Rapport n° 47 (2017-2018) de M. Jacques LE NAY , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 25 octobre 2017
Disponible au format PDF (281 Koctets)
N° 47
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018
Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 octobre 2017 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification de l' accord de transport aérien entre les États-Unis d' Amérique , premièrement, l' Union européenne et ses États membres , deuxièmement, l' Islande , troisièmement, et le Royaume de Norvège , quatrièmement,
Par M. Jacques LE NAY,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Bernard Cazeau, Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Robert del Picchia, Thierry Foucaud, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Cédric Perrin, Gilbert Roger , vice-présidents ; M. Olivier Cigolotti, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Philippe Paul, Rachid Temal , secrétaires ; MM. Jean-Marie Bockel, Gilbert Bouchet, Michel Boutant, Olivier Cadic, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Édouard Courtial, René Danesi, Gilbert-Luc Devinaz, Jean-Paul Émorine, Bernard Fournier, Jean-Pierre Grand, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Jean-Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Rachel Mazuir, François Patriat, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Gérard Poadja, Ladislas Poniatowski, Mmes Christine Prunaud, Isabelle Raimond-Pavero, MM. Stéphane Ravier, Hugues Saury, Bruno Sido, Jean-Marc Todeschini, Raymond Vall, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Jean-Pierre Vial, Richard Yung . |
Voir les numéros :
Sénat : |
822 (2015-2016) et 48 (2017-2018) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi du projet de loi n° 822 (2015-2016) autorisant la ratification de l'accord de transport aérien entre les États-Unis d'Amérique, premièrement, l'Union européenne et ses États membres, deuxièmement, l'Islande, troisièmement, et le Royaume de Norvège, quatrièmement.
Le présent accord, signé les 16 et 21 juin 2011, a pour objet d'étendre à l'Islande et à la Norvège, comme si c'était des pays membres de l'Union européenne, l'accord de transport aérien signé, les 25 et 30 avril 2007, entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis, d'autre part, ainsi que le protocole, signé le 24 juin 2010, qui l'amende.
Cet accord d'extension est un accord mixte qui porte à la fois sur des matières relevant de la compétence de l'Union et sur des matières relevant de la compétence des États membres. Son entrée en vigueur requiert donc une ratification de la part des États membres.
L'accord de transport aérien transatlantique de 2007 est appliqué à titre provisoire depuis le 30 mars 2008. Son entrée en vigueur formel devrait avoir lieu dans les prochains mois puisque les 27 États membres ont désormais notifié l'achèvement de leurs procédures internes. La France, quant à elle, l'a ratifié en 2008.
Le protocole de 2010 n'est pas non plus en vigueur, trois États membres (Autriche, Italie et Lituanie) n'ayant pas encore achevé leurs procédures internes de ratification. Toutefois, à la différence de l'accord de 2007, cet instrument ne prévoit pas de date précise pour son application provisoire mais renvoie à la législation des parties pour ouvrir cette possibilité. La France l'applique à titre provisoire depuis novembre 2014, date à laquelle le Parlement a autorisé sa ratification.
L'accord de transport aérien de 2007 a libéralisé les services aériens transatlantiques en permettant aux entreprises de transport aérien de l'Union européenne et des États-Unis de proposer des services, libres de toute restriction, entre tout aéroport européen et tout aéroport américain. Le cadre juridique qu'il met en place prévoit notamment la possibilité d'étendre son champ d'application à des pays tiers afin de « maximiser les avantages pour les consommateurs, les transporteurs aériens, les travailleurs et les populations des deux côtés de l'Atlantique » .
Dès 2007, l'Islande et la Norvège ont fait part de leur intention d'y adhérer et en novembre 2010, le comité mixte établi par l'accord a formulé, en vue de cette adhésion, une proposition comprenant le présent accord d'extension ainsi qu'un accord annexe à caractère technique, qui ne requiert pas d'autorisation parlementaire pour sa ratification.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté ce projet de loi , dont le Sénat est saisi en premier. L'application du présent accord permettra de poursuivre la libéralisation des services aériens transatlantiques commencée en 2007 en permettant aux transporteurs aériens européens, américains, islandais et norvégiens de proposer des vols entre tout aéroport situé sur le territoire de l'Union européenne, de l'Islande et de la Norvège et tout aéroport situé sur le territoire des États-Unis et réciproquement dans un cadre réglementaire uniforme. L'extension de l'accord de transport aérien de 2007 modifié ne devrait poser aucun problème dans la mesure où l'Islande et la Norvège apparaissent comme des candidats naturels à celle-ci. Membres de l'Espace économique européen (EEE), ils appliquent en effet déjà l'ensemble des règles de l'Union européenne relatives au transport aérien.
PREMIÈRE PARTIE : L'EXTENSION DE LA LIBÉRALISATION DES SERVICES AÉRIENS TRANSATLANTIQUES À L'ISLANDE ET À LA NORVÈGE
I. LE CADRE JURIDIQUE MIS EN PLACE PAR L'ACCORD DE TRANSPORT AÉRIEN TRANSATLANTIQUE DE 2007
Le cadre juridique applicable au transport aérien transatlantique de passagers et de fret résulte de l'accord de transport aérien, signé en 2007, entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part. Cet accord a été modifié par un protocole signé en 2010.
Cet accord de 2007 fait suite aux arrêts dits de « Ciel ouvert » 1 ( * ) de la Cour de justice de l'Union européenne du 5 novembre 2002, relatifs à des accords aériens bilatéraux concernant huit États membres de la Communauté européenne (Royaume-Uni, Danemark, Suède, Finlande, Belgique, Luxembourg, Autriche, Allemagne) et les États-Unis d'Amérique.
Dans ces arrêts, la Cour a estimé que certaines dispositions des accords bilatéraux contestés représentaient une entrave à la liberté d'établissement reconnu par les traités européens, en ce qu'elles limitaient la désignation des transporteurs aériens par un État membre aux entreprises détenues et effectivement contrôlées par des intérêts de cet État membre. Elle a également considéré que d'autres dispositions empiétaient sur la compétence communautaire, notamment celles relatives à la fixation des tarifs pour les services aériens intra-européens, aux systèmes informatisés de réservation des billets d'avion, à la gestion des créneaux horaires et aux services d'assistance en escale.
En 2003, prenant acte de ces arrêts, la Commission a reçu mandat pour négocier un accord avec les États-Unis d'Amérique visant à établir « un espace aérien sans frontière » avec l'Union européenne, qui remplacerait les accords bilatéraux de l'ensemble des États membres.
En 2005, une communication intitulée « Développer l'agenda de la politique extérieure de l'aviation de la Communauté » 2 ( * ) est venue préciser les objectifs de la nouvelle politique de la Commission en matière de transport aérien. Elle précise que, s'agissant de la négociation des accords entre l'Union européenne et certains partenaires clés de l'Union européenne, comme les États-Unis d'Amérique, les accords européens de services aériens sont adaptés aux spécificités du pays concerné, en recherchant toutefois un certain degré de convergence des réglementations dans les principaux domaines du transport aérien, notamment dans celui de la sécurité.
Les 25 et 30 avril 2007, à l'issue de quatre années de négociation, les parties concernées ont signé l'accord aérien transatlantique, mais, cette signature n'a été rendue possible que par l'inclusion à l'article 21 intitulé « Négociations en vue d'une seconde étape » d'une clause prévoyant l'ouverture rapide de négociations pour « poursuivre l'ouverture de l'accès au marché et maximiser les avantages pour les consommateurs, les transporteurs aériens, le personnel et les populations des deux côtés de l'Atlantique » . Le protocole signé le 24 juin 2010 est le fruit de ces nouvelles négociations.
L'accord aérien transatlantique de 2007 est venu se substituer aux accords bilatéraux précédemment conclus par les États membres avec les États-Unis. Pour la France toutefois, l'accord sur les transports aériens entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique, signé à Washington le 18 juin 1998, reste le cadre juridique applicable aux parties du territoire de la République française auxquelles l'ensemble des dispositions des traités européens ne sont pas applicables, comme Saint-Pierre-et-Miquelon ou la Nouvelle-Calédonie.
Cet accord de 2007 libéralise les services aériens transatlantiques en prévoyant une ouverture totale des liaisons transatlantiques aux compagnies aériennes européennes et américaines.
Il permet principalement aux transporteurs aériens européens et américains de déterminer librement leurs tarifs et d'exploiter les routes internationales entre l'Union européenne et les États-Unis (droits dits de 3 ème et 4 ème libertés 3 ( * ) ) et les routes au-delà de l'Union européenne et des États-Unis (droits de 5 ème liberté), sans aucune limitation sur le nombre de routes, sur la fréquence de services, sur la capacité des appareils. S'agissant du transport de fret, il les autorise à exploiter des routes déconnectées de leur territoire d'origine (droits dits de 7 ème liberté), les transporteurs américains n'en bénéficient toutefois pas pleinement pour l'instant.
L'accord de 2007 vise également à consolider la coopération entre les parties dans de nombreux domaines et notamment en matière de sûreté et de sécurité, domaines dans lesquels les Européens et les Américains appliquent des normes supérieures aux standards minima requis par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI). Cette mission est assignée au comité mixte composé des représentants des parties, institué par l'article 18.
Il affiche aussi comme objectif une concurrence loyale et équitable en reconnaissant que les subventions publiques peuvent fausser la concurrence. Il prévoit un mécanisme de consultation entre les parties ainsi que la possibilité de soumettre tout problème à l'examen du comité mixte. Il prône le renforcement de la coopération entre les autorités respectives des parties en charge de la concurrence (Voir annexe spécifique « concernant la coopération sur les questions de concurrence dans le secteur des transports aériens »).
Dans le domaine de l'environnement, l'accord de 2007 apparaît comme précurseur, en y consacrant un article spécifique, l'article 15, amendé par le protocole de 2010. Outre une déclaration de principe en faveur de l'environnement, l'accent est mis sur la collaboration entre les parties, qui s'engagent, par ailleurs, à appliquer le principe de « l'approche équilibrée », méthodologie développée par l'OACI. La gestion des nuisances sonores sur les aéroports font l'objet de dispositions spécifiques.
S'agissant de la protection des consommateurs traitée à l'article 16, la réglementation européenne 4 ( * ) s'applique à tous les passagers au départ d'un aéroport européen, et aux passagers voyageant sur une compagnie européenne entre les États-Unis et un aéroport européen.
Par ailleurs, les exemptions et exonérations des droits de douanes et taxes accordées sur une base de réciprocité sont conformes à la pratique des accords aériens.
Enfin si la gestion du trafic aérien n'a pas fait l'objet d'un article spécifique dans l'accord de 2007, le protocole a introduit de nouvelles dispositions dans l'article 18 relatif au Comité mixte afin d'encourager la coopération entre les autorités compétentes dans le but principal de rendre compatibles/interopérables les nouveaux systèmes de gestion du trafic aérien en cours de développement des deux côtés de l'Atlantique, dans le cadre du programme SESAR (« Single European Sky ATM Research ») côté européen, et NextGen (« Next Generation Air Transportation System ») pour les Américains.
Le bilan de la mise en oeuvre de cet accord montre qu'il n'a pas révolutionné un marché déjà ouvert et fortement concurrentiel. En effet, avant 2007, 16 États membres, dont la France, avaient déjà conclu avec les États-Unis des accords bilatéraux dits de « ciel ouvert ».
Selon Eurostat, le trafic passager entre l'Union européenne à vingt-sept et les États-Unis est passé de 52,13 millions de passagers en 2007 à 56,65 millions en 2016, soit une progression de moins de 9 %. Cette faible croissance s'explique par la maturité du marché à la date de signature de l'accord et la crise économique de la fin des années 2000. La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) indique que le trafic entre la France et les États-Unis est passé de 6,20 millions de passagers à 7,1 millions pendant cette même période. Entre ces deux dates, le nombre d'aéroports français reliés par un service direct avec les États-Unis est resté stable. Il s'agit des aéroports d'Orly, de Roissy-Charles-de-Gaulle et de Nice.
Selon le ministère de l'Europe et des affaires étrangères 5 ( * ) , l'opportunité offerte par l'accord de 2007 à n'importe quelle compagnie européenne de desservir les États-Unis au départ de n'importe quel aéroport européen n'a été que très peu utilisée et s'est généralement soldée par des échecs économiques, comme les tentatives de la compagnie Air France au départ de Londres. La forte implantation des transporteurs nationaux sur « leur » territoire, et le modèle économique dominant pour les services long-courriers, à savoir le recours à un hub pour alimenter les avions gros porteurs et optimiser leur remplissage, expliquent ce phénomène. Toutefois, l'apparition de nouveaux modèles économiques sur le long-courrier, comme les compagnies à bas-coûts ou la desserte point-à-point, c'est-à-dire sans passer par un hub, rendue possible par les appareils de dernière génération, devrait multiplier les nouveaux compétiteurs sur le marché transatlantique, à l'image de la compagnie Norwegian , premier opérateur « européen » à bas-coûts qui exploite de manière durable des services long-courriers (cf. infra ).
II. UNE EXTENSION À DES CANDIDATS NATURELS ET À L'IMPACT ÉCONOMIQUE RELATIVEMENT LIMITÉ
Le présent accord, signé en 2011, a pour objet d'étendre à l'Islande et à la Norvège, qui le réclamaient depuis 2007, l'accord de transport aérien transatlantique de 2007 signé entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis, d'autre part, ainsi que le protocole, signé le 24 juin 2010, qui l'amende.
Compte tenu des liens que l'Islande et la Norvège entretiennent avec l'Union européenne, ces deux pays apparaissent comme des candidats naturels à l'extension de l'accord de 2007 . Ils sont tous deux membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE ) 6 ( * ) et de l'Espace économique européen (EEE) 7 ( * ) . Pour mémoire, l'accord sur l'EEE, signé en 1992 et entré en vigueur en 1994, a pour objet l'extension des dispositions de l'Union européenne applicables à son marché intérieur aux membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE).
Selon les informations transmises par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères 8 ( * ) , la Norvège est l'un des partenaires les plus proches de l'Union européenne et l'Union européenne est le premier partenaire commercial de la Norvège. La Norvège présente de bons résultats en matière de mise en oeuvre de l'acquis du marché intérieur, ce qui démontre sa grande proximité avec l'Union. Le Conseil de l'Union européenne a ainsi adopté, en décembre 2016, des conclusions sur les relations entre l'Union européenne et les États de l'EEE/AELE, qui ont souligné l'étroitesse et la stabilité de la coopération entre l'Union européenne et la Norvège, en particulier dans le cadre de l'EEE.
L'Islande, quant à elle, a également décidé, à la suite de l'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'Union européenne en 1995, de rejoindre l'Espace Schengen, dont elle applique la convention depuis 2001. La question de l'adhésion à l'Union européenne et de l'adoption de l'euro s'est posée à la suite de la grave crise financière de 2008. Actuellement cependant l'Islande n'est pas considérée comme un pays candidat.
En leur qualité de membres de l'EEE, ces deux pays appliquent l'ensemble de la réglementation européenne afférente au secteur du transport aérien, référencée à l'annexe XIII - Transports de l'accord sur l'Espace économique européen. Cette annexe est régulièrement mise à jour pour incorporer les dernières évolutions du droit de l'Union, par décision du comité mixte de l'accord sur l'Espace économique européen. En contrepartie, les transporteurs aériens islandais et norvégiens sont considérés, à l'égard du seul marché intérieur, comme des transporteurs européens et bénéficient des mêmes droits. Par exemple, la compagnie norvégienne Norwegian peut librement exploiter des services non seulement entre Paris et Oslo, mais également entre Nice et Copenhague, ou entre Marseille et Lyon.
En outre, ces deux pays sont également signataires de l'accord multilatéral sur la création d'un Espace aérien commun européen (EACE) conclu en 2006, qui met en place un vaste marché couvrant le territoire des États membres de l'Union Européenne, des États des Balkans occidentaux, de l'Islande et celui de la Norvège.
Le présent accord d'extension prévoit que, pour l'application de l'accord de 2007, ces deux pays sont considérés comme des pays membres de l'UE et ont donc les mêmes droits et les mêmes obligations que les États membres. En conséquence, les transporteurs aériens européens, islandais, norvégiens et américains pourront proposer des vols entre tout aéroport situé sur le territoire de l'Union européenne, de l'Islande et de la Norvège, d'une part, et tout aéroport du territoire des États-Unis d'Amérique, d'autre part. Ces vols seront traités de manière uniforme dans un cadre règlementaire harmonisé.
L'extension à l'Islande et à la Norvège de l'accord de 2007 ouvre de nouveaux marchés, dont l'intérêt est cependant limité pour les compagnies aériennes régulières de l'Union européenne. En effet, ces deux pays n'offrent pas de véritables opportunités en raison, d'une part, de leur faible population - l'Islande ne compte que 330 000 habitants et la Norvège un peu plus de 5 millions - et d'autre part, de l'existence de transporteurs aériens solides dans ces deux pays. Ces marchés pourraient toutefois représenter des opportunités pour des transporteurs aériens européens qui miseraient sur des opérations ponctuelles, même si l'importance de l'offre rend cette hypothèse peu vraisemblable.
Selon les informations transmises par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères 9 ( * ) , l'Islande dispose de deux transporteurs aériens d'importance, la compagnie régulière Icelandair et la compagnie à bas-coûts Wow air qui, profitant de la localisation de l'Islande, relient, via leur hub de Reykjavik, l'Europe au Canada et aux Etats-Unis. La Norvège compte, elle aussi, un transporteur aérien régulier « traditionnel », la compagnie scandinave Scandinavian Airline System (SAS), dont les trois actionnaires principaux sont les États suédois, danois et norvégien et la compagnie à bas-coûts Norwegian , la troisième en Europe en termes de passagers transportés.
En revanche, l'accord d'extension ouvre aux transporteurs aériens de ces deux pays un marché européen de 500 millions de consommateurs potentiels . Son impact économique devrait cependant être limité dans la mesure où la compagnie Norwegian n'a pas attendu pour développer un réseau de liaisons transatlantiques au départ de plusieurs Etats membres , notamment l'Espagne, la France, l'Italie et le Royaume-Uni. Elle a créé deux filiales dans l'Union européenne, Norwegian Air International (NAI) en Irlande, et Norwegian Air UK (NUK) au Royaume-Uni, qui sont toutes deux considérées comme des transporteurs européens car titulaires d'une licence de transporteur aérien délivrée par un Etat membre.
En France, Norwegian a implanté, en 2016, une base à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle avec deux avions 787-800 qui desservent Fort-Lauderdale (Miami), Los Angeles et New-York et annoncent pour la saison aéronautique d'été 2018, Orlando, Boston, Denver et Oakland.
Depuis la saison d'hiver 2015-2016, Norwegian exploite avec sa filiale NAI ses liaisons saisonnières entre les Antilles françaises et les États-Unis (New-York, Fort Lauderdale et Providence) avec un succès considérable : le trafic est passé de 77 000 passagers en 2014 à 148 000 passagers en 2016.
Par ailleurs, en matière d'investissements, le présent accord d'extension permettra à des intérêts européens d'investir dans des compagnies aériennes islandaises et norvégiennes sans perdre pour autant les droits de trafic sur les marchés transatlantiques. De cette façon, les Européens bénéficieront de la réciprocité en termes de possibilités d'investissements dans les transporteurs aériens de ces deux pays.
SECONDE PARTIE : LES STIPULATIONS
I. LES SIX ARTICLES DE L'ACCORD
Les Parties à l'accord, que sont respectivement les États-Unis, l'Union européenne et ses États membres, l'Islande et la Norvège, sont définies à l'article 1 er .
Aux termes de l'article 2, les dispositions de l'accord de transport aérien de 2007 modifié par le protocole de 2010 s'appliquent, sous réserve des adaptations nécessaires, à l'Islande et à la Norvège, « comme si ces pays étaient des États membres de l'Union européenne » de sorte qu'ils disposent des mêmes droits et obligations que ceux-ci.
L'article 3 précise les modalités de dénonciation ou de cessation de l'application provisoire de l'accord. L'Union européenne et ses États membres ou les États-Unis peuvent, à tout moment, mettre fin au présent accord ou à son application provisoire, en ce qui concerne l'Islande et la Norvège. Réciproquement, l'Islande et la Norvège peuvent à tout moment décider de se retirer du présent accord ou de cesser de l'appliquer à titre provisoire.
L'article 4 indique que le présent accord est enregistré auprès de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).
Les articles 5 et 6 relatifs à l'application provisoire du présent accord et à son entrée en vigueur contiennent les dispositions habituelles en la matière. Pour l'entrée en vigueur du présent accord, la date retenue sera la date la plus tardive des dates suivantes, date d'entrée en vigueur de l'accord de transport aérien de 2007 ou date d'entrée en vigueur du protocole de 2010 le modifiant.
II. LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES DE L'ANNEXE EN CE QUI CONCERNE L'ISLANDE ET LA NORVÈGE
L'annexe contient les adaptations de l'accord de transport aérien modifié par le protocole en vue de permettre son application à l'Islande et à la Norvège.
Le point 1 de l'annexe donne une nouvelle définition du terme de territoire figurant à l'article 1 er de l'accord de transport aérien modifié par le protocole pour élargir le champ d'application territoriale de celui-ci à l'Islande et à la Norvège.
Les points 2 et 3 précisent les articles de l'accord de transport aérien et du protocole qui ne sont pas applicables à l'Islande et à la Norvège. Il s'agit principalement de dispositions relatives à la dénonciation, à l'enregistrement auprès de l'OACI, de l'application provisoire et de l'entrée en vigueur.
Le point 4 complète la liste de l'annexe 1, section 1, des accords bilatéraux signés avec les États-Unis, qui sont suspendus ou remplacés par l'accord de transport aérien modifié, en ajoutant ceux signés respectivement par l'Islande et la Norvège.
Le point 5 modifie l'annexe 1, section 2, pour ajouter à la liste les accords qui resteront applicables, l'accord bilatéral entre la Norvège et les États-Unis, pour prendre en compte les parties du territoire norvégien non couvertes par l'accord sur l'Espace économique européen.
Le point 6 ajoute l'Islande et la Norvège à la liste des pays à destination ou à partir desquels les transporteurs américains ont le droit de fournir des services de fret tout cargo déconnectés d'un service desservant les États-Unis.
Le point 7 précise les dispositions applicables en matière de concurrence à l'Islande et à la Norvège. Il s'agit notamment de celles de l'accord sur l'Espace économique et européen.
Le point 8 prévoit que l'Islande et la Norvège ne pourront se prévaloir des opportunités supplémentaires ouvertes à l'article 21, paragraphe 4 de l'accord modifié que si, pour ce qui concerne les restrictions d'exploitation liées au bruit, la législation européenne révisée pour répondre aux exigences du protocole est intégrée à l'accord sur l'Espace économique européen et est appliquée par l'Islande et la Norvège.
III. LES AUTRES ÉLÉMENTS DE L'ACCORD
Une déclaration commune, qui fait partie intégrante de l'accord, précise les modalités d'authentification de l'accord dans d'autres langues que l'anglais, soit échanges de lettres avant sa signature, soit décision du comité mixte après la signature.
Sur cette base, trois accords sous forme d'échanges de lettres avec les représentants des États-Unis, de l'Islande et de la Norvège authentifient la version française de l'accord, qui fait également foi.
CONCLUSION
Après un examen attentif des stipulations de cet accord, la commission a adopté ce projet de loi autorisant la ratification de l'accord de transport aérien entre les États-Unis d'Amérique, premièrement, l'Union européenne et ses États membres, deuxièmement, l'Islande, troisièmement, et le Royaume de Norvège, quatrièmement.
En effet, le présent accord permettra l'harmonisation du cadre juridique applicable aux vols transatlantiques entre les États-Unis d'Amérique, d'une part, et les États membres de l'Union européenne, l'Islande et la Norvège, d'autre part.
Il ne requiert aucune modification du droit interne français et aura un impact économique relativement limité dans la mesure où la mise en oeuvre, à titre provisoire, de l'accord aérien transatlantique de 2007 n'a pas bouleversé le marché et où la compagnie Norwegian a déjà développé un réseau de liaisons transatlantiques au départ de plusieurs États membres, dont la France.
Au 1 er septembre 2017, quatorze États-membres avaient notifié au Secrétariat général du Conseil l'accomplissement de leurs procédures internes qui permettent l'entrée en vigueur de l'accord : l'Allemagne, la Belgique, Chypre, l'Espagne, l'Estonie, la Grèce, la Hongrie, la Lettonie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, la Roumanie et la Slovénie.
L'achèvement de la procédure de ratification permettra à la France d'appliquer cet accord d'extension à titre provisoire.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 25 octobre 2017, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Jacques Le Nay sur le projet de loi n° 822 (2015-2016) autorisant la ratification de l'accord de transport aérien entre les Etats-Unis d'Amérique, premièrement, l'Union européenne et ses Etats membres, deuxièmement, l'Islande, troisièmement, et le Royaume de Norvège, quatrièmement.
Après l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé.
M. Christian Cambon, Président . - Je précise à nos nouveaux collègues qu'ils sont appelés à rencontrer souvent cette procédure d'examen en forme simplifiée pour les conventions internationales. D'ailleurs, c'est une formule qui va se généraliser dans les autres commissions pour les textes de nature technique, afin d'alléger l'ordre du jour de la séance publique. Bientôt les textes techniques seront examinés en commission et le vote de la commission vaudra approbation du Sénat. Il sera toutefois toujours possible d'examiner les textes ou les conventions les plus importants selon la procédure normale dans l'hémicycle, comme le protocole au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession du Monténégro. Par ailleurs, le volume des conventions internationales à examiner chaque année est très important et il faudrait pouvoir accélérer le rythme. C'est un problème sur lequel je réfléchis avec la présidente de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale.
Mme Hélène Conway-Mouret . - Je souhaiterais savoir si le présent accord aura des incidences sur notre compagnie aérienne nationale.
M. Jacques Le Nay, rapporteur . - C'est un marché de libre concurrence et il y a toujours des incidences possibles. Pour l'instant, c'est difficile à dire.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.
* 1 Cour de justice de l'Union européenne : Affaires C-466/98, C-467/98, C-468/98, C-469/98, C-471/98, C-472/98, C-475/98 et C-476/98 concernant le Royaume-Uni, le Danemark, la Suède, la Finlande, la Belgique, le Luxembourg, l'Autriche et l'Allemagne
* 2 Communication de la Commission COM(2005) 79 final, du 11 mars 2005.
* 3 Selon la nomenclature de l'Organisation de l'aviation civile internationale, OACI.
* 4 Règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol, et abrogeant le règlement.
* 5 Source : réponse au questionnaire.
* 6 L'AELE est composée actuellement de l'Islande, du Lichtenstein, de la Norvège et de la Suisse.
* 7 L'EEE regroupe l'Islande, le Lichtenstein, la Norvège et les Etats membres.
* 8 Source : réponse au questionnaire.
* 9 Source : réponse au questionnaire.