III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

À titre personnel, votre rapporteur a fait part, devant votre commission, de son soutien à la réforme engagée par le Gouvernement appelant à adopter ces deux textes dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Pour votre rapporteur, le cumul du mandat parlementaire avec d'autres fonctions exécutives locales ne permet pas d'exercer le mandat parlementaire dans toute sa plénitude, la décentralisation ayant profondément bouleversé l'exercice des fonctions exécutives locales, et ce, y compris dans les plus petites communes, car les maires et leurs adjoints sont soumis à de nouvelles contraintes sans disposer de collaborateurs ou de services aussi étoffés que dans les grandes villes. Dans un souci de revalorisation du Parlement, ses membres doivent ainsi pouvoir se consacrer davantage aux missions que la Constitution lui confie.

Votre rapporteur s'est opposé à un traitement différencié entre sénateurs et députés, qui aurait pour effet de réserver à ces derniers les nouvelles dispositions du projet de loi organique. Jusqu'à présent, les uns et les autres sont soumis à un régime d'incompatibilités strictement identique. Certes, le Sénat, en vertu de l'article 24 de la Constitution, assure la représentation des collectivités territoriales de la République ; il assume cependant une fonction généraliste à l'instar de l'Assemblée nationale. Sous couvert de la défense de la spécificité territoriale, un régime d'incompatibilités distinct pour les sénateurs de celui des députés pourrait justifier, aux yeux de votre rapporteur, une limitation du rôle du Sénat, à rebours de l'objectif poursuivi par les opposants de la réforme. Le Sénat exerçant des missions identiques et des prérogatives quasiment similaires à celle de l'Assemblée nationale, il est donc logique en retour que ses membres soient assujettis aux mêmes règles d'incompatibilité.

Cependant, votre commission a désapprouvé la réforme qui lui était soumise, rejetant le projet de loi organique et le projet de loi qui procèdent de la même logique.

Elle a d'abord regretté l'engagement de la procédure accélérée pour l'examen d'une réforme ayant des incidences fondamentales sur l'équilibre institutionnel, notamment du bicamérisme.

Elle a ensuite estimé, dans sa majorité, que les comparaisons internationales n'étaient pas un argument recevable pour justifier la réforme dans la mesure où cette comparaison ne prenait pas en compte les autres différences institutionnelles qui caractérisent la France et qui sont intimement liées à la question du cumul des mandats et des fonctions. De même, le plus fort absentéisme des parlementaires disposant d'un mandat local ou d'une fonction exécutive locale est un argument contredit par de nombreux exemples.

Une majorité de votre commission a jugé l'incompatibilité parlementaire proposée trop restrictive en ce qu'elle prive un parlementaire d'une expérience au sein des collectivités territoriales ou de leurs groupements, lien jugé nécessaire pour une bonne appréhension des réalités locales.

En outre, il a été jugé paradoxal qu'une fonction exécutive locale, au service de l'intérêt général, ne puisse être exercée simultanément à un mandat parlementaire alors que la législation actuelle posait comme principe, sous réserves des incompatibilités professionnelles applicables aux parlementaires, la liberté d'exercer une profession privée.

S'agissant plus particulièrement du Sénat, la majorité de la commission a estimé que l'article 24 de la Constitution, en assignant à la Haute Assemblée la mission d'assurer la représentation des collectivités territoriales de la République, plaidait en faveur du maintien d'un lien particulier entre les sénateurs et les élus locaux, qui ne peut mieux s'incarner que par l'exercice d'un mandat local ou d'une fonction exécutive locale parallèlement à un mandat parlementaire.

Votre commission n'a pas écarté cependant la nécessité de mieux encadrer la possibilité de cumul d'un mandat parlementaire et d'une fonction exécutive locale. Elle a souhaité une limitation plus rigoureuse du nombre de mandats et fonctions locaux exercés simultanément.

Enfin, votre commission s'est accordée sur la nécessité de promouvoir l'élaboration d'un véritable statut de l'élu local.

Pour ces raisons, après avoir adopté deux amendements visant à limiter au montant de l'indemnité parlementaire de base le montant de l'indemnité perçue par un parlementaire, y compris lorsqu'il détient un mandat local, ainsi qu'en cas de cumul entre mandats et fonction locaux, votre commission n'a pas adopté les deux textes qui lui étaient soumis.

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À l'issue de ses travaux, votre commission n'a pas adopté les présents projets de loi.

En conséquence, et en application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte du projet de loi organique et du projet de loi déposés sur le Bureau du Sénat.

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