B. LES PRINCIPAUX APPORTS DE LA PREMIÈRE LECTURE AU SÉNAT.
La première lecture au Sénat a permis d'améliorer les dispositions du texte initial et de proposer des compléments pour répondre à l'enjeu d'amélioration de la compétitivité des filières agricoles et alimentaires.
• D'abord, le Sénat a instauré,
à l'article 1
er
bis
,
une
interdiction de la cession à titre onéreux des contrats laitiers
entre producteurs
. En effet, le système des quotas laitiers a
régulé depuis 1984 l'organisation de la production
laitière. Ce dispositif administratif d'encadrement a été
supprimé depuis le 1
er
avril 2015. Désormais, les
agriculteurs ont la liberté de produire les quantités de lait
qu'ils souhaitent, mais les laiteries ont l'obligation de leur proposer un
contrat long pour acheter le lait ainsi produit, offrant une garantie de
débouché durant la période d'exécution du contrat.
Dans le contexte de désorganisation du marché laitier, est
apparue une pratique de « marchandisation » des contrats
d'achat de lait entre producteurs et acheteurs, ce qui contribue à
l'alourdissement des charges des producteurs. A l'initiative de votre
rapporteur, la cession à titre onéreux des contrats conclus en
application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime
a été rendue inopérante, d'abord en obligeant les
acheteurs qui acceptent un changement de producteur dans le cadre d'une reprise
d'exploitation, à proposer un nouveau contrat aux mêmes
conditions, et ensuite en permettant l'interdiction par décret de la
cession à titre onéreux.
• Ensuite, le Sénat a adopté en
séance, à l`initiative de notre collègue Daniel Dubois,
deux articles 2
bis
et 2
ter
modifiant la
loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le
secret en matière de statistiques : le premier article
prévoit que les établissements qui refusent de se soumettre aux
enquêtes obligatoires du service statistique public affichent
publiquement leur refus afin que le public puisse en prendre connaissance et le
second article prévoit la publication, par l'Observatoire des prix et
des marges des produits alimentaires, de la liste des établissements
refusant de se soumettre aux enquêtes statistiques. Avec ces deux
dispositifs, il s'agit d'encourager davantage de transparence des acteurs
économiques, dans le but de favoriser une plus grande confiance sur les
mécanismes de partage de la valeur ajoutée entre les
différents maillons des filières agricoles et alimentaires.
• Afin de diversifier l'offre de financement du
secteur agricole, en particulier le financement de l'installation des jeunes
agriculteurs, le Sénat a également adopté à
l'initiative de Daniel Dubois et de votre rapporteur un
amendement
créant l'article 5
bis
, qui demande au Gouvernement de remettre
au Parlement un rapport sur le développement de mécanismes de
prêts de carrière
. Les prêts agricoles classiques
sont en effet proposés aujourd'hui pour des durées trop courtes,
qui impliquent pour les jeunes agriculteurs de très lourdes charges de
remboursement, compte tenu de l'importance croissante des capitaux à
mobiliser pour la reprise d'une exploitation agricole. La recherche de
solutions innovantes de financement est indispensable pour permettre le
renouvellement des générations en agriculture, tout en
préservant le modèle des fermes familiales.
• Le Sénat avait aussi
relevé
le plafond des déductions pouvant être pratiquées au titre
de la réserve spéciale d'exploitation agricole
(RSEA)
remplaçant la déduction pour aléas (DPA) ou de la
déduction pour investissement (DPI), en adoptant un amendement à
l'article 6, à l'initiative de notre collègue Michel Canevet. Cet
amendement allait dans le sens de l'amélioration des conditions
d'utilisation de la RSEA déjà proposées en commission par
votre rapporteur.
• Afin de favoriser la gestion des risques, le
Sénat avait adopté en commission, à l'initiative de votre
rapporteur,
un article 6
bis
instaurant une obligation
d'assurance contre les risques climatiques pour les jeunes
agriculteurs
.
• Par ailleurs, le Sénat a renforcé le
volet relatif à la simplification des normes et à
l'allègement du carcan normatif. En séance, a été
adopté à l'initiative de notre collègue Daniel Dubois un
amendement créant l'article 8
bis
A
,
qui fixe un double principe : tout d'abord, toute création de
nouvelle norme dans le domaine agricole doit être compensée par la
suppression d'une norme existante ; ensuite, le bilan des créations
et destructions de normes en matière agricole doit être
présenté publiquement chaque année.
Il s'agit d'une disposition symbolique, dont la mise en oeuvre est difficile, mais qui marque une volonté politique de simplification. Une telle démarche a été mise en oeuvre dans d'autres pays, comme au Royaume-Uni. Pourquoi la France n'en serait pas capable ?
Votre commission avait aussi adopté, à l'initiative de votre rapporteur, un amendement proposant d'expérimenter jusqu'à 2019 l'alignement de la formulation en droit national des exigences en matière d'études d'impact dans le secteur de l'élevage sur les dispositions des textes européens, afin de prévenir toute divergence d'interprétation et de supprimer tout risque de sur-transposition des directives 2010/75/CE et 2011/92/UE. Cet amendement est devenu l'article 8 bis.
•
En matière de réduction des
charges fiscales et sociales
des agriculteurs, plusieurs dispositions
avaient été adoptées pour permettre aux chefs
d'exploitation ou d'entreprise agricole de bénéficier d'une
exonération partielle des cotisations d'assurance maladie,
invalidité et maternité, à travers une
modification de l'article 9
proposée par notre
collègue Daniel Chasseing, ou encore pour permettre aux entreprises
agricoles de bénéficier à plein du mécanisme du
crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), à
travers un amendement de votre rapporteur
créant l'article 9
bis
.
Dans le même esprit, le Sénat avait adopté en séance un amendement de notre collègue Daniel Chasseing créant un article 11 bis au sein de la proposition de loi, dont l'objet est de mettre en place une exonération des 60 premiers hectares de chaque exploitation au titre de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB), le coût de cette mesure étant compensée pour les collectivités territoriales par un relèvement à due concurrence des dotations de l'État.