II. LA DÉFINITION D'UN CADRE JURIDIQUE SPECIFIQUE À LA MISSION STATUTAIRE DE LA CROIX-ROUGE FRANÇAISE
Afin de disposer des moyens juridiques nécessaires à l'exercice de cette mission d'intérêt général, la Croix-Rouge française a initié une réflexion qui a abouti au dépôt, le 23 mai 2016, de la présente proposition de loi sur le bureau de l'Assemblée nationale. Cette initiative législative fait écho à des évolutions juridiques semblables opérées ces dernières années au sein d'autres États européens (Allemagne, Belgique, Royaume-Uni, etc.).
Adopté par l'Assemblée nationale le 15 juin 2016, à l'unanimité, ce texte, pour lequel le Gouvernement a engagé la procédure accéléré, fixe les conditions dans lesquelles la Croix-Rouge française peut accéder à des données personnelles détenues par des personnes publiques ou des organismes assurant une mission de service public.
A. LA CRÉATION D'UN DROIT DE COMMUNICATION SPÉCIAL EN FAVEUR DE LA CROIX-ROUGE FRANÇAISE
La proposition de loi reconnaît à la Croix-Rouge française un droit de communication dérogatoire au droit commun pour les :
- données figurant dans un document administratif ou dans un traitement de données à caractère personnel ( article 1 er ) ;
- copies intégrales et extraits des actes de l'état civil et extraits de ces actes ( article 2 ) ;
- données relatives aux électeurs figurant sur les listes électorales (noms, prénoms, domicile) ( article 3 ).
Elle soumet toutefois la mise en oeuvre de cette faculté à plusieurs conditions restrictives . Ce droit de communication s'exercerait :
- directement auprès des services de l'État et des collectivités territoriales (dont les officiers d'état civil 1 ( * ) ) ainsi que les établissements publics administratifs de l'État et des collectivités territoriales, des services des organismes de sécurité sociale et des organismes « qui assurent la gestion des prestations sociales » ;
- pour les seuls besoins de la mission statutaire de rétablissement des liens familiaux, qualifiée à cette occasion de « mission d'intérêt général » par le législateur ;
- uniquement pour obtenir des informations liées à la personne recherchée et, hors le cas des actes de l'état civil et des informations présentes sur les listes électorales, si elles sont « indispensables à la détermination du sort de la personne recherchée sur le territoire national ».
Le législateur reconnaît ainsi un droit de communication qui exclut une consultation directe par la Croix-Rouge française des traitements de données, des registres de l'état civil ou encore des listes électorales. Il appartient à l'administration saisie de sélectionner les informations qui peuvent être légalement transmises à la Croix-Rouge française. Sauf pour les actes de l'état civil et les informations présentes sur les listes électorales, la demande effectuée par cette dernière devrait d'ailleurs être motivée.
À l'initiative de sa rapporteure, Mme Françoise Dumas, la commission des lois de l'Assemblée nationale a donné compétence à la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) pour connaître des questions relatives à la communication des documents sollicités par la Croix-Rouge française dans le cadre du droit de communication particulier qui lui est accordé par le présent texte ( article 3 bis ). À cet effet, serait complété le A de l'article L. 342-2 du code des relations entre le public et l'administration qui confie à la CADA compétence pour plusieurs catégories particulières de documents qui ne sont pas nécessairement des documents administratifs.
Selon la rapporteure de l'Assemblée nationale, cette disposition vise à « permettre à la Croix-Rouge française qui dispose désormais, par dérogation, d'un droit de communication particulier à certains documents administratifs en application des articles 1 er à 3 de la présente proposition de loi de pouvoir saisir la CADA en cas de refus implicite ou explicite de l'administration de les lui communiquer ».
* 1 Sont officiers d'état civil les maires et leurs adjoints (article L. 2122-32 du code général des collectivités territoriales), les agents diplomatiques et consulaires (article 48 du code civil) et les officiers d'état civil militaires (article 93 du code civil).