N° 222
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 décembre 2018 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse portant modification de l'annexe 1 à la convention du 13 septembre 1965 relative à l' extension en territoire français du domaine de l' Organisation européenne pour la recherche nucléaire ,
Par M. Hugues SAURY,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Bernard Cazeau, Robert del Picchia, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean-Marc Todeschini , vice-présidents ; M. Olivier Cigolotti, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont , secrétaires ; MM. Jean-Marie Bockel, Gilbert Bouchet, Michel Boutant, Olivier Cadic, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Édouard Courtial, René Danesi, Gilbert-Luc Devinaz, Jean-Paul Émorine, Bernard Fournier, Jean-Pierre Grand, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Jean-Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Rachel Mazuir, François Patriat, Gérard Poadja, Ladislas Poniatowski, Mmes Christine Prunaud, Isabelle Raimond-Pavero, MM. Stéphane Ravier, Hugues Saury, Bruno Sido, Rachid Temal, Raymond Vall, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Jean-Pierre Vial, Richard Yung . |
Voir les numéros :
Sénat : |
710 (2017-2018) et 223 (2018-2019) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi du projet de loi n° 710 (2017-2018) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse portant modification de l'annexe 1 à la convention du 13 septembre 1965 relative à l'extension en territoire français du domaine de l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire .
Cette organisation, plus connue sous son acronyme historique « CERN » 1 ( * ) , est un centre de recherche européen de pointe dans le domaine de la physique des particules. Elle est établie dans la région frontalière franco-suisse, à la fois sur le canton de Genève et sur le département de l'Ain.
Le présent accord, dans sa nouvelle rédaction, étend aux opérations de secours la dérogation au principe de compétence territoriale exclusive des États sur la partie du domaine du CERN relevant de leur territoire respectif, jusqu'à présent réservée aux interventions des forces de l'ordre.
Cet accord vise à compléter le cadre juridique existant en établissant les règles d'engagement des services de secours de chaque partie, ainsi que le régime de protection applicable aux agents concernés en cas de mise en cause de leurs responsabilités civile et pénale. L'accord tripartite entre le CERN et ses deux États hôtes, conclu en décembre 2016 et entré en vigueur en août 2017, en constitue la déclinaison opérationnelle.
En cas d'urgence, les services de secours et d'urgences médicales français et suisses pourront alors intervenir sur le territoire de l'autre partie , à la demande du CERN ou de leur propre chef, dans le cadre d'une opération qui ne serait pas menée conjointement.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté ce projet de loi , dont le Sénat est saisi en premier.
I. L'ORGANISATION EUROPÉENNE POUR LA RECHERCHE NUCLÉAIRE
A. SA GENÈSE
Au sortir de la seconde guerre mondiale, des scientifiques européens ont avancé l'idée de créer un laboratoire de physique atomique afin de s'unir et partager ainsi les coûts croissants des installations de physique nucléaire. Lors de la Conférence européenne de la culture qui s'est tenue à Lausanne en décembre 1949, le physicien français Louis de Broglie a donc proposé la création d'un laboratoire européen , projet soutenu par l'Américain Isidor Isaac Rabi, prix Nobel de physique.
À l'occasion de la 5 ème session de la Conférence générale de l'Unesco de 1950, ce dernier fit inscrire une résolution autorisant le directeur général de l'Unesco à « faciliter et encourager la création et l'organisation de laboratoires et de centres de recherches régionaux , afin qu'une collaboration plus étroite et plus fructueuse s'établisse entre les hommes de science des différents pays qui s'efforcent d'accroître la somme des connaissances humaines dans des domaines où les efforts déployés isolément par l'un quelconque des États de la région intéressée ne sauraient permettre d'y parvenir. Et à cette fin déterminer dans quelle mesure la création de tels centres de recherches régionaux est possible et nécessaire, effectuer des enquêtes préliminaires sur leur financement et leur installation et aider à élaborer leurs programmes de travail (...) » .
La première résolution relative à la fondation d'un Conseil européen pour la recherche nucléaire (CERN) a été adoptée lors d'une réunion intergouvernementale de l'Unesco en décembre 1951. Deux mois plus tard, onze pays signèrent un accord pour la création du Conseil provisoire ; la ville de Genève sera choisie plus tard pour l'accueillir.
La convention pour l'établissement d'une organisation européenne pour la recherche nucléaire a été signée à Paris, le 1 er juillet 1953 2 ( * ) , puis modifiée le 17 janvier 1971.
L'Organisation européenne pour la recherche nucléaire a vu officiellement le jour le 29 septembre 1954 après que la France et l'Allemagne ont ratifié l'accord. Le Conseil provisoire du CERN est alors dissous mais son acronyme, lui, restera.
* 1 Conseil européen pour la recherche nucléaire, organe provisoire institué en 1952.
* 2 Dans son préambule, cette convention renvoie à l'accord du 15 février 1952 en rappelant la volonté des parties de « conclure une Convention pour l'établissement d'une Organisation européenne pour la recherche nucléaire, comportant la fondation d'un laboratoire international en vue d'exécuter un programme déterminé de recherches de caractère purement scientifique et fondamental concernant les particules de hautes énergies » .