B. LA SOLUTION RETENUE PAR LES PROPOSITIONS DE LOI : LA MISE EN PLACE D'UN « AIGUILLAGE » LÉGAL ENTRE LES DEUX VOIES DE RÉPRESSION

1. Le débat sur la nature et les modalités de l'aiguillage légal

Dès lors que s'est imposée l'idée d'instaurer un « aiguillage » forçant à choisir une des deux voies et fermant l'autre, restait à en définir la nature et les modalités.

Le parquet national financier défendait l'idée d'un monopole du parquet dans l'appréciation de l'opportunité des poursuites pénales. Il proposait ainsi que le procureur puisse à tout moment et, en tout état de cause, avant l'ouverture de poursuites par l'AMF, « évoquer » une affaire pour engager les poursuites au pénal, quitte à mettre au service de l'autorité judiciaire des personnels de l'AMF, par voie de commission rogatoire ou de soit-transmis.

Cette solution a semblé à votre rapporteur attentatoire à l'indépendance de l'AMF et peu équilibrée.

Le groupe de travail de l'AMF proposait quant à lui que cette répartition se fasse sur la base de critères objectifs, en particulier le montant du gain réalisé : en deçà d'un certain montant l'affaire aurait été automatiquement orientée vers l'AMF. Cependant, non seulement certaines affaires ne présentent pas de gain quantifiable, mais la gravité n'est pas nécessairement question de montant : le dirigeant d'une grande entreprise ou un agent de l'AMF qui commettrait un délit d'initié grâce à des informations recueillies dans le cadre de ses fonctions serait sans doute poursuivi plus opportunément devant le juge pénal que devant la Commission des sanctions de l'AMF.

Une appréciation au cas par cas a semblé préférable à votre rapporteur.

C'est ainsi que les propositions de loi de votre rapporteur et de notre collègue Claude Raynal prévoient un aiguillage systématique à l'issue de l'enquête, avant l'ouverture des poursuites, et que la décision d'orientation découle en première intention d'une concertation entre l'AMF et le parquet national financier. Aucune des deux autorités n'auraient ainsi pu engager des poursuites sans que l'autre n'y consente.

C'est ce schéma qui a également été retenu par la présente proposition de loi.

Restait à envisager le cas d'un désaccord persistant, chacun revendiquant le fait de poursuivre une affaire.

La solution consistant à laisser perdurer le blocage jusqu'à ce qu'une des deux parties renonce n'a pas paru satisfaisante à votre rapporteur. Il fallait donc un arbitre.

Plusieurs solutions étaient envisageables, notamment la création d'une instance ad hoc , inspirée de la commission des infractions fiscales. S'est alors noué un intense débat sur la conformité à la Constitution d'une telle solution, au regard notamment du principe de séparation des pouvoirs.

Votre rapporteur et notre collègue Claude Raynal étaient favorables à l'arbitrage par une instance tierce à l'AMF comme au parquet national financier et souhaitaient sortir de l'aporie résultant de la combinaison du principe du ne bis in idem et de celui de la séparation des pouvoirs, qui, tout à la fois, soustrait l'action de l'administration au contrôle de l'autorité judiciaire et interdit à l'exécutif d'intervenir dans le cours d'une procédure judiciaire.

Il leur importait également d'éviter d'arrêter la réflexion à cette question de l'arbitrage, alors que la fin du cumul des sanctions pénales et administratives exigeait par ailleurs des adaptions importantes de notre droit afin que la voie pénale soit suffisamment dissuasive et efficace pour la répression des affaires les plus graves. En effet, la question de l'arbitrage présentait des enjeux pratiques assez mineurs, même si elle suscitait d'importantes crispations institutionnelles.

Dès lors, votre rapporteur et notre collègue Claude Raynal ont fait le choix de préconiser dans leurs propositions de loi que l'éventuel conflit d'attribution soit tranché par une instance extérieure , neutre et paritaire. Cette instance, qui ne se serait réunie que dans les cas exceptionnels d'absence d'accord entre l'Autorité des marchés financiers et le parquet national financier, aurait été composée à parité de magistrats du Conseil d'État et de la Cour de cassation. De nature juridictionnelle mais ne relevant ni de l'ordre judicaire, ni de l'ordre administratif, elle aurait rendu des décisions non susceptibles de recours, à l'instar du Tribunal des conflits.

Cette proposition avait le mérite d'évacuer le problème de la séparation des pouvoirs, alors que le débat n'était pas encore tranché sur ce point, et de permettre d'avancer sur les aspects du dispositif de répression des abus de marché.

Depuis, la réflexion juridique a avancé. Le Conseil d'État, interrogé par le Gouvernement, a ainsi indiqué qu'il n'y a pas d'obstacle constitutionnel à prévoir le caractère prioritaire de la voie pénale sur la voie administrative et de subordonner l'engagement de poursuite devant la Commission des sanctions de l'AMF à l'accord du parquet.

La présente proposition de loi vise à consacrer cette solution en confiant le rôle d'arbitre au procureur général près la Cour d'appel de Paris.

Compte tenu ces éléments et du consentement de l'AMF comme du parquet national financier, votre rapporteur se rallie au principe d'un arbitrage par le procureur général.

2. Une répression pénale qui doit gagner en rapidité et en sévérité
a) Une sévérité accrue

Au-delà même de l'obligation qui est faite par la directive relative aux abus de marché 31 ( * ) , votre rapporteur estime nécessaire que les faits les plus graves soient réprimés par le juge pénal, et qu'ils le soient avec plus de sévérité qu'aujourd'hui.

En effet, le juge répressif n'a jamais prononcé de peine de prison ferme et inflige des amendes d'un montant très inférieur à celles prononcées par l'AMF. Entre 2004 et 2014, le juge pénal a prononcé des amendes d'un montant moyen de 140 000 euros, quand les pénalités infligées par l'AMF atteignent en moyenne un million d'euros, avec une tendance à la hausse.

À cet égard, les propositions de loi de votre rapporteur et de notre collègue Claude Raynal prévoient un relèvement des sanctions pénales, s'agissant aussi bien des amendes que des peines d'emprisonnement :

- là où le droit actuel prévoit deux ans ou un an de prison selon les cas, les peines s'élèveraient respectivement à cinq ans et trois ans. En cas de commission en bande organisée, ces durées seraient portées respectivement à dix ans et sept ans ;

- le plafond en valeur absolue 32 ( * ) des amendes (1,5 millions d'euros ou 150 000 euros selon les cas) passerait à 15 millions d'euros, soit 75 millions d'euros pour les personnes morales. Si les informations privilégiées ayant servi au délit d'initié sont liées à un crime ou un délit, l'amende serait portée de 1,5 million d'euros aujourd'hui à 20 millions d'euros.

Les propositions de loi de votre rapporteur et de notre collègue Claude Raynal prévoient également l'instauration, pour les personnes morales, d'un plafond de sanction, au pénal et à l'administratif, correspondant à 15 % du chiffre d'affaires, venant s'ajouter aux deux plafonds alternatifs existants, exprimés l'un en valeur absolue et l'autre en multiple du gain. Ce nouveau plafond permettrait au juge, administratif ou pénal, de prononcer des sanctions très dissuasives à l'encontre des grandes sociétés pour lesquelles le plafond de 100 millions d'euros semble parfois insuffisant.

S'agissant des seules sanctions administratives, le Gouvernement a repris cette disposition, y compris le pourcentage de 15 % préconisé par votre rapporteur, dans le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dont l'examen prochain par le Parlement donnera l'occasion de débattre du champ de ce nouveau plafond.

La présente proposition de loi prévoit quant à elle l'alignement de l'ensemble des peines de prison à cinq ans 33 ( * ) et le relèvement des amendes à 100 millions d'euros ou dix fois le gain pour les personnes physique et 500 millions ou cinquante fois le gain pour les personnes morales.

Votre rapporteur approuve globalement l'évolution des peines qui résulterait de la présente proposition de loi. Il a simplement souhaité y intégrer l'aggravation des peines en cas de commission en bande organisée. Votre commission a adopté un amendement en ce sens.

b) Une rapidité qui reste à améliorer

Il faut en outre garantir une sanction rapide : si, en moyenne, le délai pour obtenir une décision du juge pénal atteint trois ans contre deux ans et demi pour l'AMF, alors même que le juge intervient le plus souvent après les investigations de l'AMF, de nombreux dossiers, dont les plus médiatiques, ont été jugés plus de dix ans après les faits.

Lors des auditions menées dans le cadre de la mission d'information de la commission des finances sur les pouvoirs de sanction des régulateurs financiers, il est apparu que le parquet national financier était déterminé à améliorer l'efficacité de la justice pénale en matière boursière.

Il faut s'en féliciter et lui donner la possibilité de réaliser cet objectif.

Le mouvement a été amorcé grâce à la création de la 32 e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, qui a tenu sa première audience le 2 février 2015 et est appelée à traiter en priorité des dossiers du parquet national financier.

La formation des magistrats au droit boursier et leur spécialisation dans le contentieux financier est également une garantie d'efficacité, de même que leur sensibilisation à la gravité des préjudices publics et privés que causent les abus de marché et donc à la nécessité de les réprimer sévèrement en usant de toute la latitude offerte par la loi.

Il a été souligné au cours des auditions réalisées par votre rapporteur que l'enquête pénale, qui vient souvent après l'enquête administrative, conduisait souvent les services de police à refaire des actes déjà réalisés par les enquêteurs de l'AMF. Il apparaît pourtant qu'il ne s'agit pas là d'une obligation légale et que les procès-verbaux d'audition dressés par l'AMF seraient, en l'état, parfaitement admissibles dans le cadre de la procédure pénale. Sur ce point, l'amélioration de la rapidité de la procédure pénale passerait principalement par une évolution des pratiques. Toutefois, il serait utile de mieux organiser la coopération entre le parquet et l'AMF dans la phase d'enquête afin que soient prises en compte très en amont les exigences liées d'éventuelles poursuites pénales et administratives.

De même, l'ouverture d'une information judiciaire serait trop systématique, contribuant à rallonger considérablement les délais. Dès lors que l'affaire est en état d'être jugée, grâce aux éléments rassemblés par l'AMF et complétés par l'enquête préliminaire, votre rapporteur estime qu'il faut privilégier la citation directe des mis en cause devant le tribunal correctionnel.

Enfin, le parquet national financier semble décidé à commencer de se servir de la procédure la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) - dite procédure de « plaider coupable » - dans les affaires d'abus de marché. Cette évolution coïnciderait avec le souhait d'un recours plus fréquent à la procédure de plaider coupable pour les infractions financières et économiques exprimé par Jean-Michel Hayat, président du Tribunal de grande instance de Paris, lors de son discours prononcé à l'occasion de l'audience de rentrée solennelle, le 19 janvier 2015.

De fait, cette procédure, introduite par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite « loi Perben II », reste relativement inusitée dans cette matière, alors même que cela est possible depuis la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles.

Votre rapporteur approuve une telle évolution qui serait de nature à réduire la durée des procédures. En réglant par le plaider coupable les dossiers les plus simples, le parquet national financier pourrait consacrer plus de temps et de ressources aux dossiers complexes.

3. Une répression administrative dont l'efficacité doit être préservée

L'AMF constitue, pour des raisons évidentes de compétence et de moyens techniques, à la fois le principal outil de détection des opérations d'initiés ou manipulation de cours, et le vecteur des sanctions les plus rapides. Pour ne pas remettre en cause cette compétence et cette efficacité, il semble nécessaire que l'essentiel des affaires continue d'être poursuivi et sanctionné par l'AMF.

La possibilité pour l'AMF de répondre rapidement, le cas échéant par le prononcé d'une sanction, aux comportements qui nuisent à l'intégrité des marchés et causent un préjudice illicite aux investisseurs, constitue une composante essentielle de son rôle de régulateur.

Comme l'explique Marie-Anne Frison-Roche, « le régulateur financier est au coeur du marché financier et il y assure la stabilité, là où les forces du marché se nourrissent de son instabilité. Pour assurer cet office essentiel, il doit expliciter une politique de sanction, notamment à travers le rapport annuel, des lignes directrices auxquelles les opérateurs accordent la plus haute importance parce qu'elles permettent cette projection de tous dans l'avenir à l'occasion de ses décisions particulières [...], satisfaisant ainsi la nécessité des agents de savoir à quoi s'en tenir pour l'avenir, pour s'exprimer plus trivialement encore : en matière de répression, les agents ne demandent pas à être exempts de toute perspective de punition, ils veulent savoir ?à quelle sauce ils seront mangés?. » 34 ( * )

Cette politique n'est pas entièrement maîtrisée par l'AMF, dans la mesure où le juge administratif et le juge judiciaire, selon les cas, ont le dernier mot sur les sanctions, aussi bien pour leur principe que leur quantum, dans le cadre des recours formés devant eux.

Il y a donc là une difficulté essentielle : « c'est au régulateur de concevoir et d'imposer une politique de sanction, puisqu'il a les marchés financiers sous sa garde et qu'il en est l'expert, tandis que le juge, personnage juridique éloigné, n'en a pas la puissance politique et expertale, et n'est pas reconnu comme tel par les marchés ; dans le même temps, par un effet mécanique, les décisions du régulateur par lesquelles celui-ci exprime sa politique sont dévolues par le jeu des recours devant les juridictions qui peuvent annuler ou réformer celles-ci et en cela détruire le travail du régulateur ou s'y substituer ».

La difficulté risque d'être aggravée par l'aiguillage mis en place, dans la mesure où la Commission des sanctions de l'AMF n'aura même plus l'occasion de se prononcer dans les affaires poursuivies pénalement.

Des pistes sont ouvertes pour résoudre cette « dissociation » :

- mieux intégrer le ministère public dans la régulation financière , « ministère public qui porte depuis toujours la politique répressive » . La concertation et la coopération entre le parquet national financier et l'AMF, que votre rapporteur souhaite la plus approfondie possible dès l'engagement d'une enquête pénale ou administrative, doit permettre cette intégration et la définition d'une politique pénale lisible par le marché.

- « prendre acte la prévalence de l'autorité de marché pour fixer la politique de sanction, parce qu'elle est à l'intérieur du marché et proche des opérateurs dans une répression dont l'efficacité dépend de sa proximité avec ceux-ci ». Cette prévalence ne peut être juridiquement reconnue dès lors qu'entre en jeu une dimension pénale. Elle s'établira de fait dans les affaires les plus complexes techniquement et nécessitant une connaissance fine du fonctionnement du marché et de ses acteurs. Ce sont justement elles pour lesquelles il importe que les agents aient des indications rapides afin d'adapter leur comportement. Les affaires graves mais techniquement plus simples jouent un rôle important de discipline des agents mais l'élaboration de la politique pénale qui leur est relative ne requiert pas la même proximité avec le marché.

- faire en sorte que « le juge qui connaît du recours s'imprègne de la politique de sanction que la décision particulière exprime, son arrêt devant à son tour avant tout servir la finalité systémique des sanctions. »

Si cette remarque vise les juges saisis d'une décision de l'AMF, elle est également vraie s'agissant du juge répressif qui se prononce en première intention : il serait utile que celui-ci prenne en compte le rôle que joue la politique de sanction dans la régulation des marchés et de l'expertise dont dispose l'AMF dans le domaine.

La faculté offerte à l'AMF par l'article L. 621-16-1 du code monétaire et financier de se constituer partie civile et l'obligation faite au juge par l'article L. 466-1 du même code de lui demander son avis devraient contribuer, avec la formation et la spécialisation des magistrats, à permettre « de conserver l'unicité de la politique de sanction en régulation financière, supposant une meilleure connaissance par les juges du fonctionnement des marchés financiers et évitant que se heurtent au détriment de tous régulateurs et juges » .

À cet égard, votre rapporteur estime qu'il est utile que l'AMF - qu'elle ait choisi ou non de se constituer partie civile - soit représentée à l'audience du tribunal correctionnel lorsque sont poursuivis des délits boursiers et propose un amendement en ce sens à l'article 4 de la présente proposition de loi.

En outre, il considère qu'il serait opportun d'ouvrir le champ de la composition administrative 35 ( * ) de l'AMF aux abus de marché, ce qui permettrait de régler rapidement les affaires pour lesquelles on dispose d'une jurisprudence claire et établie de la Commission des sanctions et de permettre à cette dernière de concentrer ses ressources sur les cas les plus complexes ou soulevant des problématiques nouvelles, en raison de l'innovation perpétuelle dont font montre les acteurs du secteur financier et de la sophistication constante de leurs techniques. Votre commission a adopté un article additionnel tendant à cette fin.

4. La nécessité de garantir la coordination des enquêtes administratives et pénales

Le droit en vigueur n'organise pas de manière satisfaisante la coopération entre le parquet national financier et l'AMF, qui sera pourtant particulièrement nécessaire dès lors que sera mis en place un dispositif d'aiguillage.

Un échange d'informations est bien prévu par la loi, mais n'intervient qu'au terme de l'enquête de l'AMF, au moment de la notification des griefs. L'article L. 621-15-1 du code monétaire et financier dispose en effet que « si l'un des griefs notifiés conformément au deuxième alinéa du I de l'article L. 621-15 est susceptible de constituer un des délits mentionnés aux articles L. 465-1, L. 465-2 et L. 465-2-1, le collège transmet dans les meilleurs délais le rapport d'enquête ou de contrôle au procureur de la République financier ».

Or cette information à un stade où l'AMF a achevé son enquête risque d'affaiblir la « qualité de l'enquête policière », comme le relève notre collègue député Dominique Baert dans son rapport sur la présente proposition de loi : « À titre d'exemple, les moyens d'enquête policière, tels que les interceptions téléphoniques, deviennent inutiles dès lors que les personnes mises en cause sont informées de l'existence de l'enquête, notamment à l'occasion des visites domiciliaires par l'AMF ou de la notification des griefs par le collège de celle-ci. »

Il serait donc souhaitable « de coordonner les actes d'investigation intrusifs, comme les perquisitions, les mesures de saisies ou d'auditions ». Il s'agirait ainsi « d'éviter l'allongement des délais de l'enquête policière et les redondances préjudiciables à l'efficacité des recherches ».

Votre rapporteur partage cette analyse et estime, comme notre collègue député Dominique Baert, que, « dès lors que le cumul des poursuites et des peines est impossible, mais qu' a contrario la dualité des enquêtes demeure, une réelle concertation pourrait impliquer la mise en place d'un mécanisme d'information réciproque dès l'ouverture de toute enquête administrative ou pénale ». Ce mécanisme devrait porter sur l'ensemble des pièces du dossier, réserve faite des informations issues de la coopération internationale obtenues par l'AMF sous réserve qu'elles ne soient pas transmises à d'autres autorités, et non plus seulement sur le rapport d'enquête.

Ainsi, les propositions de loi présentées par votre rapporteur et notre collègue Claude Raynal comportent des dispositions visant à imposer une information réciproque de l'AMF et du parquet national financier dès l'ouverture d'une enquête, à créer un véritable dossier d'enquête commun et à permettre à chacune des autorités de solliciter de l'autre la réalisation d'actes ou d'expertises relevant de sa compétence.

En revanche, la présente proposition de loi ne prévoit rien en la matière. Notre collègue député Dominique Baert estime ainsi qu' « en pratique, il semble que les excellentes relations entre le Parquet national financier et l'AMF permettent à ce jour une coopération approfondie, assortie de la transmission des pièces nécessaires au Parquet national financier, lorsqu'il y a mise en mouvement de l'action publique ». L'AMF comme le parquet national financier ont également souligné ces excellentes relations lors de leurs auditions par votre rapporteur.

Il semble cependant à votre rapporteur que la pérennité de telles relations n'est malheureusement jamais assurée et que la loi doit fixer un cadre permettant d'organiser la coopération entre les deux autorités sans compter uniquement sur la bonne volonté de celles-ci et d'affermir les bases légales de la pratique actuelle.

Votre commission des finances a donc souhaité reprendre dans le présent texte les dispositions 36 ( * ) que comportaient sur ce sujet les propositions de loi de votre rapporteur et de notre collègue Claude Raynal.


* 31 La directive 2014/57/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché impose « l'établissement d'infractions pénales au moins pour les formes graves d'abus de marché ».

* 32 Le plafond alternatif de dix fois le montant du gain serait maintenu.

* 33 Y compris la peine de sept ans d'emprisonnement prévue lorsque les informations en cause concernent la commission d'un crime ou d'un délit, qui s'en trouverait ainsi réduite, étant noté que la définition du délit serait également modifiée, puisqu'elle viserait désormais l'utilisation d'une information privilégiée acquise à l'occasion de la commission d'un crime ou d'un délit.

* 34 Marie-Anne Frison-Roche, « Une "politique de sanction" peut-elle exister dans la régulation financière et être commune aux régulateurs et aux juges ? », Bull. Joly Bourse , 01 décembre 2009 n° Spécial, p. 445-447 .

* 35 L'article L. 621-14-1 du Code monétaire et financier, introduit par la loi de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010, a conféré à l'Autorité des marchés financiers (AMF) la possibilité de proposer aux personnes à l'encontre desquelles une procédure répressive pourrait être un accord de composition administrative, c'est-à-dire une transaction évitant que ne soit saisie la Commission des sanctions.

* 36 Présentées plus en détail au commentaire de l'article 2 ter .

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