C. LE SPECTRE DE L'INFLATION MENACE LE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT
Le contexte d'inflation, en particulier s'agissant des prix de l'énergie, affecte déjà et menace d'affecter très sérieusement dans les années à venir s'il se prolonge, le secteur des transports . Le financement des infrastructures de transport n'est pas épargné et la capacité à maintenir des trajectoires d'investissements ambitieuses à moyen-terme est remise en cause.
Il est ainsi constaté une évolution extrêmement rapide des index de travaux publics (TP) qui servent à calculer la révision des prix des marchés. Il apparaît que l'évolution du coût d'une opération moyenne routière avoisine les 15 % entre le mois de janvier 2020 et l'automne 2022. L'index relatif aux chaussées a progressé de 24 % sur cette période. Les projections actuelles prévoient de nouvelles évolutions à la hausse pour ces index en 2023 et dans les années à venir.
S'agissant des investissements sur le réseau ferroviaire, la crise des prix de l'énergie affecte significativement le coût des matériaux . Concernant les travaux de régénération du réseau ferroviaire, d'ores et déjà sous-financés à hauteur d'un milliard d'euros (voir infra ), SNCF Réseau évalue les surcoûts liés à l'inflation à environ 500 millions d'euros en année pleine . Si la trajectoire d'investissements en euros courants du contrat de performance de SNCF Réseau était maintenue, les conséquences sur l'état du réseau seraient dramatiques . Aussi les rapporteurs appellent-ils l'État à réviser d'urgence le contrat de performance de SNCF Réseau dont ils ont exposé toutes les insuffisances dans leur rapport publié en mars 2022 sur la SNCF et le système ferroviaire national 11 ( * ) .
De surcroît, SNCF Réseau a récemment informé les entreprises ferroviaires du risque d'une forte hausse des redevances liées à l'électricité pour l'année 2023. Les barèmes de l'électricité, négociés par SNCF Réseau avec ses fournisseurs, devraient en effet être multipliés par plus de 4 entre 2022 et 2023.
Le contexte d'inflation s'est d'ores et déjà traduit par une augmentation des coûts de nombreuses opérations prévues dans le cadre des CPER , notamment pour celles dont le financement devait être engagé en 2022 pour des lancements de travaux en 2023 et 2024. D'après la DGITM, pour ce type d'opérations, l'augmentation des coûts liée à l'inflation se situe en moyenne entre 20 % et 25 % du coût initial de l'opération en euros courants.
Pour les opérations à forts enjeux , telle que la régénération de certaines petites lignes ferroviaires nécessaire pour pallier le risque de suspension des circulations, les financeurs, dont l'État, ont pu abonder leurs participations respectives pour permettre la signature et l'engagement des conventions de financement ou la poursuite des chantiers en cours en cas de conventions existantes. Concernant la participation de l'État, des financements complémentaires ont pu être mobilisés pour combler ces surcoûts grâce aux crédits du plan de relance et au report de certaines opérations qui n'ont pas avancées au rythme prévu. Toutefois, la DGITM a signalé aux rapporteurs spéciaux qu'il n'était pas du tout garanti qu'une telle souplesse budgétaire puisse être mise en oeuvre en 2023 et au-delà .
Les rapporteurs considèrent que cette situation est particulièrement préoccupante. Le contexte d'inflation ne doit pas conduire à affaiblir davantage le financement des infrastructures de transport et la nouvelle trajectoire d'investissements pour la période 2023-2027 qui doit être présentée au Parlement après l'aboutissement des travaux du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) devra nécessairement traiter cet enjeu majeur pour les années à venir.
* 11 Comment remettre la SNCF sur rail ? Modèle économique de la SNCF et du système ferroviaire : il est grand temps d'agir, Rapport d'information n° 570 (2021-2022) de MM. Hervé Maurey et Stéphane Sautarel, fait au nom de la commission des finances, 9 mars 2022.