Section 3 - Dispositions relatives aux dépenses des accidents du travail et des maladies professionnelles
Article 53 - Versement de la branche accidents du travail-maladies professionnelles à la branche maladie du régime général
Objet : Cet article fixe le montant de la compensation versée par la branche AT-MP au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.
I - Le dispositif proposé
Cet article propose de porter à 790 millions d'euros le montant versé à la branche maladie au titre de la compensation des sous-déclarations des accidents du travail - maladies professionnelles, soit 80 millions de plus que les trois années précédentes.
Cette augmentation fait suite au dernier rapport de la commission prévue par l'article L. 176-1 du code de la sécurité sociale pour en évaluer l'ampleur, qui a été rendu en juin 2011. Cette commission, actuellement présidée par Noël Diricq, se réunit tous les trois ans depuis 1997. Sur la base de la fourchette d'évaluation établie par la commission (entre 0,6 et 1,1 milliard dans le dernier rapport) le Gouvernement fixe un montant moyen de compensation. Celui-ci a été multiplié par six entre 1997 et 2012.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de la commission
Votre commission constate que la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles apparaît de plus en plus importante malgré quinze ans d'actions ciblées destinées à la réduire et une augmentation continue du nombre de maladies professionnelles reconnues. Le Gouvernement ne semble pas prendre la mesure exacte de ce phénomène puisqu'il persiste à faire le choix d'une compensation moyenne qui s'avère systématiquement insuffisante.
Une action sur les causes de la sous-déclaration est impérative. Les maladies liées à l'amiante, pourtant largement connues, constituent plus de la moitié des dépenses prise en charge à tort par l'assurance maladie.
Votre commission suivra donc avec attention la suite donnée aux propositions de la commission Diricq. Mais celles-ci ne peuvent faire effet qu'à moyen ou long terme. Dès à présent, votre commission aurait souhaité porter la compensation dans la fourchette haute de l'évaluation faite par la commission Diricq, ce qui lui aurait paru plus conforme à la réalité. Mais cela lui est interdit par l'article 40 de la Constitution.
Dans ces conditions, la commission vous demande de vous abstenir lors du vote de cet article.
Article additionnel après l'article 53 (art. L. 452-3 du code de la sécurité sociale) - Droit à réparation intégrale des victimes d'une faute inexcusable de l'employeur
Objet : Cet article additionnel tend à permettre aux victimes d'une faute inexcusable de l'employeur d'être indemnisées intégralement de leur préjudice.
Le Conseil constitutionnel a eu à se prononcer, à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité, sur la conformité à la Constitution du régime de réparation des accidents du travail et maladies professionnelles causés par une faute inexcusable de l'employeur. La décision « Epoux L. » 88 ( * ) a été la première comportant des réserves d'interprétation sur des dispositions en vigueur. Le Conseil a jugé que le principe de responsabilité, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen 89 ( * ) , interdit d'opposer des restrictions disproportionnées au droit d'indemnisation des victimes. Ainsi, l'ensemble des dommages non couverts par les dispositions spécifiques relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles 90 ( * ) doit pouvoir être indemnisé en cas de faute inexcusable de l'employeur.
De cette décision, il résulte que sont contraires à la Constitution les dispositions limitatives de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale qui énumèrent la liste des préjudices indemnisables dont la victime peut demander réparation dans ce cas. Le Conseil constitutionnel a par la suite réaffirmé sa position s'agissant des dommages subis par les gens de mer du fait d'une faute inexcusable de leur employeur 91 ( * ) .
Votre commission vous propose donc d'inscrire dans le code de la sécurité sociale le principe de l'indemnisation intégrale, par les employeurs, des victimes de fautes inexcusables. L'article 40 de la Constitution impose de supprimer la mention de l'avance des sommes dues par la caisse afin de ne pas alourdir ses charges. La commission attend du Gouvernement, qui est le seul à disposer de cette faculté, qu'il rétablisse l'intervention de la caisse.
Elle vous demande d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.
* 88 DC n° 2010-8 QPC précitée.
* 89 « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi ».
* 90 Livre IV du code de la sécurité sociale.
* 91 Décision n° 2011-127 QPC du 6 mai 2011, Consorts C.