PREMIÈRE PARTIE :
LA CONSOLIDATION DE L'ACTION DU GROUPE CONSULTATIF POUR LA RECHERCHE
AGRICOLE INTERNATIONALE (CGIAR)
I. LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, PRIORITÉS DE LA RECHERCHE AGRICOLE
A. LE CGIAR, UN PARTENARIAT MONDIAL DE LA RECHERCHE AGRICOLE
1. A l'origine, la révolution verte
La création de centres de recherche en matière agronomique a été inspirée par les expériences menées dans certains pays au titre de la « révolution verte » . Cette dernière constitue une politique visant à faire évoluer les agricultures des pays en développement et les moins avancés vers l'intensification et l'utilisation de variétés de céréales à haut potentiel de rendement. Son objectif principal est de réduire le risque de famine, dans un contexte d'augmentation de la démographie mondiale.
Elle a été lancée en 1943 par le Mexique . En effet, le gouvernement, appuyé par la fondation Rockefeller, crée le Bureau des affaires spéciales 1 ( * ) afin de permettre à l'agriculture mexicaine de soutenir l'urbanisation et l'industrialisation croissantes du pays. Ce bureau réunit des généticiens et phytopathologistes dont les principaux axes de recherche concernent le développement de variétés de maïs et de blé à haut potentiel de rendement.
L'augmentation quantitative de la production de blé au Mexique qui s'en est suivie représente l'un des effets les plus spectaculaires de cette révolution verte. Le Mexique est alors devenu auto-suffisant en blé en 1951. Il en a commencé l'exportation en 1952 alors que dans le même temps sa population augmentait fortement.
Cette expérience a conduit certains décideurs politiques à porter prioritairement leurs efforts sur la recherche en matière agronomique , notamment par le biais de l'implantation de nouveaux centres de recherche à travers le monde.
Ainsi, ont été créés :
- en 1960, l'Institut international de recherches sur le riz ( IRRI ), aux Philippines ;
- en 1963, le Centre international d'amélioration du maïs et du blé ( CIMMYT ) qui remplace l'Office of Special Studies, au Mexique ;
- en 1967, le Centre international d'agriculture tropicale ( CIAT ) créé par le gouvernement colombien et les fondations Rockfeller , Ford et Kellog .
- en 1971, le Centre international de la pomme de terre ( CIP ) institué au Pérou .
Le 19 mai 1971 , dix-huit organisations 2 ( * ) et pays, dont la France, créent le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale ( CGIAR 3 ( * ) ) rassemblant les quatre centres internationaux précités . Il en compte désormais quinze .
Soutenu par des donateurs étatiques et institutionnels, le CGIAR constitue un réseau destiné à coordonner les efforts internationaux de recherche agricole visant à réduire la pauvreté et assurer la sécurité alimentaire dans les pays en développement. Il tend ainsi à améliorer la santé et l'alimentation des populations ainsi qu'à permettre une gestion plus durable des ressources naturelles.
2. Le CGIAR réformé, un acteur mondial de la recherche agricole
En 2007, l'assemblée générale du CGIAR décide de réformer l'organisation ainsi que le fonctionnement du Groupe en profondeur, répondant ainsi à une double préoccupation , principalement liée aux défis écologiques ainsi qu'à la trop grande complexification de sa structure .
Figure n° 1 : Facteurs administratifs de la réforme de 2009
- L'absence de correction des dysfonctionnements soulignée par les différents audits et évaluations mais non suivie d'effets, faute d'instance ayant autorité sur les centres ; - Un double système d'évaluation (du CGIAR et de nombreux donateurs) onéreux et consommateur de temps ; - Une structure de gouvernance lourde (plus de 200 membres des différents conseils d'administration), un doublonnage partiel des mandats de recherche 4 ( * ) ; - Un déséquilibre dans le financement des centres avec une majorité de projets ne finançant que des coûts additionnels liés à leurs activités, sans prendre en compte les coûts de structure. |
Source : Ministère des affaires étrangères
Outre les facteurs administratifs plaidant pour une réforme du Groupe ( Cf. ci-dessus), la nécessité d'évoluer vers une plus grande ouverture aux autres acteurs de la recherche agricole s'est imposée, afin de prendre en compte l'ensemble des problèmes environnementaux et de développement durable 5 ( * ) .
Le préambule de l'Accord constitutif expose ainsi la nouvelle vision du Groupe qui tend à « combattre la pauvreté et la faim, améliorer la santé humaine et la nutrition et renforcer la résilience des écosystèmes en favorisant le partenariat, le leadership et l'excellence dans la recherche agricole internationale »
Le CGIAR est alors devenu un partenariat mondial de recherche agricole pour le développement affichant trois objectifs stratégiques :
- nourrir les populations , par la création et l'appui à un accroissement soutenu et durable des rendements et de la production d'aliments sains par et pour les populations les plus pauvres ;
- préserver l'environnement pour les populations , par la conservation, l'amélioration, et l'utilisation durable des ressources naturelles et de la biodiversité afin d'améliorer les conditions de vie des plus pauvres, en réponse aux changements climatiques et autres facteurs ;
- mettre en oeuvre des politiques pour les populations, par la promotion de changements institutionnels et de politiques qui stimulent la croissance agricole, et l'équité au bénéfice des plus pauvres, particulièrement les femmes en milieu rural, et les autres groupes de personnes défavorisées.
Ce renforcement des missions du Groupe a conduit à promouvoir un partenariat actif avec de nombreux acteurs, au-delà des systèmes de recherche agricole nationaux, tels que les universités, les organisations non gouvernementales ainsi que le secteur privé.
* 1 Office of Special Studies.
* 2 Notamment, la Banque mondiale, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD)...
* 3 Consultative Group on International Agricultural Research.
* 4 Par exemple, trois centres travaillaient sur le riz, cinq sur les thématiques liées aux forêts.
* 5 I.e . le changement climatique, la biodiversité, la gestion durable des ressources naturelles.