C. LA RÉFORME DE LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE ET LE DURCISSEMENT DES CONTRÔLES DÉONTOLOGIQUES
1. La réforme de la haute fonction publique
Très général, l'article 22 du projet de loi tend à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour :
- « organiser le rapprochement et modifier le financement » des acteurs de la formation ;
- réformer les modalités de recrutement et de formation des corps et agents de catégorie A ;
- renforcer la formation des agents les moins qualifiés, des travailleurs handicapés et des « agents les plus exposés aux risques d'usure professionnelle ».
En réalité, cette habilitation constituerait le fondement des travaux de la mission confiée par le Président de la République à M. Frédéric Thiriez pour réformer la haute fonction publique .
Sur le plan juridique, elle ouvre la voie à bien d'autres réformes, comme la modification du mode de financement du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).
Réformer la haute fonction publique : la lettre de mission de M. Frédéric Thiriez Lors de sa conférence de presse du 25 avril 2018, le Président de la République a annoncé son intention de « supprimer, entre autres, l'ENA [...] pour bâtir quelque chose qui fonctionne mieux [...]. Sur ce sujet, je ne crois pas du tout au rafistolage : [...] si vous gardez les mêmes structures, les habitudes sont trop fortes, les habitudes sont là ». Le 14 mai 2019, le Premier ministre a missionné M. Frédéric Thiriez, avocat aux conseils, pour mener une mission de réflexion sur la haute fonction publique. Cette mission s'organise autour d'un triple objectif : - Revoir les modalités de recrutement des hauts fonctionnaires , « en mettant en place une sélection exigeante, ouverte à la diversité des talents » ; - Réformer la formation des hauts fonctionnaires , « en privilégiant les expériences de terrain » mais également « l'aptitude au travail en équipe ». Un tronc commun de formation initiale pourrait être créé entre les trois versants, « sans exclure les corps techniques, avant qu'ils ne rejoignent leur filière de spécialisation » ; - « Dynamiser les parcours de carrière » pour « constituer le vivier des cadres dirigeants de l'État ». Les spécificités des magistrats judiciaires, administratifs et financiers devront être prises en compte. |
2. Le durcissement des contrôles déontologiques
Point central des débats à l'Assemblée nationale, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) contrôlerait désormais le départ des agents publics vers le secteur privé , en lieu et place de la commission de déontologie (articles 16, 16 bis , 16 ter et 16 ter A) . Le Sénat a proposé une telle fusion dès 2016, sans être suivi par le Gouvernement.
Le contrôle du « pantouflage » serait recentré sur les dossiers les plus sensibles, définis par décret en Conseil d'État.
Le contrôle du pantouflage
Source : commission des lois du Sénat
Enfin, certains employeurs publics 17 ( * ) auraient l'obligation de publier sur leur site Internet la somme de leurs dix rémunérations les plus élevées . Le Gouvernement devrait remettre, en complément, un rapport annuel sur « le montant moyen et le montant médian des rémunérations au dernier centile » 18 ( * ) dans les trois fonctions publiques (article 16 ter ) .
* 17 Départements ministériels, régions, départements, collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 80 000 habitants, établissements publics hospitaliers dotés d'un budget de plus de 200 millions d'euros.
* 18 D'après l'INSEE, les 48 500 agents publics les mieux rémunérés (dernier centile) perçoivent un salaire médian de 6 410 euros, pour un salaire moyen de 7 850 euros. Dans le secteur privé, le dernier centile s'élève à 8 280 euros nets par mois, soit 30 % de plus que dans le secteur public.