CHAPITRE IV
L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE AGRICOLE
L'année dernière, vos rapporteurs spéciaux s'étaient inquiétés de l'évolution des emplois d'enseignants dans l'enseignement technique agricole public et, plus généralement, de la situation de l'ensemble du programme 143. Comme l'a d'ailleurs souligné la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire 2011, « l'absence de chef de file et le manque de coordination dans la gestion entre les ministères chargés de l'éducation et de l'agriculture rendent largement fictif le caractère interministériel de la mission Enseignement scolaire ».
En pratique, pour l'enseignement technique agricole, le budget 2012 signifiait toujours moins d'enseignants, moins de moyens, moins de classes et moins d'élèves. Vos rapporteurs spéciaux ont donc choisi de consacrer un chapitre distinct à l'examen de ce programme de la mission.
I. UNE ORGANISATION ORIGINALE AU SEIN DU SYSTÈME ÉDUCATIF
A. UN ENSEIGNEMENT PARTAGÉ
1. Le programme 143 : une structure à part dans la mission « Enseignement scolaire »
L'enseignement agricole présente un caractère social marqué, un fort ancrage territorial (en particulier dans les zones rurales ou de déprise démographique) et des modes d'enseignement propres qui le distinguent au sein de la mission « Enseignement scolaire ». Par son rôle d'animation des territoires, sa capacité d'innovation technique et pédagogique, l'enseignement agricole comporte des spécificités qui sont autant d'atouts pour enrichir le cadre éducatif national. En temps de crise économique, cette voie conduit vers l'emploi des jeunes, parfois en difficulté, qui seraient sans cela souvent sortis du système éducatif. L'organisation académique et les pratiques d'enseignement originales, avec des structures pratiquant l'alternance et entretenant une grande proximité avec les milieux professionnels, contribuent aux bons résultats obtenus en termes de résultats aux examens et d'insertion professionnelle.
La direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt (MAAF) est responsable du programme, qu'elle gère en s'appuyant sur les directions régionales de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt (DRAAF) qui assurent le rôle d'autorité académique.
Le programme 143 recouvre un ensemble cohérent en termes de périmètre de formation et d'établissements subventionnés. Dans ses conclusions rendues en mars 2008, le Comité Interministériel d'Audit des Programmes (CIAP) avait d'ailleurs recommandé le maintien de la structuration en cinq actions, de volumes financiers certes inégaux, mais organisées par centres de coûts et leviers d'action cohérents.
Le programme 143 finance plus de 800 établissements publics et privés 33 ( * ) , de la classe de quatrième à la terminale, auxquels il faut rajouter les formations supérieures courtes délivrées dans les lycées (BTS et classes préparatoires aux grandes écoles). La plupart de ces établissements possèdent un internat, ce qui est une spécificité propre à l'enseignement agricole. Selon les chiffres du ministère de l'agriculture, le nombre d'élèves du second degré et d'étudiants de l'enseignement supérieur court s'élève à la rentrée 2011 à 174 104, en progression de 1,4 % après une diminution de 0,6 % à la rentrée 2010.
Evolution du nombre d'élèves
2010 |
2011 |
2011/2010 |
2012 34 ( * ) |
2012/2011 |
|
Public |
63 162 |
63 667 |
0,80 % |
62 812 |
-1,34 % |
Privé |
108 524 |
110 437 |
1,76 % |
107 600 |
-2,57 % |
dont temps plein |
55 006 |
55 910 |
1,64 % |
||
dont rythme approprié |
53 518 |
54 527 |
1,89 % |
||
Total général |
171 686 |
174 104 |
1,41 % |
170 412 |
-2,12 % |
Source: réponse au questionnaire budgétaire
La répartition des effectifs entre les différentes catégories d'établissements reste relativement stable : elle est d'environ 36,5 % dans l'enseignement public, 32,1 % dans l'enseignement privé temps plein et 31,3 % dans l'enseignement privé du « rythme approprié ». L'accroissement des effectifs est cependant plus rapide au sein de l'enseignement privé :
- l'enseignement public, accueille 493 élèves et étudiants de plus (+ 0,80 %) qu'à la rentrée 2010, augmentation qui fait suite à trois années de baisse ;
- l'enseignement privé accueille 1 944 élèves supplémentaires (+ 1,76 %) par rapport à la rentrée précédente. Cette augmentation concerne à la fois le temps plein (+ 903 élèves) et le rythme approprié (+ 1 041 élèves).
Les effectifs du second cycle professionnel (CAPA, BEPA, Bac Pro, 2 nde professionnelle) ont augmenté de façon conjoncturelle en lien avec la réforme de la voie professionnelle initiée en 2009, les effectifs des autres cycles étant en diminution. La réforme de la voie professionnelle, qui a mis en place dès la seconde un cursus permettant d'accéder au baccalauréat professionnel en trois ans, a concerné en 2009 toutes les spécialités, sauf celles des services, des activités hippiques, de l'animalerie de laboratoire, de l'agriculture des régions chaudes, pour lesquelles cette mise en oeuvre est intervenue à la rentrée 2011.
Cette réforme a eu un effet à la hausse en 2011 avec un quasi doublement du taux d'accès au niveau du baccalauréat (62,7 % en 2011 pour les élèves entrés en seconde professionnelle en 2009 au terme d'un parcours en trois ans, contre 30,5 % en 2010, pour les élèves entrés en BEPA en 2007 au terme d'un parcours en quatre ans). Cette hausse conjoncturelle devrait être suivie d'une baisse équivalente à la rentrée 2012, avec la sortie de la cohorte entrée en BEPA en 2008. En 2012, il n'y a donc plus que trois générations d'élèves en second cycle professionnel contre quatre avant la réforme pour les spécialités réformées en 2009.
De fait, selon les remontées prévisionnelles des établissements de fin août 2012, les effectifs prévus s'élèveraient à 62 812 élèves pour le public (- 1,34 % par rapport à 2011) et à 107 600 élèves pour le privé (- 2,57 % par rapport à 2011), pour un total de 170 412 élèves (soit - 2,12 % par rapport à la rentrée 2011). Cette baisse prévisible souligne le caractère transitoire et exceptionnel de 2011. Ces évolutions résultent, pour l'essentiel, des effets de la mise en oeuvre de la réforme de la voie professionnelle avec le passage d'un cursus de baccalauréat professionnel en quatre ans en un cursus en trois ans. En second cycle professionnel, la rentrée 2012 est marquée par la fin de la double génération du baccalauréat professionnel pour les spécialités réformées en 2009. Pour 2013 et 2014, une hausse suivie d'une baisse peut être anticipée avec, en décalé, les effets liés à la deuxième vague de la réforme. Ce n'est qu'à compter de la rentrée 2014 que les effectifs devraient évoluer de manière moins heurtée.
* 33 Etablissements Publics Locaux d'Enseignement et de Formation Professionnelle Agricole (EPLEFPA) et établissements privés sous contrat avec l'Etat.
* 34 Estimation à fin août 2012.