Rapport n° 233 (2019-2020) de M. Philippe BONNECARRÈRE , fait au nom de la commission des lois, déposé le 8 janvier 2020

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N° 233

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 janvier 2020

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi visant à créer un droit à l' erreur des collectivités locales dans leurs relations avec les administrations et les organismes de sécurité sociale ,

Par M. Philippe BONNECARRÈRE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François-Noël Buffet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Di Folco, MM. Jacques Bigot, André Reichardt, Mme Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, M. Loïc Hervé, Mme Marie Mercier , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Vincent Segouin, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Sénat :

283 (2018-2019) et 234 (2019-2020)

L'ESSENTIEL

Le 8 janvier 2020, la commission des lois a adopté, sur le rapport de Philippe Bonnecarrère, sénateur du Tarn et membre du groupe Union Centriste , la proposition de loi n° 283 (2018-2019) visant à créer un droit à l'erreur des collectivités locales dans leurs relations avec les administrations et les organismes de sécurité sociale déposée par Hervé Maurey , sénateur de l'Eure et Sylvie Vermeillet , sénatrice du Jura, tous deux membres du groupe Union Centriste.

La loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dite loi « ESSoC » est venue consacrer, au sein du code des relations entre le public et l'administration, un droit général à la régularisation en cas d'erreur au profit des particuliers et des entreprises venant compléter les mécanismes préexistants en matière fiscale et sociale. Dès l'examen de ce texte, le Sénat s'était montré favorable à ce que ce nouveau droit soit étendu aux collectivités territoriales et à leurs groupements , sans pour autant qu'une telle option ne soit retenue dans le texte finalement promulgué.

Là où elles ne devaient respecter, il y a encore quelques années, que des normes spéciales, les collectivités territoriales sont de plus en plus soumises aux mêmes règles que les autres acteurs juridiques, qu'ils soient de droit public ou de droit privé . Cette soumission aux mêmes règles les confrontent aux mêmes administrations, dont elles sont devenues, de fait, des usagers à part entière. Or, la baisse des ressources des collectivités territoriales les a contraintes à réduire leurs moyens humains et juridiques, multipliant d'autant leurs chances de commettre des erreurs en toute bonne foi dans des procédures complexes.

Partageant l'objectif poursuivi par les auteurs de la proposition de loi, la commission des lois a considéré opportun d'ouvrir un droit général à la régularisation en cas d'erreur au bénéfice des collectivités territoriales et de leurs groupements. Elle a jugé que ce nouveau droit viendrait utilement compléter les dispositifs spéciaux ouvrant un droit à l'erreur en matière fiscale et sociale qui s'appliquent déjà à eux, ainsi que le nouveau rescrit préfectoral créé par la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

À l'initiative du rapporteur, la commission des lois a étendu la portée et amélioré l'efficacité du dispositif proposé. Ainsi, le bénéfice de ce nouveau droit a été ouvert à l'ensemble des collectivités et à leurs groupements et non plus seulement aux communes et à leurs groupements, comme le prévoyait la proposition de loi initiale. La commission des lois a également précisé que des dispositions spéciales ne pourraient faire obstacle à l'application de ce nouveau principe général que si elles ont « pour objet ou pour effet d'assurer une protection équivalente » .

Le texte adopté par la commission des lois sera examiné par le Sénat en séance publique le 16 janvier 2020.

I. UN DROIT À L'ERREUR POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES : UN BESOIN DÉJÀ EXPRIMÉ PAR LE SÉNAT

A. LA RECONNAISSANCE D'UN DROIT À L'ERREUR PAR LA LOI « ESSOC »

La création d'un droit général à régularisation en cas d'erreur est issue de l'article 2 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance dite loi « ESSoC » , entré en vigueur le 12 août 2018. Ces dispositions ont été codifiées aux articles L. 123-1 et L. 123-2 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA). Ce « droit à l'erreur » permet aux usagers ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à leur situation ou qui ont commis une erreur matérielle lors du renseignement de leur situation, de ne pas se voir infliger une sanction administrative pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation.

En application de l'article L. 100-3 du CRPA, la notion d'usager englobe « toute personne physique » et « toute personne morale de droit privé, à l'exception de celles qui sont chargées d'une mission de service public lorsqu'est en cause l'exercice de cette mission » . Deux conditions cumulatives sont nécessaires pour bénéficier de ce droit : la personne ne doit pas être de mauvaise foi et elle doit avoir régularisé sa situation, de sa propre initiative ou sur invitation de l'administration.

La notion de mauvaise foi est définie à l'article L. 123-2 du CRPA qui dispose également que sa preuve doit être rapportée par l'administration, au même titre que celle de la fraude.

Ces dispositions sont favorables aux usagers puisqu'elles ne permettent à l'administration de ne sanctionner que ceux qui enfreignent volontairement les règles. Ces dispositions sont également favorables à l'administration puisqu'elles incitent les usagers à régulariser leur situation de leur propre initiative, sans attendre d'y être invités dans le cadre d'une procédure contradictoire faisant suite à l'instruction de leur dossier.

Les dispositions introduites dans le CRPA par la loi « ESSoC » précitée sont supplétives, en application de l'article L. 100-1 du même code qui dispose que ce code régit « les relations entre le public et l'administration en l'absence de dispositions spéciales applicables » . Le droit à l'erreur assis sur les dispositions du CRPA ne trouve donc notamment pas à s'appliquer en matière fiscale et sociale puisque des dispositions spéciales régissent déjà les relations entre usagers et administration.

Ces dispositions spéciales comportaient déjà des mécanismes permettant aux usagers de rectifier leurs erreurs avant l'entrée en vigueur de la loi « ESSoC ». En matière fiscale, Jean-Claude Luche, sénateur de l'Aveyron (groupe Union Centriste), et Pascale Gruny, sénateur de l'Aisne (groupe Les Républicains), rapporteurs pour la commission spéciale du Sénat en charge de l'examen du projet de loi « ESSoC », constataient que « l'article L. 62 du livre des procédures fiscales prévoit une procédure de règlement des litiges en cas de contrôle 1 ( * ) , réservée aux contribuables de bonne foi et sous réserve que leur chiffre d'affaires ne dépasse pas un certain seuil. Il leur permet de ? régulariser les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances dans les déclarations souscrites dans les délais?, moyennant le paiement d'intérêts de retard à taux réduit 2 ( * ) . De surcroît, le livre des procédures fiscales fait bénéficier les contribuables d'une présomption de bonne foi à son article L. 195 A, dans sa rédaction issue de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédure aux contribuables en matière fiscale et douanière : en cas de contestation des pénalités fiscales relatives à certains impôts, ?la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration? » 3 ( * ) . L'article L. 62 précité a été complété par l'article 9 de la loi « ESSoC » afin, notamment, d'étendre la procédure de régularisation en cours de contrôle à l'ensemble des procédures de contrôle fiscal, dont celles relatives à l'examen de la situation fiscale personnelle des particuliers et aux contrôles sur pièces en général.

L'article 15 de la loi « ESSoC » a également créé l'article L. 62 B du livre des procédures fiscales qui institue un droit à l'erreur pour les redevables de contributions indirectes.

En matière sociale, les rapporteurs du projet de loi « ESSoC » relevaient que « l'article R. 243-10 du code de la sécurité sociale permet [déjà] à l'employeur de rectifier les erreurs constatées dans ses déclarations de cotisations et de contributions sociales lors de l'échéance déclarative la plus proche, sans avoir à payer les majorations de retard et les pénalités encourues. Ce droit à l'erreur ne s'applique pas en cas d'omission de salariés dans la déclaration ou d'inexactitudes répétées, acception qui se rapproche de la notion de mauvaise foi » 4 ( * ) . En outre, l'article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale dispose que, à l'issue d'un contrôle opéré par les organismes chargés du recouvrement des cotisations, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement ne peut être majoré de 10 % que dans le cas où « l'employeur n'a pas pris en compte les observations notifiées lors d'un précédent contrôle » .

Le droit à l'erreur dans le domaine de la sécurité sociale a été récemment mis en place par le décret n° 2019-1050 du 11 octobre 2019 relatif à la prise en compte du droit à l'erreur par les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale. S'inspirant des dispositions introduites dans le CRPA par la loi « ESSoC », il vient modifier la partie réglementaire du code de la sécurité sociale afin d'étendre les droits des usagers (voir encadré infra ).

Principaux apports du décret du 11 octobre 2019
relatif à la prise en compte du droit à l'erreur par les organismes
chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale

La mise en oeuvre du droit à l'erreur dans la sphère sociale a donné lieu à la publication du décret du 11 octobre 2019 relatif à la prise en compte du droit à l'erreur par les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale. Ce texte pose une règle de droit commun d'absence de sanction dans l'ensemble des cas de retard, d'omissions ou d'inexactitudes dans les déclarations sociales comme pour les paiements de cotisations en cas de contrôle.

1. Non-application des majorations de retard et pénalités en cas de déclaration régularisatrice

Le décret du 11 octobre 2019 confirme le principe selon lequel l'employeur doit corriger, lors de l'échéance déclarative la plus proche, les erreurs constatées dans ses déclarations de cotisations et de contributions sociales des mois précédents. L'employeur doit alors verser à la même échéance le complément de cotisations et de contributions sociales. La correction peut intervenir de la propre initiative de l'employeur ou à la demande de l'organisme de recouvrement dont il relève.

En dehors des cas d'omission de salariés dans la déclaration ou d'inexactitudes répétées du montant des rémunérations déclarées, les majorations de retard et les pénalités ne sont pas applicables aux erreurs corrigées si l'une des conditions suivantes est remplie :

- la déclaration rectifiée et le versement de la régularisation correspondant au complément de cotisations et de contributions sociales sont adressés au plus tard lors de la première échéance qui suit celle de la déclaration et du versement initial ;

- le versement de régularisation est inférieur à 5 % du montant total des cotisations initiales ou, à compter du 1 er janvier 2020, le montant des majorations et pénalités qui seraient applicables est inférieur à la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale (3 428 euros).

2. Non-application des majorations de retard en cas de retard de paiement des cotisations

Actuellement, les majorations de retard et pénalités sont appliquées puis remises lorsque les trois conditions suivantes sont respectées :

- aucun retard de paiement dans les 24 derniers mois ;

- le montant des sanctions encourues est inférieur au plafond mensuel de la sécurité sociale (3 377 euros en 2019) ;

- les cotisations et contributions sociales sont acquittées dans un délai de 30 jours.

À compter du 1 er janvier 2020, les cotisants respectant ces mêmes conditions bénéficieront d'une non-application des majorations de retard initiales et complémentaires. Par ailleurs, la non-application des majorations aux cotisants ayant obtenu un accord de délai dans les 30 jours suivant la date d'exigibilité des cotisations, sera effective dès lors que les deux conditions tenant à l'absence de retard dans les 24 mois et au montant des sanctions encourues seront remplies.

3. Non-application des majorations de retard initiales suite à contrôle (à compter d'avril 2020)

À compter d'avril 2020, aucune majoration de retard initiale à l'issue d'un contrôle comptable d'assiette, d'un contrôle sur pièces ou d'un contrôle demandé par l'employeur ne sera appliquée, sauf dans deux types de situation (article R. 243-17 du code de la sécurité sociale) :

- application d'une majoration/pénalité au titre d'un abus de droit, de travail dissimulé ou d'obstacle à contrôle, de la non mise en conformité suite aux observations formulées lors d'un précédent contrôle ;

- montant des sommes redressées supérieur ou égal au plafond annuel de la sécurité sociale (40 524 euros pour 2019).

Source : Direction de la sécurité sociale

B. LA VOLONTÉ DU SÉNAT DE CRÉER UN DROIT À L'ERREUR AU PROFIT DE CERTAINES COLLECTIVITÉS DÈS L'EXAMEN DU PROJET DE LOI « ESSOC »

Si le nouvel article L. 123-1 du CRPA étend le bénéfice du droit à régularisation à « toute personne » dans ses relations avec l'administration, cette disposition doit être lue à la lumière des articles L. 100-1 et L. 100-3 du même code. Ils disposent respectivement que « le présent code régit les relations entre le public et l'administration » , que le mot « public » recouvre « toute personne physique » et « toute personne morale de droit privé, à l'exception de celles qui sont chargées d'une mission de service public lorsqu'est en cause l'exercice de cette mission » et que, a contrario , la catégorie de « l'administration » vise notamment « les collectivités territoriales » et « leurs établissements publics administratifs » . Ces dispositions rangent donc les collectivités territoriales et leurs groupements du côté de l'administration et non de celui du public et font ainsi obstacle à ce qu'ils bénéficient des dispositions de l'article L. 123-1 précité.

Face à ce constat, Sylvie Vermeillet, sénatrice du Jura (groupe Union Centriste), avait été à l'origine d'un amendement 5 ( * ) adopté par la commission spéciale du Sénat lors de l'examen en première lecture du projet de loi « ESSoC », tendant à étendre le bénéfice du droit à régularisation aux collectivités territoriales ou leurs groupements . Très proche de la présente proposition de loi, cet amendement tendait à introduire un nouvel article au sein du code général des collectivités territoriales (CGCT) rendant applicable les nouveaux articles du CRPA relatifs au droit à l'erreur, par dérogation à l'article L. 100-3 précité de ce code.

Les rapporteurs avaient déposé un sous-amendement qui tendait à restreindre l'accès à ce droit aux seules communes de moins de 3 500 habitants et aux groupements de moins de 10 000 habitants. Cet amendement avait finalement été retiré car, comme le soulignait alors Pierre-Yves Collombat, sénateur du Var (groupe Communiste républicain citoyen et écologiste), « toutes les entreprises [...] sont [concernées par le droit à l'erreur], quelle que soit leur taille. Pourquoi n'en irait-il pas de même pour les collectivités territoriales ? » 6 ( * ) .

L'article additionnel ainsi créé avait fait l'objet d'un amendement de suppression déposé en séance par le Gouvernement au motif que « le droit à l'erreur a été conçu pour renforcer la confiance du public dans l'administration quelle qu'elle soit. C'est pourquoi, ce droit a été inséré dans le code des relations entre le public et l'administration. L'étendre au bénéfice d'autres administrations risquerait de diluer l'objectif clairement affiché sur cette mesure centrale du projet de loi, qui s'adresse aux usagers dans leurs relations avec toutes les administrations et non aux relations entre administrations » 7 ( * ) .

Le Gouvernement relevait également qu' « il est difficile de percevoir quelles situations seraient concrètement concernées par cette extension du droit à l'erreur aux collectivités » 8 ( * ) et que « les préfectures assurent, dans le cadre du contrôle de légalité comme en dehors, des missions de conseil et d'appui juridique aux collectivités locales, notamment en faveur des plus petites d'entre elles, dans l'exercice de leurs compétences » 9 ( * ) .

Après l'échec de la commission mixte paritaire, l'article additionnel introduit par le Sénat a finalement été supprimé en nouvelle lecture, à l'Assemblée nationale, à la suite de l'adoption d'un amendement de commission à l'initiative des membres du groupe La République en Marche. Son exposé sommaire reprenait les arguments développés par le Gouvernement devant le Sénat, en première lecture 10 ( * ) .

Par la suite, trois amendements de séance reprenant un dispositif relativement similaire à celui qui avait été adopté par le Sénat lors de l'examen du projet de loi « ESSoC » ont été déposés par Jean-Yves Roux, sénateur des Alpes de Haute-Provence (groupe Rassemblement démocratique, social et européen) 11 ( * ) , et Hervé Maurey, sénateur de l'Eure (groupe Union Centriste) 12 ( * ) , à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique dit projet de loi « Engagement et proximité » . Une interrogation technique des rapporteurs les a conduits à demander l'avis du Gouvernement pour fonder celui de la commission des lois sur le sort à donner à ces amendements. Le Gouvernement s'est alors basé sur les arguments déjà avancés lors de l'examen de la loi « ESSoC » pour demander le retrait des amendements, estimant notamment que « leur adoption entraînerait de nombreux bouleversements : contrôle budgétaire, contrôle de légalité... Ces dispositions pourraient déstabiliser profondément beaucoup de choses. M. le rapporteur l'a dit, des mécanismes permettant de corriger certains effets de bord existent » 13 ( * ) . Les auteurs avaient alors retiré leurs amendements respectifs après avoir exprimé le souhait qu'ils soient examinés par le rapporteur de l'Assemblée nationale, en première lecture. Comme l'avait indiqué Hervé Maurey à Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales : « j'attends de votre part cet engagement. Il s'agit d'un vrai sujet, notamment pour ce qui concerne les organismes de sécurité sociale, comme la délégation sénatoriale aux collectivités locales l'avait souligné » 14 ( * ) . Aucun dispositif en ce sens n'a cependant été réintroduit dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

II. UN DROIT À L'ERREUR NÉCESSAIRE AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS LEUR NOUVEAU STATUT D'« USAGER »

A. DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DEVENUES À LA FOIS ADMINISTRATION ET USAGERS

1. Des collectivités territoriales soumises à un droit à la fois moins exorbitant et plus complexe

La Constitution de 1958 consacre les collectivités territoriales en tant que composante à part entière de la puissance publique , au côté de l'État. Son article 1 er affirme le caractère décentralisé de l'organisation de la République et l'article 72 prévoit que les collectivités territoriales s'administrent librement 15 ( * ) , sans tutelle de l'une sur l'autre 16 ( * ) , afin de « prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon » 17 ( * ) . À cette fin, elles « disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences » 18 ( * ) .

Les usagers perçoivent donc les collectivités territoriales comme un élément de l'administration, prise dans son sens général, puisqu'elles ont pour mission de prescrire et de faire appliquer des normes dans leurs champs de compétences géographique et matériel afin de garantir le caractère décentralisé de l'organisation de la République. Elles sont à ce titre formellement reconnues comme telle par l'article L. 100-3 du code des relations entre le public et l'administration.

La soumission des collectivités territoriales au droit n'est pas une spécificité en soi puisque la soumission des organes de puissance publique au droit est le fondement de la notion d'état de droit. L'application de ce principe aux collectivités est rarement mise en avant puisque les théories de l'état de droit ont émergé au XIX e siècle, époque à laquelle la puissance publique se confondait majoritairement avec le seul État 19 ( * ) . Toutefois, l'incarnation effective de la puissance publique par les collectivités semble conduire à leur appliquer mutatis mutandis les principes dégagés à l'époque.

Les changements récents à l'origine de la présente proposition de loi ne sont donc pas la soumission des collectivités au droit, mais bien la mutation du droit qui leur est applicable. Un retour de balancier est nettement perceptible. L'émergence du droit administratif s'est faite, à partir de la fin du XIX e siècle, par la construction jurisprudentielle d'un droit exorbitant applicable aux seules personnes morales de droit public et à certaines personnes morales de droit privé. Aujourd'hui, ce droit exorbitant existe toujours, mais il côtoie des règles applicables aux collectivités territoriales qui sont de plus en plus semblables aux règles de droit commun applicables aux personnes dépourvues de prérogatives de puissance publique.

Là où elles ne devaient respecter que des principes généraux du droit, les collectivités territoriales sont désormais soumises à des procédures de plus en plus formalisées et complexes , au même titre que certains acteurs économiques. C'est notamment le cas en matière de droit de la commande publique ou de la fonction publique.

Là où elles ne devaient respecter que des normes spéciales, les collectivités territoriales sont de plus en plus soumises aux mêmes règles que les acteurs économiques de droit commun . Comme les entreprises, elles perçoivent la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), paient des cotisations sociales et l'impôt sur les sociétés ou participent au prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Cette soumission aux mêmes règles les confrontent aux mêmes acteurs, telles que les URSSAF ou la direction générale des finances publiques (DGFIP), dont elles sont devenues, de fait, des usagers à part entière.

2. Des collectivités aux moyens parfois limités

Le rapporteur partage pleinement le constat opéré par les auteurs de la présente proposition de loi selon lequel « le risque pour une collectivité locale de commettre des erreurs et même de voir sa responsabilité engagée s'est accru avec la multiplication des normes et la complexification des procédures administratives à respecter. Cette situation est aggravée avec la baisse de leurs ressources sous l'effet de la diminution des dotations de l'État qui les a contraintes à réduire leurs moyens humains et juridiques, d'autant que, dans le même temps, les services déconcentrés de l'État se désengagent de plus en plus de leurs missions de conseil et d'appui juridique des collectivités locales » 20 ( * ) .

L'augmentation de la complexité du droit que les collectivités doivent respecter, rapportée à l'insuffisance de leurs moyens, devrait légitimement conduire à leur ouvrir le bénéfice d'un droit à l'erreur, au même titre que les autres administrés.

B. UN DROIT À L'ERREUR VENANT UTILEMENT COMPLÉTER LES DISPOSITIFS EXISTANTS EN FAVEUR DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Des droits à l'erreur « spéciaux » s'appliquant déjà aux collectivités territoriales

Les arguments développés par le Gouvernement et les députés de la majorité à l'Assemblée nationale, au cours de l'examen de la loi « ESSoC », pour priver les collectivités d'un droit général à la régularisation ne semblent pas tenir devant l'évidence des faits puisque les collectivités territoriales bénéficient déjà de droits similaires prévus par des textes spéciaux .

La direction des affaires juridiques des ministères économiques et financiers souligne, à juste titre, que les collectivités territoriales et leurs groupements « peuvent déjà se prévaloir du droit à la régularisation de [leurs] erreurs en matière d'impôts, applicable à tout contribuable en vertu de l'article L. 62 du livre des procédures fiscales » 21 ( * ) (voir supra ). Le constat est le même en matière sociale puisque les collectivités territoriales ou leurs groupements semblent assimilés aux « employeurs » visés par les dispositions du code de la sécurité sociale lorsqu'ils sont amenés à verser des cotisations sociales. En effet, les agents non titulaires ne bénéficient d'aucun régime spécial de sécurité sociale et sont soumis de plein droit au code de la sécurité sociale.

Interrogée par le rapporteur, la direction de la sécurité sociale (DSS) 22 ( * ) a confirmé ce constat. Elle a ajouté que l'application des dispositions du décret du 11 octobre 2019 précité aux collectivités territoriales se fondait sur l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale en ce qui concerne le contrôle des URSSAF et les majorations applicables en cas de redressement. Cet article dispose que « le contrôle de l'application des dispositions du présent code par les employeurs, personnes privées ou publiques y compris les services de l'État autres que ceux mentionnés au quatrième alinéa, par les travailleurs indépendants ainsi que par toute personne qui verse des cotisations ou contributions auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général est confié à ces organismes » . Il en résulte que les dispositions réglementaires qui garantissent des droits aux employeurs ou créent des obligations pour les URSSAF s'appliquent aussi aux collectivités territoriales.

La DSS précise également que le décret du 11 octobre 2019 précité s'appliquera aux collectivités territoriales pour les pénalités qu'elles pourraient éventuellement recevoir en cas de non-transmission de la déclaration sociale nominative (DSN) créée par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives. Le code de la sécurité sociale impose en effet cette transmission aux collectivités territoriales en tant qu'il vise « tout employeur de personnel salarié ou assimilé » 23 ( * ) . Elles bénéficieront donc du nouvel article R. 243-11 du code de la sécurité sociale qui dispose que les pénalités ne seront pas dues si la déclaration a été transmise dans les trente jours, si « aucun retard de paiement n'a été constaté au cours des vingt-quatre mois précédents » et si « le montant des majorations et pénalités qui seraient applicables est inférieur à la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale » .

Qu'est-ce que la DNS ?

La DSN, ou déclaration sociale nominative, est un fichier mensuel produit à partir de la paie, destiné à communiquer les informations nécessaires à la gestion de la protection sociale des salariés aux organismes et administrations concernés. Elle permet de remplacer l'ensemble des déclarations périodiques ou événementielles et diverses formalités administratives adressées jusqu'à aujourd'hui par les employeurs à une diversité d'acteurs (CPAM, URSSAF, AGIRC ARRCO, organismes complémentaires, Pôle emploi, centres des impôts, caisses régimes spéciaux, etc. ).

La DSN repose sur la transmission unique, mensuelle et dématérialisée des données issues de la paie et sur des signalements d'événements.

Les données transmises dans la DSN mensuelle sont donc le reflet de la situation d'un salarié au moment où la paie a été réalisée. En complément, elle relate les évènements survenus (maladie, maternité, changement d'un élément du contrat de travail, fin de contrat de travail...) dans le mois ayant eu un impact sur la paie.

La DSN réduit les risques d'erreur et la charge de travail déclarative.

Source : site internet http://www.dsn-info.fr/index.htm mis en place par le GIP-MDS
(groupement d'intérêt public modernisation des déclarations sociales

2. La création d'un nouveau rescrit en faveur des collectivités territoriales

S'inspirant des dispositions de la loi « ESSoC » développant les procédures de rescrits en faveur des usagers 24 ( * ) , la récente loi « Engagement et proximité » est venue consacrer un rescrit préfectoral au bénéfice des collectivités territoriales 25 ( * ) au sein du code général des collectivités territoriales (CGCT). Son nouvel article L. 1116-1 dispose que, « avant d'adopter un acte susceptible d'être déféré au tribunal administratif, les collectivités territoriales ou leurs groupements ainsi que leurs établissements publics peuvent saisir le représentant de l'État chargé de contrôler la légalité de leurs actes d'une demande de prise de position formelle relative à la mise en oeuvre d'une disposition législative ou réglementaire régissant l'exercice de leurs compétences ou les prérogatives dévolues à leur exécutif » . Si l'acte pris par la collectivité est conforme à la prise de position formelle, le représentant de l'État ne peut plus le déférer au tribunal administratif, sauf changement de circonstances. Les modalités d'application de ce nouvel article doivent être fixées par un décret en Conseil d'État dont l'entrée en vigueur subordonne celle de la disposition législative, en application de l'article 1 er du code civil.

Cette disposition ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif soit saisi par toute personne remplissant les conditions d'intérêt et de qualité à agir . Comme le soulignaient les rapporteurs du projet de loi, Françoise Gatel, sénatrice d'Ille-et-Vilaine (groupe Union Centriste) et Mathieu Darnaud, sénateur de l'Ardèche (groupe Les Républicains), cette procédure « s'inscrit dans le cadre d'un dialogue déjà nourri, articulé autour du contrôle de légalité des actes adoptés par les collectivités » 26 ( * ) .

Contrôle de légalité et dialogue entre État et collectivités territoriales

Le contrôle de légalité des actes adoptés par les collectivités territoriales est l'occasion pour elles d'un dialogue avec le représentant de l'État se déroulant en deux temps :

a) avant l'adoption de l'acte : des contacts informels entre collectivités et services des préfectures existent d'ores et déjà et peuvent apporter une première sécurisation juridique des actes des collectivités. Le conseil ainsi donné n'est cependant pas encadré et ne lie pas le préfet. Il repose essentiellement sur des liens de confiance entre le préfet et les collectivités ;

b) après l'adoption de l'acte : en cas d'illégalité constatée par les services de la préfecture dans le cadre du contrôle de légalité, les lettres d'observation transmises par le préfet à la collectivité permettent de corriger certaines erreurs ou de lever des incompréhensions.

III. LA CRÉATION D'UN DROIT À L'ERREUR POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET LEURS GROUPEMENTS : UNE DÉMARCHE SOUTENUE PAR LA COMMISSION DES LOIS

Suivant la proposition du rapporteur, la commission des lois a décidé de soutenir l'objectif poursuivi par la présente proposition de loi qui reprend majoritairement des dispositions déjà adoptées par le Sénat à l'occasion de l'examen de la loi « ESSoC » 27 ( * ) .

La présente proposition de loi est cosignée par 85 sénateurs des groupes Les Républicains et Union Centriste. En outre, l'amendement n° 251 précité déposé lors de l'examen du projet de loi « Engagement et proximité » et dont le dispositif était identique à celui de la présente proposition de loi, avait été cosigné par la très grande majorité de des sénateurs membres du groupe Rassemblement démocratique et social européen 28 ( * ) . Ce dispositif a donc été directement appelé de ses voeux par près du tiers des membres du Sénat au cours de la session en cours.

À l'initiative du rapporteur, la commission n'a donc apporté au texte que des modifications visant à en étendre la portée ou à en améliorer l'efficacité. En ce sens, la commission a adopté l'amendement COM-1 de son rapporteur après avoir recueilli l'accord de nos collègues Hervé Maurey et Sylvie Vermeillet, premiers signataires de la présente proposition de loi.

A. L'ÉLARGISSEMENT ET LA CLARIFICATION DU CHAMP D'APPLICATION DE LA PROPOSITION DE LOI INITIALE

1. La création d'un droit à l'erreur autonome

La commission a tenu à clarifier le champ d'application de la proposition de loi en supprimant le renvoi opéré aux dispositions du CRPA dans sa rédaction initiale. En effet, les dispositions du CRPA doivent être lues à la lumière de ses articles L. 100-1 et suivants précités qui en précisent le champ d'application. Or, les dispositions que la proposition de loi initiale tendait à inscrire dans le CGCT comprenaient également certaines dispositions relatives à leur champ d'application. Afin de supprimer toute ambiguïté, la commission a donc décidé de supprimer le renvoi et d'inscrire le nouvel article « en dur » au sein du seul CGCT.

La suppression de ce renvoi a également une portée symbolique puisqu'elle permet de créer un droit à l'erreur autonome applicable aux collectivités parfaitement détachable de celui créé par la loi « ESSoC » au sein du CRPA. Il ne sera donc pas possible de reprocher au Sénat d'assimiler les collectivités au « public » à qui est destiné ce code.

2. L'élargissement du droit à l'erreur à l'ensemble des collectivités et leurs groupements

À l'initiative du rapporteur, la commission a également élargi le bénéfice de la proposition de loi à l'ensemble des collectivités territoriales et leurs groupements et non plus seulement aux communes et à leurs groupements. Reprenant le sens de la rédaction adoptée par le Sénat à l'occasion de l'examen de la loi « ESSoC », elle considère en effet que les difficultés rencontrées par ces collectivités ou groupements ne dépendent pas nécessairement de leur nature et qu'il convient d'ouvrir ce nouveau droit à l'ensemble d'entre eux. Comme l'a indiqué l'Assemblée des départements de France, « les départements ne disposent pas non plus tous des mêmes moyens : les plus petits d'entre eux manquent aussi de compétences et de ressources pour recruter des experts. Ils sont, de la même façon que les communes et leurs groupements, confrontés à la complexification des textes, et des problématiques (fiscales, sociales....) et à la disparition et au manque de moyens des services d'État pour les accompagner et leur apporter leur appui et leur expertise » 29 ( * ) .

B. DES ADAPTATIONS TECHNIQUES POUR UNE MEILLEURE PROTECTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE LEURS GROUPEMENTS

1. La reprise des exclusions prévues par le CRPA

Afin de définir le champ d'application des dispositions introduites dans le CGCT, la commission a repris la liste des exclusions prévues à l'article L. 123-1 du CRPA qui vise notamment les « sanctions requises pour la mise en oeuvre du droit de l'Union européenne » ou les « sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement » . Ces exclusions sont essentiellement dictées par le respect de normes internationales ou le maintien de l'ordre public. Elles trouvent donc à s'appliquer au droit à l'erreur des collectivités territoriales et de leurs groupements.

2. Une supplétivité de la mesure conditionnée à la protection équivalente des collectivités et de leurs groupements

La suppression du renvoi au CRPA a conduit la commission à réintroduire dans sa nouvelle rédaction la supplétivité des dispositions de la proposition de loi 30 ( * ) afin qu'elles ne viennent pas faire obstacle aux droits à l'erreur spéciaux qui bénéficient déjà aux collectivités et à leurs groupements en matière fiscale et sociale. Là où le CRPA prévoit que ses dispositions ne s'appliquent qu' « en l'absence de dispositions spéciales applicables » 31 ( * ) , la commission a souhaité donner un sens encore plus protecteur à la présente proposition de loi en prévoyant que le droit spécial ne s'appliquera que s'il a « pour objet ou pour effet d'assurer une protection équivalente » à celle conférée par le nouveau droit à l'erreur créé au sein du CGCT .

3. La suppression de la notion de « première fois » inapplicable aux collectivités territoriales et la simplification de la notion de mauvaise foi

Alors que l'article L. 123-1 du CRPA ne s'applique qu'à une personne « ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation », la commission a souhaité supprimer cette notion de première fois. Elle trouve difficilement à s'appliquer à une personne morale de droit public réputée « immortelle » et poserait des problèmes d'interprétation en cas de fusion ou de création de nouvelles collectivités. L'absence de sanction resterait néanmoins subordonnée à l'absence de fraude ou de manquement délibéré de la part de la collectivité ou du groupement en cause.

Enfin, la commission a préféré ne pas reprendre la notion de mauvaise foi mentionnée à l'article L. 123-1 du CRPA mais directement introduire la définition détaillée qui en est donnée à l'article L. 123-2 du même code : « Est de mauvaise foi, au sens du présent titre, toute personne ayant délibérément méconnu une règle applicable à sa situation » .

*

* *

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN EN COMMISSION

__________

MERCREDI 8 JANVIER 2020

M. Philippe Bas , président . - Nous examinons la proposition de loi visant à créer un droit à l'erreur des collectivités locales dans leurs relations avec les administrations et les organismes de sécurité sociale, présentée par Hervé Maurey, Sylvie Vermeillet, et plusieurs de leurs collègues. Le groupe Union Centriste (UC) s'est saisi avec opportunité de ce sujet porteur pour les maires. La commission des lois a désigné Philippe Bonnecarrère sur ce texte.

M. Philippe Bonnecarrère , rapporteur . - Monsieur le président, ce sens de l'opportunité que vous prêtez au groupe Union Centriste répond au vôtre, puisque vous avez choisi d'examiner en ce début d'année une proposition de loi visant à créer un droit à l'erreur pour les collectivités territoriales, ce qui est une façon de nous rappeler que nous sommes perfectibles et de nous inviter à commettre le moins d'erreurs possible cette année.

Il nous faut nous interroger sur le droit à l'erreur pour les collectivités territoriales, si d'aventure celles-ci en commettaient. Je précise que, en tant que tel, le droit à l'erreur n'existe pas en droit positif, même si, dans la pratique, l'expression est couramment utilisée ; en revanche, il existe un droit à régulariser en cas d'erreur déjà ouvert à l'ensemble des particuliers et entreprises.

Sur cette question, je proposerai le vade-mecum suivant : pas plus, pas moins et pas d'impunité. En effet, il ne s'agit pas de donner aux collectivités plus de droits que n'en ont nos concitoyens ; pour autant, il s'agit de ne pas leur en donner moins.

À quoi correspond le droit à l'erreur ? Il a beaucoup été évoqué en 2018, lors de l'examen de la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite loi ESSoC. Il a fait l'objet d'une généralisation à tous les usagers. Ce principe est désormais inscrit aux articles L. 123-1 et L. 123-2 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA), sous réserve qu'il n'y ait pas de mauvaise foi et que la situation soit régularisée à l'initiative de l'intéressé ou sur invitation de l'administration. La mauvaise foi, notion qui fait l'objet d'une définition, doit être prouvée par l'administration.

Il s'agit donc d'une mesure favorable aux usagers. Pour autant, les dispositions du code des relations entre le public et l'administration ne trouvent pas application lorsqu'existent des dispositions spéciales, notamment en matière fiscale et sociale.

La question qui se pose pour les collectivités locales est la suivante : si un droit à l'erreur est prévu pour M. Tout-le-Monde, ce M. Tout-le-Monde ne pourrait-il pas être une commune et la commune ne pourrait-elle pas bénéficier de ce droit à l'erreur ?

Lorsque cette question a été posée en séance publique, au moment de l'examen de la loi ESSoC, la réponse du Gouvernement a été négative. C'est pourquoi les différents amendements visant à étendre ce droit aux collectivités locales ont été soit directement rejetés par le Sénat, soit écartés par l'Assemblée nationale lorsqu'ils avaient été adoptés au Sénat. Voilà qui a achevé de nous convaincre qu'il y avait un problème sur ce sujet.

En effet, la réponse du Gouvernement n'avait pas été d'une extrême précision : elle consistait à dire que les collectivités étaient d'abord des administrations, des collectivités publiques soumises à un droit dérogatoire ; elles ne pouvaient donc être concernées. Cette justification a renforcé l'idée de nos collègues du groupe UC et de notre collègue du groupe du RDSE de prendre l'initiative de rédiger plusieurs amendements et une proposition de loi en ce sens. Nous sommes en effet dans une situation paradoxale : si les collectivités territoriales sont un élément de l'administration prise dans son sens général, de plus en plus, elles sont des usagers, notamment en matière fiscale et sociale. À ce titre, elles paient de la TVA, et l'impôt sur les sociétés, de même qu'elles font des déclarations à l'Urssaf, lorsqu'elles emploient des agents contractuels.

Pour les amoureux du droit public, cela ne manque pas d'intérêt : alors que, pendant un siècle et demi, les collectivités ont aspiré à un statut dérogatoire, comme l'ensemble de l'administration française, nous assistons aujourd'hui à un retour du balancier, les collectivités demandant à être traitées comme M. Tout-le-Monde et à bénéficier du droit commun.

Pour autant, les collectivités sont-elles victimes d'un traitement discriminatoire lorsqu'elles commettent des erreurs ? La réponse est négative, je l'ai vérifié auprès du monde social ou de l'administration fiscale. Cela s'explique par le fait qu'il existe des textes spéciaux et des dispositions particulières en matière fiscale et sociale prévoyant des modalités de régularisation. La loi ESSoC les a élargies et a, en outre, prévu des conditions d'extension des modalités de régularisation jusqu'au moment du contrôle fiscal. Elles bénéficient également des mêmes modalités de régularisation pour l'Urssaf et les organismes sociaux. Un décret a été publié en ce sens le 11 octobre 2019, réécrivant certains articles de la partie réglementaire du code de la sécurité sociale afin de développer les modalités de régularisation. Ainsi, lorsqu'un cotisant régularise dans les délais, il ne se voit pas infliger de majoration ou d'indemnités de retard. L'Urssaf comme l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) font application de ce décret aux collectivités locales sans réserve.

Par ailleurs, dans certaines dispositions que nous avons adoptées en fin d'année dernière et qui ont été promulguées in extremis , vous avez créé un rescrit préfectoral, qui permet de réduire les risques d'erreur pour les collectivités territoriales.

Du point de vue pratique, il est donc difficile de dire que les collectivités territoriales ne bénéficient pas d'un droit à l'erreur ; celui-ci leur est appliqué en matière sociale et fiscale, quand elles sont des usagers.

Toutefois, la vie est aussi faite de symboles et le Sénat, comme représentant des territoires, peut prêter attention à l'idée d'inscrire dans la loi ce droit à l'erreur, même si les collectivités en bénéficient déjà dans les faits.

Selon que vous serez attachés aux symboles ou que vous vous souviendrez de Portalis exigeant que la loi ne soit pas trop bavarde, vous ferez votre choix. Quant à moi, je vous suggère de retenir la valeur des symboles.

Si vous le faites, il vous faudra alors éviter de prêter le flanc au reproche, émis par le Gouvernement lors des discussions précédentes, de créer une confusion dans le CRPA entre la forme administrative d'une collectivité et son statut d'usager. Je vous propose d'oublier le CRPA et de prévoir un droit à l'erreur autonome pour les collectivités territoriales inscrit dans leur propre code : le code général des collectivités territoriales (CGCT).

En outre, je propose de nous garder de ne considérer que les seules communes et de décider qu'une telle mesure a vocation à concerner toutes les collectivités territoriales et leurs groupements, départements, régions, etc. Les départements, en particulier, ont eu la courtoisie de nous dire que cela pouvait être intéressant, notamment pour les plus modestes d'entre eux, qui ne disposent pas toujours de service juridique d'envergure.

Ensuite, je vous propose de ne pas faire de bêtise, c'est-à-dire d'éviter de priver les collectivités territoriales, du fait d'une rédaction générale, de mesures existantes qui leur sont favorables. Nous pourrions faire cela par voie d'amendement selon deux axes, d'une part, en décidant que ne devront être applicables aux collectivités territoriales que les dispositions spéciales offrant une protection au moins équivalente aux dispositions générales que nous créons ; d'autre part en reprenant les exceptions existantes dans le CRPA, qui concernent notamment les sanctions en matière de droit de l'Union européenne ainsi que de méconnaissance des règles en matière de santé publique ou de sécurité des personnes. Si vous me permettez cette expression diplomatique, le premier axe revient à appliquer aux collectivités territoriales une « clause de la nation la plus favorisée ».

Enfin, dans le CRPA, ces mesures s'appliquent quand M. et Mme Tout-le-Monde commettent une erreur « pour la première fois ». Cette notion nous paraît compliquée à appliquer aux collectivités territoriales, car il nous semble difficile, malgré le principe de continuité, de les rendre comptables de ce qui aura été fait parfois des années auparavant. En outre, dans le cas des communes nouvelles, par exemple, nous ne voyons pas comment leur opposer les actes de chacune des communes qui les précédaient. Nous avons donc choisi de supprimer purement et simplement cette notion en ce qui concerne les collectivités.

Pour terminer, il me revient d'expliciter le champ d'application de la proposition de loi pour permettre le dépôt d'amendements de séance ne contrevenant pas à l'article 45 de la Constitution. Le champ de cette proposition de loi se limite donc aux relations entre, d'un côté, les collectivités et leurs groupements et, de l'autre, les administrations de l'État, ses établissements publics administratifs et les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d'une mission de service public administratif.

M. Jean-Pierre Sueur . - C'est énorme !

M. Philippe Bonnecarrère , rapporteur . - En effet !

M. Jean-Pierre Sueur . - Il faut donc maintenant que chaque rapporteur définisse le champ de son texte ? Il me semble pourtant que celui-ci est défini par le texte lui-même et son objet. Cet exercice me semble redondant, et ne vise qu'à fournir une sorte de paratonnerre contre les amendements qui ne seraient pas reçus. Nous devrions avoir une vision plus ouverte de ces dispositions et ne pas nous rendre victimes de cette interprétation.

M. Philippe Bas , président . - Notre rapporteur met ainsi en oeuvre une procédure qui est appliquée avec constance depuis l'année dernière à l'initiative du président du Sénat après délibération de la Conférence des Présidents, dans lequel tous les groupes sont représentés, et qui consiste à ouvrir autant qu'il est possible le dépôt d'amendements en explicitant le champ au sein duquel ceux-ci seront recevables. La présentation faite par notre rapporteur montre d'ailleurs à quel point ce champ est vaste.

M. Philippe Bonnecarrère , rapporteur . - Il s'agit en effet d'expliciter et non de définir. Imaginez le bonheur complet du rapporteur : il représente déjà le Sénat et la Nation, et, par cet exercice, il reçoit de surcroît une petite parcelle d'onction constitutionnelle !

M. Jean-Pierre Sueur . - La Conférence des Présidents a délibéré et je continue à penser ce que je pense.

M. Jean-Yves Leconte . - Sur ce sujet, il me semble que la commission et son rapporteur disposent également d'une sorte de droit à l'erreur.

Dans le cadre du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, le cadrage de la commission des lois a empêché le dépôt de certains amendements concernant les Français de l'étranger. Ceux-ci ont pourtant pu être déposés par nos collègues à l'Assemblée nationale et y être défendus, sans qu'un débat parlementaire complet soit possible à leur endroit.

Il est logique de se préoccuper du respect de la Constitution, mais la manière dont on le fait empêche parfois des débats, en commission comme en séance, alors même que ceux-ci ont lieu à l'Assemblée nationale. Cela me semble poser problème. Dans le cas que j'ai à l'esprit, cette situation a été évoquée jusqu'en commission mixte paritaire : des amendements déposés à l'Assemblée nationale ont prospéré et ont conduit à changer la loi, alors que nous n'avons pas pu en débattre ici. Il me semble important de veiller à éviter cette situation, car il n'est pas exclu que le Conseil constitutionnel soit un jour saisi de l'impossibilité faite à une chambre de débattre d'un sujet alors que l'autre aura pu le faire.

M. Alain Richard . - Cela ne saurait se produire car il ne peut y avoir de question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dans cette circonstance. Le respect de la procédure législative ne fait pas partie des « droits et libertés que la Constitution garantit » visés à l'article 61-1 de la Constitution.

M. Jean-Yves Leconte . - Le texte peut-être soumis au Conseil constitutionnel avant sa promulgation !

M. Philippe Bas , président . - Jean-Yves Leconte fait allusion à un amendement concernant les Français de l'étranger qu'il avait déposé sur le projet de loi Engagement et proximité, et dont il regrette que le champ d'application du texte n'ait pas permis d'en admettre la recevabilité, alors même que l'Assemblée nationale a pu en débattre.

Mon cher collègue, l'une des deux assemblées a sans doute été laxiste, et ce n'est pas la nôtre. Sur ce point, notre interprétation de l'article 45 est parfaitement conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Le texte en question est d'ailleurs entré au Sénat avec 28 articles et en est ressorti avec 120 articles. Quelques-uns d'entre eux provenaient d'amendements du Gouvernement, mais il a tout de même bien fallu que vous exerciez un large droit d'amendement pour parvenir à ce résultat. Peut-être même avons-nous été trop souples... Je vous rappelle que nos concitoyens et nos maires se plaignent d'un afflux de normes. Ne confondons pas la loi et un arrêté préfectoral. Le désir de faire avancer la réforme nous tient tous à coeur, mais il nous faut tenir compte de l'intérêt d'une législation maîtrisée. Il ne s'agit pas de nous plier aux injonctions du Conseil constitutionnel, mais de respecter la Constitution, laquelle a raison de nous indiquer que le débat parlementaire doit être organisé.

Le droit d'amendement s'exprime très largement et un amendement concernant les délégués consulaires n'a pas sa place dans un texte sur les collectivités locales, l'article 45 ne nous laisse pas de marge de manoeuvre à ce sujet. Ce que fait l'Assemblée nationale la regarde, nous avons, quant à nous, la réputation d'être une assemblée respectueuse des principes fondamentaux de notre droit : n'y renonçons pas.

M. Jean Louis Masson . - Sur le fond, je suis d'accord avec vous, monsieur le président, mais tout dépend de l'interprétation qui est faite. Nous avions ainsi décidé que la question de savoir s'il devait ou non y avoir une photo sur un bulletin de vote relevait de la loi, alors que l'article 45 a été opposé à un amendement relatif à l'utilisation des trois couleurs bleu-blanc-rouge sur les circulaires électorales. À ce sujet, un décret récent a d'ailleurs repris mot pour mot l'amendement que j'avais déposé. Quant à moi, je ne vois pas la différence entre ces dispositions au regard de l'article 45.

Le vrai problème dans cette enceinte, c'est que l'article 45 a divers usages : parfois, il est pratique de « zapper » ainsi une proposition, d'autres fois, on souhaite rendre service à l'auteur d'un amendement. Une clarification me semble donc nécessaire, même si, sur le fond, vous avez raison. Dans le cas d'espèce, je partage l'avis du rapporteur, mais je ne peux pas m'associer à l'utilisation de l'article 45 pour se débarrasser d'un amendement, alors qu'on en accepte d'autres du même type.

M. Philippe Bas , président. - En matière de recevabilité, le travail accompli par nos rapporteurs, avec l'assistance de nos administrateurs, consiste généralement à admettre le plus grand nombre possible d'amendements. Au reste, mon cher collègue, je pense que votre amendement pouvait poser problème au niveau de la recevabilité au titre de l'article 41 relatif au domaine de la loi comme de l'article 45 de la Constitution.

Il me semble que, professions de foi et bulletins de vote ne sont pas toujours traités de la même façon par notre droit : le bulletin de vote est assorti de garanties importantes, d'ordre législatif. Quoi qu'il en soit, je me réjouis que vous ayez réussi à faire avancer votre proposition par la voie réglementaire - ce qui prouve bien que, lorsqu'un amendement est déclaré irrecevable, la question de fond peut néanmoins être traitée dans de bonnes conditions.

Mais revenons à notre débat. Cette proposition de loi est une initiative politique qui paraît très opportune, au moins sur le plan symbolique. Notre rapporteur l'a éclairée avec une objectivité et une impartialité dignes d'éloges.

On parle souvent, de nos jours, de signaux faibles : il s'agit, en l'occurrence, d'un signal fort, que le groupe Union Centriste, l'ensemble de la majorité sénatoriale et tous ceux qui voudront s'y associer sont invités à adresser à nos élus, lesquels ont bien besoin qu'on leur témoigne du soutien. Ce signal fort s'adresserait aussi aux administrations, en vue de traiter avec égards, face à la multiplication des normes, les responsables de collectivités territoriales. Ceux-ci ont besoin d'être aidés plutôt que censurés !

Mme Brigitte Lherbier . - Je tiens seulement à apporter une nuance à la proposition présentée. Bien entendu, il peut être tout à fait normal que des situations soient régularisées dans l'esprit du droit à l'erreur. Néanmoins, placer des collectivités territoriales sur le même plan que des personnes privées me heurte quelque peu. S'il faut soutenir les petites communes, je crains que, s'agissant des grands services juridiques et financiers des régions ou des départements, cela ne conduise à en déresponsabiliser les hauts fonctionnaires.

M. Jérôme Durain . - Je félicite à mon tour le rapporteur, dont le travail est très documenté sur le plan théorique comme sur les conséquences pratiques du dispositif proposé.

Lors du débat sur la loi ESSoC, nous étions résolument favorables à l'extension du droit à l'erreur à l'ensemble des collectivités territoriales. Un amendement de la rapporteure de ce texte visait à distinguer deux catégories de collectivités. Nous étions, nous, pour une extension maximale, considérant qu'un principe de droit commun devait s'appliquer à tous. Notre position est inchangée.

À l'époque, le Gouvernement avait argué d'un risque de dilution du principe, qui devait être réservé aux particuliers. Nous continuons de réfuter cette conception. De même, nous estimons que l'idée de la première fois n'aurait pas de sens appliquée aux collectivités territoriales et nous ne considérons pas que le rescrit rendrait le droit à l'erreur inutile.

Nous sommes donc très favorables à l'extension de ce droit à l'ensemble des catégories de collectivités. Les explications du rapporteur sur la clause de la collectivité la plus favorisée sont également de bon sens, de même que l'autonomisation du principe dans le code général des collectivités territoriales.

Nous avons débattu, entre nous, de l'expression « droit à l'erreur », qui vise en fait un droit à la rectification d'erreur. Pour le particulier, il s'agit d'une corde de rappel, d'une forme de bienveillance de l'administration. S'agissant de collectivités territoriales, veillons à ce que ce principe ne soit pas compris comme un privilège, comme un droit à la distraction, à la négligence ou à l'incompétence, voire un blanc-seing à la phobie administrative. Nous reviendrons en séance sur cette question sémantique, qui n'est pas anodine.

M. Philippe Bonnecarrère , rapporteur. - Monsieur le président, vous avez parfaitement résumé l'esprit de ce texte : que les collectivités territoriales soient traitées avec égards.

Madame Lherbier, la question que vous soulevez a déjà été débattue dans le cadre de l'examen de la loi ESSoC. Le Sénat s'était prononcé contre l'instauration d'un seuil. Notre collègue Pierre-Yves Collombat, défenseur reconnu des communes rurales, avait insisté à juste raison sur l'universalité du principe. D'ailleurs, s'agissant des entreprises, aucun seuil d'effectif ou de chiffre d'affaires n'a été prévu pour qu'elles bénéficient du droit à l'erreur.

Monsieur Durain, je vous remercie pour votre soutien à la proposition de loi. S'agissant de son interprétation par l'opinion publique, j'ai commencé mon propos liminaire en insistant sur ce principe : pas plus de droits pour les collectivités territoriales que pour M. ou Mme Tout-le-Monde, mais pas moins. Pas d'impunité, donc, mais la garantie pour les collectivités de ne pas être traitées plus défavorablement que les autres usagers en cas d'erreur.

Au reste, les dispositions reprises du code des relations entre le public et l'administration garantissent l'absence d'impunité : la régularisation ne sera pas possible en cas de fraude ou de méconnaissance délibérée de la règle, et les règles préservant directement la santé publique ou la sécurité des personnes, des biens ou de l'environnement seront exclues du champ du dispositif.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

M. Philippe Bas , président. - L'amendement COM-1 , tendant à rédiger l'article unique de la proposition de loi, est présenté par M. le rapporteur.

L'amendement COM-1 est adopté.

En conséquence, la proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article unique

M. BONNECARRÈRE, rapporteur

1

Réécriture de l'article unique

Adopté

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Mme Olga Mamoudy , professeure des universités, professeure de droit public

URSSAF - Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

Mme Christine Cambus , directrice adjointe de la réglementation, du recouvrement et du contrôle (DIRREC), en charge de la réglementation et de la sécurisation juridique

M. Samuel Zapata , directeur de cabinet du directeur général

Ministère de l'action et des comptes publics

Direction générale des finances publiques (DGFiP) - Service juridique de la fiscalité

M. Edouard Marcus , chef du service

M. Etienne Duvivier , sous-directeur en charge de la gestion comptable et financière des collectivités locales au service des collectivités locales

Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Direction générale des collectivités locales (DGCL) - Sous-direction des compétences et des institutions locales (SDCIL)

M. Frédéric Papet , sous-directeur

Mme Marine Fabre , chef du bureau du contrôle de légalité et du conseil juridique

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Direction des affaires juridiques des ministères économiques et financiers

Direction de la Sécurité sociale (DSS)

Assemblée des Départements de France (ADF)

Association des directeurs généraux des communautés de France (ADGCF)


* 1 Au cours d'une vérification de comptabilité (contrôle sur pièces et sur place), ou d'un examen de comptabilité (contrôle à distance).

* 2 Article 1727 du code général des impôts.

* 3 Rapport n° 329 (2017-2018) de Mme Pascale Gruny et M. Jean-Claude Luche, fait au nom de la commission spéciale, déposé le 22 février 2018, page 26.

* 4 Ibidem , page 28.

* 5 Amendement COM-62.

* 6 Extrait du compte rendu de la réunion de la commission spéciale du mercredi 21 février 2018, disponible à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20180219/cs_confiance.html#toc2

* 7 Exposé sommaire de l'amendement n° 37 déposé en séance par le Gouvernement.

* 8 Ibidem .

* 9 Ibidem .

* 10 Amendement de commission n° 67.

* 11 Amendement n° 251.

* 12 Amendements n os 687 et 688.

* 13 Extrait du compte rendu intégral de la séance du 17 octobre 2019.

* 14 Ibidem .

* 15 Article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, alinéa 3.

* 16 Article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, alinéa 5.

* 17 Article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, alinéa 2.

* 18 Article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, alinéa 3.

* 19 Le concept d'État de droit semble apparaître chez le doyen Léon Duguit, dans les années 1910, puis dans son Traité de droit constitutionnel , en 1923. Voir également, Contribution à la théorie générale de l'État, 1920.

* 20 Extrait de l'exposé des motifs de la proposition de loi.

* 21 Extrait de la contribution écrite transmise le 30 décembre 2019.

* 22 Direction de la sécurité sociale du ministère des solidarités et de la santé.

* 23 Article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale.

* 24 L'article 21 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance dite loi « ESSoC » crée une douzaine de procédures de rescrits sectoriels.

* 25 Article 74 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

* 26 Rapport n° 12 (2019-2020) de M. Mathieu Darnaud et Mme Françoise Gatel, fait au nom de la commission des lois, déposé le 2 octobre 2019, page 173.

* 27 L'article 2 bis A du projet de loi « ESSoC » adopté par le Sénat visait les collectivités territoriales et leurs groupement alors que la proposition de loi initiale ne visait que les communes et leurs groupements.

* 28 19 signataires sur les 23 membres que compte le groupe.

* 29 Extrait de la contribution écrite transmise le 6 janvier 2020.

* 30 Cette supplétivité est mentionnée à l'article L. 100-1 du CRPA à la lumière duquel l'article L. 123-1 du même code doit être lu.

* 31 Article L. 100-1 du CRPA.

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