C. QUELQUES PRÉCISIONS APPORTÉES AU RÉGIME DE LA VÉRIFICATION DU DROIT À LA CIRCULATION ET AU SÉJOUR
L'article premier du projet de loi modifie l'article L. 611-1 du CESEDA afin d'étendre le champ des contrôles d'identité à la suite desquels un étranger doit être en mesure de présenter les pièces et documents sous couvert desquels il est autorisé à circuler et séjourner en France : les contrôles de véhicules effectuées à la demande du procureur de la République, en particulier aux fins de recherche et de poursuite des actes de terrorisme, pourront ainsi également donner lieu à une vérification des titres de circulation et de séjour.
Cet article assure également la conformité des dispositions de l'article L 611-1 à la jurisprudence de la CJUE, selon laquelle les contrôles d'identité ne doivent pas s'assimiler à des contrôles frontaliers, proscrits par Schengen : dans les zones frontalières, ces contrôles devront ainsi se dérouler de manière non systématique et pendant une durée maximale de six heures .
D. LA RESTRICTION DU CHAMP DU « DÉLIT DE SOLIDARITÉ »
A ces dispositions visant à adapter notre droit à l'évolution du droit communautaire, le Gouvernement a souhaité adjoindre des dispositions destinées à restreindre le champ du délit d'aide à l'entrée et au séjour irréguliers.
Afin de dissuader et de punir sévèrement les personnes qui font du trafic de migrants une activité lucrative, notre droit punit de peines élevées (cinq ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende, ces peines étant portées à dix ans d'emprisonnement et 750 000 euros d'amende en cas de circonstances aggravantes) le fait de faciliter ou de tenter de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d'un étranger en France.
Ces dispositions, destinées à lutter contre les filières d'immigration clandestine, sont très critiquées par les associations humanitaires engagées dans l'assistance aux étrangers sans-papiers et dont certains membres ont pu, sur le fondement de ces dispositions, être interpellés, placés en garde à vue, poursuivis, voire dans quelques cas condamnés par un tribunal correctionnel.
En effet, en l'état du droit, seuls certains membres de la famille de l'étranger ou les personnes confrontées à un état de nécessité, tel que le définit le code pénal, sont protégées contre toutes poursuites pénales.
Accédant à une revendication fort légitime des associations, l'article 8 du projet de loi propose d'élargir significativement le champ des immunités pénales applicables à ce délit, d'une part, aux membres de la famille du conjoint de l'étranger, et, d'autre part, aux associations humanitaires apportant une aide désintéressée aux étrangers sans-papiers.
Ces modifications sont également apportées aux diverses ordonnances définissant le droit des étrangers applicables à Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie (articles 9 à 11).
En revanche, elles ne sont pas étendues à Mayotte. Cette omission ne résulte pas d'une intention délibérée du Gouvernement de ne pas appliquer à ce département d'outre-mer, dont le droit des étrangers demeure pour l'instant régi par un texte spécifique, les immunités pénales créées par l'article 8 du projet de loi. Le projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, actuellement discuté par le Parlement, prévoit en effet, dans son article 9, d'habiliter le Gouvernement sur le fondement de l'article 38 de la Constitution à adapter par ordonnance le droit des étrangers applicable à Mayotte. L'entrée en vigueur de ce projet de loi, qui interviendra sans doute avant le présent projet de loi, aura pour effet de dessaisir le législateur pendant le temps de l'habilitation. Il appartiendra donc au Parlement, saisi du projet de loi de ratification des ordonnances, de vérifier que les dispositions relatives à la restriction du champ du délit d'aide à l'entrée et au séjour irréguliers prévues par le présent projet de loi sont bien également applicables à Mayotte.