et de police aux frontières ou encore des activités externalisées. La part des dépenses de personnel oscille entre 75 et 80 %.
Source : direction de la coopération internationale du ministère de l'intérieur
De même, hors crédits du plan de relance, le niveau atteint en 2022 est en réalité proche de celui de 2007 et supérieur à celui de 2006.
Ces comparaisons ne visent pas à minimiser les importants progrès permis par les efforts financiers effectués mais démontrent que ces niveaux ne sont pas « inédits » et que l'effort doit être poursuivi.